nathan

J'étais assise sur l'un des fauteuils du balcon, mes chevilles croisées sur la rambardes de celui-ci. Silencieuse, j'observais de mes iris hagardes le ciel au dessus de ma tête sans même oser briser ce rare moment de sérénité qui m'habitait soudainement. Il était dur entre les murs de l'hôtel de trouver un bref instant où seul le silence régnait en maitre, avec une vingtaine de candidats tous plus bavards et excités les uns que les autres cela s'avérait même quasiment impossible. Ici, je pouvais réfléchir calmement et recentrer mes premières impressions sur cette aventure, sans un Soren pour venir se serrer contre moi en pleine nuit ou un quelconque autre abrutit de cet acabit qui se plaindrait de la vaisselle non faite. Dos à la porte, les jambes largement découvertes de ce mini short que l'on distinguait que très peu sous ma chemise trop large, je me mis à fredonner paisiblement. Je n'étais pas nominée cette semaine, c'était au moins un point positif, et même si mon petit-ami me manquait affreusement et que je n'avais clairement aucuns amis dans cette maison, je me disais que j'aurais au moins l'occasion de m'en faire les jours qui suivraient. Du moins je l'espérais, cette solitude s'avérait pesante et je sentais que certains avaient encore des chances d'être fréquentables parmi tous ces candidats. Les yeux dans la vague, le claquement de la porte dans mon dos ne me fit même pas sursauter tant celui-ci était faible.

Nuit noire sur le centre-ville de Dublin. Du toit, mon regard pouvait dominer quelques ruelles lugubres de la ville étonnamment calme. Nerveux je tirai sur ma cigarette inlassablement, accoudé à la rambarde. L'Irlande n'était décidément pas un pays qui me convenait; humide, flegmatique et lassant, mon père avait trouvé l'endroit idéal pour me rendre fou. Fou comme je l'étais déjà cinq jours à peine, peut-être six, après mon arrivée dans cette aventure bien différente de l'idéal que j'avais imaginé. J'étais un gamin en soif d'évasion et de découverte, cet endroit ne se révélait absolument pas fait pour moi et ma nomination le reflétait parfaitement. Sans doute se logeait là la clé de mon indifférence à la seconde où Cupidon avait prononcé mon prénom, je n'étais tout simplement pas fait pour l'enfermement c'était un fait. Moi qui attendait beaucoup de cette expérience je ne pouvais que ressentir un immense sentiment de déception, j'étais sûrement l'un des plus jeunes ici et cet écart d'âge avec les autres candidats se faisait énormément ressentir. Dans un long soupir je lâchai mon tube de tabac, l'observant virevolter dans le vide. Il n'était pas tard mais pourtant j'avais déjà envie d'écourter cette journée, preuve encore que je ne me ressemblais pas et que j'avais peine à m'identifier à celui que j'étais dans la vie de tous les jours. Le maître des lieux se plaisait d'ailleurs à creuser ce fossé qu'il y avait entre le candidat qu'il voulait faire de moi et le candidat que j'avais en optique d'être. Un bâillement chassa ces pensées puis je me décidai à quitter la terrasse et descendis lourdement les escaliers menant au premier étage où régnait un silence affolant. Morne, cet endroit était morte et ennuyeux, cela en était désespérant. Une lumière teintée de bleu attira cependant mon attention et je détournai le visage en sa direction constatant qu'une silhouette féminine se détachait au milieu de ce monochrome. Curieux je m'approchai et n'hésitai pas à rejoindre la personne en question, quelle qu'elle soit, quitte à retarder mon sommeil d'un court instant. Aussi étonnant que cela pouvait paraître, j'avais envie d'apprendre à tenir une conversation digne de se nommer ainsi ce soir. D'emblée j'allai obstruer la vue de la candidate, m'asseyant en face d'elle sur la balustrade qui dominait la piscine, sans gêne. Je fus agréablement surpris de reconnaître Ismaëlle, l'une des rares personnes que j'avais décidé d'épargner de ma causticité cette semaine et ce quitte à m'attirer les foudres de l'ange joufflu. Ne la voyant pas spécialement enjouée, je décidai de prendre la parole en premier, ne trouvant à déclarer qu'une réplique à la banalité affligeante. Tellement ridicule que je balbutiai même.

Ça ne va pas ? Enfin non, non ça ne va pas. Je reprends. Qu'est-ce qui ne va pas ?

Mes doigts effleurant de leur pulpe le sol du balcon, le bras morne, je me rendis alors compte de la présence d'un candidat lorsque celui-ci vint s'asseoir dangereusement sur la balustrade face à moi. Levant le visage, j'aperçus ainsi Nathan à à peine un mètre. Prenant conscience de mes jambes nues qui s'étendaient sous ses yeux, je ramenai aussitôt celle-ci contre ma poitrine avant de pencher la tête sur le côté sans cesser de l'observer, esquissant un sourire. Il n'était pas avec Abygaëlle, ce qui n'était au fond pas pour me déplaire, je ne parvenais pas à en aligner une lorsqu'elle était dans les parages. Pas que je n'appréciais pas la blonde, bien au contraire elle était très gentille, mais le duo réuni se révélait insupportable ou du moins difficile à suivre. Ne sachant que dire de pertinent, le jeune homme choisit finalement de prendre les devants. Avais-je l'air d'aller mal? Je haussai les épaules.

Tout va bien. Du moins, je ne vais pas me plaindre de ma situation y'a pas vraiment de quoi. Même si je ne me plais pas ici, je préfère encore rester sur ce balcon plutôt que d'envisager de rentrer chez moi. Me grattant la tête nerveusement, je me redressai dans ma chaise de façon à pouvoir poursuivre plus confortablement. A vrai dire il n'y a qu'une seule chose qui me manque à Edinburgh. Mon voisin.

Je ne pus m'empêcher de m'esclaffer, étouffant aussitôt ce petit rire en me souvenant que nous étions filmés. Énoncer cette situation digne des films d'adolescents les plus niais me faisait doucement sourire mais je ne tenais en aucun cas à ce que ce voisin en question se fasse de fausses idées. Levant finalement le visage vers mon interlocuteur, je fis la moue, compatissante.

Et toi, ces nominations ne t'affectent pas trop?

La réaction d'Ismaëlle à mon arrivée me laissa quelque peu perplexe puisque dès que mon regard se posa sur elle, la jeune femme rabattit ses jambes contre son buste, visiblement gênée par mes yeux pourtant moins baladeurs que d'habitude. Son air embarrassé m'arracha un rire nerveux et je toussai aussitôt comme pour m'excuser de celui-ci. Machinalement je levai les yeux au ciel à peine elle avait ouvert la bouche. Elle n'était clairement pas convaincante quand elle disait que « tout allait bien » mais je ne comptais pas pour autant m’improviser en pseudo-psychologue, étant très individualiste voire égoïste il ne me ressemblait pas de m’intéresser aux potentiels problèmes de autres. Seulement, l’infime trait de politesse qui existait encore en moi m’obligeait à faire le strict minimum. J'esquissai finalement un sourire franc quand elle m'indiqua ressentir l'absence de son voisin, doutant qu'une anecdote inénarrable se cachait derrière là-dessous. Déterminé à en savoir plus, peut-être même à vouloir connaître une histoire qui n'avait absolument aucun intérêt, je ne pus m'empêcher de la questionner.

Ton voisin en lui-même ou les escapades nocturnes que tu t'accordes chez lui ?

Le visage de mon interlocutrice se fit ensuite moins lumineux, et ce fut inévitablement le sujet des nominations qui vint s'incruster dans le dialogue. Un sourire niais vint voiler mes lèvres, la jeune femme semblait presque s’attendrir face à un évènement qui n’avait absolument aucune importance pour moi, ce que je m’empressai de lui révéler.

Je ne suis pas à ma place ici, les gens ne s’amusent pas, on se lasse. Tu l’auras peut-être remarqué, au pire des cas tu as encore une journée pour le faire, je suis quelqu’un d’immature, gamin et irréfléchi. J’ai envie de m’amuser, de sortir, moi j’appelle ça vivre. Clairement, on s’emmerde, et j’étouffe déjà. Franchement, tu t’attendais à ça ?

Je ponctuai mon monologue par une expression radieuse, montrant clairement que cette nomination m’était presque bénéfique. Clairement non, je n’étais pas affecté.

Mes joues rosirent à l'instant où le jeune homme face à moi me pressa de détails quant à ma relation avec mon prétendu voisin. Je sentis une vague de mélancolie affluer en moi, il était clair que conjuguer mes escapades nocturnes au pluriel était une grave erreur étant donné que... je sentis mon visage chauffer à ces pensées, presque honteuse de ces images affluant subitement dans ma tête alors que je discutais avec Nathan. Préférant secouer la tête avant que celles-ci ne dérapent sur une vision qu'il aurait mieux valu taire, j'esquissai un sourire nostalgique, rêveur, profondément niais et béat au candidat avant de soupirer.

Outre "les escapades" comme tu dis, c'est effectivement mon petit-ami et ce depuis plusieurs mois.

Tellement que je n'osais même plus compter, j'avais encore du mal à m'accommoder à cette relation nouvelle à mes yeux, moi qui n'avait jamais eut de relations avec un homme avant de me rendre compte que celui-ci en particulier existait, de l'autre côté de l'allée. M'étirant longuement, tel un félin en somme, je glissai une main dans mes cheveux afin de ramener ceux-ci contre mon crâne, l'épaisseur de ma crinière s'avérait parfois bien contraignante malgré le roux particulier de celle-ci que tout le monde se plaisait à me complimenter. Nathan reprit alors la parole, me faisant part de son ressenti quant à l'émission, à l'aventure. Je ne pus que renchérir involontairement en hochant la tête, même si Fake-Lover se présentait à moi comme un moyen de souffler d'une façon ou d'une autre. Me penchant vers le jeune homme, je fis glisser mes doigts sur son front avant de tapoter gentiment sa tête de peur que ce geste soit mal interprété.

Tu sais, je ne te connais que depuis une semaine à peine mais je t'apprécie, et si tu veux savoir je suis pas bien plus mature ou irréfléchie que toi. Il faut être drôlement sot pour participer à ce genre d'émission. J'haussai les épaules avant de soupirer, soudainement las. J'aimerai te donner ce petit peps qui te permettrait de voir cette aventure sous un autre angle, mais malheureusement je l'attends moi-même avec impatience.

Ismaëlle me paraissait être une candidate bien énigmatique. Elle qui dès le premier soir m'avait parue si timorée et prude, je me demandais soif de découvrir ce qui l'avait poussée à se dévoiler aux caméras perverses de la télé-réalité et j'avais réellement la volonté de connaître ses motivations. Cependant je ne préférai pas soulever la question, estimant qu'il était encore relativement tôt pour me permettre de satisfaire cette curiosité qui m'animait. Je me contentai donc de sourire timidement à chacune de ses réactions, observant avec amusement le rouge qui lui montait aux joues.

Si tu trouves mes questions déplacées n'y réponds pas surtout. Je n'ai pas envie de te mettre mal à l'aise.

La moindre de ses mimiques trahissait ce que j'interprétais comme un certain malaise, je voulais de ce fait m'assurer que je n'étais pas l'origine même de cette intimidation. Moi-même légèrement troublé, je fuis un temps le regard de mon interlocutrice, tâtant la poche de mon jean pour dégainer mon paquet de cigarette, en vain. Les doigts d'Ismaëlle vinrent alors trouver mon front dans un mouvement gracieux et je relevai enfin les yeux, ceux-ci pendus aux lèvres de la candidate. Elle ne se disait pas plus immature que moi, aussitôt un gloussement s'échappa de ma bouche. Ayant la mentalité d'un adolescent de quinze ans déficient mental une fois le cap de la majorité passé, je doutais qu'il existe une quelconque personne sur Terre capable de faire concurrence à ma connerie.

Sot, oui peut-être... Naïf surtout, la télévision ne reflète pas vraiment ce qui se passe au sein du jeu en fin de compte. Tu attends quoi de cet émission au juste ?

Tu ne souhaites pas me mettre mal à l'aise mais tu meurs d'envie d'en savoir plus, je me trompe? Je me mordis la joue avant de laisser s'échapper d'entre mes lèvres un rire léger et cristallin, me coupant aussitôt sans cesser de le fixer, espiègle. Je ne suis pas mal à l'aise par rapport à tes questions, il n'y a pas vraiment matière à l'être à vrai dire. Tu as une petite amie Nathan?

Il sortit un paquet de cigarettes de sa poche avant de glousser à l'entente de mes paroles. J'étais ravi de le faire rire, certes, mais il n'y avait pas réellement matière à s'esclaffer à ce moment-là. Me mordant l'intérieur de la joue, je l'écoutais avec attention, ma main se posant par mégarde sur son genoux alors qu'il continuait de parler. Même debout et lui assis, je ne parvenais toujours pas à le regarder droit dans les yeux sans devoir lever ceux-ci, c'était déstabilisant. Je devais être une sacré naine, ou alors c'était lui qui s'avérait être trop grand pour moi. Une nouvelle question de sa part, une colle en somme car j'en venais à me demander ce que j'attendais réellement en venant ici. Je craignais de me livrer trop intimement au jeune homme qui ne se révélait être qu'un inconnu, de plus sous l'œil de caméras sur écoute. M'éloignant du candidat, je me mis à parcourir de mes pieds nus le sol froid de la terrasse, les mains enfoncées dans les poches de mon mini short. Me tournant finalement vers le brun, je pris soin de faire une pause avant de répondre quoique ce soit, le regard rivé sur ses pieds afin d'éviter le sien.

Sincèrement? Je veux juste fuir l'Écosse, je sais qu'en disant ça tu vas te poser de nombreuses questions mais j'avais juste besoin de prendre un peu de recul avec ma vie. Et de m'accepter aussi, réellement.

Un soupire, énième démonstration de ma lassitude face à cette situation, mourut sur mes lèvres alors je revenais finalement vers Nathan dont les iris me déstabilisaient particulièrement. M'accoudant à la balustrade à ses côtés, un sourire vint finalement habiller mon visage rosi par le vent frais.

Et toi, à part vouloir faire la fête et draguer d'la gonzesse comme Abygaëlle, qu'est-ce que t'es venu foutre en Irlande?

Je crois que si on ne cherchait pas à se connaître on crèverait tous d'ennui. Alors je m'occupe comme je peux.

Incontestablement oui, j'avais envie de connaître Ismaëlle davantage, pas plus cependant que j'avais volonté de découvrir les personnalités des autres candidats pour savoir s'il était possible de les décoincer un peu. Chacun me semblait si guindé que je me demandais tout de même si l'ambiance allait un jour être au rendez-vous dans cet hôtel. Bien sûr nous ne nous connaissions que depuis une semaine à peine, mais j'étais quelqu'un d'impatient et qui surtout se lassait très vite. A sa question je ne pus m'empêcher d'esquisser un fin sourire, « Nathan » et « petite amie » n'étaient pas des mots qui résonnaient très harmonieusement aux oreilles.

Tu penses bien que non.

Je haussai les épaules, nonchalamment. L'amour ne faisait certainement pas partie de mon vocabulaire ou alors chez moi il était remplacé par « sexe » et je m'étonnais d'ailleurs que la jeune femme n'ai pas perçu le message d'elle-même, je ne m'étais pas vraiment gêné pour exprimer clairement et avec obscénité mes opinions sur les femelles de cette maison. Voyant mon interlocutrice s'éloigner, je portai une cigarette à ma bouche avant de tirer dessus plusieurs fois, la réflexion de la candidate semblait s'éterniser. Elle prit enfin la parole, fuyant mon regard sans que je ne puisse déceler la raison encore de cette attitude défensive. Peut-être l'avais-je effrayée en la gratifiant de mon regard-salace quelques secondes auparavant. Je l'écoutai le regard détourné sur l'étendue d'eau puis renchéris finalement, ne cherchant même plus à la dévorer des yeux.

Je me pose la question, en tout cas je regrette. Il y a mon père aussi qui y est un peu pour quelque chose... Enfin, il ne va pas tarder à me dégager de chez lui alors, j'ai préféré anticiper.

Curieux de sa précédente déclaration, je me résolus à descendre de la balustrade sur laquelle j'étais perché puis sans quelconque gêne, allai relever le visage de la jolie rousse presque aussi hiératique que celui d'une statue de cire. Plantant mes iris dans les siens, je ne tardai pas à lui adresser mon ressenti sur un ton oscillant entre rigolade et sérieux.

T'accepter. T'accepter comme qui dirait t'assumer ? Je ne veux pas briser ton ambition mais si c'est là où tu veux en venir tu n'es pas très... très bien partie. Déjà regarde moi quand on discute petite.

Silence, unique remarque que je fus en mesure de fournir au jeune homme à sa réponse à ma question. Elle était idiote, il était clair d'après son comportement que ce dernier n'était pas pour le moins du monde en couple. Glissant une main dans mes cheveux, ramenant ceux-ci dans mon dos le plus naturellement du monde, un sourire railleur vint maquiller mes lèvres.

C'est clair que la petite-amie qui t'aurait laissé venir ici sans elle n'aurait clairement pas tenu en votre union. Même si elle t'avait accompagné d'ailleurs.

Dans un petit clin d'œil, mon regard se contenta alors de suivre le tien, s'échouant sur l'eau plus bas qui s'étendait à quelques quatre ou cinq mètres sous nos pieds. De quoi faire un plongeon sans retour, en somme. Je doutais d'avoir le cran de sauter un jour par dessus la balustrade pour voir quel effet cela pouvait bien faire. Trop peur de me racler la tête comme il faut au fond du bassin. Perdue dans mes pensées, je ne fis qu'à peine attention à ce que déblatérait le jeune homme à mes côtés, hochant la tête dans un "hum" lui indiquant que je l'écoutais malgré mon mutisme. Apparemment, Nathan était convaincu d'être un vrai poids pour ses proches comme pour les candidats ici. Son idée était d'ailleurs bien arrêtée et le français ne semblait pas s'en biler. Frissonnant sous une légère bourrasque nocturne, je sentis alors sa main, beaucoup trop douce à mon goût, se glisser sous mon menton pour relever mon visage vers le sien. Mes prunelles émeraudes bien éveillées, je ne pus que cligner des yeux avant de me mordre une nouvelle fois la joue, haussant simplement un sourcil.

Ah, tu penses? Je ne te parle pas d'accepter un physique, mais d'accepter ce que je suis au fond de moi. J'ai accepté un tas de choses ces dernières années, quitte à en négliger le plus important. Mes iris plantées dans les siennes, je dégageai finalement mon visage de sa main sans pour autant baisser les yeux. C'est bien parce que tu as des très beaux yeux, grand dadet. Je n'hésiterai pas à te saquer du lit avant 13heures si jamais j'ai besoin d'un massage du con, je te préviens.

Un haussement d'épaules, un rire nerveux et dérangé. Je n'avais pas grand chose d'autre à répondre, j'aimais m'amuser avec les filles, m'engager le temps d'une nuit entre les draps puis les jeter sans vergogne dès le lendemain matin. Oui j'étais ce genre de « sale enflure » qui en faisait souffrir plus d'une, la faute sans doute à mon corps de rêve, devenu une institution à Neuilly-sur-Seine. Devant Ismaëlle, je ne préférai pas m'étaler sur le sujet, devinant de toute façon qu'elle ne cautionnait pas ce genre de comportement, elle qui ressentait déjà le manque de son petit-ami, elle devait incontestablement avoir ce côté fleur bleue qui aurait éventuellement pu subir mes railleries. S'arrêter là était la meilleure solution. Je l'écoutai donc poursuivre son discours avec attention, hochant simplement la tête d'abord, je la coupai dès la seconde suivante, chevauchant ainsi avec les propos qu'elle avait enchaînés.

D'abord la main sur mes genoux, maintenant les « très beaux yeux », fais attention à toi c'est en général à ce moment que je les emmène dans mon lit, et encore je me trouve plutôt patient.

Je marquai une pause, prenant un visage grave. « Du con » ? Avais-je bien entendu ? Dans quel contexte elle l'avait sorti, je l'ignorais totalement, cependant j'avais bien l'impression d'avoir ouï cette injure de sa bouche aux airs faussement innocents. Je fronçai les sourcils, imitant alors à la perfection la tête de mon père me convoquant dans le salon un dimanche matin pour faire le bilan catastrophique de la semaine écoulée.

Comment disait papa avant, « un si gros mot dans une si petite bouche ?! ». Je ponctuai ma question d'un rire amusé, poursuivant finalement sur un ton menaçant. J'ai vu tes yeux vagabonder sur la piscine en bas, tu veux y faire un petit tour ? La sanction est gentille, le tarif d'une insulte chez moi est généralement beaucoup plus cher. Je te laisse soin d'enlever ta chemise ou tu te sens prête pour le grand saut ?

Ni une ni deux, je passai mes mains autour de sa taille, mon emprise telle que la frêle jeune fille ne pouvait pas franchement se débattre. Je jetai d'abord mon mégot par-dessus la rambarde puis la plaquai contre celle-ci avec fermeté, mes traits toujours rieurs.

On fait appel à Aby pour un témoignage ? Elle à l'habitude de ce genre de situation elle saura sans doute t'expliquer comment t'en sortir.