Mei déteste les fantômes. Lloyd beaucoup moins. Tout ce qui est paranormal n'entre pas vraiment dans son acceptation de la réalité, parce que... parce que ce n'est pas prouvé, parce qu'il est assez cartésien même s'il croit au coup de foudre, à l'amour au premier regard et à d'autres conneries. Les fantômes, ça lui fait pas peur. Pas qu'il en ait déjà rencontré -ce qui jusqu'à preuve du contraire valide l'hypothèse qu'ils n'existent pas- mais s'il venait à en voir un, l'incompréhension et le choc l'empêcheraient probablement de réagir, la peur ne venant qu'après que le cerveau est réussi à analyser les informations. Le dressing c'est un peu son élément, pas qu'il soit un fashionisto invétéré, il aime les fringues, ses fringues, et les ranger par couleur ou par matière est une occupation de son temps comme les autres. Ses tenues de prime sont toutes sur cintres, rangées dans un ordre bien précis, ses vestes brodées sélectionnées avec soin pour les primes à venir pendues avec les pantalons qu'il a élus comme perfect match, les blazers monochrome en soie et leur ensemble. Tout ça donne à Lloyd-Snö l'impression d'avoir accompli quelque chose : il a instauré une hiérarchie, une chronologie. Il a été proactif. Ses mains agiles remettent en place la pile de t-shirts et débardeurs alors que des pas approchent et que des voix se font entendre. Des voix féminines, une qu'il reconnaît, la seconde sur laquelle il n'arrive pas à imprimer un visage. Débarquent Jade et... l'autre rousse qui s'appelle Starlett non, Scarlett. Lui et les prénoms. Starlette pourrait être un surnom cela dit. Elles sont sœurs s'il a tout compris. Elles ne semblent pas l'avoir vu et il décide de jouer les idiots. Se cachant derrière la porte de plein pied il attend qu'elles arrivent à son niveau pour lancer un :« BOUH ! » magistral. Dressing hanté, bouh, fantôme ? Son schéma de pensée niveau blague s'arrête là. Il leur laisse quelques secondes, le temps de l'insulter, de le fustiger et de le frapper si nécessaire avant de demander : « On apprécie vachement plus d'avoir le choix de ses vêtements quand on a passé une semaine en combinaison orange. Vous trouvez pas ? » Il se doute que pour Scarlett dont il a surtout retenu le métier -parce qu'il admire les gens qui savent se servir de leur cerveau et de leurs mains- la semaine en complet difforme monochrome n'a pas dû être une partie de plaisir, mais la mode sort toujours gagnante des combats contre l'oppression il faut croire, puisqu'à part Lawrence qui se trimballe en caleçon depuis dimanche, ils ont tous retrouvé l'accès à une garde-robe décente.

Elles loupent la blague. Lloyd en est un peu décontenancé, l'aplomb de Scarlett, son absence de sourire, tout ça est un peu étrange à ses yeux. Il a tendance à marcher dans le jeu de ses camarades même s'il ne le trouve pas foncièrement exaltant, qu'elles se montrent aussi peu réceptives le blase un peu à vrai dire. « Je manque de référence en matière de fantôme pour juger de leur conversation... désolé. » dit-il la voix un peu éteinte, se collant au ton de celle de Scarlett, imitant son langage corporel sans le vouloir et haussant lui-même les épaules. Jade en rajoute une couche et lui rappelle immédiatement l'une de ses cadettes qui a toujours son mot à dire. Uli est comme ça, leurs parents appellent ça le syndrome du petit dernier. Toujours à vouloir se faire une place. « Que quelques battements ? J'ai raté mon coup alors j'espérais éliminer la compétition. » plaisante-t-il. Leur filer à tous des crises cardiaques est une stratégie à laquelle il n'aurait pas pensé. Il aurait peut-être dû même si ça semble une façon assez déloyale de gagner des semaines de sursis. Son système d'organisation semble interroger les deux jeunes femmes, si Scarlett semble vraiment interpelée par son placard. À croire qu'elles n'ont jamais vu un garçon organisé. Mais c'est la réflexion de Jade qui l'interpelle le plus de par la preuve de son manque de politesse, faire comme s'il quelqu'un n'était pas présent dans la pièce lui semble totalement dénué de tact et de bonne manière. « Il est réel. » lâche-t-il, un sourire manquant d'amusement aux lèvres. Elle lui avait déjà paru un peu trop sûre d'elle pour en être attachante durant la semaine en prison, mais ses interventions lui semblent maintenant simplement l'oeuvre d'une nature méprisante. Pas très encourageant.  « Et toi t'es une espèce de conne ? » a-t-il failli répondre à la plus jeune des rouquines, pas qu'il se sente particulièrement agressé, mais pas spécialement amusé non plus par les mots de Jade. Lloyd n'a pas envie de se battre et il doute qu'entamer une discussion sur la façon de s'adresser aux autres avec elle serait utile d'une quelconque façon. Les filles aériennes, un peu évanescentes ont souvent ce trait de caractère qui les poussent à être plus franches que la moyenne. Peut-être parce que leur substance leur échappe et qu'elles retrouvent en la franchise non-filtrée. « Non, je suis juste organisé. Mais si j'ai besoin de me confesser un jour je sais à qui m'adresser. » fait-il avec l'ombre d'un sourire. S'énerver n'aurait aucun intérêt, parce qu'elles sont deux, parce qu'elles sont sœurs et qu'il n'y a aucune raison pour elles de faire le moindre effort. « Vous êtes siamoises ou quelque chose du genre ? » qu'il demande parce qu'il n'a de cesse de les apercevoir collées l'une à l'autre dans le nid. « Ça facilite la vie d'avoir quelqu'un qu'on connait bien dans l'aventure ? » Cette fois-ci il est vraiment intéressé par leur réponse. Aux yeux de Lloyd tout ça est un peu injuste, foutre des sœurs, des gens en couple, dans une maison supposée être pleine d'étrangers, leur donne une espèce d'avantage. Un pied-à-terre, un repère qu'aucun d'autre n'a. Il sait qu'il n'aurait pas pu faire l'aventure avec Arthur, même s'ils n'avaient pas eu Mei, mais ça n'empêche pas qu'il aurait aimé avoir Althea, Elliot ou Uli à ses côtés pour soulager les moments où toute cette nouveauté lui donne le tournis.