Il y a forte à parier que dans les valises des candidats il y avait tout un tas de vêtements. Dans celles de Scar c'était autre chose. Il y en a bien une qui n'était faite que de vêtements, mais l'autre regorgeait de tissus, de patrons, de nécessaire de couture ou bien de robe entamées mais pas encore terminée. C'est justement ce qu'elle a l'intention de faire tout de suite. Elle a commencé à se faire une jolie robe d'été, dont le bustier est composé de perles ethniques. La coupe est terminé il ne reste plus que les finitions, ce qu'elle aime le plus, coudre des rangées de perles dans un code couleur bien définit. Elle avait eut dans l'idée de se cacher dans le dressing, mais puisqu'elle a décidé de tout faire pour être dans le passage des gens, elle finit par apporter sa boite de perle et la robe noire sur l'épaule jusqu'au salon. La tâche sera longue et souvent fastidieuse pour ses collègues couturières, mais Scar elle, adore ne plus sentir le temps avoir une emprise sur elle alors qu'elle coud des petits détails comme ces perles de bois qu'elle a chiné dans une boutique de Vienne. Pour l'instant le salon est vide mais sent encore l'odeur d'un café qu'on vient de déguster. Elle imagine que des âmes vont bien vite peupler les fauteuils de cuirs. Comme elle est justement entrain de le faire à son tour. Regardant l'ouvrage commencé qui va former une sorte de plastron coloré sur la poitrine, elle se rend compte que l'idée absurde de faire des vêtements d'étés alors que l'hiver n'est pas commencé. Un sourire passe sur son visage, juste le temps pour elle d'étaler sur la table basse ses outils de travail. Elle prend le temps d'enfiler un long fil sur une aiguille qu'elle pique dans le haut de la robe pour ensuite enfiler un bon nombre de perles dans un motif de couleur bien définis pour venir faire une forme particulière qui va se répéter un bon nombre de fois. Le temps ni même l'espace n'a d'emprise sur elle à ce moment là. Elle prend sa tâche très au sérieux et se plonge là dedans totalement. D'un geste agile elle remonte ses lunettes – qu'elle ne porte que lorsqu'elle coud ou lit très longtemps – c'est en remontant un peu la tête en arrière qu'elle entrevoit la silhouette de l'indien au costume traditionnel si épatant. Il est peut être là depuis longtemps, certainement d'ailleurs. Peut être même qu'il lui parlait, mais dans ces cas là elle n'entend pas. « Tu … ? Tu disais quelque chose ? » Qu'elle lui demande espérant ne pas avoir loupé quelque chose. Elle ne souhaite en aucun cas être mal polie Scarlett, même si elle est la plus part du temps étrange et qu'on peut dire qu'elle fait preuve d'hypocrisie. Elle essaye de ne jamais être impolie.

De toutes les choses que l'indien avait été soulagé de retrouver au moment où on lui avait rendu ses affaires, son petit carnet brun comptait parmi celles qui lui avaient le plus manqué pendant sa semaine dans les abysses. Pas parce qu'il ressentait perpétuellement le besoin d'y coucher tous ce qui lui passait par la tête, mais parce qu'il y avait certaines occasions ponctuelles où ce carnet lui aurait été utile. Alors maintenant qu'il avait remis la main dessus, il rattrapait comme il pouvait le temps qu'il avait perdu dans la prison, quand il n'avait pas pu noter certaines observations, certaines suppositions, certains détails surtout. Une tasse de café à la main et son stylo dans l'autre, il avait passé une partie de l'après-midi installé dans le salon, à écrire quelques prénoms, puis à leur associer certaines caractéristiques. Gael, Enola, Khadija et toutes les candidates avec qui il avait déjà plus ou moins fait connaissance se retrouvaient malgré elles inscrites sur des feuilles de papier, tandis qu'il spéculait au sujet de choses qu'il n'avait pas osé demander, soit parce que l'occasion ne s'était pas présentée, soit parce qu'il ne s'y était pas résolu. Et une fois qu'il eut terminé, c'est avec son carnet à la main mais sans sa tasse de café qu'il avait quitté la pièce, un oubli qu'il constata juste avant de regagner l'étage. Il revint alors sur ses pas, n'étant pas du genre à laisser traîner des choses alors qu'il ne connaissait que trop bien la vie en communauté, et n'ayant surtout pas envie que quelqu'un se sente obligé de faire sa vaisselle à sa place. Seulement, en revenant dans le salon, la pièce avait été investie par une candidate, Scarlett, qu'il reconnut instantanément à sa chevelure rousse, et à ce qu'elle était entrain de faire. Car elle lui avait parlé de son activité de couturière, et maintenant qu'il la voyait à l’œuvre, il faisait inévitablement le lien. « Excuse-moi, je … je peux repasser plus tard si tu ne veux pas être dérangée. » Il lui avait alors adressé, depuis l'autre bout de la pièce, pensant finalement qu'il pourrait récupérer sa tasse un peu plus tard, que celle-ci n'aurait pas disparu s'il lui laissait la pièce pendant un petit moment. Mais sa camarade ne lui répondit pas, semblant entièrement absorbée par sa couture, ce qui dessina sur ses lèvres un sourire amusé. Il n'était pas vexé, loin de là même, il avait toujours aimé les gens passionnés, et n'était pas mécontent d'avoir l'occasion de la voir coudre. Et puis finalement, Scarlett nota sa présence, et il s'avança d'un pas ou deux. « Je te proposais juste de repasser plus tard pour te laisser coudre tranquillement. » Il répéta au moment où elle chercha à savoir s'il lui avait parlé, n'étant plus certain d'avoir envie de partir maintenant qu'il s'intéressait à son travail, mais lui laissant toujours le choix. Et puis il reprit. « Je constate que tu as dit vrai, dimanche. » Lorsqu'elle avait évoqué son métier de couturière, et qu'elle lui avait confié aimer les perles et les broderies. C'est effectivement ce qu'il constatait en observant la robe qu'elle était entrain de coudre, qui n'était pas sans lui rappeler certains saris portés par les femmes de chez lui. Bien sûr la coupe était différente, un peu courte, si bien qu'elle ne serait probablement pas adaptée pour une indienne. Mais néanmoins, tout ça avait suscité un véritable intérêt de sa part. « Et je comprends que tu en ais fait ton métier. C'est un travail précis. Cette robe sera certainement ravissante une fois terminée. » A vrai dire, du peu qu'il voyait de là où il se trouvait, il était déjà en mesure d'affirmer qu'elle avait un talent certain. « C'est pour toi ? » Il la questionna finalement, dans un sourire, supposant que ça devait être plus simple de coudre pour soi-même, parce qu'elle devait savoir quelles étaient la taille et la coupe qui la flattaient le mieux, et parce qu'il semblait s'agir d'une robe estivale, dont elle ne ferait sûrement pas cadeau à une autre candidate dans l'immédiat.

Scar n'est pas spécialement passionnée de mode, elle a un certain goût pour les beaux tissus et les couleurs agréables. Son truc ce sont les tissus vaporeux, les broderies, perles en tout genre. Elle n'a clairement pas un style très hype, mais on ne peut pas dire qu'elle ait particulièrement l'air d'un épouvantail non plus. Scar elle arrive à être élégante sans avoir l'air sophistiqué, elle arrive à être originale sans avoir l'air d'une hypster en mal de reconnaissance. Ce qu'elle aime avant tout c'est le processus de création, le dessin qu'elle couche sur un calepin et les patrons qu'elle crée de ses mains. Elle aime le travail bien fait. Il lui arrive même d'avoir des obsessions pour la couture, par vague. Quand il lui arrive d'avoir des vacances par exemple, elle peut passer des jours sans dormir ni manger réellement, pour confectionner une robe, un chemisier ou tout autre chose. C'est apaisant, parce que c'est quelque chose d'automatique. Quelque chose de naturel. Tellement qu'elle s'enferme dans une bulle, ce n'est pas une bonne idée. Si Jade passe par là, elle va certainement lui faire les gros yeux. Mais en réalité si elle a choisit le salon comme QG de couture c'est justement dans l'espoir de se faire accompagné. Pour continuer de prétendre d'être quelqu'un qui apprécie la compagnie. Alors qu'en réalité, elle glisse sur elle. Elle n'a pas d'impact sur sa personne, parce qu'elle est trop hermétique aux gens qui l'entourent. A moins qu'ils ne gravitent autour de Jade, là c'est autre chose. Elle finit par remarquer la présence de Naveen, sans savoir depuis combien de temps il est là elle croit tout de même qu'il s'est adressé à elle. En effet, elle n'avait pas imaginé cette voix sucrée. C'était bien lui, qui proposait de repasser un peu après pour la laisser coudre tranquillement. Elle esquisse un sourire presque franc et secoue sa tête de gauche à droite, à la négative. « Non, t'inquiète pas, tu peux rester. » Qu'elle susurre de sa voix toujours aussi chaude, malgré le manque d'éclat de son regard. Il fait référence à leur brève conversation dimanche, sur sa tenue de prime et l’éventualité qu'elle puisse lui venir en aide si un jour il manquait sequin ou perle dorée sur ses beaux atours. « Je suis un peu obsédée de la perle. » Elle tente de plaisanter, mais comme souvent ou même toujours ça sonne creux dans son cœur. Pourtant elle y met le sourire, les mimiques et ajoute même une pointe de brillance dans le regard. Mais au fond d'elle, elle sait bien que ce n'est que de la fraude. Pour pas trop sortir du lot, pour pas faire peur ou faire fuir. Il complimente son travail, elle souri un peu plus franchement et observe justement où elle en est. « Ça devrait être pas mal oui, c'est gentil. » Elle ne risque pas de la mettre dans le nid, mais sait-on jamais qu'il y avait un thème ethnique comme soirée. Ça pourrait toujours servir. « Techniquement oui, mais je suis pas à l’abri de me la faire piquer par une autre rouquine. » Jade. Elle est plus pantalon et blouse, mais lui arrive d'avoir des pulsions féminine. Alors ça pourrait très bien terminé dans sa penderie à elle. « Tu.. tu peux t'asseoir si tu veux. » A moins qu'il n'avait autre chose de prévue, elle ne sait pas trop. Mais elle croit bien que ça la dérangerait pas de passer un peu plus de temps avec lui. Elle reprend son ouvrage, avant de regarder l'indien. « Tu veux peut être essayer ? » Pourquoi pas, elle sait pas trop si ça lui plairait à lui. Mais elle, elle est pas contre de lui laisser un moment son aiguille et ses perles, c'est même pas bien grave s'il se trompe.

Spoiler:

Naveen n'aimait pas déranger, c'était le genre de situations qu'il avait appris à éviter un maximum, le plus souvent en proposant à une personne qu'il venait d'interrompre de repartir d'où il venait, pour la laisser terminer ce qu'elle était entrain de faire. C'est donc ce qu'il ne tarda pas à énoncer, à son retour dans le salon, lorsqu'il y trouva Scarlett qui visiblement avait commencé à coudre. Car bien que la couture soit un domaine assez obscur pour lui, il imaginait sans mal que c'était le genre d'activité qui nécessitaient un minimum de tranquillité, alors autant dire, dans l'idéal, une certaine solitude. Alors oui, il avait préféré lui proposer de repasser plus tard pour la laisser continuer tranquillement, seulement voilà, il n'obtint aucune réponse de la part de la rousse, si bien qu'il resta planté comme un idiot sans trop savoir s'il était censé repartir, ou non. Il aurait été tenté de la laisser, comme il l'avait proposé à l'instant, mais il suffirait qu'elle relève la tête au moment précis où il quitterait la pièce pour qu'elle risque de s'imaginer qu'il n'était pas désireux de passer un moment en sa compagnie, ce qui était faux. Car s'il y avait bien une chose que lui avait appris le fait d'avoir grandi avec huit sœurs, c'est que les femmes pouvaient parfois être un peu compliquées. Heureusement, ses questionnements existentiels prirent fin lorsque sa camarade nota finalement sa présence, et chercha à savoir s'il s'était adressé à elle. Il saisit donc cette occasion pour lui réitérer sa proposition, celle de laisser seule, mais obtint de sa part l'autorisation de rester. Et honnêtement, il en était ravi, parce que pendant qu'il avait attendu une réponse de sa part, il avait eu l'occasion d'observer un petit peu son travail, et avait développé une certaine curiosité vis à vis de ce qu'elle faisait. « D'accord. » Il souffla en tout cas, dans un sourire, tandis qu'il s'avança de quelques pas et ne tarda pas à faire référence à ce qu'elle lui avait confié sur le prime, dimanche soir. Car elle lui avait dit qu'elle était couturière et qu'elle aimait les perles et les broderies, et sa réponse l'amusa. « Et nostalgique des jours chauds, visiblement. » Il le constatait ici parce que la robe qu'elle était entrain de coudre semblait ne pas être très adaptée pour l'hiver, du moins celui d'ici, car chez lui elle pourrait assurément la porter à n'importe quelle saison. Insinuant en tout cas qu'elle avait un talent certain, il chercha ensuite à savoir si la robe qu'elle était entrain de coudre était pour elle, et sa réponse semblait évidente, bien qu'il n'y ait pas songé sur le coup. « Oh, oui. J'ai cru comprendre que Jade était ta sœur. » Il était arrivé ici sans trop de repères, alors il avait mis quelques jours à atterrir, et c'est finalement tout récemment qu'il avait compris que les deux rousses étaient effectivement liées. « Ce doit être rassurant, d'avoir un proche à ses cotés, dans un jeu comme celui-ci. » C'est ce qu'il supposait en tout cas, et ça le rendait subitement nostalgique de sa propre famille, du fait de n'avoir personne de familier dans cet environnement si différent de celui auquel il était habitué. Scarlett l'invita par la suite à s'asseoir. « Merci » qu'il souffla, dans un sourire, en prenant place à coté d'elle. Elle lui proposa alors d'essayer. « Essayer … oh, de coudre tu veux dire ? » Sur le moment, il avait cru qu'elle lui proposait d'essayer la robe, ce qui l'aurait surpris pour deux raisons : elle ne semblait pas terminée, et il ne croyait pas lui avoir donné de raisons de penser qu'il aimait porter des vêtements de ce genre. « Il m'est arrivé de voir mes sœurs recoudre les vêtements de leurs enfants, mais … je n'ai jamais essayé, moi. Alors j'aurais un peu peur d'abîmer tout ton travail. » Il haussa les épaules d'un air embêté, parce qu'en soi sa proposition lui faisait plaisir mais il craignait qu'elle s'en morde les doigts ensuite. « A moins que tu me guides. Suivre des directives, ça devrait être dans mes cordes. » Il proposa finalement, parce qu'en effet il devrait quand même être capable de faire ce qu'elle lui dirait, ce qui limiterait assurément les risques qu'il fasse une bêtise irréparable.

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