Il était déjà tard. Mais j'avais encore une envie d'aller au parc, après tout je m'y sentais bien et cette semaine j'avais envie de tester la plupart des attractions que je n'avais pas encore pu faire. Le carrousel me tentait plutôt bien, mais fallait-il encore que je le trouve ! C'est vrai que le parc était grand et qu'il était parfois difficile de s'y retrouver. Heureusement au bout d'un moment ma recherche fut fructueuse puisque j'étais face à ce carrousel où Enola était déjà dedans. Je ne la connaissais qu'à peine, c'était une candidate avec qui je n'avais pas vraiment de relation, je lui avais déjà vaguement parlé une fois dans le bus. Mais c'était tout rien de plus, peut-être que cette fois-ci j'en apprendrais plus sur la jeune femme. Elle était sur un cheval et je décidais de venir me mettre sur celui d'en face. « Que fais-tu ici toute seule ? » demandais-je en me demandant ce qu'elle pouvait faire ici à une heure si tardive. Peut-être qu'elle attendait quelqu'un, après tout j'avais pu comprendre qu'elle était une femme convoitée par les hommes ici. Moi aussi je la trouvais très charmante, mais j'avoue que je trouvais tout le monde beau ici, alors bon je ne pouvais pas dire si quelqu'un me plaisait plus qu'un autre, puisque tout le monde ici aurait pu être susceptible de me plaire, mais ce n'était pas mon but en venant ici. « Tu attends quelqu'un ? » demandais-je pour tenter d'engager une bonne fois pour toute la conversation.

Enola flâne entre les allées du parc d'attraction, guidée par toutes ces lumières chatoyantes qui réveillent son âme d'enfant. Petite, elle n'a jamais connu ce genre de lieu quasi inexistant au Salvador. Sa famille avait beaucoup mieux à faire que d'avoir ne serait-ce que l'idée d'emmener leur petite tribu de cinq enfants dans un tel endroit. C'était une véritable découverte pour elle, toutes ces lumières, toutes ces odeurs qui éveillaient en elle une certaine euphorie. Après le repas, elle avait donc pris le chemin du parc d'attraction en solitaire faisant un crochet par le stand de confiserie où elle avait eu l'immense plaisir de retrouver Margie sa hantise des abysses. Munie de sa gaufre au sucre la jeune femme s'était réfugié dans le carrousel à l'abris des regards pour un petit moment de tranquillité qui n'appartiendrait qu'à elle. Elle s'était hissé sur un des chevaux de bois avant de commencer à picorer dans sa friandise. Quelqu'un prit place en face d'elle, un visage qu'elle reconnaissait comme étant celui de Cody, un candidat avec qui elle n'avait pas eu le temps de sympathiser depuis le début de l'aventure. Elle trouvait ça dommage de ne pas avoir laissé un jeune homme si souriant entrer dans son aventure. « Je m'ennuyais » . Elle répond lorsqu'il lui demande ce qu'elle faisait sur le carrousel toute seule. Sa réponse ne l'étonnera sûrement pas puisqu'ils passent leurs journées à tuer le temps. « Et puis j'avais faim » ajoute-t-elle en arrachant un morceau de gaufre pour le porter à sa bouche. Machinalement elle lui tend pour lui proposer un bon avec un sourire radieux. « Sers toi, j'ai pas mordu dedans, tu risques rien » . Elle ajoute d'un ton amusé en insistant bien sur le dernier détail au cas où Cody soit un hypocondriaque chronique. Sa prochaine question lui arrache un autre sourire, le candidat s'était sûrement imaginé qu'elle attendait quelqu'un, un soupirant peut être. Elle roule des billes avant de reprendre un petit morceau de sa gaufre. « Toi ... c'est toi que j'attendais » . Elle réplique mutine. A vrai dire elle n'attendait personne et personne ne l'attendait. Tout ce qu'elle voulait c'est que ce maudit carrousel se mette enfin en marche. « Tu as peur pour demain ? » . Cette question lui brûle les lèvres, c'est la première fois que Cody se retrouve sur le banc des nominés. Et vu les fortes personnalités partageant sa condition, il avait de quoi être anxieux.

J'avais donc la réponse à ma question, elle s'ennuyait. Oui c'est vrai que dans le nid il arrivait très souvent que l'on s'ennuie durant un instant. Puis comme nous ne sommes jamais seuls et bien il y a toujours un candidat pour rompre la solitude qui était présente. Et là c'est ce que je viens de faire avec Enola. A vrai dire la première fois que je lui avais parlé elle semblait plus dynamique et piquante. Enfin je la voyais vraiment comme une femme de caractère et plus directe alors que là elle était plus calme, posée un peu pensive même. Elle me tendit un bout de gaufre, bon j'avoue que la tentation était présente et que je me sentais obligé d'en prendre un bout. En plus si elle me le proposait je me sentais un peu obligé d'accepter quoi ! « Oh merci c'est gentil. » dis-je en venant directement l'apporter à ma bouche pour commencer à le manger. Bah quoi, je n'avais pas forcément extrêmement faim, mais d'un autre côté j'étais gourmand du coup j'avais envie. « De toute façon je ne suis pas du genre à être hypocondriaque et à fuir les microbes. Je m'en fiche, le temps que c'est bon et que je peux en profiter. » dis-je en haussant mes épaules. J'avais parlé avec la bouche pleine, mais j'avais tenté de masquer la nourriture en mettant ma main ou du moins en la passant lentement pour ne pas qu'elle regarde ce que je mangeais. Parce que ça ne devait pas être très agréable à voir. Elle me disait que c'était moi qu'elle attendait, je me doutais que c'était une blague. Enfin je pensais, après tout je me demandais pourquoi elle m'attendrait moi. Je ne la connaissais pas beaucoup et on ne s'appréciait pas. Enfin je l'aimais bien, comme à peu près tout le monde à vrai dire, mais c'est tout. Ce n'était pas une relation très amicale entre nous deux, c'était platonique, une conversation parfaitement banale. « Et bien tant mieux si tu m'attendais. Je suis là ! » dis-je en laissant échapper un léger rire. J'essayais d'être moins naïf et de moins prendre à la lettre tout ce qu'on me disait, je tentais de faire la différence entre l'ironie et une phrase normale qu'on dit au sens propre. Elle me demandait si j'avais peur pour demain, j'essayais de ne pas trop y penser c'est vrai, mais bon vu qu'elle me le demandait j'étais bien obligé d'y répondre. Cette semaine j'étais face à de fortes personnalités, face à mon binôme. Je ne doutais pas qu'il finirait premier ou deuxième dans les votes et qu'il était fortement apprécié du public. Moi je me voyais un peu partir, mais si je tentais de rester optimiste, une partie de moi me disait que c'était déjà la fin et que j'allais retrouver mon appartement dimanche soir. L'avantage c'est que je n'habitais qu'à trente minutes d'ici donc c'était cool. « Ouais quand même. C'est la première fois que je suis nominé. Donc je peux pas dire que j'ai peur, mais je suis un peu anxieux à l'idée de partir quoi. » dis-je en lui souriant. Mais je tentais de ne pas me laisser abattre et de garder le sourire, il valait mieux ça que de me morfondre dans mon coin ! Je devais profiter des dernières heures que j'avais ici, enfin des dernières heures jusqu'au prime quoi.