S’il y a bien une chose qui m’énerve assez, c’est le fait de devoir sa propre lessive. La production fait tout avec un certain tape à l’œil grotesque pour finalement obliger ses candidats à faire tout manuellement. Qu’une cuisinière ne soit pas engagée, je peux le concevoir. De toute façon, je déteste qu’on me fasse la cuisine, c’est bien pour ça que je déteste aller au restaurant, mais le rangement, ils auraient pu sortir les fonds nécessaires les rapaces. Vingt-quatre personnes enfermés dans un palais gigantesque obligé de faire le ménage eux-mêmes, on va droit à la catastrophe. Entre ceux qui ont l’air aussi dégourdis qu’un manche à balai et les personnes âgées qui vont jouer sur leur problème de dos, ce palais risque vite de finir dans un état atroce. Cependant, je n’ai aucun moyen de révolte et faire la grève de lessive ne porterait préjudice qu’à moi-même. Je descends donc avec les quelques vêtements que j’ai dû porter durant mon enfermement avant d’arriver ici vers la laverie. Cette dernière est vide, ce qui me va très bien. J’ouvre le premier hublot que je croise et je jette sans aucune douceur le tas de vêtement que j’ai entre les mains. Habituée des tâches ingrates, je ne mets pas bien longtemps à comprendre la machine et à la mettre en route. Je finis par m’asseoir sur la machine à côté de la mienne, évitant les miteuses banquettes de salle d’attente qu’ils ont installées aux machines. Heureusement, j’ai prévu un peu de lecture pour ne pas sombrer dans l’ennui. C’est au bout de la cinquième page que la porte s’ouvre pour laisser entrer un candidat. Je reconnais le blondinet avec qui j’ai parlé lors de la soirée d’ouverture, mais son nom m’échappe toujours autant à cause du surnom que je lui ai trouvé. « Tiens, tu fais ta lessive toi-même Brad Pitt ? Je t’imaginais plutôt du genre à déléguer ce genre de tâche. » Oui, c’est un jugement sans aucun fondement, mais je me fiche bien de le froisser avec cette remarque qui n’a pourtant rien de bien méchant. Je fixe un instant la caméra qui nous scrute sous nos têtes avant de poser de nouveau mon regard dans celui de Brad. « Tu penses qu’en installant des caméras ici, ils pensent réellement filmer quelques choses d’intéressant ? » Je ne vois pas à quel moment regarder des gens faire des lessives, ça peut être quelques choses de divertissant.

Ce moment paisible fut de courte durée. Enfin, les bruits de la machine à laver ne sont pas les sons les plus agréables que j’ai pu entendre dans ma vie, mais le fait de ne rien devoir faire à part attendre en lisant un livre sont les moments de détente que je préfère. Je ne me plains pas de l’arrivé d’un candidat à la laverie, car en participant à cette émission, je savais que j’allais devoir vivre en communauté. Ce n’est pas la chose qui m’a le plus emballée, mais à force, on s’y fait. Et puis quand je vivais encore avec mes parents dans les camps de roms, on n’avait pas non plus trop le choix de vivre en communauté. Je me sens même chanceuse de ne plus être dans un camp, mais dans un palais assez moderne et bien agencé. Je demande donc au candidat que je m’amuse à appeler Brad Pitt s’il fait sa lessive seul. Il m’explique qu’il ne fait que visiter les lieux et qu’il n’est donc pas là pour laver son linge. Il continue de parler, en t’expliquant qu’il vit seul et qu’il est donc obligé de faire son linge, mais également le ménage. « L’homme parfait en soi. » Bah oui, n’est-ce pas ce que recherche toutes les femmes modernes ? Un homme qui ne se contente pas de se poser dans le canapé en rentrant le soir. Un homme qui met la main à la pâte. Enfin, il s’agit là de qualité pour certaines femmes, mais pas pour moi. Je trouve ça normal qu’un homme sache se débrouiller également, le temps des femmes au foyer est résolu. « Et donc, en plus d’être beau et de savoir faire le ménage, qu’est-ce que tu sais faire de plus Brad ? » Je suis sûr qu’il a encore plein de qualité en réserve pour en mettre pleins les yeux aux gamines qui regardent l’émission et qui trouveront en lui l’homme parfait. Il finira même par avoir des comptes fans sur les réseaux sociaux, je n’en doute pas un instant. Je lui pose alors une autre question, concernant la mise en place d’une caméra dans la laverie. A quoi cela peut-il bien servir ? Est-ce qu’une activité amusante pourrait être fait ici qui m’échappe totalement. A la réponse du candidat, j’arque un sourcil, dubitative. Il me demande par la suite, s’il peut s’installer à mes côtés. Sans oublier ce surnom qu’il m’a attribué dont la référence m’échappe. Je l’invite à s’installer en tendant le bras et mes pupilles ne le lâche pas un instant « Alors, tu vas m’expliquer ce qu’on peut faire pour tuer le temps pendant que la machine tourne ? » Il a l’air d’avoir une petite idée derrière la tête, j’attends de connaître ses suppositions.