J'avais faim, mais j'avais aussi une flemme qui ne me ressemblait pas, c'est pour ça que j'étais bêtement appuyé contre le plan de travail à regarder les va-et-vient des autres candidats. En vérité je manquais de volonté depuis le départ de Savannah, j'avais été assez surprise, d'ailleurs j'aurai préféré qu'Andrea s'en aille, plutôt que Savannah, même si on pouvait trouver que mon jugement était égoïste, je rigolais plus avec Savannah qu'avec l'autre blonde et puis c'était ma Savannah quoi. Alors que j'étais encore en train de me demander comment je faisais sans ma Savy' la nuit, Vadim fit son entrée dans la cuisine. Le regardant d'abord en souriant, je vus qu'il commençait à se préparer à manger. « Tu veux bien me faire à manger aussi s'il te plaît Vadim, s'il te plaît, s'il te plaît. » lui demandais-je l'attrapant par le bras pour bien insister jusqu'à ce qu'il cède.

C'est avec une mine affreuse que le russe descendit les escaliers, une légère faim le tenait depuis quelques minutes déjà mais il avait la flemme d'y descendre, dans cette cuisine, sauf qu'il venait de trouver le bon moment pour aller chercher à manger. Il poussa la porte, des candidats, toujours des candidats et encore des candidats. S'en fichant royalement, il ouvrit le frigo, pris une part de gâteau qui était dedans et le posa sur le comptoir, prit une cuillère quand une main vint se poser sur son bras, le tirant presque. C'était Yasmeen. Le nid se vidait de semaines en semaines, et ce n'était pas avec les trois départs du prime dernier que tout cela s'arrangeait. Mais il y avait Yasmeen. Il l'appréciait, et il était bien content qu'elle soit encore là, pour les demies-finales. Bon, il était contre elle, mais c'était le jeu après tout. Ils n'avaient pas eu énormément de discussion, mais on pouvait les considérer, l'un comme l'autre comme 'amis'. Lui souriant, un peu, il poussa la part de gateau et la cuillère à la hauteur de Yasmeen. Puis, il prit place sur le siège à côté d'elle, les deux coudes posés sur le plan de travail, la tête entre ses mains, soufflant presque. Il était triste. Et ça se voyait.

Vadim ne semblait pas dans son assiette, alors que je plongeais la cuillère dans le gâteau qui m'avait proposé et que je l'amenais à ma bouche, je continuais de le regarder intensément pour voir cet air triste qu'il avait rarement eut. Alors que j'avalais ce délicieux gateau qu'il venait de m'offrir généreusement, je replongea ma cuillère dans le gâteau, mais au lieu de la ramener droit dans ma bouche, je la mis devant celle de Vadim pour l'obliger à en prendre une bouchée. « Qu'est ce qui se passe ? » lui demandais-je, inquiète de le voir aussi silencieux, ça ne lui ressemblait pas d'être aussi sérieux et avoir une mine aussi déconfit. Si tout le monde déprimait dans ce qui ressemblait à ma dernière semaine, car j'étais sûr de ne pas rester jeudi, ça n'allait pas être marrant tout les jours, mais si je pouvais aider Vadim à se sentir mieux en se confiant, dans ce cas, j'étais prête à l'écouter.

Cela se voyait tant que ça qu'il n'avait pas le moral ? Lui qui arrivait parfaitement à cacher ses émotions, même les plus pales, s'est fait démasqué cette fois. Quand Yasmeen apporta la cuillère de gâteau à la bouche du russe, il approcha sa bouche vers l'ustensile, mâchant donc ce qu'elle lui avait donné. Avant qu'elle ne pose une question. La question. En parler était peut-être la meilleure solution, qui sait. « Lullaby est partie. Et je n'ai même pas pu lui dire au revoir. » Il s'en voulait. Il était triste qu'elle soit partie, comme ça. Alors que des gens qu'il n'aimait clairement pas été encore là, inutile de dire des noms, ils étaient parfaitement identifiables. Il sourit à la jeune femme. Elle non plus, elle ne devait pas être dans son assiette. Le départ d'Aidan. Le départ de Savannah. Au final, c'était trois départs qui avaient attristés le nid entier. La première fois. « Savannah et Aidan sont partis aussi. Tu dois être triste. » Elle ne devait pas l'être, seulement, elle l'était. Elle était proche de sa partenaire et elle avait été amoureuse d'Aidan. Vadim, lui, ne pourrait imaginer si Hivana ou, pire, Micah sortait. C'était inimaginable et il ne voulait clairement pas y penser. Sachant qu'il serait le premier à partir, peut-être jeudi. Il sourit à la jeune femme, une nouvelle fois, tournant sa chaise vers elle, un seul coude posé sur le comptoir. Discussion discussion.

J'étais satisfaite de voir que Vadim accepta la bouchée de gâteau, comme de se confier, après tout, si je pouvais l'aider, je serais ravie de le faire. Alors que je replanta la cuillère dans le gâteau que je rapportais une nouvelle fois dans ma bouche, alors qu'il me mit enfin au courant de ce qui n'allait pas. Je ne pouvais que le comprendre au fond, lorsque Savannah était parti sans prévenir personne, j'étais vraiment perdue sans elle, mais puis j'avais essayé de continuer l'aventure, en me disant qu'elle n'aurait pas aimé me voir comme ça. Je n'avais pas pensé que ça serait pareil pour Vadim, enfin je ne connaissais pas plus que ça Lullaby pour être resté avec elle que lors des soirées et encore, mais dès quelqu'un partait, c'était toujours très triste. « Dis-toi qu'on va les retrouver à la sortie. » lui dis-je d'abord en pivotant vers lui, posant moi aussi mon coude sur la table, en m'appuyant dessus, continuant de regarder Vadim. « C'est bizarre tu trouves pas ? Quand je suis entrée dans ce jeu, j'étais surtout venu pour l'argent, mais je ne penserais pas que je m'attacherais à des personnes ici. J'imagine que ça devait être pareil pour toi ? » lui demandais-je, alors, me rappelant de mon arrivée dans le jeu et même avant le jeu.

En venant ici, il ne pensait pas s'attacher à des candidats, à des lieux, des caractères, des rituels, des habitudes, des clashs des pleurs, à cette aventure en somme. Il pensait qu'il allait rester comme il l'était en dehors, et au début, c'était ça, mais ensuite, il a commencé à se détendre, à en apprendre un peu plus sur la vie des candidats, et, avait commencé à s'attacher à certains d'entre eux. Dont Lullaby. Surtout Lullaby, en fait. Il la considérait comme sa petite soeur, à chacune de ses nominations, il était là, à lui rappeller à quel point il était derrière elle. Mais elle était partie. Le public avait tranché, elle n'allait plus revenir. Et il n'était pas content, non. Mais il ne pouvait rien faire. Il comprenait donc Yasmeen, quelque part, puisqu'elle avait perdue sa partenaire, et elles semblaient très proches, c'était indéniable. Il se contenta de sourire à sa première réplique alors qu'elle se tortillait dans tous les sens pour se mettre dans la même position que le russe et expliquer ce qu'elle avait à dire. Il était totalement d'accord avec elle, hormis sur la question de l'argent, il n'en avait pas forcément besoin - même si c'était un plus, et pas n'importe lequel. Dans son cas, c'était son secret. Il méritait amplement sa venue ici. « Oui. Et je ne pensais pas rester huit semaines et demie ici. Toi non plus ? » Il pensait partir la première semaine, c'était pour dire...

Ma venue dans le jeu s'était passé différemment que ce que j'avais imaginé, il est vrai que j'avais un apriori sur ce genre de jeu, mais au final, ça c'était passé beaucoup mieux que je l'avais pensé, ce qui était dix fois mieux. Vadim me précisa qu'il ne pensait pas tenir plus de huit semaines dans ce jeu et je le comprenais, moi aussi je pensais partir à un moment, mais j'étais quand même resté jusqu'en demi-finale et même si je trouvais ça honorable, je voulais viser la finale, mais il ne fallait pas rêver, je savais que les personnes avec qui j'étais en compétition -dont Vadim- avait beaucoup plus de chance que moi et je serais de toute manière très heureuse pour eux. Je pris la peine de répondre à Vadim, bien qu'il devait se douter de ma réponse. « C'est clair, maintenant j'ai peur de retrouver la réalité, ça va être beaucoup plus dur de quitter ce jeu que je le pensais. » Puis trouvant que la discussion que je voulais jusqu'à la positive, déviée sur un sujet presque trop dramatique à mon goût, alors dans un excès de folie surement, je plongea mon doigt dans le gâteau et redessina le visage de Vadim, avant de me rendre compte de mon geste et de très vite réagir en sautant de ma chaise et me mettant de l'autre côté de la table, plus en sécurité qu'à côté du jeune homme. « M'en veux pas, je voulais pas faire ça. » lui déclarais-je, malgré tout hilare par la situation et l'expression qu'il avait.