- CAESAR -
Alors que la matinée n'était plus, ou tout du moins, ne serait plus vraiment elle-même d'ici quelques minutes, j'allais faire un tour au petit coin. Je poussais alors la porte sans m'assurer que la pièce était vide auparavant, puis de toutes façons même occupée j'aurais fait un caprice pour y prendre place, et allais siéger sur le majestueux trône de cette salle sombre et lugubre. Ils aiment ça, les trucs lugubres cette saison. Le cimetière, la chapelle, les toilettes...franchement, il ne manquait plus que les évènements dérangeants et l'on pourrait sans mal se prendre au jeu des fantômes. Enfin bref, en vidant ma vessie je remarquais qu'un candidat peu futé avait laissé son iPod, à côté de la chasse d'eau, original. Et bien sûr, je ne me faisais pas prier longtemps avant de me l'approprier, du moins pour le temps de ma visite ici. Quels goûts foireux...oh, Nirvana. Je posais l'appareil un temps pour m'essuyer et tirer la chasse avant de refermer l'abattant et de me rasseoir. J'enfilais les écouteurs puis enclenchai la musique. Smells Like Teen Spirit, les valeurs sûres, oui. Kurt Cobain, je me rappelle lui avoir voué un culte quand j'avais encore l'âge de me faire passer pour une grosse rebelle, enfin bon. Je me levais, debout sur les toilettes, étant complètement sûre que de toutes façons, j'avais verrouillé la porte et que personne ne saurait rentrer pour constater que j'étais en train de me taper mon délire, perchée sur les WC. « With the lights out, it's less dangerous ! Here we are now, entertain us ! » Je sautais oui, sur la cuvette des toilettes, en chantant, le comble.

Comme chaque soir de pleine lune, j'ai passé une nuit terrible: bercé par moultes cauchemars, j'ai plus ou moins somnolé jusqu'à maintenant. Onze heures passées, le château commence à doucement me réveiller. Prenant garde de ne pas réveiller la petite Breathe confortablement installée et semblant dormir à poing fermé, je me tire lentement du lit, enfilant le premier truc qui me tombe sous la main, à savoir un vieux jogging gris trop grand que je prends soin de nouer à la ceinture. Dans un état encore léthargique, je me traîne jusqu'à la cuisine, tentant d'ouvrir les yeux et discipliner en tant soit peu mes cheuveux: je me prends bien entendu la poignée d'une porte dans le ventre, et ne me gène pas pour le faire savoir à tout le monde en gueulant après l'objet inaminé. Clopinant, j'arrive à la cuisine, vide les placards et me prépare un petit déjeuner copieux, bien à l'encontre de mes habitudes. J'ai besoin de décompresser la nuit terrible que j'ai passé, et le sport intensif m'en parait être la seule et unique solution. Une fois l'estomac rempli, je ne prends pas la peine de ranger mon bordel et me tire vite fait aux toilettes afin de soulager ma vessie. La porte est vérouillée, et une meuf s'amuse manifestement à chanter/pisser. Lol. "Oh, y'en a qui voudrait pouvoir aller pisser!" Pas de réponse; je fous plusieurs coups sur la porte, haussant le ton. "J'TE RAPPELLE QU'Y'A QU'UN SEUL CHIOTTE ICI, ALORS OUVRE C'TE PUTAIN D'PORTE!"