ft. connor

Je ne sais pas pourquoi un tel blues me prend ce soir. Je n'ai pas envie de monter dans la chambre parce que le silence morne de la pièce me parait étouffant présentement. Je ne réfléchis pas plus que cela à cet endroit vers lequel je me rends, je me retrouve sur la terrasse sans l'avoir prémédité. Je suppose que c'est l'air de la campagne irlandaise qui m'a attiré jusqu'à lui, j'ai besoin de respirer un bon coup tant je me sens curieusement oppressée. Le lieu est vide de tout homme, plongé dans le noir, je suis persuadé que personne n'y remarquera ma présence alors je m'installe derrière l'une des chaises longues disposées le long du mur et soupire. Les jambes entre mes bras, je fixe les iris tremblantes le parc du château qui s'étend devant moi. J'ai une clope coincée entre mes doigts, mais j'ai oublié mon feu à l'intérieur et je n'ai plus le courage de me lever pour aller le chercher. Et, dans ce calme absolue, seule avec ma culpabilité, je me mets à sangloter péniblement sans que je ne puisse me contrôler. Je me sens pathétique, je ne m'explique pas ces larmes, je ne comprends pas pourquoi je craque maintenant. Le bilan du prime est plutôt positif, je ne suis pas nominée cette semaine et j'ai découvert que certains dans cette émission m'appréciaient réellement. Dépitée, je glisse mon poignet contre mes paupières humides et plonge finalement ma tête entre mes genoux. Je suis stupide.

Le prime vient à peine de s'achever et déjà les candidats rejoignent les chambres, l'endroit à la mode ce soir. Je n'ai pas envie de me mêler à la foule une fois encore, mon seuil de tolérance à la connerie à été dépassé ce soir. L'exterieur m'appelle pourtant je suis trempé et l'idée même de sortir pour cause de pneumonie ne m'enchante pas. Prudent, je passe dans la salle de bain enfiler un jogging en coton et je passe un pull en laine comme on en fait beaucoup par ici directement sur ma peau nue. Couvert, je m'aprête à traverser le parc pour rejoindre la chapelle lorsque des sanglots attirent mon attention. Je m'arrête un instant essayant de percevoir quelque chose à travers l'épaisse couche de brouillard qui enrobe le parce d'une manière presque magique. Forçant un peu plus le regard je distingue une silhouette, Maddie assise sur le sol de la terrasse. Pas réellement doué pour réconforter les gens et sachant que trop bien que la solitude peut être nécessaire dans ses moments là, je me contente de sortir mon briquet de ma poche puisqu'il n'est pas bien difficile de remarquer sa cigarette éteinte pendant entre ses doigts. « Tu veux du feu ? » Quelque peu décontenancé par la teneur de mes propos ô combien stupide, je m'asseyais néanmoins à ses côtés observant le vide sidéral face à nous. Bon dieu que je n'étais pas doué avec ce genre de situation.

J'entends des pas contre le bois de la terrasse. J'ai envie de disparaitre, je n'ose pas imaginer ce que le candidat va bien pouvoir penser en me découvrant dans un tel état. Je renifle un bon coup, essuie mes joues contre le tissu de ma robe corail encore humide et redresse la tête. J'esquisse un sourire triste alors que mes iris se lèvent sur ces jambes qui me contemplent, jusqu'à finalement reconnaitre le corps athlétique de Connor et son visage singulier. Tu veux du feu, qu'il me demande. Il a l'air gêné, je suis désolée de l'accabler d'un tel malaise alors qu'il aurait pu tout simplement tourner les talons et partir. Je secoue la tête positivement tout en tendant la main vers son briquet que je saisis d'une main un peu tremblante. Il s'installe à mes côtés alors que j'allume ma cigarette, je le remercie en clignant des paupières une fois tout en lui rendant son bien. Un silence s'installe, je crois qu'il ne sait pas trop comment s'y prendre, et je n'en sais pas plus sur l'attitude à adopter dans cette situation. Je me contente de rire, un petit rire qui n'a pas grand chose de naturel et que je ne pense pas nécessaire. Je me pince les lèvres et baisse la tête. « Maintenant tu comprends l'intérêt de l'expression "pleurer comme une Madeleine".. » J'essaye de faire preuve d'un peu d'humour, et finalement ce n'est pas si difficile même si ma voix est chevrotante et mon ton faible. Le chagrin n'est pas si gros après tout, juste un coup de blues comme on en connait tant ici. Je tourne la tête vers lui. « Tu es tout rouge, tu as froid? » Je remarque. C'est vrai qu'il ne fait pas chaud dehors.

Je récupère mon briquet que Madeleine m'a emprunté et j'allume ma cigarette que j'ai au préalable sorti de mon paquet. J'inspire profondément, un silence s'installe je voudrais dire quelque chose, lui prendre la main ou trouver un moyen de la réconforter, mais rien. Je me contente de fumer ma cigarette à une allure déconcertante, habitué à faire semblant de m'intéressé aux autres, j'en ai oublié la façon de procéder avec naturel. Un rire, son rire brise le silence, je tourne la tête vers elle quelque peu surpris ce de bref changement de situation. Je souris à sa remarque, timidement, puis plus franchement par la suite. « J'ai jamais entendu cette expression, mais c'est vrai qu'elle prend tout son sens maintenant » Je réponds ironiquement, sans cesser de sourire. Il doit s'agir d'une expression française, puisque de toute évidence, je ne la connais pas. Elle me demande si j'ai froid ensuite. « Non, c'est plutôt l'ignorance que tu lis sur mon visage. » Je souris à nouveau, avant de lui retourner la question lorsque je la vois dans sa petite robe du prime, sans rien sur le dos. « Toi par contre, si tu n'enfiles pas quelque chose, tu vas finir la semaine cloué au lit, tu veux que je te rapporte quelque chose ? » Soudainement plus à l'aise lorsqu'il s'agit de proposer mon aide de cette façon, je me redresse immédiatement, prêt à rentrer dans le nid pour lui attraper un manteau, une échappe, des gants et un bonnet de laine s'il le faut.

Connor essaye de faire preuve d'une certaine attention à mon égard, me faisant remarquer la finesse de ma robe. Il fait plutôt froid à l'extérieur, mais je ne souffre pas pour autant des températures plutôt basses, surtout après le prime quelque peu mouvementé que je viens de vivre. « No... » Je commence avant qu'il ne se lève, prêt à se précipiter dans le nid pour aller me chercher de quoi me couvrir. Je tends aussitôt le bras devant moi et l'attrape par la jambe de son pantalon pour le retenir. Il semble interloqué, je me contente de sourire maigrement avant de secouer la tête de droite à gauche. « Reste avec moi.... s'il te plait. » Je lui demande dans un murmure alors qu'il s'installe de nouveau à mes côtés. Je ne mesure pas mes gestes et me rapproche de lui pour me glisser sous un pan de sa veste. Certes, c'est une bien maigre couverture pour mes épaules mais la chaleur qui se dégage du corps de Connor m'apaise davantage qu'un bonnet et une écharpe. J'enroule mes bras autour de sa taille et me blottis contre lui sans aucune arrière pensée. « J'ai pas vraiment envie de rester seule ici en imaginant que quelqu'un d'autre pourrait venir.. » Je marmonne en fermant les yeux, la joue appuyée contre son épaule. Je me tais un instant, instant qui s'étire le temps d'une minute puis deux. Sa respiration rythme notre échange muet, je lève le regard vers lui de nouveau. « Je suis désolée, tu veux peut-être rentrer. »