Il avait failli se sentir mal. Malheureux au sein du château, mal après sa dernière rencontre avec Madeleine. Mais son caractère solitaire, autonome et joyeux de nature avait décidé de l'oublier. Vers vingt-deux heures et quelques, sûrement, il décida de quitter le groupe avec lequel il discutait pour se faire un café. Dans la cuisine, il s'attela à la tache, préférant se servir de la cafetière italienne que personne n'utilisait, lui préférant la machine électrique. Selon lui, les cafetières d'origine donnaient toujours un meilleur café – café qu'il avait pris le soin d'isoler de façon étanche et de placer au frigo. Plutôt que de retourner dans le salon en attendant que le café se mette à bouillir, il préféra rester isolé dans la cuisine, furetant un peu partout dans les tiroirs et les placards. Enfin, le café fut prêt et il se servit une tasse brûlante, sans sucre. Ce ne fut que lorsqu'une bourrasque de cheveux d'or entra dans la pièce qu'il se stoppa, les lèvres encore dans la tasse, l'observant du coin de l'œil. C'était Síomha, la blonde sulfureuse de la saison dont tout le monde parlait depuis le début. Rapidement, il se remémora ce qu'il avait pu entendre. « Orgueilleuse », « vulgaire », « prétentieuse », « égocentrique », que du joli, en fait. Il remarqua avec un sourcil haussé que les garçons du château s'étaient contentés d'approuver les médisances féminines sans pour autant avouer à quel point ils trouvaient Síomha sexy, ce qu'ils trouvaient, sans hésitation. Le fait était que peu de personnes parmi celles qu'il avait croisées ne semblaient s'entendre avec cette candidate caractérielle. Il ne put empêcher un léger sourire moqueur de se dessiner sur ses lèvres. Tout en sirotant son café, il poussa vers Síomha la carafe pleine. « Tiens la tigresse, il en reste. »

Si elle avait été dans une période normale de sa vie, cet instant aurait été le moment parfait pour aller dans un bar ou dans une discothèque, pour se déhancher contre un inconnu. Un inconnu avec une belle gueule, cela allait de soit. Flirter, boire, faire sembler de s'intéresser à sa vie. Et enfin, il lui accorderait une bonne partie de jambes en l'air dans l'hôtel miteux du coin. Quand elle était chanceuse, c'était plus simple. Pas besoin de parler. Deux verres d'alcool et le baiser qui mène au sexe était donné. Oui, en temps normal, elle pouvait baiser sans aucun mal. Ici, c'était une autre histoire. A croire que les bisounours avaient eu raison des autres candidats et les avaient transformés en véritables petits anges dénués de désirs sexuels. Pire que ça encore, elle avait l'impression qu'ils ne faisaient jamais la fête et qu'ils ne touchaient pas à une seule goutte d'alcool. Contrairement à Síomha qui n'en était pas rendue à sa première bouteille. Enfin... Toujours est-il qu'en ce vendredi soir, elle n'avait pas grand chose à faire. A part dîner, cela allait de soit. Elle ne mangeait que quand elle avait faim et ne se mettait pas à table à des heures fixes. Elle vivait de la sorte, c'est tout. Et le fait que cela lui évite de croiser d'autres candidats était, sans grande surprise, un plus. D'un pas nonchalant, elle se rendit dans la cuisine. Sans porter attention si qui que ce soit s'y trouvait, elle se positionna devant le frigo, l'ouvrit. Une voix s'éleva. D'un simple coup d'œil, elle remarqua que c'était bien à elle que l'on s'adressait. Le jeune homme semblait lui proposer du café. Elle arqua un sourcil. Le café, ce n'était pas son truc. Elle préférait encore un bon verre d'alcool. Surtout à une heure pareille. Elle détourna le regard et attrapa une boite de cordon bleu, ainsi que de pâtes déjà prêtes. Suffisait de tout passer au micro-onde. Elle ouvrit un placard, en sortit une assiette, sur laquelle elle posa les deux cordons bleus. Oui, deux. Pas parce qu'elle allait proposer à son camarade de la rejoindre pour manger, uniquement parce qu'elle mourrait de faim. Elle plaça l'assiette dans le micro-onde, positionna le minuteur sur deux minutes. Elle n'avait plus qu'à attendre que ça soit chaud, après quoi, les pâtes y passeraient à leur tour. Pourquoi se faire chier à cuisiner quand on a des plats quasiment déjà prêts à disposition, hein?