winifred.

Profitant du temps doux qu’il s’offrait à nous, pauvres petites brebis de Cupidon, j’avais trouvé refuge sur le balcon qui s’étendait à l’étage, entre les deux chambres. En fait, pourquoi le décrivais-je? Cela faisait trois semaines que vous le voyiez sans arrêt. Bref. J’étais assis là, bien emmitouflé dans mon cardigan beige, seul vêtement qui me gardait vraiment au chaud, en dehors de mes jeans et de mon t-shirt. Je risquais fort de choper un bon rhume, mais je m’en fichais un peu. Je voulais profiter du grand air et du soleil qui perçait enfin à travers les nuages, prendre une bonne dose de luminothérapie ; ça ferait grand bien à mon teint. N’ayant pu regarnir ma réserve de cigarette, j’étais en sevrage depuis quelques jours, voir bientôt une semaine. Dans ma bouche se trouvait une paille que je mâchouillais afin de me faire passer l’envie d’en fumer une. Bon sens, pourquoi avais-je seulement recommencé? Grossière erreur de ma part. J’en payais le prix, aujourd’hui, devant tout reprendre du début. Merde. Et avec cette douleur lancinante tout au long de ma jambe, il me semble qu'une petite dose de nicotine n'aurait pas été de refus.

En étant dans le nid depuis quelques semaines maintenant, je m'autorisais à rire de certains détails complètement stupides de la vie courante, de la vie extérieure, de mon existence à Reading. La météo, par simple exemple. Quand nous sommes entourés de média, nous n'avons aucuns foutus moyens de louper la météo. Même si vous n'achetez pas le journal local, même si vous ne regardez pas la télé ou n'écoutez pas la radio, il reste impossible de ne pas avoir au minimum un appareil doté d'un quelque pouvoir lié à l'allure qu'aura le ciel le lendemain. Ici, pour la météo, c'était plus un jeu de hasard qu'autre chose. Je me prêtais parfois au jeu et pariais avec Franckie sur ce qu'on allait bien avoir pour la journée, et difficile de perdre, étant donné qu'au-dessus de notre résidence, de notre château, il grisonnait souvent. Par chance, aujourd'hui, alors que le soleil semblait se faire petit mais présent tout de même, je ne m'étais pas prononcée sur la couleur que les nuages prendraient. Par chance oui, si j'avais prédit l'opposé total du temps actuel, Franckie m'aurait certainement déjà préparé un mauvais coup. Pari perdu, il fallait bien que je le paie, en quelques sortes. Alors que certains candidats profitaient de ce temps pour gagner la piscine, le hammam ou je ne sais quelles autres activités aquatiques du genre, je remontais, paquet de cigarettes à la main. Il ne m'appartenait pas, en réalité, je ne fumais pas, théoriquement. Sauf que depuis que j'étais là, une petite barre de nicotine ici et là, n'était pas mal vue. Je m'avançais jusqu'au balcon, y croisant une candidate. Evey, je crois. La voir mâchouiller son brin de paille me fit rire, tandis que je me clouais une cigarette entre les lèvres. Je me plaçais à côté d'elle, lui tendant le paquet. « C'est ton jour de chance, je me fais rarement généreuse. Quoiqu'en fait je dois t'avouer qu'elles ne sont pas à moi, mais si tu n'as rien contre le fait d'abaisser les réserves de Baptiste, qui peut au moins m'accorder ça, je partage volontiers. » Beh, autant être franche non ? Et puis, si jamais elle en voulait vraiment une, Baptiste ou pas, elle la prendra.

- désolée pour le "semi" pavé -

C’était plutôt pathétique de me voir là, assise seule au balcon, mâchouillant ma paille. Pas étonnant que ce fut un rire qui m’annonça l’arrivée imminente d’un candidat, ou plutôt d’une candidate dans le cas présent. Tournant la tête vers le gloussement, je reconnus là Winifred. Enfin, il me semblait que c’était elle, mais je ne pouvais le confirmer à 100%. Malgré le fait que nous vivions dans ce château depuis bientôt trois semaines, elle restait une étrangère à mes yeux, comme beaucoup d’autres participants de l’émission. Elle se rangea à mes côtés. « C’est ton jour de chance, je me fais rarement généreuse. Quoiqu’en fait je dois t’avouer qu’elles ne sont pas à moi, mais si tu n’as rien contre le fait d’abaisser les réserves de Baptiste, qui peut au moins m’accorder ça, je partage volontiers. » Je tournais la tête vers elle, puis mes yeux dérivèrent vers le paquet tendu. Hum. « Je comptais refuser ton offre, mais maintenant que je sais qu’elles appartiennent à Baptiste, je ne peux pas passer à côté. » Je n’aimais pas tellement Baptiste, instinctivement, sans raison apparente. Je ne sais pas, quelque chose dans son visage, sa voix, son attitude me déplaisait. Définitivement. Rien que l’idée de le priver de quelques unes de ces précieuses cigarettes, cependant, m’enchantait. J’en attrapais finalement deux, en fourrait une dans ma poche et l’autre, dans ma bouche, remplaçant vite-fait la paille que j’envoyais valser non loin de moi. J’allumais bien vite la clope et en tirait deux ou trois bouffées, comblant en quelques secondes le manque qui m’habitait. Grand Dieu, je n’avais aucune volonté! Ce n’est pas de sitôt que je me débarrasserais de cet addiction si je continuais d’agir de la sorte.