esther.

Je me balade dans le parc, à la recherche d'une place où me poser sans jamais trouver celle qui m’inspirera assez pour m’arrêter. Je passe près de la chapelle, puis décide de pousser la barrière qui sépare le cimetière du reste du terrain. L’endroit est vide et silencieux, comme se devrait de l’être un lieu de sépulture. Je passe à côté d’une tombe qui semble m’être familière. Je me penche légèrement pour apercevoir le nom et j’esquisse un léger sourire. Tiens, n’est-ce pas le valentin de Moore ? Si, c’est bien lui. « Bonjour Matthew. » fis-je à l’attention du cadavre qui git probablement sous mes pieds. « Désolé, ta valentine n’est pas là aujourd’hui, tu devras te contenter de moi. J’espère que ça te vas. » Je ne sais pas pourquoi je parle ainsi avec un mort, mais bon, je pense mettre ça sur le compte de l’ennui. Me dirigeant sur le banc qui se trouve non loin, je m’y installe malgré le froid poignant de la pierre. Si j'avais eu envie d'un peu de chaleur, c'est au salon que j'aurai dû me poser, et pas ici. Je sors de la poche de mon manteau un roman quelconque que j’ai subtilisé de la bibliothèque et l’ouvre, débutant ma lecture d’un air désintéressé. Il faut vraiment que je ne sache pas quoi faire de ma peau pour aller m’asseoir dans un cimetière avec un livre… Quelqu’un, sortez-moi d’ici, vite, avant que je ne devienne folle. « Tu veux que je te fasse la lecture, mon cher Matthew ? Le temps doit te paraître bien loin, coincé ici… » C’est un sentiment tout à fait partager, d’ailleurs. Je suppose qu'il le devine, on sait bien que les fantômes sont au courant de tout ce qui se passe dans ces lieux. Presque aussi efficace que toutes ces caméras et micros.

C’était un bel après-midi. J’avais besoin de prendre l’air. ce n’était pas ma meilleure semaine. Pourtant, je me sentais un peu mieux. J’avais accepter le départ de Maddie, je m’étais aussi remise de mon atroce gueule de bois. L’idée de boire autant de vodka aussi. C’était stupide. Comme moi et mes comportements. Je ne savais ce qui me prenait ces temps-ci. Ce nid d’amour ne me faisait pas. J’avais parfois l’impression qu’il m’étouffait, ou qu’il changeait simplement quelque chose en moi. Bref, j’enfilai un manteau chaud pour une fois, errant dans le parc, dans mes pensées, dans mon univers que j’aimais me créer. Je rêvais, les yeux grand ouvert. Mes pas me guidèrent jusqu’au cimetière sans que je ne m’en rende réellement compte. Puis j’entendis une voix, me sortant de ma solitude. Cette voix ne s’adressait pourtant pas à moi. M’étirant le cou, je remarquai qu’elle appartenait à Evey. Je la regardai durant quelques secondes, comprenant qu’elle s’adressait directement à un mort. C’est un étrange comportement, mais j’aurais bien été capable de faire la même chose. Je m’approchai donc, lui offrant un léger sourire avant de m’installer face à elle. J’étais à présent au courant de ce qui c’était passé entre Cooper et elle. Est-ce que j’avais mon mot à dire ? Non. Est-ce que cela me faisait quelque chose ? Oui. Mais je ne l’avouerais jamais. « Tu parles aux morts ? C’est un moyen comme un autre de contrer la solitude. » dis-je faiblement, fixant une pierre tombale au hasard, un peu timide. J’aurais peut-être du refaire chemin.

On dirait que les gens se sont passé le mot pour venir tenir compagnie à ce pauvre spectre, car quelques instants à peine après mon arrivée, alors que je discute avec le défunt, la petite silhouette fluette d’Esther est perçu par mon œil. Il faut dire qu’elle m’est carrément passé devant, s’installant même sur le banc qui me fait face, de l’autre côté de l’allée. Elle me sourit et j’esquisse un léger signe de tête pour la saluer avant de reporter l’attention sur ce que je tiens entre les mains. « Tu parles aux morts ? C’est un moyen comme un autre de contrer la solitude. » J’entends sa petite voix faire son commentaire, et je ne comprends pas cet excès de timidité qui en ressort. La seule impression que cela me donne est que je l’intimide. Fort possible. Elle a intérêt à se dégêné avec moi, j’ai peut-être l’air méchante mais c’est pas pour autant que je vais la manger toute crue. Je suis pas assez désespéré pour tenter le cannibalisme. « Tu offusques Matthew, le pauvre. » fis-je seulement en posant les yeux sur elle, les détachants de ma lecture si passionnante. « Ce n’est pas parce qu’il est mort qu’il n’a pas besoin d’un peu de compagnie. C’est un acte de bonté que j’accomplis là. » Comme si j’y croyais, à ce délire. Moore était beaucoup plus sérieuse à ce sujet lorsque je l’ai croisé ici, la semaine dernière. À moins que ce ne soit l’alcool l’unique et seule responsable de sa divagation. J’hausse finalement les épaules, mettant un terme à ses spéculations inutiles. Refermant le bouquin d’un coup sec, je m’adresse à ma visiteuse, une question me brulant les lèvres. J’encre d’ailleurs mon regard bien solidement dans le sien. « Tu l’aimes bien, non? » Et vlan. Je n’ai pas besoin de mettre de nom sur la personne dont je parle. C’est plus qu’évident de savoir que je m’interroge au sujet de son affection pour son partenaire, qui, à mon sens, est plutôt flagrante. Oseras-t-elle me répondre et être franche ou évitera-t-elle la question qui la mettrais un tantinet mal à l’aise. Je ne sais pas, mais j’ai bien l’intention de le découvrir.

« Tu offusques Matthew, le pauvre. » Cette phrase eu le don de me faire légèrement sourire. « Oups. Pardon Matthew. » dis-je aussitôt à l’intention de la dites personne. Je savais bien qu’elle plaisantait et c’était ce que je faisais aussi. Elle m’expliqua ensuite qu’elle ne faisait que l’accompagner en guise de bonté. J’y voyais bien un peu d’ironie et je ne relevai pas le sujet plus que ça. De toute façon, la question qu’elle posa par la suite me pétrifia. « Tu l’aimes bien, non ? » Je la regardai, sans un mot d’abord. Je savais très bien de qui elle parlait. Qui d’autre ? Mes joues devinrent un peu plus rouge, me sentant immédiatement mal à l’aise avec la situation. Je baissai le regard sur mes mains, jouant distraitement avec celles-ci, démontrant mon inconfort avec le sujet. Je devais lui donner une réponse. « Je... hum. C’est si évident que ça ? » finis-je par demander de ma petite voix. De mon point de vu, cela ne paraissait absolument pas. Et j’étais persuadé que Cooper ne l’avait pas plus remarqué de son côté. Je ne savais pas quoi ajouter d’autre. Je me demandais pourquoi me posait-elle une telle question ? Que retirerait-elle de ma réponse ? J’espérais qu’elle ne dise rien à Cooper. C’était mon seul souhait.

« Oups. Pardon Matthew. » Elle sourit, et je suis contente intérieurement. J’arriverai peut-être à la décoincé un peu, du temps qu’on discute. Enfin, c’est sans compter sur le rouge qui lui monte aux joues alors que j’aborde un sujet sensible à la belle. Cooper, qui d’autres. Son regard se détache du mien pour aller s’accrocher quelque part au niveau de ses mains. Je l’ai mise mal à l’aise, ça se voit à cent lieux à la ronde. « Je… hum. C’est si évident que ça ? » J’arque les sourcils, croyant qu’elle blague. Je veux dire, la personne qui s’attardera moindrement à son comportement quand il est dans les parages aurait pu le remarquer. Et puis Cooper avait fortement attirée mon attention au cours de la dernière semaine, ça m’avait sautée aux yeux, comme ça. Elle semble gênée que j’ai percée son secret à jour. Je suis même persuadée qu’elle ne se doutait de rien. Personne n’aurait dû savoir, n’est-ce pas ? Trop tard. « J’suis observatrice, contrairement à d’autres. Les petites attentions que t’as envers lui, cette habitude que tu as de toujours t’asseoir près de lui à chaque prime. » J’énumère les premières trucs qui me passe par la tête, mais sans trop m’y attarder. Il y a bien plus important. « Et puis, tu n’aurais pas pris si mal son attitude s’il ne comptait pas autant pour toi. » Là, pour moi, elle s’était carrément vendue. Cooper devait être bien aveugle pour ne pas s’être rendu compte tant l’évidence était là. Mais c’était un homme, et les hommes ne remarquaient pas ce genre de chose. « Tu savais qu’on avait couché ensemble ? » Je ne vois pas l’intérêt de lui cacher, enfin, pour moi, c’est loin d’être tabou. Et je préfère encore qu’elle soit au courant, qu’elle sache pour lui et moi. N’allez pas croire que je cherche à la blesser, non. Je suis seulement honnête, et la vérité n’a jamais tuée personne.

Je me sentais soudainement bête. Au fur et à mesure ou elle énumérait certaines choses qui démontraient l’affection que j’entretenais pour mon partenaire. Mon comportement m’énervait. Je ne savais pourquoi je ressentais cela pour Cooper. J’aurais préféré que personne ne le remarque et que je garde cela pour moi. C’est vrai. Il compte pour moi. De plus en plus. Il n’y avait pas non plus de quoi en faire tout un plat. Je n’étais pas prête à déclarer quoi que se soit de sérieux non plus. Il ne fallait pas aller trop vite. « Je ne suis pas amoureuse de lui. Faut pas non plus croire ça. » Je tenais bon de le dire. Je ne voulais surtout pas que les rumeurs commencent à courir à l’intérieur des murs du château. « Tu savais qu’on avait couché ensemble ? » Elle le faisait exprès ? Pas besoin de remuer le couteau dans la plaie, c’est gentil. « Oui, je sais. Il me la dit. » dis-je faiblement, relevant les yeux pour regarder la demoiselle. Il m’avait d’abord mentit, mais bon. Nous avions dit que l’on oubliait cette soirée et c’était ce que j’essayais de faire. Le pire, c’est que je savais qu’il recoucherait avec Evey et peut-être même avec d’autres candidates. Je n’y pouvais rien. « Il est un grand garçon... Il couche avec qui il veut en même temps. » Et je le pensais vraiment. Ce n’était pas pour paraître plus détaché ou quoi que se soit. Je n’allais pas dicter ses faits et gestes. Je n’avais aucun pouvoir la dessus.

« Je ne suis pas amoureuse de lui. Faut pas non plus croire ça. » Si elle le disait, c’est que ça devait être vrai, même si j’en doutais un peu. Mais bon, l’envie de m’obstiner était depuis longtemps passée, et je me contentais seulement d’hausser les épaules. « On peut apprécier quelqu’un sans nécessairement l’aimer, c’est indépendant l’un de l’autre, comme le désir, l’attirance, ce genre de trucs. Mais le fait est qu’il ne te laisse pas indifférente quand même. Ne va pas prétendre le contraire. » Elle croyait surement que j’irais crier ces confidences ici et là après notre entretien, mais je n’en avais cure. Qu’elle l’apprécie, voir même qu’elle l’aime, ça ne regardait qu’elle. Et j’avais toujours cru bon de ne pas interférer dans les histoires de cœur des autres. Je posais peut-être des questions, mais j’agissais rarement, voir jamais. M’investir dans un couple autre que le mien, jamais. Je perdais déjà bien assez de temps avec mes propres déboires amoureux. « Oui, je sais. Il me l’a dit. » Et visiblement, ça lui déplaisait que je mette ça sur le tapis. L’apprendre de Cooper, je comprenais que ça ait pu la chambouler, vu son affection flagrante pour lui. Mais que je lui remette sous le nez, ça devait faire mal. Bon d’accord, j’avais peut-être voulu, rien qu’un peu, la blesser. Mais j’étais comme ça. Cru, directe, franche. Si ça ne lui plaisait pas, elle était complètement libre de ces mouvements. Elle pouvait partir quand ça lui chantait. « Il est un grand garçon… Il couche avec qui il veut en même temps. » Au moins, elle s’était fait à l’idée, car visiblement, Cooper était de ce genre d’hommes qui ne se privait pas, qui savourait la vie comme elle venait à elle, soit bien souvent sous la forme de jolies femmes qu’il se faisait un plaisir de mettre dans son lit. « Tu coucherais avec lui ? » que je lui demande, curieuse. Après tout, si l’occasion se présente, je suis intriguée de savoir si elle saura la prendre.

« On peut apprécier quelqu’un sans nécessairement l’aimer, c’est indépendant l’un de l’autre, comme le désir, l’attirance, ce genre de trucs. Mais le fait est qu’il ne te laisse pas indifférente quand même. Ne va pas prétendre le contraire. » J’étais d’accord avec elle. Evey avait parfaitement raison et je n’allais pas la contredire. Ce serait mentir. « Non c’est vrai, il ne me laisse pas indifférente. J’aime être en sa compagnie, j’aime passer du temps à ses côtés. » Voilà, c’était dit et ce, clairement. Je ne voyais simplement pas où allait nous mener cette discussion. J’en venais presque à me demander si ce n’était pas une façon de me soutirer de l’information pour ensuite me ridiculiser. Dans le genre qu’elle irait dire à tout le monde : la pauvre petite Esther qui en pince pour Cooper alors que lui couche avec moi, c’est pathétique, elle me fait pitié. Non parce que sérieusement, je ne connaissais rien de cette fille. Je ne savais pas si elle faisait partie de ce genre de personne qui prenne plaisir à rabaisser les autres. J’espérais fortement qu’elle n’était pas comme ça. Qu’elle allait réellement garder les confessions que je lui faisais en ce moment pour elle-même. « Tu coucherais avec lui ? » Elle me surprit de nouveau. C’était plutôt personnel comme question. La réponse ne me venait pas instantanément. Gênée de nouveau, je continuai tout de même de regarder la jeune femme, mordillant ma lèvre inférieure. « Hum... Bah oui. J’imagine. Mais je peux rien prévoir. Je ne crois vraiment pas que nous en sommes rendu là par contre. » répondis-je, ajoutant mentalement que ce n’était pas seulement de mon ressort, mais aussi de Cooper. Même si moi je le voudrais, peut-être que lui non. Et je n’allais pas gâcher notre relation pour simplement essayer de coucher avec lui. Je tenais trop à lui pour le moment.

« Non c’est vrai, il ne me laisse pas indifférente. J’aime être en sa compagnie, j’aime passer du temps à ses côtés. » Tout à fait le genre de choses qui ne mentait pas. Un jour ou l’autre, qu’elle le veuille ou pas, toute cette affection se transformerait en bien plus, à moins qu’elle n’y prenne garde. Mais peut-être qu’elle voulait tomber amoureuse? Peut-être qu’elle était venue dans cette émission rien que pour ça, pour trouver le prince charmant. Tout à mon contraire. Il y a longtemps que je n’avais pas ressenti ne serait-ce qu’un onze de ce que c’était, l’amour. Mon cœur était un temple inaccessible et les obstacles qui menaient jusqu’à lui, infranchissable. Bref. « Hum… Bah oui. J’imagine. Mais je peux rien prévoir. Je ne crois vraiment pas que nous en sommes rendus là par contre. » J’appréciais que, malgré l’inconfort de mes questions, Esther tente d’y répondre. Rien ne l’obligeait à agir de la sorte. Je songeais même au fait que d’autres qu’elle auraient surement pris la poudre d’escampette depuis bien longtemps. Mais non. Elle restait là et répondait à chacune de mes interrogations sans chigner une seule fois. « Ça n’arriverait peut-être jamais, en fait, ou ça s’produira demain. Tout est possible, avec lui. » Jamais je n’aurais imaginé me retrouver en aussi compromettante situation avec Cooper, d’ailleurs. Si on me l’avait dit en début d’aventure, je leur aurais rit en plein visage. Mais voilà, nous avons voulu jouer avec le feu, et il nous avait consumé tout les deux. Maintenant, ce qui était fait l’était, et il n’y avait aucun moyen de revenir en arrière. De toute façon, est-ce que je regrettais? Non. L’affaire était donc close, comme cette discussion. « J’ai terminée de t’embêter avec mes questions. » affirmais-je finalement en posant mon regard sur Esther. La pauvre, on aurait presque pu croire que je l’avais torturée. Mais ça ne m’amusait plus, désormais. Libre à elle de prendre le relais ou de partir.

Désolé, c'est mauvais .

« Ça n’arriverait peut-être jamais, en fait, ou ça s’produira demain. Tout est possible, avec lui. » J’hochai lentement la tête à l’affirmative, approuvant ses dires. Je ne pouvais rien prévoir de ce qui se produirait avec Cooper. Mais une chose dont j’étais certaine, c’était de ne pas trop le pousser. Je ne devais pas le faire sentir coincer dans cette situation. Bref, je devais, pour une fois, me la fermer sur ce que je ressens et sur l’affection qui commence à grandir en moi à son égard. « J’ai terminée de t’embêter avec mes questions. » Enfin. C’était terminé. Cet interrogatoire m’avait plus que mis mal à l’aise. Je n’aime pas trop avoir à parler de mes sentiments à quelqu’un que je ne connais pas. J’aurais pu simplement ne pas répondre aussi, mais ce n’est pas dans ma nature. Je suis pratiquement incapable d’être brusque ou froide. Je me serais donc sentit mal j’aurais fini par culpabilisé pour quelque chose qui n’en vaut clairement pas la peine. « Oh tu ne m’embête pas... Enfin, c’est plutôt gênant à avouer, mais bon, je ne vois pas pourquoi je ne t’aurais pas répondu. » répondis-je en la regardant, lui offrant un léger sourire. Je pouvais comprendre que Cooper était attiré par elle. Elle était vraiment belle. Et elle dégageait la confiance que moi je n’avais pas. « Alors toi de ton côté... J’imagine que c’est seulement... physique ? Ou... » demandais-je maladroitement, ne sachant pas vraiment comment poser la question sans que cela ne semble être de la jalousie. Non, je ne voulais pas être cette fille jalouse. Surtout que je n’avais pas à l’être.

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