Le blond

Ne jamais, jamais s'aventurer dans une chapelle à l'heure où, habituellement, vous êtes censés dormir. Si j'avais pris l'habitude de me coucher aux alentours de vingt-trois heures dans la semaine, pour ne pas être totalement déconfi le lendemain au moment du réveil, ce n'était étrangement pas le cas ce soir. J'étais toujours debout à vingt-trois heures trente, et cela s'expliquait par le fait que ce soir, il m'était tout bonnement impossible de trouver le sommeil. J'avais pourtant essayé, pendant une vingtaine de minutes, de m'endormir -car oui, en général, il me fallait moins de dix minutes pour tomber dans les bras de Morphée- mais ce soir quelque chose n'allait pas. Je n'étais pourtant pas plus stressé, ni anxieux qu'un autre soir. Je n'avais pourtant pas plus mangé qu'un autre soir. Et je n'étais pourtant ni malade, ni perturbé, ni énervé. Ce devait être la lune qui, de toute évidence, était pleine ce soir. La pleine lune, je ne sais pas vous, mais moi ça m'avait toujours posé des soucis pour dormir... En général lorsque cela m'arrivait, je trouvais une occupation jusqu'à ressentir une grande fatigue qui me pousserait à rejoindre mon lit pour, enfin, pouvoir m'endormir. Et ce soir, je ne sais pourquoi, j'avais décidé de visiter la chapelle. Enfin "visiter", c'était un endroit que je connaissais déjà bien, puisque j'y avais fait un début de strip-tease à une certaine candidate, avant d'avoir été interrompu par deux crétins dont les noms resteront secrets (roh allez, on les connait tous).
En avançant vers la chapelle, je me dis que j'étais vraiment très con de sortir en pleine nuit, à l'heure où tout le monde envisageait d'aller dormir, et surtout à l'heure où les loups-garous étaient de sortie. Bon d'accord, il n'y avait sans doute aucun loup garou de sortie ce soir, mais ça n'était tout de même pas très rassurant. Je fis mon entrée dans la chapelle, vide comme je le redoutais, et bien plus glauque encore que dans la journée. Peu de lumière, une ambiance de film d'horreur genre l'Exorciste, je faillis prendre mes jambes à mon cou et sortir en courant, mais je n'étais pas du genre à paniquer pour si peu. Ce fut lorsque j'entendis un bruit sourd derrière moi que mes yeux s'écarquillèrent et que mes poils se hissèrent. J'avais donc été suivi ? Quelqu'un allait-il se jeter sur moi pour m'étrangler avant de se débarasser de mon corps ? Allais-je rencontrer le petit Jésus ? Je me saisis alors de la première chose qui me tomba sous la main, à savoir un crucifix. Mais qu'est ce que ça foutait là, ça ? Peu importe. Je tendis le crucifix devant moi après m'être soudainement retourné. Je n'y voyais rien, ou presque rien. S'il s'agissait d'un vampire, il fuirait sans doute en voyant le crucifix. Sinon, j'étais dans la merde. « Qui que vous soyez, vous n'êtes pas le bienvenu en ce lieu. Ou vous sortez, ou vous n'allez pas tarder à recevoir un crucifix dans le cul. » Paix à mon âme. Ce n'était probablement pas la chose à dire à un potentiel tueur avec qui j'étais désormais seul dans cette chapelle.

Dieu n'existe pas. Non sérieux, il n'existe pas. Et ne prétendez pas le contraire, vous n'avez aucune preuve. Est-ce que l'un de vous, bordel de merde, l'a déjà rencontré ? Pas dans une rêverie à deux balles, mais genre en vrai ? Non. Alors voilà, il n'existe pas. Telle était en tout cas l'opinion de Jackson sur le sujet. Et vue qu'il était bien connu que le bonhomme avait toujours raison - renseignez-vous, c'était l'exacte vérité - il était donc évident qu'aucun Dieu n'existait. Alors bien sûr, chacun était libre de croire à ces conneries, de s'imaginer qu'un monsieur barbu veillait sur eux - pas le Père Noël, abrutis, Dieu - mais très honnêtement, c'était n'importe quoi. Ainsi donc, Jackson ne croyait pas en Dieu. Mais ça, c'était pas un scoop de toute manière. Ça n'était pas comme si il lui arrivait de croire en quelque chose, hein. A part en lui même, ça il savait faire. Et pourtant, il avait bien envie d'aller faire un tour dans la chapelle ce soir. Il attendit alors une heure où aucun abruti n'aurait probablement dans l'idée de s'y rendre en même temps que lui, puis prit le chemin de celle-ci. Grimpant à la fenêtre, il y pénétra sans mal. Mais alors qu'il se croyait seul, il ne tarda pas à remarquer une présence. Nom de Dieu - pardon - c'était ce grand singe, ce furoncle sur pattes. Quelqu'un ne s'était donc toujours pas décidé à l'éliminer, pour le bien de la société ? Merde. Jackson allait devoir s'en charger alors. Dommage pour lui, il était vachement vicieux le blond. Ce dernier songea d'ailleurs à quitter immédiatement les lieux. Mais c'était sans compter sur cet abruti de Ruben, qui brandissait un malheureux crucifix. Attendez voir, il était sérieux ? Putain. C'était grave là. « Bah vas-y, mets-le moi » fit alors Jackson, sur un ton tout aussi blasé qu'à son habitude. Chassez le naturel, il revient au galop. « Dois-je comprendre que tu crois aux vampires ? » finit-il par demander. Ça ne l'étonnerait même pas venant de Ruben. Parce que, justement, c'était Ruben.

On peut croiser toute sorte d'individus dans une chapelle, à presque minuit. Et parmi les nombreux individus sur lesquels on peut tomber, il y a les albinos bodyduldés. Des grands machins blancs style Mr Malabar, pas sexy pour un sou, vaniteux et pétant plus haut que leur cul. Cette chose, que je pensais être un vampire ou un loup-garou, n'était en fait que Jackson. C'te déception qui m'envahis, sur le moment, en découvrant la tronche du blond. Pas franchement effrayé par le crucifix que j'avais brandis dans le feu de l'action, Jackson me proposa même de me le foutre dans le cul. « Bah vas-y, mets-le moi » Charmant. Tentant, même, mais... non. Y'avait pas moyen. Je n'étais pas du genre maso' non plus, oh. « Oh non pas lui. Heu non, sans façon. » Je n'étais franchement pas ravi de tomber sur Jackson, tout simplement parce que c'était dans les moments où je n'avais vraiment pas envie de le voir qu'il apparaissait. Pire qu'une vermine. De toute évidence, le crucifix que je tenais toujours dans ma main ne laissa pas le blond indifférent. Celui-ci émit alors une hypothèse, une hypothèse de blond. « Dois-je comprendre que tu crois aux vampires ? » C'était surtout le premier truc qui m'était tombé sous la main en cherchant de quoi me défendre en cas d'attaque. J'avais pris un crucifix, mais j'aurais très bien pu me saisir d'une bougie, d'une statuette du petit Jésus ou de je ne sais quoi d'autre. « Tout de suite le cliché. Donc sous prétexte que je brandis un crucifix, je crois aux vampires. C'est un peu comme si je disais que t'étais con, tu vois, c'est tout simplement un cliché car tout le monde sait bien que Jackson égal con. » Ce mot, "con", je savais à quel point ça l'énervait que je le débite à tout va. Il n'y avait pourtant pas de meilleur terme pour désigner ce qu'il était. Et personne ne risquait de me contredire là dessus. Pas même Jésus. Sur le moment je me sentis un peu obligé de lui expliquer la signification du mot "cliché", par peur qu'il ne comprenne pas ce dont je causais. Fallait pas oublier que j'avais en face de moi Jackson, quand même, blond de son état.

Ça c'était bien sa veine. Alors la fois où Jackson se décidait à pénétrer dans cette obscure chapelle, ça devait forcément être la fois où un sombre abruti s'y trouvait lui aussi. Et pas n'importe lequel d'ailleurs, le champion du monde de cette catégorie. Ruben, bien sûr. Ou bien le hasard se la jouait couillon, et ça n'allait clairement pas pouvoir le faire. Ou bien c'était le karma de Jackson qui se la jouait couillon, et là non plus ça n'allait clairement pas pouvoir le faire. Lui qui était si épanoui depuis qu'il n'avait plus Ruben sur le dos vingt quatre heures sur vingt quatre aurait particulièrement apprécié de ne pas avoir à tomber sur lui en pleine nuit. Mais non, décidément, il n'avait pas de chance. Et le pire dans tout ça, c'est que chaque fois que Jackson était contraint de faire la conversation au grand singe, celui-ci s'avérait plus con que précédemment. C'était de pire en pire, vraiment. La réplique de Ruben poussa d'ailleurs Jackson à lâcher un lourd soupire. Mais bon sang, pourquoi existait-il ? « Ruben ou la discrétion incarnée » fit-il alors, sur un ton blasé. Probablement qu'il n'avait même pas cherché à être discret, mais qu'importe. L'occasion était trop belle, vous comprenez. Et figurez-vous que ce crétin s'était muni d'un crucifix, sans nul doute pour se défendre contre une éventuelle horde de suceurs de sang. Ce qu'il était naïf le Ruben. On le sait, bon sang, que ça ne fonctionnaient pas les crucifix. Ça n'était qu'une putain légende, voyons. Mais vu que de toute manière les vampires n'étaient pas censés exister, ça réglait le problème. Et voilà qu'il cherchait à se défendre en plus. Ri-di-cu-le. « Allez va, ça fait rien. T'as pas à te justifier. Chacun ses croyances. » Non parce que son histoire de clichés était, comment dire, plus chiante que chiante. En plus, il s'embrouillait dans ses explications. Parfois, il ferait quand même mieux de se taire le Ruben. « Et sinon, qu'est-ce que tu fous là, mise à part getter l'arrivée de Nosferatu ? » reprit Jackson, sur un ton quelques peu moqueur. Là, il fit quelques pas et observa ce qui se trouvait autour de lui. Pas mal. Et franchement pas de quoi flipper comme un malade. N'est-ce pas Ruben ?

« Ruben ou la discrétion incarnée » Ces paroles me rappelèrent pourquoi je détestais Jackson du plus profond de mon être. Si j'avais pu l'oublier ne serait-ce que quelques secondes, le blond me le rappela en débitant cette phrase aussi profonde qu'elle était inutile. Je décidai de ne même pas répondre, car ne voyant tout simplement pas quoi répondre à ça. Dans certains cas, il vaut parfois mieux se taire et laisser l'autre faire preuve de toute la stupidité dont il sait faire preuve. Pour une fois au moins qu'il m'appelait par mon prénom plutôt que par l'un des nombreux surnoms dont il faisait usage comme le gorille, King Kong ou je ne sais quoi d'autre encore... « Allez va, ça fait rien. T'as pas à te justifier. Chacun ses croyances. » Je ne cherchais aucunement à me justifier, mais plutôt à l'instruire. Car très franchement, à en juger son niveau intellectuel, il y avait de très minces chances que le blond sache ce qu'était un cliché. D'ailleurs, le fait qu'il ait répondu aussi sèchement montrait bien qu'il essayait de détourner le sujet de la conversation. Qu'est ce que vous voulez que je vous dise... « Enfin bref. T'imagines surtout pas que je puisse croire aux vampires car ça n'est pas le cas. » Je préférais que les choses soient et restent bien claires. Je ne voulais pas être ensuite catalogué comme le mec qui croyait dur comme fer à l'existence des vampires, jusque parce qu'un grand machin blond s'était fait de fausses idées en voyant le crucifix que j'avais brandis contre lui. « Et sinon, qu'est-ce que tu fous là, mise à part getter l'arrivée de Nosferatu ? » Nosferaquoi ? Jamais entendu parler de ce monsieur là, perso. Ah, Jackson se croyait sans doute très intelligent, en débitant des choses qu'il était sans doute le seul à connaitre ici. Il ne m'impressionnait guère, qu'il se le dise. Non, je n'étais aucunement venu à la chapelle pour voir mon ami Nosfemachintruc. « Je vais te dire : je ne trouvais pas le sommeil, alors je suis venu ici dans l'espoir de trouver un peu de calme. D'ailleurs tout allait très bien, jusqu'à ce que tu arrives. T'es juste arrivé au mauvais moment, quoi. » Je le soupçonnais même de m'avoir suivi de ma chambre à la chapelle, tellement ce gamin était vicieux. Il en aurait été bien capable.

Croyez bien que si cette chapelle ne revêtait pas un certain intérêt aux yeux de Jackson, celui-ci se serait tiré d'ici depuis bien longtemps, notamment au moment où il était tombé sur cet imbécile de Ruben. Parce qu'après une semaine passée à se le coltiner quotidiennement, il en avait légèrement sa claque du grand singe. Cela n'avait évidemment rien de personnel, qu'on se le dise. Ou peut être bien que si, en fait. Voyez, même lui ne le savait plus. Preuve que ce Ruben lui était véritablement néfaste à force. « Je ne m'imagine rien, je me contente de constater » répondit alors le grand blond. Que Ruben croit ou non en l'existence des vampires, franchement, il n'en avait clairement rien à foutre. Parce qu'à l'image de toute la personnalité de ce type, c'était profondément inintéressant. Ainsi, qu'il prête ou non une quelconque foi à ces conneries le laissait profondément indifférent. Ça n'était pas ses affaires après tout. En attendant, Jackson avait souhaité connaitre les raisons de la présence de Ruben en ces lieux. Évoquer Nosferatu lui avait semblé naturel, bien qu'il était assez probable que son camarade n'y connaisse rien en cinéma germanique. Quoi qu'en même temps, Jackson n'y connaissait pas grand chose non plus. Il avait entendu ça quelque part, voilà tout. A la réponse de Ruben, Jackson souleva un sourcil. « Donc, plutôt que d'aller chercher un peu de calme dans la bibliothèque, t'as préféré venir dans cet endroit. T'es bizarre. » Surtout que froussard comme il semblait l'être, il n'avait pas fait preuve d'une très grande malice en ramenant son cul de métèque par ici. « Et sinon, qu'est-ce que ça t'a fait de t'en prendre plein la gueule l'autre soir ? » Soir mémorable que celui-ci. Mais si, vous savez, le soir où Ruben s'était notamment mangé une gifle et s'était vu insulté de toute part. Ouais, vraiment mémorable.

« Je ne m'imagine rien, je me contente de constater » Ce Jackson, il avait vraiment un don pour dire des conneries. Tout ce qu'il débitait était sans intérêt et à mon sens ce garçon gaspillait sa salive. Pourquoi donc parler pour ne rien dire quand on peut très bien soulager l'humanité en fermant sa gueule ? Chacune des paroles du blond me faisaient souffrir. Pourquoi ? Parce que je ne supportais pas sa voix, les mimiques qu'il prenait lorsqu'il s'exprimait, les intonations de certains mots... Je priai le ciel pour que Jackson se retrouve subitement aphone, mais hélas ces derniers jours le ciel ne semblait pas franchement de mon côté. « Et bien constate, petit, constate. » Y'avait juste rien à constater, là, mais si ça l'amusait de se prendre pour un caïd. Le blond avait porté un soudain intérêt aux raisons de ma présence dans cette chapelle. A cela je lui avais rétorqué que c'était un endroit plutôt paisible ou je me plaisais à me rendre pour me vider un peu les esprits. « Donc, plutôt que d'aller chercher un peu de calme dans la bibliothèque, t'as préféré venir dans cet endroit. T'es bizarre. » Qu'est ce qu'il croyait, le blond, je l'avais déjà essayée la bibliothèque. C'était aussi un endroit calme, mais je préférais encore cette chapelle. Ce devait être mon côté glauque et noir qui ressortait. « Ah vraiment tu me trouves bizarre ? Et bien laisse moi te dire que tu n'as encore rien vu... » Je n'essayais pas de me donner un genre, non pas du tout. Je le mettais juste en garde. Car il ne devait pas y avoir de mec plus imprévisible que moi dans ce nid. La majorité des candidats me sous-estimaient, et ils commettaient là une belle erreur. Mon passé, s'il venait à se savoir un jour dans ce nid, suffirait à mon avis amplement pour les faire tous changer définitivement d'avis à mon sujet. « Et sinon, qu'est-ce que ça t'a fait de t'en prendre plein la gueule l'autre soir ? » Nous y voilà. Je l'attendais, celle là, de remarque. C'était quasiment inévitable de ne pas évoquer ce fameux soir avec quelqu'un comme Jackson, qui prenait un malin plaisir à foutre la merde. J'avais du m'expliquer une bonne vingtaine de fois sur ce fameux soir, à pas mal de monde ici, et voilà que je devais faire de même avec Jackson. Allons bon, le gamin voulait du "croustillant", je ne voyais donc aucune raison de ne pas le lui en donner. « Qu'est ce que tu veux que je te dise ? Ça m'a juste prouvé l'immaturité ambiante qui règne en ces lieux. Je ne suis entouré que de gamins prétentieux et capricieux, alors bon, m'en prendre plein la gueule comme tu dis ne m'a pas étonné plus que ça. » Triste vérité. Je devais bien reconnaitre que mes camarades avaient réagit comme des enfants. Deux ans d'âge mental, voilà ce que tous avaient ici.

En fait, qu'est-on en avait globalement à foutre de savoir si Ruben croyait ou non aux vampires ? Ça le regardait s'il était définitivement idiot après tout. Et croyez bien que Jackson avait présentement autre chose à faire que de se demander si son camarade prêtait une quelconque foi aux mythes vampiriques. Ça ne l'intéressait pour ainsi dire pas le moins du monde. En plus, Ruben était plutôt loup garou que vampire, à la base, non ? Bref. Ainsi donc, le chapitre sur les vampires était clos. Et ça n'était pas plus mal, de l'avis de Jackson. Bien qu'affectionnant un univers assez glauque, il n'était pas franchement branché créatures surnaturelles. Sans doute était-il trop terre à terre pour croire en ce genre de conneries. Et alors que le grand blond avait insinué que son camarade était bizarre, celui-ci trouva judicieux de lui dire qu'il n'avait encore rien vu. Bouh. C'était là qu'il était censé trembler, n'est-ce pas ? « Oh, mais je ne demande qu'à voir » fit-il alors, totalement désintéressé par la conversation. Parler à Ruben se révélait chaque fois aussi passionnant que d'interagir avec un rouleau de sopalin. L'éclate totale en somme. Et puis Jackson avait cherché à savoir comment Ruben vivait désormais son nouveau statut de persona non grata. La réponse de son camarade le fit d'ailleurs légèrement sourire, bien que cela s'avérait très peu perceptible dans une telle obscurité. C'était d'ailleurs pas plus mal, il ne faudrait pas que Ruben s'imagine que tout cela l'intéressait, à tort. « C'est toujours la faute des autres, pas vrai ? » le questionna-t-il, l'air de rien. Il ne cherchait pas à l'inciter à se remettre en question, soyons clairs. Après tout, qu'est-ce que cela pouvait bien lui faire que Ruben se voile la face ? « Et quand tu dis que les gens d'ici sont immatures, tu t'inclus dedans ou bien ... ? » Comment ça, il remuait le couteau dans la plaie ? Absolument pas. Ça n'était tellement pas son genre au Jackson.

« Oh, mais je ne demande qu'à voir » Ce gamin semblait vraiment s'emmerder avec moi, c'était flagrant. Je n'avais pas cherché à lui faire peur, car premièrement j'en étais tout bonnement incapable, mais surtout parce que Jackson ne semblait pas être le genre de mec à prendre peur à la moindre petite menace, alors bon je m'attendais un peu à ce genre de réaction de la part du grand blond. Il avait plus l'air blasé qu'autre chose. « Heu si je te fais chier, t'es libre de partir tu sais. Personne, pas même Jésus, ne te retient ici. » Après ça, je m'attendais à recevoir un "tu sais où tu peux te le foutre ton Jésus ?". On disait souvent de moi que j'étais assez vulgaire, grossier. Bah alors il fallait voir Jackson, qui à mon sens était vraiment vulgaire, lui. Je ne comptais plus le nombre de gros mots que le blond avait débité depuis son entrée dans le nid. Mais je m'y étais habitué. Comme à ses cheveux. Jackson avait cru bon de souligner le fait que je m'en étais vraiment pris plein la gueule par mes chers camarades. « C'est toujours la faute des autres, pas vrai ? » Elle était vraiment débile, sa phrase. Ça n'avait tout bonnement pas lieu d'être dans une telle conversation. C'était con à souhait, et cela prouvait surtout que Jackson était vraiment un crétin. Dédicace à Moore. « Heu... t'en as d'autres des comme ça ? » Sur le coup je ne savais pas trop quoi répondre au grand blond. Allez répondre à ça, vous. Par ailleurs j'avais bien souligné l'immaturité qui régnait dans le nid, et le fait que je n'étais entouré que de gamins dans son genre. C'était ces gamins là qui avaient crié au crime lorsque j'avais pris la décision de nominer le grand con. A les croire, c'était la pire décision que quelqu'un pouvait prendre ici. Mais cela avait sans doute un rapport avec le fait que toucher au grand con, c'était sacré. Allons bon. Moi de toute manière ce qui était sacré, j'en avais pas grand chose à faire. « Et quand tu dis que les gens d'ici sont immatures, tu t'inclus dedans ou bien ... ? » Merde quoi, j'avais trente-trois ballets. Je pensais tout de même avoir un peu plus de maturité que la plupart des candidats. J'avais vécu bien plus de choses que tous ses gosses de riches. Et sans doute que Jackson, qui rappelons le bien n'avait que vingt cinq ans et quelques. « Non je ne m'incluais aucunement dedans. Mais toi par contre tu en fais partie, ça je peux te le dire. Et tu viens de me le prouver, là, à l'instant. Y'a pas plus immature que toi dans ce nid, laisse moi te le dire Jack'. » Ouais c'était un nouveau surnom. J'en avais un peu marre de l'appeler le blond sans arrêt. Et puis Jack' lui allait plutôt bien franchement. C'était un surnom tout à fait ignoble, alors je ne pouvais pas trouver mieux. Ce gosse était si immature qu'il ne pouvait même pas remarquer son immaturité. Le pire des ignorants est encore celui qui s'ignore.

S'il le faisait chier ? Heu, attendez voir ... Non, pas vraiment. Parce que cela voudrait dire que ses actes, tout comme ses paroles, avaient un quelconque impact sur Jackson, ce qui était purement erroné. Il réussissait à le blaser, tout au plus. Non en fait, Jackson y arrivait très bien tout seul. Blasé de nature comme il était, ça n'avait rien de bien compliqué. « Tu crois m'apprendre quelque chose, sans doute ? » Comme si il ignorait qu'il était parfaitement libre de quitter cet endroit, comme il était libre de faire tout ce qui lui plaisait. « Parce que tu crois en Jésus, en Dieu, en toutes ces conneries, peut être ? » l'interrogea-t-il subitement. Peut être qu'elle était là l'explication de la présence de Ruben dans un tel endroit. Peut être qu'il était très branché religion, en fait. Ça n'était pas à exclure après tout. En attendant, Jackson était revenu sur la fois où Ruben s'était vu attaqué de toutes parts par ses camarades. Notez que Jackson, lui, ne lui avait pas cherché des poux ce fameux soir. Tout simplement parce qu'il savait qu'il aurait tout le loisir de le faire plus tard, comme ici. Et Ruben cherchait visiblement à rejeter toute la faute sur ses camarades, qui étaient semble-t-il profondément immatures, prétentieux et capricieux. Ça n'était pas que faux, remarquez. Pour autant, c'était un peu gros aux yeux de Jackson. « Toute une collection, oui » fit-il ironiquement, en réponse à l'interrogation de son camarade. Franchement, il n'avait pas beaucoup de répondant pour le coup. C'en était presque décevant. Ensuite, Jackson crut bon de revenir sur le fait que Ruben venait à l'instant de qualifier les candidats de ce jeu d'immatures. Aussi véridique cela soit-il dans certains cas, il était un brin hypocrite. Dans le sens où lui même ne brillait pas de par sa maturité depuis le début de l'aventure. Et probablement que Jackson n'était pas le seul à le penser, mais bien l'un des seuls à avoir les couilles de le lui dire franco. Et le moins que l'on puisse dire, c'est que Ruben n'apprécia pas sa petite insinuation. Mince alors, ça n'avait pourtant aucunement le but de le vexer, hein. Il traita même à son tour Jackson d'immature. On aura tout vu. Ce dernier arqua un sourcil. « C'est là que je suis censé te prouver que tu as tort, que je ne suis en rien immature ? Franchement, je m'en branle de ton opinion. Elle parvient tout juste à me faire sourire. Quant au surnom que tu viens de m'attribuer, il est aussi minable que ta répartie. » De quel droit le surnommait-il Jack', au juste ? Que ce soit bien clair, seuls les plus proches connaissances de Jackson étaient en droit de l'affubler d'un surnom. Et le dit surnom n'était pas Jack' mais Jackie. Ainsi donc, il pouvait se garder son Jack' et éventuellement se torcher avec.