C’était la première fois que je venais en ces lieux. La cabane en bois n’était pas l’endroit où je passais le plus de temps. Et pour cause, je n’avais aucun indice sur aucun secret. Mon dieu, j’étais réellement nulle à ce jeu. De plus, c’était un des seuls moyens de faire de l’argent ici. Faudrait peut-être que je m’active, que j’essaie de découvrir les secrets de mes compatriotes. Je me demandais si certains avaient des pistes sur mon secret à moi. S’il se doutait de quelque chose. Je m’étais tout de même permise de parler de certains détails de ma vie qui étaient clairement relier à celui-ci. Mais bon, je n’étais pas pressée qu’il soit découvert. J’aimais mieux garder tout cela secret. J’étais assise sur le confortable canapé, observant la pièce, un peu distraite. Mon regard se posa sur la caméra qui me fixait avec intensité. Je fis une grimace à celle-ci, rigolant soudainement. Je devais avoir l’air un peu conne. « Tu veux que je te dise quelque chose d’intéressant hein ? Tu veux avoir du contenu pour ton émission quotidienne ? Je pourrais aussi montrer mes seins, ça ferait un bon spectacle. » dis-je en rigolant. Je me parlais toute seule. Enfin, je parlais à la personne derrière la caméra, qui devait carrément me trouver folle. « J’ai des petits seins, ça n’attirerait surement pas une tonne de spectateurs. Et puis, y’a beaucoup d’autres personnes ici, genre Siomha qui se montre, alors pas besoin de le faire. » continuais-je en soupirant. Je baissai les yeux, puis les relevai vers la caméra. « Je vais te montrer quelque chose d’épatant. Je sais toucher mon nez avec ma langue. » ajoutais-je en souriant, m’exécutant et touchant bel et bien mon nez avec ma langue. J’avais vraiment du temps à perdre. Évidemment, c’est à ce moment là que la porte s’ouvrit, laissant place à Evey. J’arrêtai tout de suite mon geste, me trouvant un peu bête. « Je montre mes talents à la caméra... » lui fis-je comprendre, ne sachant pas vraiment quoi ajouter d’autre.

La cabane offrait un confort que certaines pièces de la maison n’avaient pas : des sofas, de la chaleur et une certaine tranquillité. Rien qu’en vous citant mon précédent refuge, vous comprendriez pourquoi j’avais aisément modifié mon choix : la cave. Facile à battre, n’est-ce pas? Comme les buzzs se faisaient plutôt rares dans le coin, m’installer dans l’antre de Cupidon ne devait pas poser problème, si? Je risquais de n’y déranger personne, quoi. Sauf peut-être ceux et celles qui, comme moi, cherchait un endroit où s’installer en paix. Mes écouteurs sur les oreilles, impossible de savoir si quelqu’un se trouvait à l’intérieur. De toute façon, le chérubin avait surement pensé à faire isoler l’endroit, question qu’on ne vienne pas écouter aux portes les confessions des autres. Poussant la porte, mes sourcils s’arquèrent devant le spectacle qui s’offrait devant moi, une Esther toute en grimace, dans toute sa grâce. Hm. Mon interruption dans la pièce suffit cependant à lui faire perdre son air. « Je montre mes talents à la caméra… » s’excusa-t-elle. De toute évidence, je l’avais prise en flagrant délit, et ça ne lui faisait pas forcément plaisir. « Joli... » lui répondis-je seulement en m’installant sur le fauteuil en face d’elle, réglant au minimum le volume dans mon iPod. Je n’étais pas encore tout à fait prête à m’en défaire, pas trop certaine que la brunette ait envie de discuter. Mais bon, au cas où, j’étais prête à toute éventualité. Au vue de son précédent exploit – dont j’avais pu apprécier la vue lors de mon entrée -, une question me trottait en tête. « T’es capable de licher ton coude? » que je lui demandais d’un air sérieux. Non, non, je ne me moquais pas, je voulais réellement savoir si sa langue était capable d’autres prouesses.

« Joli... » C’est vrai que ça devait être vraiment beau à voir. Moi, la langue sortit, qui touche à mon nez fièrement. Il n’y a pas vraiment de quoi avoir à être fière dans ce geste, mais bon, on fait avec les talents qu’on a. Et dans mon cas, je n’en ai pas beaucoup. Je suis nulle en dessin, je chante comme une merde et je danse très mal. Mais, mais, je sais toucher mon nez avec ma langue. Juste cette pensé me fait sourire tout de même. Evey s’installa devant moi. Je la regardai faire, encore une fois un peu intimidé par elle. J’avais beau vouloir, je ne savais pas pourquoi cette gêne ne voulait pas partir. « T’es capable de licher ton coude? » Alors là, sa question m’arracha un sourire. Elle était sérieuse ? J’avais bien l’impression que oui. Je baissai le regard sur mon coude alors que je relevais un peu ce dernier. « Bonne question... J’ai jamais essayé. Attend un peu. » dis-je alors, bien déterminer à essayer. Après tout, on avait rien à faire ici. Et puis, je n’avais pas vraiment peur du ridicule. Je n’aurais simplement pas pensé faire ce genre de connerie en la présence d’Evey. Mais il y avait tout de même un début à tout. Je penchai donc la tête, sortant la langue d’un coup, mais je m’étouffai de rire lors de cette première tentative, alors que j’avais clairement l’air d’une belle conne. Je réessayai une deuxième fois, passant tout près, mais non. Je n’étais pas capable. « Ah bah voilà. On ne peut pas être doué dans tout ! » dis-je en souriant, re prenant ma place initiale dans le divan. Je regardai Evey amusée, me demandant si elle allait oser le faire elle aussi. « Essaie donc toi ? Je veux voir si tu es capable. Mais je crois que c’est impossible ! »

La surprise se lut aisément sur son visage lorsqu’elle m’entendit la questionner au sujet de ses habiletés farfelues. J’en aurais mis ma main au feu qu’elle ne s’attendait pas à ce que ça vienne de moi. Mais bon, semble-t-il que j’étais capable de m’amuser, moi aussi. J’étais humaine, ne l’oubliez pas. « Bonne question… J’ai jamais essayé. Attend un peu. » Et comme je me doutais, elle fit une, puis deux tentatives qui échouèrent l’une après l’autre. Remarquez, le spectacle qu’elle offrait valait néanmoins le détour. Qu’est-ce que les gens à la régie devaient s’amuser à rire de ses prouesses. Moi en tout cas, ça m’arracha l’image même d’un léger sourire. « Ah bah voilà. On ne peut pas être doué dans tout ! » Non, effectivement. « Essaie donc toi ? Je veux voir si tu es capable. Mais je crois que c’est impossible ! » « Oh, tu crois ? » Si je lui avais posé cette question, ce n’était pas tout à fait innocent. Je me doutais bien qu’elle me retournait le défi, et aussi bien que ce soit sur une matière dans laquelle j’étais apte à réussir. Relevant la manche du cardigan que je portais, je plaçais mon coude à proximité de ma bouche, puis m’aidant de mon autre bras, je forçais le rapprochement. Le reste du chemin, ma langue s’en chargea. Et voilà. Pas si difficile que ça en avait l’air. « Trop facile. » Bon, j’étais hyper flexible aussi, et une blessure à l’épaule datant de mon enfance rendant les choses plus simples, mais chut, elle n’avait pas besoin de savoir. Je venais de faire le pitre devant des milliers d’auditeurs, ça devait lui suffire, non ? Comment envoyer valser sa fierté en deux minutes, top chrono. Hm.

« Oh, tu crois ? » Bah oui, c’était connu après tout, que c’était vraiment très difficile de toucher son coude avec sa langue. Je n’avais jamais vu quelqu’un réussir à le faire de mes propres yeux. C’est pourquoi je regardai attentivement Evey, espérant presque qu’elle n’allait pas y arriver. Moi mauvaise perdante ? Pas du tout. Ok, juste un peu. Déception. Elle avait réussit. Je plissai le nez avant de lui sourire pleine d’admiration. C’était tout de même un exploit. « Trop facile. » Fallait pas exagérer tout de même, ce n’était pas si facile. Mais bon, j’avoue qu’elle n’avait eu l’air d’avoir trop de difficulté à y arriver. « Bravo ! C’est la première fois que je vois quelqu’un y arriver ! » dis-je avec enthousiasme. C’est quoi, cette fille est parfaite ? Je savais que je ne devais me montrer jalouse face à elle, mais je n’y arrivais tout simplement pas. C’est un bien vilain défaut, la jalousie. Le pire, c’est que je n’ai jamais été de ses filles possessives qui ne blairent aucunes filles. La preuve, j’ai tout de même sortie durant plus d’un an avec un mec qui devait surement me tromper tous les week-ends. Mouais, je ne me vantais pas non plus d’être aussi faible. Bref, je devais arrêter de me mettre en compétition avec Evey. Ça ne donnait absolument rien. « T’as d’autres talents cachés ?! » Histoire, que je me sente encore plus minable à ses côtés. « Pour ma part, c’était mon seul et unique ! » ajoutais-je en lâchant un petit rire, baissant les yeux.

« Bravo ! C’est la première fois que je vois quelqu’un y arriver ! » Un léger sourire, mi-fier, mi-satisfait, apparu sur mes lèvres tendues. Esther semblait vraiment éblouie par ma performance, vu l’entrain donc elle faisait preuve pour me féliciter de ma si jolie pitrerie. Peut-être parce qu’elle-même n’y était point arrivée. Je l’avais donc impressionnée, et ça me faisait une jolie fleur. Être unique en son genre, ça avait quelques avantages, hein. « T’as d’autres talents cachés ?! Pour ma part, c’était mon seul et unique ! » Je lève légèrement les yeux au ciel, posant mon menton dans le creux de ma main, dont le coude repose tout contre mes genoux. Si j’ai d’autres talents cachés, bonne question. En fait, je n’y ai jamais vraiment songé. Mes talents, ceux qui me sont connus, je les exploite du mieux que je le peux. « Je chante, mais c’est pas vraiment un secret… j’en ai fait mon métier, alors forcément. » affirmais-je à son attention, toujours plongé dans mes réflexions. Ma voix, mon précieux joyau. Impossible de passer à côté. « Et j’suis quand même douée en danse, mais ce n’est en rien un talent. Disons plutôt une bonne dizaine d’années de pratique. » Et voilà, je pense que j’avais fait le tour de la question. Reposant mon regard sur la jeune fille, je m’interroge. « Tu dois surement être douée pour quelque chose. » Il y a bien un domaine où l’on performe toujours mieux qu’un autre. Pour certains chanceux, c’était parfois bien plus. Mais ils étaient rares, ces touche-à-tout talentueux. Je n’en avais connu qu’un – que j’avais oh combien jalousée – avec qui j’étais sorti quelque temps. Sa tête enflée m’avait bien vite fait descendre de mon petit nuage.