Faire comme les autres était un concept totalement étranger à Jackson. Lui, il aimait la plupart du temps faire l'inverse de ce que faisaient les autres, justement. Peut être par simple esprit de contradiction, ou parce que c'était simplement un con. Allez savoir. Quoi qu'il en soit, il est vrai qu'il se plaisait régulièrement à ne rien faire comme ses contemporains. Grimper un escalator à contre sens - c'est dur mais on en ressort particulièrement fier, à condition de ne pas avoir raté son coup -, ne pas dormir la nuit - bon ça, c'était surtout la faute de ses insomnies - ou même porter des tee-shirts en plein hiver. Ça, c'était le genre de choses qu'il faisait bien souvent. Est-ce que ça faisait de lui un type bizarre pour autant ? Sans doute. Mais il s'en fichait pas mal, à vrai dire. Ainsi donc, tout allait bien. Et aujourd'hui, Jackson se trouvait dans ce spacieux parc, à une heure à laquelle toute personne dite normale pionçait très certainement. Il était tôt. Très tôt. Sans doute trop tôt pour se balader dans un parc. Et pourtant, c'est ce qu'il faisait. Toujours cette manie de ne rien faire comme les autres, décidément. Incorrigible, ce Jackson. Finalement, après quelques minutes de marche intensive - ou comment dire qu'en fait, il glandait - le grand blond s'adossa à un arbre. Cette tranquillité était tout à fait plaisante. Mais alors qu'il ferma les yeux un court instant, il put entendre quelques pas derrière lui. Sans réfléchir, il tendit le bras pour empoigner la personne qui passa tout près de l'arbre, et ... c'était Gabrielle. Oups. Bien évidemment, il s'empressa de la lâcher. Imaginez un peu que Syssoï ne dorme pas non plus, hein. C'était clairement pas la semaine pour mourir. « Pardon » fit-il alors, admettant que c'était une approche plutôt surprenante. « Tu ne dors pas ? » la questionna-t-il ensuite. Question conne, pour le coup. Parce qu'à moins d'être face à une somnambule ou à un sosie plutôt ressemblant, Gabrielle ne dormait pas, non.

La belle se relève rapidement, la respiration haletante, le souffle court, la peau brûlante, elle vient de faire un cauchemar. Mais genre un cauchemar violent, et sanglant, un truc qui lui fichait la chair de poule, elle frissonne. Elle jette un coup d'oeil à Syssoï, paisiblement endormi, et pense à s'extirper du lit, elle bouge lentement, pas de gestes brusques qui pourraient le réveiller d'un coup. Elle pose un pied par terre, puis deux, et se soulège, elle le regarde, il ne bouge pas, tant mieux. La rousse enfile vite fait son jean qui traine sur le sol, ainsi qu'un haut de Syssoï il ne lui en voudra pas hein, et puis, elle l'aime bien ce haut. Elle prend une de ses vestes en coton et l'enfile parce qu'elle trouve qu'il fait un peu froid ici. Elle sort de la chambre, descend les escaliers avec une certaine prudence, il y a pas un chat, c'est presque flippant, elle peut pas rester toute seule dans la maison endormie, faut qu'elle sorte, au moins, y aura le bruit du vent pour la rassurer, c'est déjà cela. C'est donc ce qu'elle fait, Gabrielle traverse le parc, d'un pas lent, regardant autour d'elle, en fait, elle flippe quand même, c'est naze mais c'est comme ça. La rousse passe près d'un arbre lorsqu'un bras l'attire, okay, là, elle peut crier, puis elle se rend compte que c'est Jackson. Elle lui assème un coup sur le torse. « T'es un grand malade tu sais. » répond t-elle, furieuse d'avoir eu peur. « Tu ne dors pas ? » Hm hm, ça ne s'arrange pas. La rouquine se marre. « Je dois absolument répondre à cette question ? » lui demande t-elle un sourire aux lèvres.

Un de ces quatre, la paranoïa maladive de Jackson lui causera de gros problèmes. Pour preuve, il aura suffit de quelques bruits de pas pour qu'immédiatement il s'imagine que quelqu'un déboulerait de derrière cet arbre pour l'égorger sauvagement. Alors qu'en fait, ça n'était que Gabrielle. Mais pour le coup, il s'était empressé de l'empoigner. Erreur. Automatiquement, il relâcha cette emprise maladroite et s'assura qu'aucun témoin n'avait vu la scène. Il ne s'était d'ailleurs rien passé. Ouais voilà, rien du tout. Quoi qu'il en soit, Gabrielle n'apprécia visiblement pas ce contact, puisqu'elle lui assena immédiatement un coup sur le torse. Aie. « Ouais, je sais. » Lui, un grand malade ? Sans blague. Si il le savait ? Bien sûr que oui. Bon, Jackson pouvait visiblement se rassurer en se disant que Gabrielle aurait pu le prendre bien plus mal. Une tape sur le torse, c'était franchement pas grand chose, qu'on se le dise. Il avait connu pire, en tout cas. Par la suite, la jolie rousse chercha à savoir si il était obligatoire qu'elle réponse à sa question. « Bien sûr ... que non » fit-il doucement. Bah non, puisqu'elle ne dormait apparemment pas, il n'était effectivement pas utile qu'elle prenne la peine de le lui dire elle même. Bref. Jackson décolla alors son dos du pauvre arbre et fit quelques pas en avant, avant de se tourner vers Gabrielle. « T'es pas très rancunière, en fait » exprima-t-il d'une voix calme et posée. « Parce que je n'ai pas toujours été très honnête avec toi » reprit-il. Là, il faisait indirectement référence au secret de la belle. Et puis, c'était plutôt véridique, pour le coup. Loin de lui l'envie de remettre ça sur la table, parce qu'il n'en avait clairement pas besoin en ce moment. Mais bon, c'était aussi une manière comme une autre de lancer une véritable conversation. Peut être bien qu'elle changerait radicalement de sujet d'ici une ou deux minutes, mais qu'importe tant qu'il pouvait discuter avec elle.

Un grand malade celui-là, elle avait presque eu mal à poitrine pendant une seconde, elle plaque sa main sur sa poitrine, avant d'inspirer lentement, elle finit par lui donner un coup, bon, Gabrielle à la force d'une brindille, on ne lui en veut pas. Finalement Jackson lui dit qu'elle n'est pas obligée de répondre, c'est mieux, parce que bon ... la réponse est évidente! C'est assea ridicule. « T'es pas très rancunière, en fait » Elle arque un sourcil, pas sûre de bien comprendre où Jackson veut en venir en disant cela. Cela lui avance à quoi ? Hein ? « Parce que je n'ai pas toujours été très honnête avec toi » Gabrielle sourit. « Moi je l'ai été avec toi. » C'est le plus important, elle ne lui avait jamais menti, en lui disant qu'il compte pour elle, et pleins d'autrechose. « Je peux pas t'en vouloir toute ma vie pour ça, c'est ridicule. » murmure t-elle lentement en frisonnant, se mains se mettent à frictionner ses bras, pour éviter de mourir gelée, elle s'active. « C'est surement notre dernière semaine. » annonce t-elle fataliste, en plongeant son regard clair dans celui de Jackson. Elle est réaliste, enfin, elle essaye de l'être, là est toute la nuance. Suivait-il sa logique ? Ils ne leur restaient plus beaucoup de temps ensemble, elle ne veut pas passer son temps à lui en vouloir, elle n'en n'a pas envie, elle n'en n'a pas la force tout simplement. Elle ne peut pas, ce n'est pas son caractère, elle n'est absolument pas rancunière. « Soyons lucides, on se verra pas après. » conclue t-elle, vaguement triste en haussant les épaules. C'était surement ce que voulait Jackson, c'était surement mieux pour lui, non ? Gabrielle n'en sait rien en fait, elle se demande ce qu'il veut au fond. « Tu penses que tu n'as pas le droit au bonheur parce que ta famille est maudite ? » lui demande t-elle soudainement en passant l'une de ses mains dans sa crinière rousse, en attendant qu'il daigne lui répondre.

D'accord, Jackson ne lui referait plus jamais un coup pareil. Parce qu'à en juger par la réaction de Gabrielle, il venait de lui foutre une sacrée trouille. Pour autant, ça l'amusait légèrement. Sans doute n'était-ce pas très sympathique de rire intérieurement de ce genre de choses, mais qu'importe. Et puis, la petite tape qu'elle lui donna sur le torse n'arrangea par les choses. C'est à peine si il l'avait sentie celle-là, d'ailleurs. Bref. Par la suite, Jackson insinua que Gabrielle n'était pas très rancunière. Hm, dit comme ça, ça n'avait pas tellement de sens. Mais ce qui suivit en donna un minimum. Ainsi donc, elle n'était pas rancunière parce que Jackson n'avait pas toujours été très honnête avec elle. Donc, il faisait référence au secret de la jolie rousse. Logique. Celle-ci répondit alors, lui assurant qu'elle avait toujours été honnête avec lui, elle. Un fin sourire naquit alors sur ses lèvres. « Je sais » fit-il alors. Soyons clairs, il avait longtemps douté de l'honnêteté de Gabrielle à son égard, parce qu'il avait beaucoup souffert de sa relation avec elle. Mais désormais, il était beaucoup plus zen face à tout cela, et il prenait conscience de certaines choses, comme du fait que la jolie rousse avait effectivement été la plus honnête possible avec lui. Gabrielle affirma ensuite ne pas pouvoir lui en vouloir toute sa vie, que cela serait d'ailleurs ridicule. « Sans doute » répondit-il alors, dans un haussement d'épaules. Puis, Gabrielle eut quelques paroles qui créèrent une petite douleur au niveau de son cœur. C'était surement leur dernière semaine, oui. C'était même certain. Constat plus douloureux, pour le coup. Car si Jackson s'était fait une raison et qu'il avait désormais intégré qu'il ne pourrait rien espéré d'un point de vue sentimental avec Gabrielle, il n'avait pas pour autant envie qu'elle sorte de sa vie. Comme elle le disait elle même, il était fort probable qu'ils ne se revoient jamais après. « Je préfère croire que ça n'est pas nécessairement impossible » fit-il alors. A ses yeux, peut être bien qu'un jour, ils se reverraient. Peut être par hasard, mais c'était déjà ça. On ne peut pas savoir, après tout. Gabrielle enchaina, évoquant à son tour le secret du grand blond. Là, Jackson se débarrassa de sa veste pour la poser sur les épaules de la jeune femme - qui grelottait depuis quelques minutes - puis il entreprit de lui répondre, aussi difficile sa question soit-elle. « Non, je pense que je n'ai pas le droit au bonheur parce que je ne le mérite pas. Le reste n'a pas tellement de rapport avec ça, disons. » Son regard se posa alors sur l'arbre qu'il venait de quitter. C'était un chêne, non ? Oh et puis, quelle importance, franchement ?