Voilà deux jours que l'aventure avait commencé, et je ne trouvais toujours pas de raisons valables à ma présence dans ce jeu. J'étais une nana plutôt ordinaire, quoi que plutôt froide et discrète, ne cherchant pas spécialement les emmerdes. Derrière ça, je n'étais pas une fille facile, je suis le genre de personnes qui dit les choses en face, peu importe ce qu'en penses les autres. Peut-être que c'est ce qui faisait la différence. L'opposition partielle entre mon physique et mon caractère a joué en ma faveur. Même si les trois quarts des habitants ne connaissent toujours pas mon nom, j'imagine que je n'ai pas été sélectionnée pour rien. Faut pas s'leurer, Cupidon n'est pas dénué de bon sens et c'est ce qu'il fait. Peu importe toute manière, j'étais à présent candidate à fakelover et des millions de téléspectateurs allaient me voir, tous les jours. Les caméras d'ailleurs présentent dans tous les recoins de chaque pièce me mettaient mal à l'aise. J'allais m'y faire, comme beaucoup de choses ici, mais en attendant, le temps d'adaptation était long, et je ne pouvais m'empêcher d'y jeter un coup d’œil régulièrement. Comme pour voir si elles n'avaient pas changé de place, par la force de la sainte vierge marie t'sais. Mais non, elles ne bougeait pas. Ce qui pouvait différer en revanche c'était le point rouge sur chacune d'entre elles. Il est tantôt allumé, tantôt éteint. Réflexion faîte, peu importe la couleur, je vais devoir apprendre à oublier ces engins. Aujourd'hui il faisait beau, bien meilleure qu'hier, et à s'exposer en plein soleil il faisait bien plus de trente degré. Je déconne pas. C'est pourquoi la plupart des candidats ont pris place à l'extérieur, à se faire dorer au soleil. Personnellement, j'en avais décidé autrement, pour changer. Et je devais surtout me méfier des premiers rayons de soleil. Ma peau relativement blanche pourrait vite devenir rougeâtre si vous voyez ce que je veux dire. Bien sûr que la crème existe, mais ça n'a pas fait ses preuves, même l'écran total ne demeure pas assez pour ma peau. Je prends donc soin de ma peau, et j'y vais doucement mais sûrement. Autrement dit, je m'expose rarement plus d'une heure en plein soleil. J'arrive donc dans le salon, et à ma grande surprise, je ne suis pas la seule à avoir opté pour le repos intérieur. Je prends place sur l'un des canapés, à côté de cette jeune rousse. Je suis plutôt de bonne humeur, je vais essayer de partager cet élan. «AJ c'est ça?» je m'excuse, tout comme elle j'imagine, je ne connais pas encore les prénoms. Mais je pense me souvenir du sien, qui m'avait questionné lors du prime.

Je sais pas pourquoi, mais ils ont tous décidé d'aller se griller au soleil dehors, ils sont malades ou quoi. Moi j'hésite, parce que j'ai une peau de rousse, laiteuse, et je rougis facilement, enfin je veux dire, je crame, parlons franchement, il me suffit d'une demi-heure et après sans crème j'attrappe un beau coup de soleil, et c'est assez douloureux. Enfin, j'ai une bonne résistance à la douleur, et c'est pas un pauvre coup de soleil qui va me gâcher mon aventure -j'en ai eu des tonnes- mais si je peux m'en passer, ça serait bien. J'ai donc renoncé à l'activité commune de la journée, bon, c'est pas comme si je manquais grand chose, parce que je ne vois pas l'interêt d'aller bronzer, je trouve que c'est une perte de temps, enfin, ce n'est que mon avis. J'erre donc, toute seule dans le salon, sans savoir quoi faire, je vais donc dans ma chambre et je fouille dans ma valise, et j'en ressors un feuillet, ouaip, c'est d'la poésie, un français-malgache, mais j'ai reussis à trouver la version hébreu, parce que sinon je suis pas sûre de pouvoir bien tout comprendre en français, enfin bref. Je redescends rapidement les marches, deux à deux, avant de retourner dans le salon, je me vautre sur le canapé, sauvagement, mais y a personne donc je m'en fiche. Je commence à lire les premières lignes, avant de me remettre en position assise, le droit bien droit, le regard concentré vers ces lignes poétiques, puis mon attention est soudain détournée par une petite blonde. Tiens, elle aussi, elle ne s'expose pas au soleil. Je me sens bien moins seule tout d'un coup. Elle s'assit à côté de moi, et tente pour mon prénom. Bravo, c'est ça, en même temps c'est pas bien difficile, c'est deux lettres à retenir aussi. « Exact. Et toi c'est Katell, si je ne me trompe pas. » je finis. C'est pas vraiment une question, car je suis sûre à 99, 99 % de son prénom. Aucun doute, ou presque.

Pour y passer la plupart de mon temps, je connais le salon dans les moindres détails. Je n'adhère pas spécialement à la décoration, ce n'est pas le style disons baroque qui me gêne, mais plutôt les éléments de décoration qui sont censés embellir la pièce comme les rideaux dorés, les chandeliers dorés, le lustre en cristal et j'en passe. C'était bien trop à mon goût, mais Cupidon souhaitait faire passer une ambiance sûrement féerique, c'est gagné. Je n'avais pas pour habitude de séjourner dans de tels lieux, et pourtant je ne vis pas dans un cagibi si vous voulez être rassurés. Je couche la plupart du temps chez mon père, dans sa villa dans un coin de la capitale irlandaise. Je vais pas vous mentir, je crois que ces dernières heures j'aurais préféré les passer chez moi, au côté de ma famille plutôt qu'entouré d'une trentaine d'inconnus avec qui j'ai même pas envie de discuter. Tu vois l'truc? Enfin, j'allais bien m'y faire, et j'avais de quoi m'occuper, comme la chasse au secret par exemple. En parlant de ça, j'imagine que ça n'allait pas être une mince affaire. AJ me rassure dans mes propos, c'est bien son nom. Je suis finalement peut-être pas si à la ramasse que je le pense. Je regarde la jeune femme, et je remarque qu'elle se démarque par sa couleur de cheveux qui n'est pas commune au sein du nid d'amour de Cupidon. J'ai aussi remarqué son accent quant à sa prononciation irlandaise, je suis mal placée pour critiquer, car j'ai moi-même un léger accent. Je le reconnais forcément, j'ai le même qu'elle. Je m'aventure donc dans quelques paroles françaises, histoire de voir si mes doutes se confirment. (en français) «c'est ça.» je lui souris et j'étudie sa réaction, je comprends que j'ai visé juste, elle est sûrement belle est bien d'origine française, quoi que, n'importe quel irlandais qui se respecte peut avoir quelques notions françaises... «je me doutais que cet accent cachait quelque chose. Tu as habité en France?» moi qui fait déjà des projets sur la commette. Je pose mes yeux à présent sur le livre qu'elle tient entre ses mains, je peine d'ici à lire le titre, à vrai dire, je ne suis pas très littéraire, mis à part des livres concernant le violon, je ne lis que très peu...

«c'est ça.» Je souris doucement. J'ai raison, il est quand même étrange son prénom, enfin, je ferai mieux de me taire, qui dire du mien ? Hm si ce n'est que c'est pas un prénom, mais juste deux lettres côte à côte. Je suis pas trop en mesure de parler donc, sur son nom. Elle me parle en français, je comprends, mais c'est pas tellement plus simple que l'anglais pour moi. J'suis même pas française à la base, je tiens à dire, je suis israëlle hein, pas française, enfin si, mais c'est bien trop compliqué en fait quand j'y pense. « Je savais pas que mon accent est aussi merdique. » je réplique en faisant la moue, un brin amusée -c'est un exploit- puis je me tourne un peu vers elle, et j'abandonne mon pauvre feuillet de poésie sur un côté du canapé, n'y faisait plus trop attention, mais je crois bien que j'ai froissé une feuille, malheureusement. «je me doutais que cet accent cachait quelque chose. Tu as habité en France?» A ce point ? Je parle mal à ce point ? Je plisse légèrement les yeux, puis je lui réponds. « Cela ne fait que quelques mois que je vis en France. » je déclare en haussant les épaules. Techniquement, elle n'a qu'à moitié raison. « Je viens de Tel-Aviv. » je réponds dans un murmure. Je ne sais pas trop pourquoi, mais le fait de le dire, ça m'écorche, les mots ont du mal à passer la barrière de mes lèvres. Peut-être parce que je regrette trop d'être partie de mon pays natal pour la France, ça doit être ça. Mais je me dis, pour relativiser, que les erreurs, ça forgent la vie. « Et toi, le chat, tu es d'où ? » je lui demande de ma voix rauque, soudainement, en penchant légèrement la tête vers elle. Faut dire que c'est la première fois que j'éprouve une once de curiosité pour quelqu'un, elle a bien de la chance cette petite faut croire, ou pas. Je me tate.

Avachie sur le canapé depuis bien dix minutes maintenant, je me relève doucement, afin de me redresser et être dans une position plus droite disons. J'ai le dos fragile, j'ai pas envie d'me payer une sciatique en plus de ça, quoi. J'ai l'habitude des douleurs dans le bas du dos, mais en suivant les conseils de mon médecin, ça s'améliorait de jour en jour. J'allais pas relâcher les efforts parce que je figurais dans une émission de télé réalité. «Je savais pas que mon accent est aussi merdique.» je crois que sa réponse l'amusa. Je ne pu m'empêcher de sourire à mon tour. Ben quoi? Elle n'était pas prise de tête, j'avais rien d'autres à faire que de l'écouter, alors c'est vrai qu'en temps normal je n'aurais pas été vers elle, et je serais sûrement partie m'isoler dans les chambres, mais fake lover n'avait rien de normal, et je ne cessais de me surprendre. «tu n'as pas un accent merdique, juste un accent.» je lui fais un clin d’œil et j'enchaîne. «je connais bien la France, je ne pouvais pas me tromper.» comme si je m'y connaissais aussi niveau accent? Pas spécialement, mais entendre parler quelqu'un irlandais alors qu'il a vécu en France auparavant est remarquable. Ça vaut aussi bien pour moi ce que je dis. Et encore, l'accent tellement peu prononcé d'Aj m'avait fait douter. «Cela ne fait que quelques mois que je vis en France.» je m'arrête sur cette dernière phrase. Soit j'ai vraiment du mal à comprendre, soit sa phrase n'est pas claire... j'opte pour le deuxième solution, forcément. «que tu vis en France? Ah donc ta famille et tes potes habitent en France?» je fronce les sourcils afin de lui faire comprendre que je suis réellement perdue. Finalement, cette situation me faire sourire, dans l'fond j'ai peut-être bien compris, elle est peut-être venue participer à l'émission en Irlande n'ayant jamais mis les pieds sur le territoire irlandais. Il faut s'attendre à tout par ici. «Je viens de Tel-Aviv.» d'accord, ma culture géographique n'est pas très développée mais j'ai une culture générale sur laquelle je peux compter et tel-aviv fait partie bien évidemment de cette dernière. Petite ville côtière d'Israël. «et pourquoi donc tu as atterri, ici en Irlande...» en Irlande ou en France, peu importe elle m'a comprise j'imagine, je veux évidemment la questionner sur ce fameux départ. J'ai bien cerné le malaise quand à sa ville natale, et justement, j'aimerais en savoir plus. Après tout, ici tout est tellement différent de la vraie vie si puis-je dire. Regardes par exemple, j'ai passé les deux tiers de la nuit dernière à parler à mon partenaire de tout et de rien, alors que je le connais depuis à peine deux jours. C'est quand même un exploit pour une personne comme moi, qui habituellement parle du beau temps et de la pluie qu'à des personnes classées comme «amies». «Et toi, le chat, tu es d'où ?» le chat. Je rigole doucement. La dérision d'cette fille me plaît pas mal. J'vais vraiment finir par croire que j'ai des gênes du chat qui ont muté... «je viens de la Bretagne, coté ouest de la France si tu préfères. Mais ça fait plus de dix ans que je suis en Irlande.» j'ai jamais dévoilé autant de choses à une parfaite inconnue. J'hésite entre m'enfuir en courant ou... prendre une grande respiration et arrêter de me tourmenter de question. J'opte pour la deuxième option. À mes risques et périls.

Spoiler:

«tu n'as pas un accent merdique, juste un accent.» Je concède et j'incline simplement la tête, c'est une réponse comme une autre à son clin d'oeil. Je fais ce que je peux. Je crois que plus je parle, plus je suis entrain de perdre le chat. Je suppose qu'elle essaye mentalement de tracer mon chemin, et moi je lui parle de Tel-Aviv et de la France, je vous jure que mon but n'est pas de l'envoyer dans le décor avec mes explications un peu foireuses, je suis pas vraiment douée. «que tu vis en France? Ah donc ta famille et tes potes habitent en France?» Ok. Là, ça me fait clairement sourire, je l'ai paumée.« Je pense qu'on a des petits problèmes de compréhension toi et moi. » dis-je en esquissant un léger sourire. Parce que je crois qu'on s'embrouille avec les pays, et les villes. Je le souviens même pas de sa question de départ en plus. « Attends, je vais te résumer. » dis-je en accompagnant le tout d'un petit mouvement de main, pour lui signifier d'arrêter pour le moment ces questions, je m'en sors pas sinon. « Ma famille est à Tel Aviv, et moi je suis en France, je suis venue en Irlande juste pour les besoins du jeu. » je lui explique, en espérant avoir été assez claire sur le coup. J'en suis pas si sûre. « Tu veux dire en France ? C'est ça ? J'ai suivis un type, et j'avais envie de voyager sur le moment. » je réponds vaguement, sans trop rentrer dans les détails, parce que c'est assez ennuyant, et puis, j'ai pas envie d'étaler ma vie devant une parfaite inconnue, je n'aime pas parler de moi, et ce, même avec mes 'proches' et ils sont peu nombreux. «je viens de la Bretagne, coté ouest de la France si tu préfères. Mais ça fait plus de dix ans que je suis en Irlande.» Je note cette information dans un coin de ma tête, et je me tais. J'étire mes bras au dessus de ma tête, et je m'étire longuement, redressant mon dos, et mon cou, qui craque par la même occasion, et je me détends soudainement. « Et pourquoi tu es venue ici, dans le jeu ? » lui demandais-je. Parce que je trouve qu'elle n'a pas trop le profil, tout comme moi aussi, la prod aurait du normalement peupler le nid de personne comme Sasha, pétillante, bavarde, toujours de bonne humeur. Ca contraste vachement avec Katell, et moi aussi.

Effectivement, le conversation entre AJ et moi avait l'air plus que compliquée, et pourtant, nous étions pas en train de débattre sur une grande cause qui méritait réflexion. À vrai dire, je pense tout simplement que malgré qu'on se tienne compagnie à cet instant précis, on essayait pas plus que ça de s'intéresser à l'une ou à l'autre. Honnêtement pour ma part ce n'est pas fait exprès... je veux dire par là que je n'arrive pas à m'y intéresser. C'est d'ailleurs pour ça que je reste la plupart du temps en retrait, à observer les autres. Je n'aime pas spécialement la compagnie et encore moins la conversation. Mais ici je prends sur moi. Je sais très bien que si j'ouvre pas ma gueule ou si je reste dans mon coin je vais le payer... plus ou moins cher, mais je le payerais pas une élimination très certainement. Ce n'est pas ce que j'espérais. J'avais beau me plaindre, j'avais ce but bien précis : arriver le plus loin possible, et ce n'est pas en étant nominée la première semaine que j'allais l'atteindre. Donc comme qui dirais-je, je faisais des efforts. Efforts d'intégration particulièrement. J'écoute donc AJ me résumer sa situation. Bizarrement je l'écoutais.. sérieusement. Ce n'était pas sur joué (toute manière, je crois que là-encore ça se verrait) et cette nana assise non loin de moi m'intriguait, je ressentais comme un peu de moi en elle.. flippant non? Pour elle surtout. «envie de trouver la personne idéale? ou tout simplement besoin de fric?» c'était sorti tellement naturellement. je l'avoue, un brin d'ironie apparaît dans la première partie de ma phrase. En même temps, ça me questionne. Toute sa famille est à tel aviv, elle est venue en France et maintenant vient en Irlande pour seulement le jeu... what the fuck? Faut pas oublier que j'étais chargée de trouver les secrets comme tout le monde ici. Aucun détail n'était à laisser au hasard. «Tu veux dire en France ? C'est ça ? J'ai suivis un type, et j'avais envie de voyager sur le moment.» un type comme elle dit? Aïe à mon avis c'est plus son mec. Ou alors elle parle vraiment de lui comme un déchet... tu m'diras, pourquoi pas. J'hausse les épaules, et me contente de faire un sourire compatissant. La meuf je la connais pas, mais j'arrive à compatir, tu connais? Je me la joue un peu à inspecteur Derrick, c'est pourquoi je vais arrêter mes questions. «Et pourquoi tu es venue ici, dans le jeu ?» après ce vide, il faut le dire, elle me relance sur autre chose. Ma raison d'être venue ici? Bonne question. «je me pose encore la question.» je n'avais aucune réponse, j'en avais pas la moindre idée... pourtant ce n'était pas faute de chercher une raison. «entre autre pour me tester. C'est un défi personnel.» pas faux. Je marque un temps d'arrêt. J'imagine que ma réponse n'est pas satisfaisante, elle s'attendait sûrement à mieux de ma part, mais je suis pas une nana qui croit en l'amour. Alors fake lover ou non, du pareil au même.. «et toi, au juste?» j'étais à deux doigts de rajouter "un soucis avec ce type?" mais cette fois-ci je l'ai fermée. putain j'ai soif. J'ai jamais parlé autant en moins de trente minutes.

Ouaip, on a des problèmes de communication elle et moi, je pense. Bref, on passe, je lui explique, j'ai fais dans le simple, sinon je peux lui sevir mon language primitif, mais bon, je fais des efforts quand même. Je note que Katell n'est pas trop bavarde, moi non plus. Je note qu'elle tente de m'écouter, moi aussi, je loupe aucun de ses mots. Pour le peu qu'elle en sort. «entre autre pour me tester. C'est un défi personnel.» Je souris. Elle sait pas trop ce qu'elle fait ici, en fait, ça ne m'étonne pas tellement au fond. « Et là, c'est un défi de m'parler ? » je lui demande, simplement. Parce que pour moi, lui faire la conversation, aussi banale qu'elle pouvait l'être, c'est un défi. Déjà le fait qu'elle reste, c'est pas mal. J'ai une certaine tendance à faire fuir les gens, je suis un peu trop brutale, on m'a déjà dis que je suis un peu crue, pour une fille -mais ça, je compte pas changer-, assez tacite. J'ai du mal à m'entendre avec 95 pourcents de la plupart des gens, et je ne cotoye que rarement la gente féminine, je m'entends pa strop avec les filles, allez savoir pourquoi. Surement parce que je bosse, je vis, et je n'ai que des amis mecs, c'est logique. C'est tellement rare que je parle à une fille, je m'étonne moi même, et puis là, en fait, j'ai pas le choix. «et toi, au juste?» Sa voix m'arrache de mes pensées, soudainement. Mes yeux fixés sur le sol, davant moi, se relèvent pour se poser sur elle. « On m'a mise au défi de venir ici, mon ego et ma dignité étant en jeu, je pouvais pas refuser. » je lance doucement. Oui, on m'avait demandé de venir ici, pour voir si je ne pétais pas un câble, si je savais rester moi-même dans un jeu tel que celui-ci. Faut dire que j'avais passé mon temps à maudire les candidats de la saison dernière, par dessus l'épaule de mon colloc', quand il se mettait sur la chaine, et du coup, il m'avait mise au défi de venir ici. Et moi, dès fois, je me demande comment j'ai pû être aussi conne d'accepter. « Mais aussi pour le fric. J'en ai besoin. » j'annonce aussi en croisant les jambes, je passe une main dans ma tignasse rousse, j'enroule l'une de mes mèches autour de mon index, quelques secondes seulement, avant de la reposer sur l'un de mes genoux.

«Et là, c'est un défi de m'parler ?» cette réflexion me fit sourire. Pas vraiment un défi, c'est pas le terme. Mais j'ai comme l'impression que ma camarade me cernait plutôt bien. D'un autre côté, ça ne faisait pas d'elle une psychanalyste, je n'étais pas des plus compliqués... ni même dans cette maison. «J'aurais pas dit ça. Plutôt inhabituel et impensable, mais à la fois, prends le comme tu veux.» pas vrai belette? Je finis tout de même par lui lancer un regard plutôt compatissant. Je ne la connaissais pratiquement pas, mais c'était l'une des rares personnes ici qui ne me faisaient pas chier. Étonnant, tout de même... perturbant même. Je marque un temps d'arrêt, pendant que cette dernière enchaîne pour m'expliquer la raison de sa venue. Sa réponse ne m'étonne pas. J'imagine que si elle m'aurait dit qu'elle était là pour se montrer, se mettre en valeur et chopper des mecs je ne l'aurais pas cru. Dans le fond, on venait toutes les deux ici pour relever un défi... le mien personnel, le sien on lui a donné. «ça nous fait presque un point commun.» presque seulement oui. Je l'écoute ensuite m'avouer qu'elle a besoin de fric et j'en profite pour filer dans la cuisine me chercher quelque chose à boire. Avec cette chaleur je voulais quelque chose de rafraîchissant, une boisson fraîche si tu préfères. J'ouvre alors le frigo et commence à regarder toutes les bouteilles qui traînaient un peu partout. L'avantage c'est qu'il y avait le choix. Il y avait bien une dizaine de sodas différents, de l'eau plate et gazeuse et même du vin. Je fais mine de réfléchir. Le vin frais? Pas tellement, ça se boit plutôt à température ambiante. Dans le fond, j'en avais bien envie. Je ferme le frigo et par hasard, je remarque qu'il reste un fond de bouteille sur le plan de travail. Je l'approche de mon nez pour vérifier -vous savez y'a des malins ici, qui ne se gêneraient pas pour y rajouter quelques ingrédients non mentionnés, tu connais? Mais l'idée n'était pas encore passée par ici, le bordeaux que je tenais entre les mains n'était pas faussé. Je sors un verre ballon et je le remplis de moitié. Il reste assez pour en remplir un deuxième, maniaque dans l'âme, je déteste laisser des bouteilles traîner avec un fond. Alors gentiment je demande à AJ «j'te sers un verre?» je la regarde, elle m'a entendu, en même temps, nous étions que deux dans cette grande pièce et même si j'avais pas crié, il était totalement possible de se parler. J'attends même pas sa réponse que je sors un autre verre et le rempli à son tour. Je me replace dans le canapé, lui mettant son verre ballon à sa hauteur. Elle en veut pas? Tant pis, au moins la bouteille est vide. Par la même occasion, je sors une clope que j'allume. «besoin d'argent donc? Tu fais quoi en dehors de l'émission?»

Je l'observe filer à la cuisine, tant mieux, ça me laisse un moment de répit, où je peux souffler un peu, ça fait du bien. J'entends les bruits de ses pas qui s'éloignent, je soupire. Elle met du temps, je sais pas pourquoi mais je l'imagine, le frigo grand ouvert, hésitant entre tout ce choix. J'ai jamais compris les gens qui laissent toujours le frigo ouvert, comme s'ils attendaient que des aliments apparaissent tous seuls, ou ceux qui hésitent des heures devant le frigo, avant de ne rien prendre finalement. «j'te sers un verre?» me demande t-elle. Pourquoi pas. « Je veux bien. Merci. » je lui réponds, en haussant légèrement le ton, pour qu'elle m'entend correctement, même si la pièce est vide, et j'imagine que la cuisine l'est aussi. En fait, je crois qu'on est vraiment les seules à ne pas être sorties cette après-midi, étrange. Elle agite un verre rond devant moi, je m'en empare immédiatement, esquissant la moitié d'un sourire, pour la remercier, silencieusement. La blondinette allume une clope. Je bois d'abord ce qu'elle m'a servi, j'envisage de faire de même dans quelques minutes. «besoin d'argent donc? Tu fais quoi en dehors de l'émission?» me demande t-elle. « Prof de self défense. » j'annonce. Ok, je sais, c'est pas le top, enfin, c'est ce qu'on me dit souvent, mais moi ça me plait. Et puis, je me vois mal faire autrechose ? J'ai arrêté mes études tôt, dès la majorité en fait, et j'ai fais l'armée, donc j'ai un peu rien sur mon cv pour avoir le culot de prétendre pouvoir faire autrechose. Je me voile pas la face, c'est déjà ça hein. « Et toi ? » lui retournais-je, parce que ce c'est bien ce qu'il faut faire non ? J'en sais trop rien. Je soulève mes fesses su canapé, avant de tirer mon paquet à moitié écrasé dans ma poche arrière de jean. Elle m'a donné envie, je suis faible face à la cigarette, je sais. Je coince la cigarette entre mes lèvres, y a un peu de tabac qui essaye de se faire la malle, je tasse mieux le bout de ma cigarette. Je lui subtilise délicatement son briquet, pour allumer ma clope, et je le lui rends. Et, on a pas le droit de fumer à l'intérieur non ? Bon, c'est trop tard maintenant.