On connait tous quelqu'un qui excelle en matière de musique, qui joue d'un instrument tel un virtuose et qui nous fait rager de n'avoir pas autant de talent dans ce domaine. Et bien, sachez que Tweedy ... n'était absolument pas ce genre de personnes. Non, à la rigueur, elle était plutôt de ceux qui rageaient, justement. Pourtant, la jeune femme était supposée s'y connaitre un minimum, ou ne serait-ce que posséder un certain talent musical, puisque son père était un pianiste de talent. Ce dernier avant bien tenté d'apprendre à Tweedy tout ce qu'il savait en matière de musique, mais la jeune femme s'était rapidement destinée à faire autre chose de ses dix doigts, si vous voulez savoir. Cependant, elle en venait petit à petit à regretter de ne pas avoir davantage profité des leçons que lui avait gentiment données son père. Aujourd'hui, elle était pourvue d'un talent relatif en matière de piano, ce qui était certes mieux que rien, mais qui la contrariait légèrement tout de même. Mais soit, c'était ainsi. Et croyez bien que Tweedy n'irait pas embêter son paternel pour se remettre sérieusement au piano, hein. Ah non, le pauvre, elle le laissait tranquille. Mais si Tweedy n'était pas une joueuse remarquable, elle était tout de même capable de jouer certains airs - assez basiques disons - et c'était d'ailleurs pour cette raison qu'elle se rendait quelques fois dans cette salle de musique, où se trouvait justement un piano. Elle s'y asseyait, comme aujourd'hui, pour y pianoter légèrement. Mais tandis qu'elle s'essayait à un MORCEAU qu'elle affectionnait beaucoup - c'était ni plus ni moins sa chanson préférée qu'elle adaptait au piano - la jeune femme fut surprise par la porte qui s'ouvrit brutalement, laissant entrer Andreas. Elle en perdit le tempo, mais surtout sa concentration. Pour autant, elle garda son calme et ne manqua pas de s'en amuser. As usual. « Tu m'as fait foirer la fin de mon morceau, Andreas. Tu dois te faire pardonner. Viens ici » fit-elle alors, souriant adorablement. Avouez qu'elle était de bonne nature, la Tweedy.

Je n'avais pas forcément de très bons rapports avec la musique. Disons que ça n'avait rien d'une passion, rien d'un hobbie, mais juste quelque chose dont je supportais et tolérais l'écoute. Un peu comme les braillements de mes camarades, en somme. Je n'avais par ailleurs pas eu la moindre intention de me rendre dans cette salle de musique en ce début d'après-midi, mais le destin en avait décidé autrement. Hum, une mélodie en fait, pour être tout à fait exact. Tandis que je passais devant la porte close de la dite salle, un morceau vraisemblablement joué au piano m'interpella quelque peu : malgré le fait que c'était vraiment très mal joué, je pensais en reconnaitre l'air initial. C'était les Beatles non ? Bah, ça aurait presque pu être beau en fait. Presque. Curieux de connaitre l'identité de ce musicien en devenir, j'ouvris la porte sans me douter un instant que je ferais perdre tous ses moyens à ce dernier. Tweedy en l'occurrence. Elle donnait dans la musique, la demoiselle ? Mais elle était sur tous les fronts en fait. « Tu m'as fait foirer la fin de mon morceau, Andreas. Tu dois te faire pardonner. Viens ici » Je m'approchai alors d'elle, arborant un sourire satisfait. « J'ai rien fait foirer du tout. On peut même dire qu'j'ai mis fin à un massacre musical ; que j'ai fait ma bonne action du jour quoi. » Car autant le lui avouer tout de suite, elle n'avait rien d'un Mozart ou d'un Bach. « Bon... comment puis-je me faire pardonner gente dame ? » Qu'attendait-elle de moi au juste ? Que je prenne place à ses côtés au piano, peut-être ? Dans le doute je décidai de rester debout en attente d'une réponse de sa part.

Let it be. La chanson préférée de Tweedy. Mais pas dans le sens où elle l'appréciait simplement beaucoup, hein. Non, plutôt dans le sens où elle voudrait se marier et être enterrée sur cette musique. Déjà qu'à la base, les Beatles étaient son groupe fétiche - parmi quelques autres, il est vrai - cette chanson-ci avait toujours eu le don de la transporter dans un autre monde. Ouais, à ce point là. Et donc, pas étonnant que la petite brune s'essaye à la reproduire au piano, d'une manière plutôt maladroite et hasardeuse il est vrai. Mais tout de même, qui ne pourrait pas reconnaitre qu'on aurait pu trouver pire dans le genre, qu'il était possible de massacrer bien plus que ça l'air original ? Car si Tweedy n'était effectivement pas la joueuse de piano la plus talentueuse au monde, elle estimait tout de même avoir suffisamment de bases pour ne pas être comparée à une maudite petite joueuse de quatre ans, hein. Bref. Son camarade Andreas venait quant à lui de pénétrer dans la salle de musique, et n'avait pas manqué de faire fortement sursauter la jeune femme, qui en perdit son tempo et ne put continuer de jouer de la sorte. Alors, naturellement, Tweedy s'arrêta, portant son regard et donc son attention sur le jeune homme. Ouh le vilain, il osait prétendre qu'il n'avait rien fait foirer, et même, qu'il avait mis fin à un massacre musical, ni plus ni moins. Outch, ça fait mal ça. Une bonne action, qu'il disait. Ben voyons. Tweedy fronça doucement les sourcils, le dévisageant sans même parvenir à adopter une mine dure. Sans doute en était-elle bien incapable. Elle se mit alors à sourire légèrement. Ça, par contre, elle savait faire. « Je te trouve bien impertinent pour quelqu'un qui vient de ruiner des heeeeeures de travail » fit la jeune femme, en instant bien sur l'avant-avant dernier mot. Ouais, des heures. N'importe quoi, hein. Mais qu'importe, peut être parviendrait-elle à le faire légèrement culpabiliser de la sorte. Rien ne lui coûtait d'essayer, hein. En tout cas, Andreas se devait maintenant de se faire pardonner. Comment ? Et bien ... « Alors ... Premièrement, tu t'assois à coté de moi. Deuxièmement, tu prends cette fiche. Troisièmement, tu t'échauffes la voix. Quatrièmement, tu attends que je me mette à jouer. Cinquièmement, tu chantes Let it be en suivant le tempo. » Et vu qu'elle se doutait qu'il lui faudrait maintenant un bon argument ... « Tu me dois bien ça, quand même. » Voilà. Là, il ne pouvait pas le lui refuser, à moins d'être un monstre sans cœur. Booouh.

Ma culture musicale n'était pas bien grandiose, qu'on se le dise. À vrai dire je donnais plus dans la musique allemande que dans le rock anglais, style Beatles. En clair j'étais sans doute le seul en ces lieux étant capable de citer les noms de chanteurs allemands comme Mark Medlock ou de chanteuses allemandes comme Lena Meyer-Landrut. Aussi, aux yeux de tous, la musique allemande avait connu une fin tragique lors de l'apparition des très regrettés Tokio Hotel. Hum. Non mais je ne détestais pas pour autant les Beatles, hein, seulement la reprise que venait de faire Tweedy au piano de leur célèbre titre Let it be ne laissait pas forcément rêveur. Même, je me réjouissais sérieusement de l'avoir interrompue car cela avait été fort douloureux pour mes tympans. Les pauvres ne méritaient pas de souffrir autant. « Je te trouve bien impertinent pour quelqu'un qui vient de ruiner des heeeeeures de travail » Oui bien sur, des heures... Elle était sans doute assise là depuis une vingtaine de minutes, et elle osait appeler ça du "travail". Elle ne voulait pas une médaille non plus, la petite ? « Foutaises ! » m'écriais-je alors, prenant un air faussement outré comme si les paroles de la demoiselle avaient eu une quelconque incidence sur ma personne. En fait je me foutais bien du fait qu'elle ait foiré son morceau - c'était elle qui s'en trouvait ridiculisée, pas moi. Et du coup, que pouvais-je bien entreprendre pour me faire pardonner par la belle ? « Alors ... Premièrement, tu t'assois à coté de moi. Deuxièmement, tu prends cette fiche. Troisièmement, tu t'échauffes la voix. Quatrièmement, tu attends que je me mette à jouer. Cinquièmement, tu chantes Let it be en suivant le tempo. » Wopopop ! Cela ressemblait fortement à une série d'ordres, non ? Mais pour qui me prenait-elle ? Un type soumis ? « Tu me dois bien ça, quand même. » Oui bon, elle en rajoutait un peu à mon goût. Néanmoins je n'étais pas disposé à rechigner. Par chance, j'étais de bon poil en ce début d'après-midi. « Wow, n'en profite pas non plus hein. Bon. » Je pris finalement place à côté d'elle, histoire de lui redonner le sourire. Je me saisis alors de la dite fiche, m'éclaircis ensuite la voix puis attendis que la musique ne démarre. La mélodie se fit alors entendre. Attention, non seulement je chantais incroyablement faux, mais en plus la demoiselle allait avoir l'occasion de se rendre compte que l'anglais n'était pas forcément la langue que je maîtrisais le mieux, du moins lorsqu'il s'agissait de le chanter. Sans parler de mon accent allemand à couper au couteau... « Heuuuu... » Histoire de ne pas me rater dès le début, je commençai aussitôt. « ♪ When I fïnd myself in times of trüble, Mozer Märy comes to me... heu... Speakïng waurds of wisdom, let it beee... » Et vas-y que je continue, que je massacre encore plus cette chanson qui ne mérite sans doute pas de l'être. « ♪ And in my haür of darkness, she is standing raïght in front of me, speakïng waurds of wisdom, let it beee... » Oui, s'en était émouvant tant je chantais bien. Que d'émotion dans la voix, n'est ce pas ? « ♪ Let it be, let it be, let it be, let it be... Whispeür waurds of wisdom, let it beee. » ( paroles initiales ) C'était faux ? C'était mal prononcé ? C'était une catastrophe ? Oui, un peu de tout ça à la fois, sans doute. M'en fous, je kiffais. Et à elle, ça lui plaisait au moins ? Mmmm, pas sur. La musique se poursuivait, et sauf arrêt de sa part je n'allais pas tarder à entamer le deuxième couplet.

Des heures de travail. Oui, messieurs dames, Andreas venait d'anéantir des heures de travail. Ouais, au moins. Parce que Tweedy bossait sur cette adaptation au piano de la chanson phare des Beatles Let it be depuis tellement de temps qu'elle en avait totalement oublié la réalité et ... Bon d'accord, c'étaient des conneries. Mais genre, de vraies conneries. Parce qu'il était évident que Tweedy n'avait aucunement passé des heures à pianoter cette chanson des Beatles, hein. A tout casser, elle y était depuis une trentaine de minutes. Grand maximum quoi. Mais vu que son camarade était totalement sans gêne et que le fait d'avoir interrompue sa camarade en déboulant comme un malade ne semblait pas torturer le peu de conscience qu'il avait probablement, la petite brune avait osé mentir. Oui, mentir. Okay, c'était très mal, mais quelques fois, elle se permettait de raconter quelques salades. Ici, par exemple, c'était plus que nécessaire. Il ne fallait pas qu'Andreas se croit tout permis sous prétexte que la jeune femme lui avait confié qu'elle commençait à l'apprécier. Il y avait tout de même quelques limites. Pour autant, veuillez noter que Tweedy était restée d'un calme olympien, preuve une fois de plus que la jeune femme ne parvenait à s'énerver de rien. Du moins, pas de ce genre de choses. Par la suite, et afin d'aider Andreas à se faire pardonner, Tweedy lui proposa - enfin, façon de parler - de prendre place à ses cotés et de chanter cette fameuse chanson des Beatles, pendant qu'elle jouerait approximativement le morceau au piano. Et contre toute attente - car Tweedy s'était naturellement attendue à se voir violemment envoyée balader - son camarade accepta. Sapristi. La candidate se remit alors à jouer ce qu'elle jouait à l'arrivée du jeune homme dans la pièce, tout en veillant à ne placer aucune fausse note. Andreas, lui, se mit à chanter. Un sourire amusé prit alors place sur les lèvres de Tweedy, qui se retint profondément de rire. Okay, il faisait l'effort de chanter et elle lui en était grandement reconnaissante, mais il fallait bien avouer qu'Andreas avait un anglais tout aussi particulier que son accent allemand. Ainsi donc, le résultat ne pouvait être que ... particulier, justement. Mais bon, il s'en sortait quand même plutôt bien. Lorsqu'elle le sentit près à débuter le seconde couplet, la jeune femme lui fit une proposition. « Je vais chanter avec toi » fit-elle alors, toute souriante. Et là, tout en continuant de jouer aussi bien que possible - hum - elle unit sa voix à celle d'Andreas. « And when the broken hearted people, living in the world agree, there will be an answer, let it be ... » Aucun risque que Tweedy en oublie les paroles, soyez en sûrs. « For though they may be parted there is, still a chance that they will see, there will be an answer, let it be ... » Et ça continuait, toujours en rythme en plus. « Let it be, let it be ... Let it be, let it be ... Yeah there will be an answer, let it be ... Let it be, let it be ... Let it be, let it be ... Whisper words of wisdom, let it be ... » Bon, est-ce qu'Andreas était prêt à attaquer le troisième et ultime couplet ? Hm, dans le doute, Tweedy préféra ralentir la mélodie jouée au piano afin de s'en assurer. « On la termine, cette chanson ? » demanda-t-elle alors, un grand sourire sur les lèvres. Le pouvoir des Beatles, tout simplement.

Oui d'accord, je reconnaissais bien volontiers que je chantais comme une merde, véritablement. Mais qu'est ce que vous croyiez, au juste ? Que je ne me trouvais pas honteux à l'heure actuelle, hmm ? Quand même, plusieurs millions de téléspectateurs assistaient en ce moment même au massacre d'une chanson pourtant pas mal, à l'origine, de nos amis les Beatles. Ça n'était pas franchement faire honneur à ce groupe de rock anglais que de me demander de chanter avec elle, mais je pouvais bien faire ce plaisir à Tweedy. Après tout, j'avais ruiné son morceau au piano quelques minutes plus tôt. Seulement, elle ne savait pas ce qui l'attendait... Un accent allemand prenant le dessus quoi que je fasse, un anglais très approximatif. Non vraiment, cette chanson n'était pas faite pour moi. D'ailleurs, je pouvais voir en jetant des coups d'œil de temps à autres en sa direction que Tweedy se retenait de rire. Bah oui, cette situation donnait carrément dans le comique. « Je vais chanter avec toi » annonça-t-elle alors. Je soupirai. Au moins on n'entendrait pas que ma voix, ce qui n'était pas une mauvaise chose. Nous nous mîmes alors à poursuivre, en cœur. « And when the broken hearted people, living in the world agree, there will be an answer, let it be ... » Ce qu'il était agréable de pouvoir se reposer sur la voix et l'anglais de la demoiselle. « For though they may be parted there is, still a chance that they will see, there will be an answer, let it be ... » La mélodie allait bon train, nous poursuivions encore et toujours sur notre lancée. « Let it be, let it be ... Let it be, let it be ... Yeah there will be an answer, let it be ... Let it be, let it be ... Let it be, let it be ... Whisper words of wisdom, let it be ... » Le deuxième couplet était terminé. Pfffou, allez courage Andreas, plus qu'un ! « On la termine, cette chanson ? » demanda-t-elle alors, toute souriante. Ma foi elle semblait beaucoup tenir à ce duo, alors j'allais me faire violence jusqu'au coup. J'en étais capable - j'étais un warrior. « Ouais, heuuu... allons-y. » Je m'éclaircis à nouveau la voix, et la mélodie reprit. « ♪ And when the nïght is claüdy, there is still a lïght that shïnes on me, shïne until toumauro, let it be... » La voix de Tweedy estompait un peu la mienne. Pour le plus grand bonheur de tout un pays, sans doute. « ♪ I wake up to the sound of müsic, Mozer Märy caumes to me, speakïng waurds of wisdom, let it bee... » Ce duo ne tarderait pas à devenir légendaire, c'était une évidence. « ♪ Let it be, let it be, let it be, yeah let it be, thaire will be an answer, let it be. » Tong tong tong. Et voilà, la chanson était terminée et la mélodie venait de prendre fin. Une bonne chose de faite. J'affichai alors un sourire satisfait. Enfin satisfait je ne l'étais pas forcément néanmoins, en tout cas pas de ma performance. « Hum alors, comment était notre duo ? » Je n'avais pas une oreille musicale, contrairement à la demoiselle. Elle était donc plus disposée à dire si nous avions géré ou si, au contraire, les Beatles pouvait dormir tranquille car la relève n'était pas assurée. J'aurais eu tendance à d'avantage pencher en faveur de la seconde option mais sait-on jamais, des fois que Tweedy eut été agréablement surprise par tout ça... Vous savez, elle avait son univers bien à elle la demoiselle, donc probablement des goûts assez spéciaux.

Imaginons un instant que les téléspectateurs assistant éventuellement à une telle scène se prenaient à chanter en même temps que nos deux protagonistes. Ce serait amusant, non ? Enfin bref. Il fallait bien avouer que cette chanson avait tendance à inciter les gens à pousser la chansonnette. Cela avait toujours été le cas avec Tweedy qui, pourtant, n'avait jamais montré de talent particulier pour la chanson. D'ailleurs, cela pouvait très certainement s'entendre à cet instant précis. Sans doute ne chantait-elle pas extrêmement juste, mais dites vous bien que ça n'était de toute manière pas très évident de chanter tout en jouant du piano. Et puis, le principal n'était-il pas de passer un bon moment ? Et justement, dans cette pièce et en la compagnie d'Andreas, c'était bel et bien le cas. Alors franchement, la justesse de sa voix lui importait bien peu à ce moment précis. La petite brune était en tout cas ravie que son camarade accepte de jouer le jeu et qu'il chante avec elle. Car au départ, quand elle avait proposé au jeune homme de chanter Let it be, elle avait légitimement présumé que le candidat lui aurait demandé d'aller poliment se faire voir. Mais à l'inverse, il accepta sans broncher et n'avait pas tardé à chanter sur le morceau joué au piano, dans un anglais certes limite car altéré par un accent allemand un peu limite, mais tout de même, en faisant de gros efforts. Et ça, ce fut très apprécié par la jeune femme qui, voyant que son camarade se prenait véritablement au jeu, avait lancé le deuxième couplet, en se mettant cette fois-ci à chanter en même temps que lui. Pour le coup, son anglais était bien meilleur, et le mélange des genres donnait quelque chose d'assez surprenant, quoi que plaisant il est vrai. Une fois ce second couplet terminé, Tweedy demande à Andreas s'il voulait poursuivre en chantant le troisième et ultime couplet, ou bien s'il préférait arrêter là. Et contre toute attente, une fois de plus, Andreas créa la surprise et accepta de poursuivre. Ainsi donc, Tweedy se remit à jouer et ils purent chanter le troisième couplet de la chanson des Beatles. Là encore, l'anglais et l'accent allemand du candidat furent pour le moins douteux. Mais qu'importe, l'important était qu'Andreas joue le jeu. Enfin, la mélodie prit fin, tout comme les paroles. Le résultat était en tout cas à la hauteur de toutes les espérances de la jeune femme. « Je pense que nous pouvons postuler à l'Eurovision l'an prochain, non ? » plaisanta Tweedy, avant de laisser échapper quelques rires. Mais en fait, quel pays représenteraient-ils, hm ? Attendez voir, qu'est-ce qu'on en avait à faire, en fait ? Rien du tout, nous sommes d'accord. « Je t'aurais bien proposé de chanter une autre chanson, mais je pense que tu en auras vite assez. Alors, à la place, je te propose une interview ... » Ouais, une interview. Elle était sérieuse. Oui, oui. « Nous ne sommes pas sans savoir que tu es une véritable star au sein de l'aventure, une vedette née ... Alors, je vais t'interviewer. J'ai été formée à cela, donc ne crains pas les questions idiotes, il n'y en aura pas. » Oh mais au fait, n'était-elle pas censée lui demander son accord, quand même ? « Tu veux bien ? » Voilà.

Quelle reprise... originale. Oui c'était le mot, car pour le coup je n'étais plus vraiment sur qu'il était encore évident de reconnaitre l'air d'origine. La faute à mon accent germanique et à ma prononciation déplorable de la langue anglaise, sans doute. Autant je parlais cette langue sans trop de difficulté, autant la chanter était pour moi un parcours du combattant. En fait je pense surtout que les Beatles avaient un style musical bien à eux qui ne me correspondait en rien. Laissez tomber, le rock c'était pas trop mon truc. Bref j'avais parfaitement conscience du fait que notre duo n'avait pas été si fantastique que ça, et que j'en étais le premier responsable. Après tout, Tweedy avait plutôt géré le truc. J'aurais aimé être aussi à l'aise qu'elle dans cette langue, seulement ça n'était pas le cas. J'espérais néanmoins ne pas avoir déçu la demoiselle - quand même, ça m'aurait brisé le cœur oh oui oui oui. « Je pense que nous pouvons postuler à l'Eurovision l'an prochain, non ? » fit-elle avant d'éclater de rire. Un rire contagieux car bientôt j'y fus moi aussi poussé. L'Eurovision, ou le concours de la chanson la plus kitch, c'est ça ? « Ouais, carrément. On a qu'à représenter l'Allemagne,... on f'ra un malheur. » Ouais, ou pas. Car entre nous ce ne serait pas franchement faire honneur à mon pays que d'interpréter un titre comme je venais de le faire. Par ailleurs je venais d'inventer une nouvelle langue : l'angland. « Je t'aurais bien proposé de chanter une autre chanson, mais je pense que tu en auras vite assez. Alors, à la place, je te propose une interview ... » Elle n'avait pas tord, chanter une chanson pour lui faire plaisir d'accord, mais m'humilier par deux fois je disais non direct. « Nous ne sommes pas sans savoir que tu es une véritable star au sein de l'aventure, une vedette née ... Alors, je vais t'interviewer. J'ai été formée à cela, donc ne crains pas les questions idiotes, il n'y en aura pas. » Ah mais oui, la demoiselle était journaliste. Je m'en rappelais tout juste, et comme elle le disait si bien j'étais incontestablement l'étoile montante de ce château. « Tu veux bien ? » Si me faire interviewer par une si jolie jeune fille me tentait ? « Et comment, j'accepte volontiers. » J'étais alors plus souriant que jamais, en mode freedent blancheur extrême. « Je n'ai pas souhaité connaitre les questions à l'avance, vous en témoignerez ma jolie - remarquez, cela aurait été difficile car l'interview n'était absolument pas prévue et se trouvait parfaitement improvisée, donc bon - Hum, première question donc, je vous pries. » À quel genre de questions allais-je avoir droit cet après-midi ? Personnelles, probablement. La connaissant, c'était sans doute une faille pour tenter de cerner le type que j'étais mais bon, j'allais pas broncher hein, je laissais faire. Elle avait pas genre besoin d'un calepin et d'un crayon, là, tout de suite ?

L'Eurovision. Oui, ces deux énergumènes étaient bel et bien prêtes pour concourir à l'Eurovision. C'était même une évidence, une certitude. Avec un tel talent, une telle capacité à transformer un duo censé être banal en quelque chose d'incroyablement attrayant, ils avaient même toutes leurs chances dans la course à la victoire. Bien sûr que oui. Andreas suggéra alors carrément de représenter l'Allemagne. Hm, pourquoi pas. En plus, il disait sans doute vrai : ils feraient tous les deux un malheur. Ouais, au moins. « Ah mais trop ! On deviendra les idoles de toute une génération, après notre triomphe ! On enregistrera un album, on deviendra de vraies célébrités, et ... et ... Ouais non, peut être pas. » Effectivement, peut être pas. Déjà parce qu'il fallait bien avouer que leur talent était bien moindre pour prétendre accéder à une brillante carrière dans la musique, hm. Mais également parce que la célébrité - qui plus est le show business - n'avait jamais particulièrement tenté Tweedy, pour ne pas dire pas du tout. Ainsi donc, il était fort probable que la jeune femme parvienne à s'en passer. Fort probable, oui. Finalement, après ce duo qui, à coup sûr, resterait dans les mémoires, Tweedy eut une idée. Puisqu'Andreas bénéficiait d'une certaine renommée dans le jeu, et qu'elle prévoyait de devenir journaliste, pourquoi ne pas l'interviewer ? Oui, ce serait amusant. Mais restait à savoir si Monsieur était disposé à jouer le jeu, autant qu'il venait de le faire en se prêtant à l'exercice périlleux de chanter Let it be en compagnie d'une chanteuse et joueuse de piano aussi peu talentueuse que Tweedy. Et une fois de plus, Andreas surprit positivement sa camarade en acceptant l'interview. Chouette. « Effectivement, c'est un point à souligner. C'est honorable de votre part » fit-elle, suite aux paroles de son camarade. Il n'avait effectivement pas souhaité connaitre les questions à l'avance, m'enfin, c'était tout de même un peu logique. Place à la première question, donc. Vite, improvisation totale. Court instant de réflexion. Analyse en cours. Hop, c'est bon. « Nos lecteurs, hm, nos téléspectateurs aimeraient apprendre à vous connaitre. Parlez-nous de vous, de votre enfance, de ce qui a rythmé votre vie jusqu'à présent. » Une question tout à fait basique, mais légitime. Qui était donc Andreas ? Estimant qu'elle n'en savait pas suffisamment à son sujet, Tweedy comptait mettre cette interview au service de sa curiosité. Maligne, hein ?

Voilà une demoiselle qui semblait avoir bien plus d'ambition que moi encore. Je rêvais peut-être d'une carrière dans le milieu du football professionnel, néanmoins Tweedy faisait très fort là : c'était carrément l’Eurovision qu'elle visait. Mais si, vous savez, il s'agissait de récompenser la chanson la plus ringarde d'Europe. L'Allemagne avait d'ailleurs été sacrée il y a deux ans, me semble-t-il. Ah quand il s'agissait de faire de la merde en musique, on était très forts. Presque autant qu'en foot en fait. D'ailleurs, nous pourrions représenter mon pays natal, la jeune femme et moi. Avouez qu'on leur en mettrait plein la vue à ces Européens. « Ah mais trop ! On deviendra les idoles de toute une génération, après notre triomphe ! On enregistrera un album, on deviendra de vraies célébrités, et ... et ... Ouais non, peut être pas. » Heuuu, on allait peut-être éviter de s'emballer aussi, hein. Parce que l'album, la célébrité... je n'y croyais que très moyennement. Voir pas du tout. « Ouais non, on est bien d'accord. Peut-être même pas DU TOUT, hein. » Je ne souhaitais pas forcément lui briser tous ses rêves en l'espace de cinq malheureuses secondes, seulement il fallait voir les choses en face : ni elle ni moi n'avions le talent requis pour faire connaitre notre musique dans le monde entier. Et puis entre nous, la célébrité, moi je l'avais déjà. Bah oui, sinon pourquoi Tweedy aurait-elle insisté pour je lui accorde une interview qui, j'en étais certain, se monnaierait à prix d'or par la suite ?... Le plus beau dans tout ça restait le fait que je n'avais même pas cherché à connaitre les questions que la demoiselle allait me poser à l'avance. Quel chouette type je faisais quand même. « Effectivement, c'est un point à souligner. C'est honorable de votre part » Bien. À présent l'interview allait officiellement commencer et la première question m'être posée. J'en redoutais d'ors et déjà le sujet et j'avais bien raison de m'en faire, d'ailleurs. « Nos lecteurs, hm, nos téléspectateurs aimeraient apprendre à vous connaitre. Parlez-nous de vous, de votre enfance, de ce qui a rythmé votre vie jusqu'à présent. » Devais-je en conclure que nous allions parler famille et passé ? Tout ce qui n'importait plus en rien à mes yeux, en somme. J'avais tourné la page depuis le temps. Mais la question m'ayant été posée par une Tweedy des plus curieuses, je n'allais pas me défiler devant un obstacle aussi minime. « Pour commencer je vous apprendrai que Monsieur Parfait, qui se trouve en ce moment même assis en face de vous, a vu le jour un certain 10 novembre 1986 à Cologne, en Rhénanie-du-Nord-Westphalie. Soit en Allemagne, mais vous l'aurez compris je n'en doute pas. » Elle avait les bases. Il lui en fallait plus sans doute ? Mmmm, sur mon enfance par exemple. Allons bon. « J'ai pas l'souvenir d'avoir été un gamin heureux. J'veux dire, j'ai jamais connu l'amour des darons, j'étais fils unique et puis nous ne roulions pas non plus sur l'or. Sans parler du fait qu'on avait fait de moi la risée de tout le bahut. (éclaircissement de voix) Il ne faisait pas bon d'être le seul gars fauché de la classe. Bref, ma vie a changé le jour où j'ai suivi mon père en Angleterre. Il a fait fortune dans l'automobile, et j'ai enfin su que ce ça f'sait d'avoir du fric. Quant à ma mère... hum. » Oui alors j'allais peut-être m'arrêter là, hein, c'était sans doute préférable. « Qu... question suivante. » J'en avais déjà bien trop dit sur ma vie antérieure, celle passée au pays de la Merkel. Néanmoins je connaissais Tweedy et l'obstination qui était la sienne - ma réponse lui suffirait-elle ? Rien n'était moins sur car justement, c'était Tweedy.