Mercredi c'est plage, je l'ai décidé en allant me coucher la vieille parce que la journée avait été d'une longueur sans borne comme je n'avais rien fait qu'il était temps que je me bouge le cul. J'sais pas trop ce qu'annonce la météo, on est pas abonné à la chaîne de météo locale par ici, notre seule façon de connaître le temps c'est en sortant la tête dehors. C'est peut être plus fiable après tout, mais pour les "projets" c'est moins pratique. Mais tant pis j'suis un fou moi, j'décide de ne pas changer mes plans, parce que j'suis carrément en manque d'action, je me dis que nager ça pourrait être bien. L'eau doit être à une température particulièrement basse mais ça retend la peau et puis le sang circule mieux, à ce qu'il paraît. J'ai vérifié le ciel et même s'il est particulièrement plombé, il ne pleut pas et il ne fait pas si froid - enfin pour l'Irlande du moins. J'sors en short de bain, sans tee-shirt, j'ai déjà dit que j'étais un ouf moi. J'prends juste un tee-shirt et une grande serviette au graphisme qui laisse à désirer. La prod' et ses goûts bizarres. Je m'en fiche le ridicule ne tue mais tout de même. J'arrive sur place et dépose ma serviette sur le sable, j'ai l'impression d'être seul au monde. Je m'assieds un instant pour enlever mon tee-shirt et aussi tâter l'environnement. Lac ou pas lac ? Telle est la question. Mais je n'ai pas le temps de faire quoi que ce soit que je reçois un objet non identifié dans la tronche. « Aiiiie ! » Je crie dans un français bien net, vieux réflexe. J'baisse la tête et découvre une ballerine. Huh. C'est quoi ce délire ? Et puis une voix familière s'élève. Je tourne la tête dans sa direction. « Bonjour ma sexy lady préférée. »Et un sourire se dessine lorsque je vois le sien. « T'as voulu me tuer c'est ça ? » J'attrape sa chaussure entre mes mains, et lui lance un regard particulièrement pervers, limite psychopathe. « Tu n'y tenais pas vraiment j'espère ? » Je lance tandis que j'agite fièrement sa chaussure.

C'est une impression où Laoise me prend pour un fou ? J'aurais bien dit con, mais j'pense pas en réalité. Elle plaide non coupable, ouais, c'est ça. J'vois à sa tête qu'elle n'est pas innocente, même si elle tente de le cacher, son sourire est un aveux à lui seul. « Elle est bien à toi cette ballerine ? Alors tu es coupable c'est tout. » Bon, j'exagère, j'ai pas mal, faut pas abuser, je la taquine c'est tout, elle doit bien s'en douter. Elle plisse les yeux quand je lui demande si elle tient à sa ballerine, elle est marrante, j'ai bien envie de rire d'ailleurs, mais ça fausserait toute ma scène. Alors je maintiens mon regard, juste pour le fin. « Oh si, bien sûr. J'hésite encore la balancer à l'eau et te voir nager dans l'eau glacé et l'enterrer dans le sable, ou peut être la cramer... Qu'est-ce que tu en dis ? » La dernière option n'est carrément pas envisageable, j'suis pas un pyromane, mais ça, elle n'est pas censé le savoir n'est-ce pas. « Tu peux aussi venir la chercher si tu ne veux pas la voir périr et souffrir le martyr. » Oui parce qu'il est évident qu'une ballerine ça peut ressentir des émotions comme un être humain. Enfin ça doit être mon coup à la tête qui me fait dire n'importe quoi, j'en mettrais bien ma main au feu.

Laoise elle a beau être bourrée de qualité, oui bien sûr que c'est vrai. Parce contre, la comédie ne fait pas partie de son panel de talent. Elle n'aurait pas tenue deux jours avec le secret de Santiago, enfin si elle aurait agit de la sorte. J'remets pas en question ces talents, je ne me base que sur ce que je vois, c'est un peu ce à quoi on est contraint ici, l'apparence toujours l'apparence. Et pour le moment celle de Laoise me confirme totalement qu'elle use d'un gros mensonge. Ce que sa tête me transmets, ses yeux s'entêtent à le démonter, c'est particulièrement drôle d'ailleurs. Je ris, elle doit se demander ce que j'ai, mais peu importe, ça m'amuse. Elle joue ensuite l'indifférente lorsque je me menace d'attenter à la vie de sa chaussure. Quoi ? elle n'est donc pas l'une de ces accro à leur paire de chaussures plus qu'à leur propre vie ? « T'es ton dernier mot ? » Je lance sur un ton égal, alors que je sors mon petit briquet de ma poche et que j'actionne la flamme que je position sous le plastique de la ballerine. Pas trop près parce que j'suis pas pyromane, mais suffisamment pour le lui faire croire. « Tu sais qu'il y a des gravillons là-bas, plus loin ça fait mal aux pieds les gravillons. » Je me présente, Slavin, sadique de formation. Je souris, et là c'est que j'suis carrément entrain de me cramer les doigts que je sacrifie au profit de sa propre chaussure. « Aiiiie » Et le malin, il tombe dans le ravin, j'viens de m'ôter toute discrédité pour le coup. Et merde. J'hausse les épaules et relâche la chaussure qui s'écrase sur le sol.

Donc, soit je suis un mauvais acteur moi aussi, bon ça ne m'étonnerait pas outre mesure puisque de toute évidence, si j'étais acteur ça se saurait. Même si paradoxalement j'ai cette capacité incroyable de bluffer lorsque je suis engagé dans une partie de poker. L'issue ne m'est pas toujours favorable, je n'ai malheureusement pas assez de temps à y consacrer, je n'ai pas forcément envie d'y passer ma vie non plus je dois dire. Bref, elle ne bronche pas, elle reste impassible face à l'acte de barbarie que je m'apprête à commettre. Je me vois contraint de sortir mon briquet de ma poche, de lui faire croire que je suis assez vil pour mettre le feu à son innocente chaussure dans le but de la punir elle d'avoir lancé cet objet sur mon crâne, pour me faire risque d'avoir une commotion cérébrale importante. Et d'ailleurs, c'est peut être cette commotion qui me pousse à agir de la sorte. Mais il semblerait que le destin soit de son côté. C'est bizarre, il m'avait semble que ce con était souvent de mon côté. Mais, non, un coup de vent et la flamme du briquet se mit à lécher avec force mes doigts innocents. Et le pire dans tout ça ce n'est pas tant que Dieu ait décidé de me punir. Mais en plus de ça, elle se tord de rire. Et moi j'ai mal putain. Je lui lance un regard noir. « T'es une sorcière, putain mais t'es une sorcière, et t'as jeté un sort à mon briquet, c'est pour ça que t'es carrément confiante depuis tout à l'heure. Je tiens un scoop ! » Je lui lance la voix rieuse ce qui contraste totalement avec la douleur de mes doigts. Parce que j'suis pas du tout douillet mais ça lance quand même un peu. Je les secoue frénétiquement comme si la douleur allait partir par enchantement. Et puis je lui lance doucement sa ballerine, qui vient se planter jusqu'à côté d'elle. Putain j'suis bon en faite. « Je te la rends, elle est maudite. Fais en bonne usage. »