Tout ça pour un malheureux snowball. Snowball que je n’ai fais que lui piquer pour la faire courir un peu. Parce que oui, je n’ai même pas pu y gouter ! Pas même une seule bouchée, un seul petit morceau. Rien. De même, que je le lui ai rendu, au final. De bonne grâce en plus ! Je pensais signer la trêve. Tu parles. Lee-sha ne voulait rien entendre. J’ai essayé de négocier avec elle à plusieurs reprises tout au long des jours précédents. Rien à faire. Têtue et butée comme tout. Elle est intraitable, incorruptible. Je suis sûre que c’est son ventre encore. Son estomac qui lui dicte ses actions. Je vous le dit moi, elle va le regretter. C’est toujours lui le responsable de mes malheurs. Enfin, une partie. Oui, après ’les malheurs de Sophie’, la comtesse de Ségur, aka Sophie Rostopchine, est fière de vous présenter…. Les malheurs de Nora. Salve d’applaudissement. En plus, je suis certaine qu’elle va réellement me manger. Si vous la voyiez, elle a l’air si résignée que s‘en est presque flippant. La brunette m’entraine, sur ses talons, dans les couloirs du château jusqu’à la cuisine. Je traine des pieds et rechigne. Je tente de renégocier notre traité jusqu’au bout. Enfin « traité ». Disons plutôt: diktat. Toujours rien. On débouche sur la cuisine et elle me sollicite. Si j’ai un lieu de prédilection… J’hoche la tête vers la négative. Laoise sort rapidement le matériel. Après quoi, elle me demande par quoi est-elle censée commencer. J’écarquille les yeux. Elle est sérieuse !? C’est comme demander à un chanteur-musicien de choisir entre sa langue et ses doigts. En partant du principe qu’il est pianiste. Soit. Donc, de quelle partie de mon corps je souhaite me délester en premier ? De préférence une qui ne m‘est que peu utile… « Euh… mon oreille gauche ? » je lance sur le ton de la plaisanterie avant d’échapper un rire. « Ok, je suis sérieuse… je te concède…un de mes deux bras » je fais très peu convaincue par ce choix là. Après tout, c’est elle le bourreau, qu’elle se démerde ! Moi, je vais m’atteler à subir ma sentence, c’est déjà bien assez.« Ca ne va pas faire mal hein, dis ? » je lui fais alors qu'elle s'approche vers moi, en affichant des yeux de merlan frit.

Je continue de la dévisager avec mon air de chien battu. Franchement, si ca ne prend pas, je ne sais où est passé son cœur. Je lui tends mon bras en fermant les yeux et détournant légèrement le regard. Oui, je ne veux pas voir le spectacle sanglant qui va suivre ! Mais non, on en fait pas tout un sketch, voyons. Si peu notre genre. J’émets un petit gémissement lorsqu’elle me dit que je saurais si ca fait mal une fois le bras en moins. Cependant, quelques minutes filent, et Laoise ne le saisi pas. J’arque un sourcil, perplexe. Et, rouvre qu’un seul œil sur les deux. Elle est sérieuse la gueuse ? « Tu en doute encore ? Après tout, c‘est le doute qui rend fou, pas la certitude… » je lui marmonne avec raison. Oui, qu’elle demande donc à notre ami Nietzche, il lui dira. Et, je crois que j’essaie de semer en elle le doute pour qu’elle se ravise. Mais, paradoxalement, j’ai bien envie de voir jusqu’où elle ira. Je la teste en quelque sorte. Après tout, c’est elle qui disait vouloir me manger. Alors j’attends ! Haha. Tel est pris -presque- qui croyait prendre ! Mon bras tendu en sa direction s’ankylose et je le laisse retomber le long de mon corps. « Tss… tu te dégonfles c’est ça ? » je claironne tout sourire, un brin taquine et provocatrice. Vous pensez bien que je ne fais pas laisser passer ça aussi facilement. « Tu sais maintenant les prisons, c’est presque des hôtels… » je sifflote mutine, en braquant sur elle mes iris bleutés. « …Enfin, disons plutôt le motel pourri et précaire au possible au fin fond de l’Arkansas. » j’étoffe. Là, je ne sais pas trop si j’essaie de la dissuader ou la pousser à poursuivre son acte de pseudo cannibalisme. Un peu des deux j’imagine. En tout cas, tout ce que je peux dire c’est que ca m’amuse bien.

Alors que je lui vante les mérites de son éventuel prochain lieu de prédilection et d’enfermement, celle-ci ose, encore et toujours, me contredire. Je prends un air résigné en croisant les bras sur ma poitrine, à mon tour. « Tu acceptes d’être enfermée de long mois avec de quasi-inconnus et, en prime, être filmée, tu m’expliques la différence avec quelques mois en taule ? » je lui rétorque feintant le sérieux alors que le rire me tiraille les côtes. Franchement, des différences, il y’en a à l’appel. Je peux même les lui citer mais non, c’est moi qui pose la question. Et, je décide de jouer la carte de la mauvaise foi. Oui, oui, j’en suis tout à fait capable. Puis, je vois l’entourloupe arriver, de loin même. Très loin. Laoise a un don pour cela. C’est toujours la même chose. Un pas en avant, trois pas en arrière. Et, j’ai même des exemples ! Je n’avance rien dans le vent. Je suis formelle et catégorique. Après quoi, Lee-sha reprend la parole. J’arque un sourcil. Elle va pas sérieusement me faire gober ça la gueuse. Ma réaction est immédiate. « N’essaie même pas de retourner la situation ! » je scande en prenant un air faussement offusqué, les prunelles braquées sur elle, les yeux écarquillés ahurie. Honnêtement, je suis plutôt bonne dans le rôle. Le pire, je crois, c’est qu’elle arbore un petit air de défi. Puis, moi, je ne sais pas trop résister aux défis. J’aime bien les relever. Ca m’amuse. « Ensemble » je lui souffle, un sourire mutin aux lèvres. C'est, un peu, devenu notre devise. Je vois qu'elle ne bronche pas, alors je lève les yeux au ciel. D’ailleurs, je crois aussi qu’elle me sous-estime. Depuis le temps ne devrait-elle pas savoir que je ne recule devant quasi-rien ? Aussi, je décide pousser le vice pour voir si elle se laisserait réellement manger. « Ok, envoi ton épaule... » je lui fais spontanément, une expression résignée au visage, les bras toujours croisés, la défiant du regard.