avec irène, neuf juillet, 03h14, après le prime, dans la chambre.
sleeping with a drag queen in my bed.

Le prime, ce putain de prime vient enfin de se terminer. Une fin en beauté avec l'éviction de deux des meilleurs camarades de Sami au sein de la maison. Il ne réalise toujours pas, il s'en est toujours pas remis. Mais la cerise sur le gâteau, s'il vous plait, c'est qu'à partir de ce soir, son ou sa -c'était dur de savoir- partenaire n'était autre que le travesti de service, yipee il avait gagné le gros lot ce soir sérieux. La nuit s'annonçait longue. Irène était devenue une nymphomane après avoir changé de sexe, Sami aurait même presque peur que cet énergumène troublant lui grimpe dessus pendant la nuit. Il en frissonnait à l'idée. Mais il exagérait sûrement les choses avec l'énervement. En temps normal, il aurait été tolérant et l'aurait considérée comme les autres. Mais pas ce soir, non. Ce soir c'était trop lui demander, vraiment trop. Après avoir décroché le téléphone rose qui avait sonné lorsque Sami était rentré au nid, il était monté dans le dressing histoire d'attraper sa tenue de nuit -un t-shirt et un boxer. Un petit tour à la salle de bain histoire de se rincer le visage et de se brosser les dents, il prendrait sa douche le lendemain matin, là il était trop crevé pour rester encore une demi-heure de plus debout. Et déprimé par la même occasion. Lorsqu'il déboula dans la chambre dans laquelle il dormait, il fut surpris de voir Irène allongée sous les couettes dans son lit, ce lit qu'il avait eu pour lui tout seul depuis une semaine. Bon, il allait falloir se serrer cette semaine, et sans doute plusieurs, boarf tant pis. Sami se glissa sous les couettes de son côté du lit, sans dire un mot, dans la faible luminosité de la chambre. Il faisait noir mais toutes les portes ouvertes donnaient de la lumière dans la chambre, on voyait donc devant soi sans trop de mal. Il fixa le plafond pendant plus de dix minutes, avant de remarquer qu'Irène ne dormait pas, elle venait de se retourner dans le lit. « C'est quand même perturbant tu sais. » Il lâcha comme si ça tombait sous le sens que la jeune femme comprenne du premier coup, il était fatigué, fallait le pardonner vous savez. Évidemment il parlait du fait de dormir avec elle dans le même lit. Il n'arrivait toujours pas, même avec la plus immense des volontés, à savoir s'il devait la considérer homme ou femme.

En considérant que le prime de la semaine dernière avait été une horreur pour moi, l’on pouvait dire que celui qui venait de se passer n’était rien du tout. À mes yeux. Pourtant il était clair et net que j’étais passée de très très très près de l’élimination et que pour très peu de différence, je me faisais expulser à la place d’Aj. Encore une fois à mes yeux, cela aurait arrangé pas mal de monde à mon avis. Après tout la demoiselle avait beau être discrète à mon goût, elle allait sûrement manquer à des gens. Pas moi. Beaucoup devaient avoir la rage, de mon côté je l’avais un peu… pour l’élimination d’Ennio. Quand l’on voit qu’il fut l’un des seuls à continuer à me parler normalement, même en sachant ce que je « suis », comme l’on dit si bien de moi. Bon bref. Ce n’était pas tout. Maintenant j’avais un nouveau partenaire. Autant dire que c’était la grande joie. J’aurai évidemment préféré avoir un autre partenaire que Sami (une fille par exemple parce que visiblement elles semblaient plus tolérantes à mon égard que les mecs), ou tant qu’à faire, être seule. Complètement seule. Même si dormir avec quelqu’un ne me dérangeait pas, j’aurai tant voulu être seule pour une fois. Enfin non pas pour une fois, parce que je l’avais été pour ma toute première semaine, mais être seule pour au moins une semaine, aurait été un immense plaisir. J’aurais été à l’abri. Personne n’aurait eu peur que je lui saute dessus ou un truc dans le genre. Malheureusement Cupidon ne peut être gentil avec ses candidats. J’étais alors rapidement partie du prime, laissant les autres en train de pleurer ou de se prendre dans les bras, derrière moi. Toutes ces effusions de tristesse, ça me déprimait et me faisait rudement chier. Je préférais rejoindre les chambres, en passant par le dressing pour enfiler mon pyjama, pour me glisser rapidement sous les draps. Je soufflais, essayant de laisser mes yeux fermer et trouver rapidement le sommeil, avant que Sami n’arrive, mais impossible de dormir. Quelques minutes passèrent, pour en faire dix. Toujours pas. Je laissais échapper un nouveau soupire, lorsque Sami entra à son tour dans le lit. Je ne l’avais pas entendu arriver, alors son arrivée me fit ouvrir les yeux. Pour notre bien, je me décalais au maximum et subtilement vers l’extérieur du lit. Au moins il ne pourrait pas m’accuser d’être trop près de lui ou de le toucher. Le truc est que, être au bord du lit, ne m’aidait pas à m’endormir. Je finissais par me retourner vers Sami, de toute manière, je n’avais que ça à faire et de mon côté je ne comptais pas parler. Je pensais qu’il en ferait de même. Non. « C'est quand même perturbant tu sais. » Grâce à la pénombre, je pouvais voir le visage de Sami tourné vers le plafond. Je fronçais les sourcils dans un premier temps, avant d’en arquer un. J’avais bien compris où il voulait en venir évidemment. Il ne fallait pas être devint pour le comprendre d’ailleurs. « Qu’est-ce qui est perturbant ? » Lui demandais-je sèchement, pour bien savoir ce qu’il entendait par là. Oui j’étais à la limite de l’agressivité, parce que j’avais la nette impression que cette conversation allait très rapidement dévier du mauvais côté et m’énerver. Je connaissais déjà sa réponse : le fait que j’ai été un mec et qu’à présent, je suis une nana, c’était vraiment trop. Evidemment je voulais bien croire que cela pouvait les perturber, je ne suis pas non plus totalement inconsciente, mais de là à me traiter comme la plupart l’on déjà fait et le feront encore. Leur problème, c’est qu’ils ne pouvaient pas essayer même d’oublier un tout petit peu. C’est parfois la seule chose que je demande : que l’on m’oublie un petit peu…

Oui c'était perturbant, et il l'avait dit à Irène. C'était perturbant de dormir dans le lit de quelqu'un qui jadis, fut un homme. Qui maintenant était une femme - parfaitement réussie d'ailleurs, sans la révélation de son secret personne ne se serait jamais douté de cela, tellement Irène avait tout d'une vraie femme, d'une vraie femme fatale. C'était là un compliment. Sami était de nature tolérante, et si cela ne se voyait pas, il respectait clairement le choix de vie de la jeune femme et trouvait même cela.. courageux. Oui, courageux. Cependant il n'était pas dans l'humeur ce soir de se montrer gentil ou attachant avec elle, ni même de lui confier toute l'admiration qu'il avait pour elle, non. Ce soir était un peu comme un soir de deuil, il avait perdu Ennio et Aj, et sa colère n'était pas prête de retomber. « Qu’est-ce qui est perturbant ? » qu'elle fit, la blondinette transformée, sur un ton sec. Sami fut surpris de ce ton directement agressif et violent, il avait juste mentionner une constatation, c'était tout. Il tourna alors la tête vers la jeune femme. « Que tu aies été un homme avant, je n'aurais … jamais cru. Et j'avoue que ça fait bizarre de dormir avec toi dans ce lit aujourd'hui. Mais ce n'est pas pour ça que juge ce que tu as fait, c'est extrêmement courageux et je respecte ton choix de vie. C'est juste que pour moi, ça me fait bizarre c'est tout. Mais je ne juge pas, loin de là, ne te sens pas obligée d'être autant sur la défensive. » Car oui, elle était sur la défensive alors que Sami n'avait rien dit de mal, c'était navrant.

Je n’étais pas une inconsciente. Je savais bien que c’était plutôt difficile à concevoir que je fus un mec avant. Ils ne savent pas non plus que, en tant que mec, je n’étais pas forcément cent pour cent gay, bah non. Je ne l’étais même pas. J’aimais aussi les femmes et je les aime toujours, mais si je commencer à en parler… Ce qu’ils ne conçoivent pas non plus, c’est que je ne supportais pas non plus le fait de toujours en entendre parler. Si j’avais décidé de changer de sexe, c’est justement parce que je ne me sentais pas à ma place dans un corps de mec. Pourquoi toujours me rappeler que j’en fus un ? Surtout quand ils ne savent pas à quoi j’ai pu ressembler en tant que tel. Alors oui j’étais un peu agressive dans ma façon de m’adresser à lui, mais il l’avait un peu cherché. J’avais déjà un peu de mal à dormir et je n’étais pas ravie à l’idée de partager mon lit, alors il n’avait pas opté pour la bonne solution. « Que tu aies été un homme avant, je n'aurais … jamais cru. Et j'avoue que ça fait bizarre de dormir avec toi dans ce lit aujourd'hui. Mais ce n'est pas pour ça que juge ce que tu as fait, c'est extrêmement courageux et je respecte ton choix de vie. C'est juste que pour moi, ça me fait bizarre c'est tout. Mais je ne juge pas, loin de là, ne te sens pas obligée d'être autant sur la défensive. » Non évidemment je n’étais pas obligée d’être sur la défensive, mais j’en avais sérieusement marre d’entendre toujours le mot bizarre associé à mon prénom. Je le suis peut-être, mais ils n’avaient pas besoin de tous me le dire. Je relevais un peu le haut de me on corps, essayant de le regarder au mieux. « Tu ne me juge pas, d’accord, mais tu trouves ça quand même bizarre. Ce n’est vraiment pas mieux, moi j’te le dis. » Effectivement ce n’était pas mieux. Pour ça, je préférais encore le voir me juger, là au moins je savais en quoi m’en tenir. Là, qu’est-ce que j’étais censée en penser au juste ? « J’en ai carrément marre des gens comme toi. ‘J’te juge pas, mais t’approche pas de moi’. Va te faire voir. » J’étais un peu, beaucoup, trop remontée, mais c’était un tout petit peu compréhensible quand même, non ? Il n’avait jamais été confronté à ça lui, ni aucun autre ici. Je me remis sous les draps, me demandant si j’aurai du lui parler aussi méchamment. D’accord ça me saoulait, mais il n’irait peut-être pas tout prendre pour les autres. Oui sinon, si c’était le cas, il se prendrait carrément la baffe que je n’ai jamais pu mettre à Andreas. J’avais ma salive. « Désolé, j’aurai pas du te parler comme ça… » Lui disais-je, en me tournant de nouveau, dos à lui.