FT.TRIS

Les candidats font du bon boulot il faut bien que je l’admette. Je suis de nouveau en train de les admirer à déposer des sacs poubelles devant les maisons, à jeter des meubles pourris etc mais finalement, je m’ennuie et je pénètre dans une maison déjà partiellement nettoyée. Je me balade entre les pièces jusqu'à ce que je tombe sur Tris, dans le salon, devant une bibliothèque ravagée par l’humidité. Je m’approche. « Salut. » fis-je doucement, pour ne pas la surprendre. « C’est dommage, hein… » Dis-je en désignant les livres abîmés. Je ne suis pas un grand amateur de lecture mais j’aime ça, ça occupe mon temps et je suis déjà tombé sur des petites perles. Voir ces livres ravagés ça me fait quelque chose quand même, chaque livre renferme un univers, c'est pas rien. Et là, plus personne ne pourra les découvrir. C'est triste.

Il faut que je m’occupe, le temps semble filé à vive allure d’un certain côté, mais de l’autre, j’ai parfois cette impression de tourner en rond comme un lion en cage. Dire que j’avais l’habitude des horaires de travail surchargés, des nuits de quelques heures à peine. J’avais toujours cette impression de courir après le temps. Mais ici, c’est tout l’inverse. Ne plus me lever à l’aurore, faire ce que j’ai envie, quand j’en ai envie. Et surtout, ne plus travailler, ne plus rien avoir à prouver à qui que ce soit. Sauf moi. Je me promène donc dans le village, bifurque vers les habitations abandonnées. Certains candidats s’y trouvent déjà, travaillant à remettre sur pieds des intérieurs abîmés. Quelques maisons sont en meilleurs états, c’est un bon départ. Je pense toutefois que chasser un peu de poussière ne pourra pas leur faire de mal, c’est pourquoi je m’empare du premier balai à croiser ma route. C’est fou comme tout est sale, dans le coin. Il y a des toiles d’araignées à profusion d’ailleurs, mais je vais d’abord me contenter de balayer le plancher, ce sera au moins ça de fait. Je m’exécute d’ailleurs, et au bout d’un moment, m’arrête devant la bibliothèque antique où trônent plusieurs livres usés par le temps. Le genre de ceux qui s’effriterait surement au moindre touché. Je caresse doucement, du bout des doigts, la couverture de ces romans, quand une voix se fait entendre derrière moi. « Salut. » Je tourne la tête vers Jared, qui s’est posé à mes côtés. D’un sourire, je le salue à mon tour. « C’est dommage, hein. » Il me désigne les livres posés sur les étagères, et je ne peux seulement qu’acquiescer à sa remarque. « Oui, vraiment… certains pourraient sûrement être récupérables… mais… c’est fichu pour la plupart. Vraiment dommage. » Curieusement, j’attrape d’ailleurs l’un des volumes, et le simple fait de le feuilleter l’abîme plus encore : certaines pages tombent carrément en poussières sous le contact de mes mains.

J’imagine bien que Tris n’est pas venue dans cette maison pour tenter de lire un livre surtout que j’ai aperçu son balais et aies fait attention à ne pas marcher dans le petit tas de poussière qu’elle avait accumulé en balayant. Enfin… Petit tas… Tout est relatif, hein. « Oui, vraiment… certains pourraient sûrement être récupérables… mais… c’est fichu pour la plupart. Vraiment dommage. » Dit-elle en prenant un livre, les pages s’abimant entre ses doigts comme si elles étaient faites de poussières. « Ca me tue… » Dis-je en me dirigeant vers le bureau. « Que des gens aient du fuir si vite et tout ça pour rien, au final leur village n’est pas inondé mais ils n’ont plus rien. » Je me tourne vers Tris. « Au fait, merci pour dimanche. » Je viens de passer du coq à l’âne mais il fallait que je la remercie en face à face même si je le lui avais déjà dit dimanche, elle ne m’avait peut être pas entendu après tout.