Cet aprem c'est... c'est... c'eeeeeeest... PISCINE! Eh ouais, hinhin. En cette après-midi plutôt ensoleillée pour une journée d'octobre (on est bien en octobre nan?) les deux gonz' les piu bonasses de la maison que nous étions avions décidé de nous faire un petit plongeon. Bon en fait c'est suite à une conversation avec Dagga sur le canapé du salon que s'est lancé le défi d'aller se les geler dans l'eau du lac juste pour le fun de faire du sport. Hmm si j'avais su je me serais pas foutu de la gueule de sa gym matinale. Arrivées devant l'étendue d'eau je n'étais plus sûre de moi. Non je voulais pas y alleeeeeer! Même si enlever mes fringues pour faire ma belle en trikini me tentait bien j'étais pas trop opé... non vraiment pas. Je crois d'ailleurs qu'on aurait pu dire que je tirais une tête de trois kilomètres. Je me retourne cependant vers ma rouquine de copine en tentant de paraître la plus convaincue possible. « Booon allez assume tes dires, go fast surtout hein! » Allez hop comment faire mine de rien. Bon courage ma chère.

J’avais beau vivre plus ou moins près de l’océan, j’étais pas spécialement familière des virées à la plage, et l’océan, la mer, les lacs, les étangs et ‘fin bref vous avez compris, tous ces trucs là ça m’avait toujours vachement intimidée. Même si le lac non loin du village m’avait fascinée dès mon arrivée dans l’aventure, je m’en étais jamais approchée. Officiellement, j’avais juste pas trouvé le temps. En réalité, j’avais juste les chocottes. Mais là, en raison de mon éventuel futur départ, j’avais décidé de faire abstraction de ma phobie latente et de tenter le tout pour le tout. Il était hors de question que je quitte le village sans avoir fait trempette dans le lac. Certes, certains auraient pu y trouver à redire, affirmant qu’il n’était peut-être pas raisonnable d’aller se baigner au mois de novembre, mais ma fierté d’irlandaise me poussait à ignorer ce genre de recommandation – c’est pas parce qu’il faisait un peu frisquet que j’allais faire une croix sur un petit bain de milieu d’aprèm. Alors j’avais entraîné Nicole avec moi jusqu’au lac, un peu surprise, il faut bien l’avouer, qu’elle ne se soit pas opposée au projet d’entrée de jeu. Ceci dit, lorsqu’on arrive enfin sur place et que je commence à me dessaper pour me mettre en maillot de bain, je sens bien qu’il y a comme une faille dans son enthousiasme, et je la connais trop bien pour ne pas me méfier. Déjà que je suis d’un naturel parano, à la base, en plus - je suis pas née de la dernière pluie, et je sens bien que si je pars en trottinant devant, Nikki risque de juste rester en retrait à admirer mon popotin qui se dirige élégamment vers la nappe d'eau. Les points sur les hanches, je me tourne vers notre bombasse nationale. « Oh, tu vas pas te débiner maintenant. On va y aller, main dans la main, comme des vraies pineco. Ça fera genre un paysage de carte postale. Et imagine que je parte demain, et que t’auras pas accompli ma dernière volonté, sérieusement, ça serait triste, non ? » Je tente le coup, guettant sa réaction.

Me débiner ? C’est quoi ça ? A en conclure par sa posture et son intonation j’en conclus donc que je ne dois pas me dégonfler. Comme une poule mouillée, même si ça ne se dégonfle pas mais bref on a tous compris ! Et là elle sort l’argument de choc. Cette semaine Dagga est nominée suite aux dilemmes. Etant donné qu’elle peut choisir ses adversaires –si j’ai bien compris la chose, hm- elle ne devrait pas avoir trop de soucis à se faire ; il suffit d’être stratégique. Néanmoins dans ce jeu tout pouvait basculer d’un moment à l’autre donc finalement ma roukmout de copine avait raison de se faire du souci. « Ah ouais… non mais j’allais enlever mes fringues c’est juste que je prenais la température ambiante avant. » Lichant l’un de mes annulaire afin d’identifier la provenance du vent, je pose quelques longues secondes avec le doigt en l’air. « Okééé c’est bon on peut y aller. » Allez courage, c’était histoire de repousser le moment mais là il fallait y aller. J’enlève donc mes fringues, je crois même que c’est un pire supplice que ma première partie de strip-poker. Fin prête à aller me glisser dans une eau qui doit être au moins à -50°C, j’attrape la main de Dagga. « Je fais pas ça pour accomplir ta dernière volonté, hein. Dans tous les cas tu resteras parmi nous donc bon ! » Je me tourne vers le lac. Ouch. Si je veux rentrer là-dedans il faut que je le fasse cash… oh non ne parlons pas d’argent pitiééé. Il faut que je le fasse bref. Une, deux, trois, inspiratiooon… extentiooon… go ! Je me mets à courir, la main de Dagga dans la mienne, prête à faire le gros saut. Et plouf.

Nicole me fait bien marrer avec son petit doigt en l’air à se la jouer thermomètre humain ; c’était pas la première fois que je voyais quelqu’un faire ça mais ça me laissait tout de même vachement perplexe. Je hoche vigoureusement la tête, feignant d’adhérer à ce que je soupçonnais être un mensonge éhonté. « Tu as bien raison. Prudence est mère de sûreté. » je lâche sans trop savoir ce que ça pouvait bien vouloir dire, juste histoire d’aller dans son sens. Elle entreprend ensuite de retirer ses fringues et, en attendant, forcément, je la matte, et ouvre des yeux ronds en découvrant son maillot de bain. J’en avais vu des comme ça dans des magazines de mode, mais jamais sur des personnes, genre réelles. Faut dire que j’étais pas une grosse pro en matière de personnes réelles aussi. « Classe ! » je laisse entendre, avec un légèrement hochement de tête appréciateur. Mon bikini noir ulta sobre faisait un peu tache à côté. Mais moi aussi un jour je serai riche et j’aurai des tenues démentielles. Ou pas. « Je fais pas ça pour accomplir ta dernière volonté, hein. Dans tous les cas tu resteras parmi nous donc bon ! » Un léger sourire, un peu timide, se dessine sur mes lèvres. J’aimerais y croire autant qu’elle a l’air d’y croire. Mais j’ai trop l’impression d’être le mouton noir de la bande, et ça va pas en s’améliorant. « Euh, ouais. On verra sur le moment, hein. » J’essayais de me dire que j’avais mes chances. J’avais pas été trop trop stupide dans mes nominations, quelque part ; j’avais trouvé le bon équilibre, et été raisonnablement stupide, ce qui me garantissait un minimum de chances de m’en sortir. Enfin bref. Retour à l’instant présent. Main dans la main, Nicole et moi nous dirigeons vers le lac, et forcément, je me mets à crier de façon légèrement stridente, parce que quand y’a des scènes quand ça dans les films ou les séries, y’a toujours une fille qui hurle comme une bécasse, et j’ai toujours rêvé de faire ça. On se jette finalement à l’eau – ahah. Je lâche la main de Nicole, et brasse l’eau du lac autour de moi, cherchant à revenir à la surface. J’y parviens après quelques secondes d’efforts acharnés. « Sacrebleu, elle est fichtrement froide ! » je m’exclame, peinant visiblement à me fixer sur un niveau de langage, passant du verlan à une forme archaïque de ma propre langue en moins de trois minutes. Avec fébrilité, je fais du surplace, agitant mes bras et mes longues pattes comme un chiot paniqué. « Bon. Maintenant, faut que j’apprenne à nager. » Toujours la charrue avant les bœufs. Ma séance de noyade avec Joshua ne m’avait rien appris, clairement.

Classe ? Ouais je sais, moi aussi je le kiff bien ma petite perle de créateur. Je me contente d’un petit sourire en guise de réponse, je suis un peu gênée à vrai dire. J’aime qu’on me flatte d’habitude, un petit regard envieux suffit pour me sentir encore plus fraiche qu’un Brise Touch&Fresh senteur îles nouvelles, mais j’apprécie Dagga et je n’ai pas envie de faire ma belle devant elle alors que je sais partinement qu’elle a à peine les moyens pour remplir son frigo. Poor gurl. Décidemment cette émission m’aura fait découvrir que les personnes précaires ont elles aussi le droit d’être mes potes. Ma pompote qui ne semblait d’ailleurs pas très convaincue sur son futur dans l’aventure. Moi je le sentais bien. Un fan venait même la harceler sur son blog pour lui dire de ne pas s’inquiéter alors c’est que vraiiiment elle n’avait pas de soucis à se faire. Au pire je mobiliserais mes fans… et ceux de Malik. Mon partenaire semblait over-apprécié donc. T’inquiète Daggou, Nikki la fourbe in da place. Anyway, on parlait de ? Ah ouais, sauter à l’eau. Hm. Chouette ! Courant comme des gueudins vers l’oasis, Rouckmouta hurlant comme une folle et moi riant aux éclats comme une attardée, nous sautions dans l’eau… GELEE ! Ah-mon-DIEU ! Ca déchiiiire. Et pas dans le bon sens du terme. « Sacrebleu, elle est fichtrement froide ! » Ah mais carrément! J’en ai le soufflé coupé. « Bon. Maintenant, faut que j’apprenne à nager. » Ok, là je reprends mon souffle. « QUOI ?! » Mes yeux s’arrondissent ; j’hallucine ! J’allais avoir un mort sur la conscience. Non ! Pourquoi moi ? La vie est cruelle. Enfin là c’est plus la mort. « T’es pas sérieuse ?! Mais pourquoi tu l’as pas dit genre… avant qu’on plonge ?!» Je la regarde se débattre puis inspire une longue bouffée d’air frai. « Ok. Zen. Tu vois tes jambes ? Fais comme la grenouille. Imagine un crapaud bien dégueu qui cache un prince super sexy. Bien, tu dois être la grenouille qui charmera ce crapaud. Oublie pas de faire pareil avec tes mains, comme ça.» Je commence à lui faire une démo… mais je m’aperçois vite que c’est une mauvaise idée. Très mauvaise idée ! Depuis quand on laisse quelqu’un qui sait pas nager se débrouiller seul ? Je mets les gaz et viens l’aider à rester à la surface afin qu’elle ne s’enfonce pas dans l’eau comme une enclume. « Tu préfères la métaphore de la baleine ? » Je lui offre un gigantesque sourire et ne peux m’empêcher de pouffer. La blague est mal venue mais bon au moins je me marre bien.

Mes mains s’agitent autour de moi, se mêlant à l’eau assez confusément, et je devrais paniquée mais tout cela me fascine bien trop pour que je m’alarme aussitôt. Comme j’aurais aisément pu l’imaginer, Nicole a pas l’air forcément enchantée par mon idée d’apprendre à nager sur le tas. « J’sais pas, ça me semblait plus ou moins dérisoire… comme détail. » je réponds, le souffle entrecoupé. Je pensais sincèrement que c’était la meilleure méthode pour apprendre à nager. Bien sûr, il y en avait d’autres, moins potentiellement dangereuses. J’avais lu un livre où un mec apprenait à nager dans son appartement par exemple. Mais le ton de l’auteur avait quelque chose d’un peu ironique, et le roman en lui-même avait un peu l’air d’une satyre, et globalement c’est jamais un très bonne idée d’imiter un personnage dont le narrateur se fout de la gueule à tout bout de champ, alors j’avais résolu de faire une croix sur cette technique. « Non mais en théorie je sais nager. J’ai vu des films et tout avec des gens qui nagent. » Je fais une pause, reprenant ma respiration, légèrement saccadée. « C’est juste au niveau de la pratique je pêche un peu… » J’ajoute, confiante malgré tout. J’avais failli me noyer y’a pas trois jours mais ça, hein… J’avais tiré une leçon de mes erreurs, blablabla. Et puis Nicole me donne des conseils, et heureusement que je deviens peu à peu fluent en langue nicolienne parce que c’est assez chaud de suivre le fil de ses pensées, parfois. « J’ai pas compris. Je suis une grenouille qui drague un prince transformé en crapaud ? » Elle effectue les mouvements devant moi et je m’efforce de l’imiter, en un peu moins gracieusement. « Mais le prince, c’est une grenouille alors ? » J’ajoute, dubitative. Si je suis une grenouille, je vais pas dragouiller un prince humain, ça n’a pas de sens. Et si c’est une grenouille, comment peut-il être sexy ? J’arrive pas à conceptualiser le potentiel sexuel d’une grenouille. Ça me dépasse juste. Une grenouille avec des abdos peut-être ? Enfin, je devrais peut-être arrêter de me prendre la tête à ce propos parce que, en attendant, je coule. Heureusement, Nikki vient me repêcher et en profite pour y aller de son gentil petit commentaire encourageant. Je recrache la tasse que je viens d’avaler, en évitant autant que je peux le visage de mon amie, avant de lui répondre : « Honnêtement, je préfère quand tu fais pas de métaphores. Du point de vue stylistique, j’dis rien, mais pédagogiquement, elles sont très mauvaises – no offense hein. »