Je la cherche. Mes yeux scrutent les moindres recoins du nid. Voilà plusieurs minutes que mes pas fond des allés/retours entre les parties du villages. Peut-être même une heure. Je suis à l’affût de la moindre bouclette, de la moindre parcelle de peau hâlée, du moindre rire un peu niais mais adorable. Et je ne trouve rien. Depuis le prime, je n'ai pas eu l'occasion de recroiser Asmaa. Je m'étais jeté sur elle un peu à l volée sans penser aux autres ou à ce qu'elle pourrait ressentir. J'ai été faible et trop excessif et j'ai eu l'impression de l’embarrasser plus qu'autre chose. Je m'en veux. Et puis, j'aimerais savoir comment elle va après toutes ces confessions. Le prime a été éprouvant pour elle et je veux être là. C'est la moindre des choses. J'arrive au niveau du lac. J'embrasse le paysage. Le soleil se reflète sur l'eau cristalline et me fait plisser les yeux. Ma main fait barrage et au finale, je repère ses jolies bouclettes. Elle est assise sur la plage, les yeux rivés sur le lac. Je m'approche doucement et m'assieds près d'elle. Mon bras se pose sur ses épaules et je l'attire contre moi en un sourire complice. Je l'embrasse sur la joue avec tendresse - comme le ferait un papa ou un grand frère. « C'est pas dans tes habitudes de te mettre à l'écart comme ça. » Ma voix est toute douce. Je ne veux pas la brusquer. Sa joie de vivre me manque. Elle était tellement communicative. Je l'enlace un long moment avant d'oser prononcer d'autres mots. « Désolée pour dimanche. Je ne voulais pas te mettre dans l'embarras. » Ce n'était pas mon but, réellement pas.

Cette semaine, la compagnie des autres ne m'avait pas paru indispensable. Même en ayant tenu à ne pas me morfondre sur mon sort, à rester normale et à ne pas clamer à la terre entière à quel point je me sentais mal et que parfois, j'aimerais véritablement mal doser ma drogue et me tuer à coup d'overdose. Non, à mes yeux, toute cette histoire avait prit des proportions conséquence à cause de ma réaction au prime. Si je n'avais pas réagis, alors tout cela ne se serait pas passé et à cette heure-ci, je serais peut-être en train de m'amuser avec quelqu'un. D'ailleurs, j'entendais dans mon dos des pas, amorcés par le sable. Je ne me retournais pas, comprenant que cette personne allait venir vers moi et non passer à côté de moi sans me regarder. Au contraire cette personne vint s'asseoir à côté de moi, Arès, ce qui me décrocha un soupir de soulagement. Je ne voulais pas taper la discutions, mais avec lui c'était différent, ça ne me dérangeait pas. Je tournais ma tête en sa direction, rapprochant en même temps mon corps du sien quand il vint enlacer mes épaules. Un timide sourire vint retrousser un peu le coin de mes lèvres lorsqu'il me déposa un bisou sur ma joue de l'autre côté. « C'est pas dans tes habitudes de te mettre à l'écart comme ça. » J'haussais les épaules dans un premier temps. Arès ne me connaît pas si bien que ça. Effectivement, ici, ça n'a jamais été mon habitude et pourtant, ma vraie nature aurait tendance à m'exiler toujours des autres... Mes yeux scrutaient le visage de mon copain, mon frère de cœur, le monsieur, cherchant mes mots. « Pas ici non... » Ma voix étaient faible, à la fois cassée par une certaine mélancolie et par un mal de gorge causé par le froid. Je baissais un instant les yeux. Je sentais qu'à un moment ou un autre, il me faudrait lui parler de mes problèmes, de mon addiction, de ce comportement qui n'était normalement pas mien. Mes problèmes de drogues quoi. Pourtant, ce n'était pas le sujet là... Je posais le côté de mon visage contre son épaule, ou tout du moins contre son bras, fermant un instant les yeux. « Désolée pour dimanche. Je ne voulais pas te mettre dans l'embarras. » Comme dans un sursaut, je relevais mon visage, plissant un peu mes sourcils. « Tu ne m'as pas embarrassé... » Commençais-je, en lui pinçant gentiment le bras. Non, nullement au contraire, il avait renforcé cette idée que je pouvais compter sur lui dans les coups dur. « C'est juste que... c'est moi qui ait tout dramatiser dimanche. J'ai eu une réaction inappropriée et j'ai trop parlé. » Avouais-je toujours d'une petite voix, à propos de cette histoire de cœur. Je lâchais un soupire. « Merci d'être là quand j'en ai besoin... » Nous nous étions pas revu ensuite, mais le savoir prêt à sauter dans mes bras pour me réconforter, me donnait chaud au cœur. Je ne savais pas quoi ajouter à ça, mis à part poser de nouveau mon visage contre son épaule. J'allais être bien muette et m'en excuser en silence...

Je n'avais aucunement eut l'intention de la blesser, l'embarrasser. Mes pieds s'étaient actionnés tous seuls lorsqu'Elliot m'avait gentiment fait remarqué qu'Asmaa n'avait pas l'air dans son assiette. Que cette histoire de coucherie cachée entre Nicole et Malik ne l'avait pas laissée de marbre. Un réflexe non maîtrisé qui m'avait peut-être valu les regards appuyés de certains autres candidats. Si cette perspective me passe très haut au-dessus de la tête, celle d'avoir perturbé Asmaa en revanche me perturbe. Ce petit bout de femme comparable à un petit rayon de soleil n'a pas pour habitude de s'éloigner autant. Je revoie son sourire, j'entends de nouveau ses éclats de rires. La voir seule de cette façon me décroche un soupire et un pincement au cœur. Pas ici ? « Qu'est-ce que tu veux dire ? » Les questions de ce genre n'étaient peut-être finalement pas les bienvenues dans cette conversation mais je ne peux m'en empêcher. Comme si l'intuition qu'elle me cache quelque chose d'important. Je pensais la connaître un minimum, savoir plusieurs choses de sa vie et puis, tout s'effondre finalement. Cela dit, je n'en tiens pas rigueur et me concentre sur l'humeur de ma petite sœur – l'appeler de cette façon me fait bizarre mais finalement, je m'y fait, c'est plutôt amusant. Je ne l'ai donc pas embarrassée. Elle me pince le bras, je grogne. Un réflexe, encore. Espérant lui décrocher ne serait-ce qu'un demi sourire. Parce que je suis gauche en matière de réconfort. Je ne sais pas m'y prendre. Les mots qui sortent de ma bouche et que j’interprète comme potentiellement réconfortants finissent par enfoncer encore un peu plus le clou. Je remue encore un peu plus dans la plaie. « T'as exprimé ce que tu ressens, qui peut t'en vouloir ? » Je ne lui en veux pas, en tout cas. J'ai tendance à garder mes ressentis pour moi mais je comprends que d'autres aient besoin de les exprimer. Et en ce sens, je n'ai pas trouvé Asmaa dramatique. Je resserre mon étreinte et enfouit mon visage un petit moment dans ses boucles. « C'est le moins que je puisse faire. » en tant que pas doué, j'entends. Je fais ce que je peux. Et je ne sais plus quoi dire. Mes yeux se posent sur le lac et le fixent un long moment. Les mots sont parfois de trop et dans mon cas, il le sont plutôt souvent.