L’horloge indique 9h25 du matin. J’ai à peine dormi. J’ai une mine affreuse et des cernes qui doivent descendre jusqu’au menton. Je me sens épuisée en ce moment. Pourtant, bien que nous ayons une journée de congé aujourd’hui, me voilà assise à la table de la cuisine, face à un jus d’orange et une tranche que pain que je ne mangerai probablement pas. Connor est encore couché, pourtant j’imagine qu’il se lèvera bientôt. C’est pourquoi j’ai déjà mis en marche la cafetière pour qu’il puisse avoir sa tasse de café dès son réveil. Je suis anxieuse. Je ne sais pas vraiment à quoi m’attendre lorsqu’il entrera dans la cuisine. Parce qu’encore une fois, nous nous sommes pris la tête hier soir juste avant de se coucher. Pour une connerie en plus. C’est toujours pour une connerie ces temps-ci. Et je suis patiente habituellement, je lui laisse un peu d’espace, me faisant le plus petite possible, parce que je sais qu’il ne va pas très bien. Je sais exactement les causes qui l’amène à ce comporter comme ça et je sais aussi qu’il est à fleur de peau, qu’il est sensible concernant certains sujets. Alors je fais attention, mais comme moi non plus ce n’est pas la grande forme depuis quelques jours, et bien disons qu’il y a des étincelles entre nous. Et ça me tue, je culpabilise à mort, comme en ce moment. Parce que je ne sais pas dans quel état d’esprit il sera en franchissant la porte. Mais je sais que nous devons avoir une discussion que j’essaie d’avoir avec lui depuis trois jours maintenant. C’est autant de sa faute que de la mienne, enfin, je ne sais plus trop, je crois que dans le fond nous comme n’importe quel couple normal. On s’engueule pour mieux se réconcilier. Je me sens soudainement étourdie, fermant les yeux l’instant d’une seconde, mes doigts se crispant contre le verre de vitre alors que je pose finalement mon regard sur mon homme qui semble encore endormie. Je reste silencieuse, me levant doucement pour aller chercher une tasse vide et lui verser le café chaud qui ne l’attendait que lui. Je m’approche finalement, déposant la tasse sur le plan de travail devant Connor alors que je me glisse derrière lui pour me coller contre son dos en laissant échapper un long soupire, déposant tendrement mes lèvres contre sa nuque. Puis les secondes passent, peut-être même les minutes, j’ai perdu le compte, parce que la proximité de son corps contre le mien me fait toujours un peu plus perdre la tête. Parce que je suis faible, autant que lui lorsqu’il est question de contact physique entre nous. Pourtant je le sens tendu. J’aurais aimé qu’il dise quelque chose, peut-être même qu’il s’excuse de son attitude dernièrement. Mais non. « Alors ça va être comme ça maintenant… ? On va s’engueuler puis on va se réconcilier en faisant l’amour simplement pour pouvoir s’engueuler à nouveau après ? » Mes mains viennent entourer sa taille fermement, comme si soudainement j’ai peur qu’il me quitte. Je me colle un peu plus contre lui alors que je me sens oppressé par cette situation, par ce que j’ai besoin de lui dire. « J’ai l’impression, parfois, que tu t’éloignes de moi Connor. Tu t’énerves après moi pour un rien… Si je te tape autant sur les nerfs, je peux m’en aller.» dis-je la voix fébrile, alors que j’élève un peu plus le ton que je ne le devrais. Et moi qui voulais être calme. Il sait que je mens, il sait que je ne partirai jamais. Et ça va avoir le don de l’énerver encore plus. Et y’a le côté en moi qui a envie de le provoquer une bonne fois pour toute. Parfois, j’adopte un comportement qui est tout sauf rationnel. J’imagine que l’attaquer de la sorte dès le réveil fait partie de ce genre de comportement.

Je crois que je vais devenir fou, je crois que chaque minute passé dans ce pays de dingue va me tuer. Parce que c'est un fait, je déteste la France, je déteste l'endroit que la production a loué pour nous. Je déteste cet endroit, j'attends avec impatience de pouvoir repartir à Dublin, changer d'air. Je ne dis pas que tous nos soucis seront résolu mais améliorera sans doutes des choses. Cette saison a été un véritable enfer en tout point. Je me suis réveillé dès que Esther s'est levé pourtant je n'ai pas ouvert les yeux, je n'ai pas bougé, je lui ai fait croire que je dormais encore pour lui laisser du temps, pour nous laisser du temps. Parce que l'ambiance est pourrie et parce que je suis conscient que j'en suis la première cause, ma mauvaise humeur, mon impulsivité me fait réagir au quart de tour à chaque fois. C'est nouveau pour nous les engueulades, et je me console en me disant que c'est le lot de tous les couples, mais je ne peux pas m'empêcher d'être coupable. Je sais que je pourrais empêcher tout ça, mais je n'arrive pas à contrôler mon impulsivité, ma fragilité. Celle que je tente de dissimuler aux yeux de tous. Je n'arrive même pas à parler de ce qui me tracasse à Esther, elle n'est pas stupide, elle a sans doute compris. Je me lève au bout de plusieurs minutes puisque je ne vais pas pouvoir me résoudre à rester au lit toute la journée. L'odeur du café chaud vient me chatouiller les narines. Je pénètre dans la cuisine en traînant les pieds, Esther est là, et elle se lève aussitôt pour venir me servir du café. Je reste posté devant le plan de travail, je suis statique, silencieux. Je ne dis rien parce que je sais que je risque de partir au quart de tour, elle vient rapidement se coller contre mon dos et au lieu d'apprécier le contact je me crispe. Je l'aime comme un fou, je ne pourrais pas imaginer ma vie sans elle. Jamais. Pourtant, ce simple contact aussi agréable soit-il me rend nerveux. Son baiser à tendance à m'apaiser. J'incline la tête, ma première réaction depuis que je suis entrée dans cette pièce, je dépose un baiser contre sa nuque. J'ai l'impression qu'elle m'échappe un peu plus chaque jour, j'ai l'impression qu'à force de réagir comme un con elle va finir par s'en aller. C'est stupide, mais c'est plus fort que moi. Je soupire. Elle brise le silence, et j'aurais préféré qu'elle s'abstienne. Cette question m'énerve. « Non, oui, peut être, j'en sais rien. Tu penses que j'agis de cette manière simplement pour te faire chier ? Non, ça me fait chier aussi Esther... » Du temps, c'est trop facile. J'ai légèrement haussé le ton même si finalement je suis lassé de cette situation. Elle serre ma taille, je pose mes mains sur les siennes. Mais j'explose à sa remarque, si bien que je me détache d'elle assez brusquement. « Alors quoi ? C'est ta façon de me dire que tu veux partir ? Et bien va-t-en qu'est-ce que t'attends ? » J'envoie valser la tasse de café qui vient se briser sur le sol. Me brûlant au passage. « Putain ! » Je suis au bord de l'explosion, je ne comprends même pas comment elle fait pour encore me supporter. Je ne me supporte pas moi même. J'ai honte de la personne que je suis devenu. Je suis un véritable connard, je suis sur le point de foutre en l'air tout ce qui me tient à coeur. Esther, celle pour qui je pourrais donner ma vie sans la moindre hésitation.

Ce n’était pas l’attitude que je voulais adopter dès le départ. J’avais eu tout le temps pour réfléchir à ce que je lui dirais, quel mot exact sortirait de ma bouche et de quelle façon cela serait fait. Mais voilà que, au moment où je sens son corps se crisper à mon contact, mon esprit se renverse, oubliant tout, sauf le simple fait qu’il n’apprécie pas que je sois près de lui. Mon cœur se contracte, je me demande comment on a pu en arriver là. Je sais que ce n’est qu’une mauvaise passe, qu' il y a toujours des moments un peu plus dur dans un couple, mais nous, je ne pensais pas que ça nous arrivait. Et le soulagement que j’ai lorsqu’il dépose ses lèvres contre ma nuque ne dure qu’une fraction de seconde, puisque sa réponse n’est pas celle que j’attendais. Il aurait du être catégorique, me dire que non, les choses ne seraient pas comme ça dans le futur. Je sais que ça le fait chier, je sais qu’il n’est pas bien dans tout ça. J’ai l’impression qu’il n’est pas bien dans sa propre peau en ce moment. Et moi je suis impuissante, je ne peux rien faire pour l’aider, et chaque fois que j’essaie, je me prends un mur en plein visage. Je veux lui faire comprendre, je veux savoir si comme moi, il sent la distance se créer entre nous. Alors que ce n’est certainement pas le bon moment dans nos vies, de ressentir un tel éloignement. Mais j’ai dit la phrase de trop. Mon calme c’est envolé en apportant le sien aussi par le fait même. Je le sens se détacher violemment de mon étreinte, comme si on m’arrachait une partie de moi. Et avant que je ne comprenne ce qui se passait, la tasse éclatait en morceau, éclaboussant Connor de café par la même occasion. Je me recule, en automatisme de défense, ouvrant grand les yeux, alors qu’on peut clairement lire la peur et l’incompréhension sur mes traits. Je ne suis pas certaine d’avoir bien compris. Est-ce qu’il est vraiment entrain de me dire de partir ? Mon corps se met à trembler essayant de me parler mentalement pour rester calme, pour ne surtout pas embarquer dans son moment d’égarement. Mais je suis déjà sur le point d’exploser moi aussi. Je me demande s’il sait à quel point il me fait mal à ce moment même. « Est-ce que tu t’entends parler ? » Je ne crois pas non, je pense qu’il n’est plus conscient de ses agissements. « Je ne te reconnais plus Connor… Je n’ai pas dit que je voulais partir, mais clairement, avec la façon dont tu me traites en ce moment, j’aurais bien envie de faire mes valises et de foutre le camps. » Je n’ose plus le regarder à présent, attrapant un linge pour essuyer la vaisselle, me penchant aussitôt pour ramasser le dégât qu’il vient de faire. J’ai les larmes qui me montent aux yeux, mais je ne veux pas pleurer, je ne veux surtout pas lui montrer à quel point il est entrain de détruire tout ce que nous avons bâtit depuis la fin de notre saison dans Fake Lover. Je me relève, face à mon inaptitude à bien nettoyer en ce moment. « Peut-être que Cooper avait raison… Peut-être qu’on est allé trop vite… » J’ai la voix qui casse en lui disant ces quelques mots. Il va me détester de m’entendre dire ça, mais j’ai comme l’impression de me retrouver au pied d’un gouffre. J’ai l’impression de ne plus savoir quoi faire. Et j’angoisse face à la suite, au oui, j’angoisse.

Je sens mon corps se dérober lorsque Esther ouvre la bouche, j'ai l'impression de flancher lorsqu'elle me demande si ça va être comme ça tout le temps. Pourtant, je ne bouge pas, je reste figé mes deux pieds sont bien ancré sur le sol glacé de la cuisine. Au lieu d'être apaisé comme je l'ai toujours été lorsqu'elle s'est collée à moi je me suis raidi comme si le contact de sa peau sur la mienne me révulsait. Ce qui est totalement faux par ailleurs, c'est tout l'inverse. Elle me rend fou, je suis fou amoureux d'elle même si clairement, ce n'est pas évidemment en ce moment. Je suis sur les nerfs, constamment au bord de l'implosion et même si je donne constamment le change face aux caméras, à la maison c'est une tout autre affaire. Si au début j'estimais avoir de bonnes raisons d'être comme ça aujourd'hui ça me semble plus ridicule encore. Pourtant tout ceci m'a rendu plus fragile encore qu'il état possible de l'être. Je ne suis pas guéri, je ne le serais jamais je crois. Cette fissure ne sera jamais colmaté, pourtant il faut que je me reprenne, il faut que je prenne sur moi comme je le faisais ces derniers mois pour Esther. Elle ne mérite aucunement que je lui inflige tout ça. Pas elle. De prime abord j'ai l'air calme et je lui réponds avec toute l'honnêteté qui lui est dû pourtant, cette réponse ne semble pas lui convenir. Et c'est ce qui me déclenche cette rage qui me fait envoyer cette tasse de café qu'elle vient de me servir à travers la pièce. Je m'emporte, je ne pèse pas la portée de mes mots. Je ne réalise pas que je peux lui avoir fait du mal parce que l'énervement l'emporte sur tout le reste. Je crois que je l'effraie mais ça non plus ça ne m'atteint pas, pas totalement du moins parce que je ne peux pas m'arrêter de crier pourtant à l'intérieur mon estomac se tord, je souffre de la faire souffrir. Je la regarde nettoyer impuissant, je suis comme tétanisé. « Esther, je ... » Je ne sais pas quoi dire, je ne sais pas quels mots prononcer, si elle ne me reconnait plus, il en va de même pour moi. Je ne sais plus du tout qui je suis en ce moment. Je change en permanence. Je ne suis plus cet adolescent en pleine révolte que j'étais avant l'accident, ni l'homme qui se battait pour retrouver une vie normale. Je suis loin d'être ce candidat de télé-réalité qu'elle a connu. Aujourd'hui, je me rapproche plus de l'image du présentateur machiavélique, foncièrement mauvais qui sévit chaque dimanche. Je suis totalement perdu. Je m'apprête à faire un pas vers parce que je culpabilise, parce que mon humeur est en dent de scie parce que je ne veux pas qu'elle parte même si je viens de lui dire le contraire. Je m'approche, mes doigts effleurent son bras mais elle prononce le prénom de trop. Mon sang ne fait qu'un tour. Je vois rouge. « Cooper ? Esther. T'es vraiment entrain de me parler de Cooper ? » C'est la goutte d'eau qui fait déborder le vase. Et si j'ai de moins en moins de rancoeur envers son partenaire, si je commence à accepter qu'elle a besoin de lui dans sa vie ce n'est pas vraiment le moment. « Cooper est jaloux ! Il est jaloux, est-ce que tu t'en rendras compte un jour ? Est-ce que tu te rappelles où il était lorsque tu pleurais, lorsque tu te morfondais parce qu'il te repoussait ? Dans le lit d'une autre. Et il a commencé à s'intéresser à toi seulement lorsqu'il s'est rendu compte qu'il te perdait à mon profit. C'est facile de te dire plus tard qu'on précipite les choses et qu'on va trop vite. Tu m'étonnes ça l'emmerde de te voir enfin heureuse, et sans lui qui plus est. Alors son jugement de sale hypocrite frustré, il peut se le foutre au cul. » Je crois que j'y suis allé un peu fort. J'ai les yeux rougis par la colère mais j'ai également les larmes qui me montent aux yeux tant cette situation m'exaspère. « Comment as-tu pu ne serait-ce que l'évoquer alors que... Ma voix se brise soudainement, j'ai toujours complexé par rapport à lui, elle le sait, parce que c'est lui qu'elle a aimé, bien avant que l'idée même qu'il puisse y avoir quelque chose entre nous ne germe dans nos esprits. J'ai toujours pensé que s'il lui avait dit oui, il n'y aurait jamais eu de nous. « Est-ce que tu... Est-ce que tu as toujours des sentiments pour lui Esther ? » J'essaie de garder mon calme pourtant, je tremble de tout mon être, je sers mes points, j'essaye de contenir cette colère, l'idée même qu'elle puisse être attiré par lui, ça me terrifie.

Je crois que je suis sur le point de fondre en larme. Et alors que je suis penchée, essayant de ramasser le café étendu sur le sol de la cuisine, je me demande comment nous avons pu en arriver là. Je ne comprends pas. On s’aime. N’est-ce pas assez, de s’aimer ? Je viens à lui faire face à nouveau, frissonnant à l’entente de mon prénom et de sa main contre mon bras. Je sais qu’il veut s’excuser de son comportement. Pourtant, à la place de lui laisser le temps de s’exprimer, je décide plutôt d’émettre une réflexion. Une réflexion concernant Cooper. Je sais qu’elle est de trop et je sais qu’elle le mettra dans une colère intense. Ce n’était pas le but. Je commence simplement à me dire que nous avons tellement sauté d’étapes, qu’on arrive à un mur aujourd’hui. La passion est destructrice et l’amour fait mal à en croire ce qu’on lit dans les livres et ce qu’on voit dans les films. Est-ce que nous nous étions consommés trop rapidement ? J’ai un nœud qui se forme au ventre à cette idée. Puis je me recule, parce que Connor explose. Je crois que je ne l’ai jamais vu dans cet état. Je suis détruite à l’idée de lui avoir fait du mal en lui parlant de Cooper. Je peux me voir dans le reflet des larmes qui se forment dans son regard océan. Je n’aurais qu’une envie, le prendre dans mes bras et lui demander de tout oublier. Pourtant je le laisse continuer. Il insulte Cooper comme je ne l’ai jamais entendu le faire, et je n'aime pas ça. Et si ma phrase était de trop pour lui, celle qui termine son monologue au sujet de mon ancien partenaire est de trop pour moi. « Ne parle pas de lui comme ça. » Je suis catégorique malgré le tremblement qui se fait sentir dans ma voix. Je fixe Connor, ne sachant pas quoi dire d’autre. Jusqu’à ce qu’il me pose la fameuse question. Il veut savoir si j’ai toujours des sentiments pour Cooper. Si cela a été le cas durant quelques mois à ma sortie de Fake Lover, Connor devrait pourtant savoir clairement où je me situe face à Cooper. « Non… Non, je ne suis plus amoureuse de Cooper ! Combien de fois vais-je devoir te le dire ?! Toi arrêtes d’être jaloux ! J’ai besoin de Coop’ dans ma vie, et ce sera toujours le cas. Je crois qu’à quelque part, il y a une partie de moi qui lui appartient. Mais c’est de l’histoire passée, merde !» Je suis énervée, terriblement énervée, autant qu’il l’était il y à peine quelques minutes. Je parle fort, alors que je ne vois pas pourquoi je le fais. Une larme vient s’écraser sur ma joue alors que je continue sur ma lancé. « Et puis à ce que je sache, ce n’est pas avec Cooper que je vais avoir un enfant ! » Boom. J’ouvre grand les yeux, me rendant compte de ce que je viens de lui balancer à la figure. Non. Non, non, non. Ce n’était pas comme ça que je devais lui annoncer la nouvelle. Mais qu'est-ce qui m'avait prit. J’avais tout prévu, chaque mot, chaque geste. Je viens de tout gâcher, et ce, par un excès de colère. Et déjà que ce n’est clairement pas la nouvelle la plus facile à dire, je lui balance en plein visage un truc qui n’était pas supposé arriver avant un moment. Je n’étais pas censé être enceinte. Pas toute suite, c’était beaucoup trop tôt. Je ferme les yeux, incapable d’affronter son regard. Ma respiration se fait saccadée par toutes les émotions qui me traversent, me parlant mentalement pour ne pas angoisser à cet instant même. « Connor… Je… Ce n’est pas comme ça… que tu devais l’apprendre… Je... » Les larmes s’écrasent sur mes joues alors que je tente une approche désespérée en sa direction, étirant ma main pour venir saisir la sienne. Je suis la pire des garces, je n’arrive pas à croire ce que je viens de faire. Je suis terrorisée, et la personne vers qui je me tourne habituellement pour recevoir du courage, doit profondément me détester. Et pour cause. Tout cela est hors de mon contrôle, je me sens totalement déconnecté de la réalité, et pas dans le bon sens malheureusement. Être enceinte devrait être parmi les meilleurs moments de ma vie. Pourtant, je suis loin d’être en état d’euphorie. La peur que je ressens ne se décrit même pas. J’ai peur. J’ai peur que Connor ne veuille pas de cet enfant. J’ai peur qu’il ne veuille plus de moi, qu’il m’abandonne.

Spoiler:

Cette histoire me dépasse je me demande si on est pas arrivé au bout de notre route. Si nous étions vraiment fait pour vivre heureux jusqu'à ce que la mort nous sépare. Je me dis parfois, dans des périodes de doutes, un peu comme ce matin où rien ne semble aller que je ne suis peut être pas l'homme qu'il lui faut. Qu'au lieu d'être constamment entrain de douter de tout ce qui se passe autour de moi ces derniers, je devrais profiter de sa présence à mes côtés, je devrais être capable de faire la part des choses dans mes relations et épargner Esther. Pourtant depuis tout ceci c'est elle qui prend, elle qui récolte les fruits de ce qui me déchire à ce point. Je pensais que ma fragilité était de l'histoire ancienne, que Fake Lover était parvenu à faire de moi un homme fort et épanoui, pourtant je ne le suis plus actuellement. Je sais que j'agis comme un connard la plupart du temps, que je vais trop loin et que ma mauvaise humeur constante ne fait que nous fragiliser encore un peu plus chaque jour. C'est pour cette raison que je suis sur le point de faire un pas vers Esther lorsque je la vois entrain de frotter le sol tout tremblante. Mais elle attise pourtant ma colère, réamorce l'incendie qui me consume. J'explose. Je ne suis pas tendre avec elle. Je ne fais dire que ce que je ressens face à la situation, ce que j'ai toujours ressenti vis à vis de Cooper. Ce que je m'étais toujours abstenu de dire pour ne pas la blesser pourtant cette fois je ne me retiens pas et je lui fais mal comme elle m'a fait mal. « Mais alors ne l'évoque pas, ne l'évoque pas alors est déjà entrain de se déchirer ! PUTAIN ! » Je ne le supporte pas, elle le sait, je ne supporte pas ses références constantes et si je le tolère d'ordinaire là c'est au dessus de mes forces. J'essaye de me calmer, j'essaye de me contenir et c'est à son tour de hausser la voix. Je sais que je suis jaloux, je me suis toujours senti diminué face à lui, elle le sait. Elle est pourtant avec moi aujourd'hui, elle reste malgré ce que je lui fais subir et ça devrait suffire, la colère me fait dire n'importe quoi. Elle dit aussi n'importe quoi. Une partie d'elle appartient à Cooper, non mais je rêve. « Tu t'enfonces Esther, est-ce que tu t'entends parler ? » Ce n'est pas la meilleure façon qu'elle a trouvé pour atténuer mes craintes. Absolument pas. Une larme franchit finalement la barrière de ses yeux. Cette larme me fait l'effet d'un poignard qu'on viendrait de me donner. Je m'en veux, mais je n'ai pas le temps de me lamenter sur mon sort, de m'en faire davantage puisqu'elle lâche une bombe. Je la regarde, je ne suis pas certain d'avoir tout compris. « TU QUOI ? » Mon coeur fait un bon dans ma poitrine, je suis en colère, je suis en colère parce que je comprends qu'elle est enceinte, qu'on va avoir un bébé et qu'elle me le hurle au visage comme si cette nouvelle était un fardeau pour elle. Elle vient de me dire qu'elle attendait un bébé, comme ça. C'en est trop, des larmes roulent sur mes joues, un flot de larmes que je ne parviens plus à contenir. Elle se remet à parler mais je n'entends rien. Je suis sonné, je suis crispé, je suis à la fois en colère et heureux. Je me tends, mon sang se glace lorsque sa main effleure la mienne, c'est l'électrochoc. « Tu... Je... Esther... Je... » Je n'arrive pas à articuler quoi que ce soit. « Tu le sais depuis quand ? » Je suis beaucoup plus froid que je le souhaiterais. Ma voix se brise, mes larmes ont cessé de couler, je crois que mon corps ne contient plus d'eau de toute façon. J'attrape sa main, je l'attire vers moi. Je glisse mes mains sur sa taille, je ne sais pas ce que je vais lui dire. Je sais juste que je ne veux pas qu'elle ait peur. Cette révélation maladroite a agis comme un électrochoc. Je la regarde, elle n'ose pas croiser mon regard, elle pleure, ça me tue. Je place un doigt sous son menton pour le lui relever, en douceur, sans lâcher sa taille. « C'est, une bonne nouvelle. C'est bien non ? » Un bébé, j'ai toujours voulu un bébé avec elle, c'est trop tôt. Beaucoup trop tôt. Mes parents se sont à peine habitué à nos fiançailles rapide, un bébé c'est une étape supplémentaire. Je ne suis pas sûre que ce soit la meilleure période, le meilleur moment. A moins que... Je soupire. Je baisse les yeux un instant. « Je te demande pardon Esther, je suis désolé, pour tout ça. Je suis désolé d'être un gros con depuis tout ce temps. Excuse moi. » Je fond en larme, je suis pitoyable. J'enfouis ma tête dans son cou, je suis trop honteux de mon comportement envers elle. Je suis un gros con.

Évoquer Cooper alors que nous sommes entrain de nous crier par la tête n’était définitivement pas une bonne idée, je m’en rends compte maintenant. Mais est-ce que Connor est obligé de le traiter de tous les noms ? Je sais qu’il ne l’apprécie pas, ça va, je l’ai toujours su. Mais Cooper est important pour moi, et j’aimerais qu’il l’accepte. Autant dire que c’est une mission impossible. Je me sens dépassé par les événements, je ne comprends pas pourquoi nous en sommes à nous engueuler à propos de Cooper alors qu’il n’est pas vraiment la raison de nos problèmes cette fois-ci. Et plus je parle, et plus je suis en colère. Je ne me contrôle plus et je ne contrôle certainement plus ce que je dis. Et Connor ne perd rien pour me le faire remarquer. Ses larmes, cet air qu’il a sur le visage, mon dieu, ça me tue. Et là, sans attendre, je lui crie la nouvelle. Ce que je peux être conne, c’est incroyable. Je me sens faible à l’instant. Faible et démunie, parce que j’ai l’impression d’avoir tout gâché en une seule seconde, une seule phrase. Je regarde Connor, le visage marqué de larme, lisant la surprise, la colère et l’incompréhension dans son regard. Il crie, je pleure encore plus. Je n’arrive plus à le regarder, alors qu’il essaie clairement de me dire quelque chose, de s’exprimer sur la situation, tout cela avec beaucoup de difficulté. « Depuis trois jours. Je ne voulais pas te le cacher… C’est juste… Ces derniers temps, c’est difficile… Et… » J’éclate en sanglot, alors que je fixe le plancher de la cuisine avec insistance. Pourquoi est-ce que j’ai l’impression qu’il va quitter la pièce dans les minutes qui vont suivre ? J’ai ce vide qui me pèse, qui me ronge, qui fait mal et me donne un sentiment d’impuissance. Mais il saisit ma main et m’attire finalement dans ses bras. Je suis submergée par le soulagement de me retrouver près de lui. De sentir ses bras autour de ma taille et de comprendre qu’il ne m’abandonnera pas face à cette épreuve. Il me force à le regarder, me disant que c’est une bonne nouvelle. Je respire, j’essaie de me calmer et surtout de cesser de pleurer. « Oui… Je crois. » Je ne suis pas certaine, puisque je crois que je suis encore sous l’effet de la surprise, bien que cela fait trois jours que je le sais. Être enceinte, ce n’est pas une mince affaire. C’est tellement de responsabilités, ça va changer notre vie. Notre vie à deux, qui malheureusement, bat déjà de l’aile en ce moment. Alors j’en viens à me demander si notre couple va survivre à ça. Je ne devrais tellement pas penser comme ça, j’ai l’impression d’être une horrible personne. Et alors que je viens pour me coller contre son corps, et passer mes bras autour de son cou, Connor reprend la parole, et ça me fait encore plus mal de le voir dans un tel état. Il ne devrait pas se traiter de con ainsi. Je le serre dans mes bras, de nouvelles larmes coulant sur mes joues, incapable de m’en empêcher. « Non… Dis pas ça Connor. Je ne t’en veux pas. Je ne pourrais jamais t’en vouloir.» Parce que j’étais comme ça, il pourrait me traiter de tous les noms, de toutes les façons, et je ne partirais pas. Je m’accroche. Parce que je l’aime. Et je sais qu’il m’aime. J’embrasse son front, une de mes mains venant caresser ses cheveux, et j’en viens à m’en vouloir, d’avoir été dur avec lui, alors que je savais qu’il avait simplement besoin de temps. Du temps pour oublier ces derniers mois. « Dis moi que tout va bien aller, s’il-te-plait… Rassures-moi. Je suis terrifiée, j’ai peur… Je n’ai pas l’impression qu’on est prêt à avoir un enfant… » Je suis franche avec lui, parce que c’est exactement ce que je ressens en ce moment. Une énorme incertitude face à cette nouvelle. L’année prochaine, peut-être, après notre mariage. Mais là, dans neuf mois seulement ? C’était trop tôt. Je veux de cet enfant, il n’y a aucun doute sur ce point. Seulement, est-ce que je suis prête à l’avoir, c’est autre chose. Je n’ai pas de modèle à suivre, je ne sais pas ce que c’est d’être une bonne mère. Enfin, si, j’ai observé les autres autour de moi, mais jamais je n’ai vécu en compagnie d’une telle personne. Je n’ai pas de point de repère, et ça m’inquiète. Je regarde Connor, la crainte se lisant sur mes traits, alors que je viens caresser sa joue tendrement, essayant le plus possible de l'apaiser.

Esther m'annonce qu'elle est enceinte depuis trois jours, enfin non qu'elle le sait depuis trois jours. Ça va, je peux le supporter, elle ne me le cache pas depuis un mois ou plus encore. Et quand bien même, comment pourrais-je le lui en vouloir ? J'agis comme un con depuis plusieurs semaines, mois peut être. J'ai perdu la notion du temps. Je suis une vraie pourriture, j'ai encore beaucoup de mal à croire qu'elle puisse supporter mes sautes d'humeur. Elle éclate en sanglot et je me sens encore plus couple de lui faire subir tout ça, de lui infliger autant de peines. Elle a déjà vécu l'enfer et je l'y plonge une nouvelle fois. J'exagère sans doute, mes crises n'ont sans doute rien à voir avec tout ce qu'elle a pu vivre par le passé mais au lieu d'être là pour elle, j'ai tendance à l'abandonner, par égoïsme. Par pur égoïsme. Je l'attire contre moi. Ça me crève le coeur de la voir ainsi par ma faute. « Calme toi Esther, je t'en prie. Arrête de pleurer, s'il te plait. » Non vraiment, ce n'est rien du tout qu'elle me l'ait caché, je ne lui en veux pas. J'ai l'impression que cette nouvelle m'a permis de me reprendre, de saisir toute l'importance de cette annonce. Je la sers un peu plus dans mes bras, j'essaye de reprendre mon rôle, de la rassurer comme je le peux même si au fond je suis tétanisé à l'idée d'être père, j'ai peur de tout gâcher comme je suis entrain de tout gâcher avec elle, à cause d'une histoire stupide. D'un sentiment stupide. Je prends dorénavant conscience de ma stupidité. J'éclate en sanglot à mon tour, je n'arrive plus à contenir, je débite tout un tas de trucs, je m'en veux énormément. Je m'en veux d'agir comme ça avec elle et tout prends un sens alors qu'elle m'annonce cette nouvelle qui me rempli de joie. Je parviens à me calmer et à relever la tête grâce à elle. Grace à ses baisers qu'elle dépose sur mon front, ses mains qui caresse mes cheveux. Ces gestes tendres m'ont tellement manqué durant tout ce temps, par ma faute ça va de soit. C'est entièrement de ma faute. « Bien sûr que tu devrais m'en vouloir Esther, je t'ai pourri la vie, j'ai reporté tous mes tracas sur toi. Tu n'y es pour rie, et pourtant, je t'ai fait endurer ça. Je suis tellement con, je suis tellement désolé. Tellement désolé. » Je déglutis et j'inspire profondément. J'embrasse son front à mon tour et j'attrape son visage entre mes mains, je plonge mon regard dans l'océan très humide de ses yeux. J'arrive à lire l'inquiétude dans son regard. Elle est terrifié à l'idée d'être mère et ça peut se comprendre, sa mère n'est pas ce qu'on peut appeler un exemple. Et elle s'empresse de confier ses doutes. Il est en mon devoir d'agir convenablement et de la rassurer. Sans lui mentir, mais sans lui faire peur pour autant. « Tout va bien se passer mon ange, tu as peur mais c'est normal, j'ai peur aussi. Mais tu vas être parfaite, j'ai confiance en toi, en nous. On va être de bons parents, et même si on n'est pas les meilleurs parents du monde on va tout mettre en oeuvre pour y arriver. Ai confiance en nous. » Je souris timidement, je ne sais pas si je suis parvenu à la rassurer, parce que mine de rien il faut que je me rassure moi aussi. Elle a une horrible mère, j'ai eu deux parents mais pas vraiment des modèles à suivre, surtout pendant les dix-sept premières années de ma vie. Alors je suis persuadé qu'on va être meilleurs qu'eux, à tous points de vus. Je l'embrasse avec délicatesse. Il va falloir qu'on reparte sur de meilleures bases et j'ai l'impression que cette grossesse arrive à point finalement. Oui, j'ai envie de m'en persuader.

J’ai l’impression d’avoir le souffle coupé, que l’air ne parvient plus à mes poumons. Je ne peux plus respirer. Et les larmes s’écrasent sur mes joues de façon pitoyable, alors que la détresse s’affiche dans mon regard. Tout ce que je veux, c’est qu’il reste à mes côtés. Je ne pourrais simplement pas supporter un abandon de plus. Mon cœur ne le supporterait pas. Et avec la façon dont nous venons de nous parler, c’est vraiment l’impression que j’ai. Qu’il va partir. Qu’il va me quitter et qu’il ne veut pas de cet enfant. Pourtant c’est tellement idiot, de penser ainsi. Et je me maudis encore plus de pleurer autant lorsqu’il me prend dans ses bras, lorsqu’il me supplie de bien vouloir arrêter de pleurer. J’aimerais bien, mais c’est un surplus d’émotion qui sort en ce moment, qui ne se contrôle surtout pas. Mais je fais un effort, c’est beaucoup plus facile en étant collé contre lui à présent. En sachant qu’il est là pour moi. Et alors que graduellement, je reprend mon souffle, c’est lui qui éclate en sanglot, s’excusant un nombre incalculable de fois pour son comportement des dernières semaines. Au fond, c’était un peu cela que j’attendais, des excuses. Même si je ne serais jamais partit, que j’aurais enduré sa mauvaise humeur durant des mois encore, l’entendre me dire qu’il était désolé me rassurait tout de même. Parce qu’à un certain, j’en étais venu à me demander si ce n’était pas moi le problème, si c’était de moi qu’il ne voulait simplement plus. Et lorsque mon insécurité cogne à la porte, il est vraiment difficile pour moi de m’en débarrasser. Ma main toujours dans ses cheveux, je ne cesse de caresser ceux-ci, alors que le contact visuel se fait à nouveau entre nous. « Je sais Connor… Je sais. Je te pardonne, ça va… » C’est tellement rare que mon rôle soit de le rassurer. Habituellement, cela revient toujours à Connor de le faire, pour une tonne de raisons. Mais les rôles ne sont pas inversés bien longtemps, puisqu’on en vient à parler du bébé, de notre bébé. Et je ne peux m’empêcher de lui confier que je ne crois pas que nous sommes prêts à avoir une telle responsabilité. Avoir confiance en nous. C’était tout ce que j’avais à faire et tout irait bien ? Je savais qu’il le pensait vraiment, mais ça ne fonctionnait pas comme ça. C’était tellement plus difficile. J’ai confiance en lui et moi, j’ai beaucoup plus confiance en nous qu’en moi en fait. Mais je n’étais tellement pas prête à avoir un enfant, cela fait trois jours que j’essaie de me convaincre que tout ira bien, pourtant, y’a toujours quelque chose qui me fait douter. « Je suis certaine que tu feras un excellent père. Mais moi… Et si jamais je suis comme elle ? Et si jamais je décide de tout foutre en l’air, de virer folle comme elle ? Je sais, c’est con, je ne consomme pas, je ne suis pas une grosse droguée dégueulasse… Mais… » Je m’arrête, parce que je dis clairement de la merde. Je ne peux pas être comme ma mère, jamais je ne serai comme ma mère. C’était quelque chose d’écrit dans le ciel. « Y’a pas un guide d’emploi pour élever un enfant… » Non ça n’existe malheureusement pas. Mais je dois arrêter de m’en faire aussi. Je regarde Connor, et je me dis que je ne devrais même pas avoir de doutes. Qu’il est vrai que c’est beaucoup trop tôt pour avoir un enfant, alors que cela ne fait même pas encore un an que nous sommes ensemble. Mais que d’un autre côté, je ne peux pas nier que j’ai pensé à plusieurs reprises, que j’ai rêvé de ce moment. Il vient m’embrasser, et alors qu’il se recule de quelques centimètres en mettant fin au baiser, je retourne capturer ses lèvres subitement, peut-être de façon un peu trop précipité, mais aussi marqué d’une grande douceur et de tendresse. Mes doigts caresses sa nuque, puis descendent contre ses épaules. « Je t’aime tellement… » Je murmure tout bas, contre ses lèvres, alors que je suis encore émotive par tout ce qui vient de se produire. Je relève les yeux vers lui, me collant encore un peu plus contre lui, restant silencieuse un instant. « On va avoir un bébé… » Comme si j’avais besoin de le dire et le redire encore pour finir par le croire. Un sourire très fin et discret apparaît sur mes lèvres. C’est la réaction normale des gens habituellement. Sourire, démontrer sa joie. Je ne veux pas qu’il croit que je ne suis pas heureuse, puisque ce n’est pas le cas. Mais c’est dur d’y croire en ce moment, c’est tout.