C’est vrai que c’est drôle, de se retrouver dans un supermarché toute seule. D’habitude, je fais ça avec Kat. Toujours Kat. Parfois Jamie. Mais en général, il s’en fiche, lui, de tout ça. Je me demande comment il faisait, avant qu’on ne soit là, avec Kat, parfois. Je suis dans un rayon, il y a du chocolat partout. Vrai que j’ai envie d’un peu de chocolat, comme ça. Mais moi, je ne m’imaginais pas être dans une galère comme ça, pour une simple envie de chocolat. Une galère, parce qu’il y a beaucoup de choix. C’est vrai ça. Des marques, j’en connais pas beaucoup, moi, mais il y en a plein. Une fille arrive, je ne la connais pas, moi. Même son prénom, je le ne sais pas. « trop de choix, on devrait pas avoir autant de choix, c’est stupide, du chocolat, c’est du chocolat, mais non, maintenant, il y a du chocolat noir, blanc, au lait, avec des noisettes, du caramel, praliné, pas praliné, croquant, fondant, extra fondant, extra fin, d’abord, ça veut dire quoi, ça, du chocolat fin ! » je la regarde. Je me suis rendu compte que j’ai beaucoup parlé. Et vite. Mince. Je préférais avant. C’était plus simple. Un morceau de chocolat, c’était un morceau de chocolat, et je ne me posais pas toutes ces questions. Mais là, je ne sais pas lequel choisir. Et ça m’énerve, il faut forcément faire un choix, mais moi, je ne sais pas. « tu manges quel chocolat toi ? » je suis sûre que son goût à elle, c’est le bon.

Elle m’apprend qu’il existe du chocolat avec des morceaux de framboise, des petits, et même avec des grains de riz, je ne savais pas moi, ça. Je la regarde, je regarde les nombreuses tablettes de chocolat, pour essayer de trouver ceux dont elle me parle, ça ne peut qu’y être, ici, il y en a trop, les siennes, elles y sont, c’est obligé, ça. Elle me demande ce que je mange, comme chocolat, ouah, je sèche, là, je mange du chocolat, du chocolat normal, pas avec des morceaux de framboise ou du riz, ou du caramel, moi, c’est du chocolat simple, voilà, mais, du chocolat simple, je ne sais pas comment ça s’appelle, en vrai, ici. Peut-être qu’il est fondant. Ou extra-fin. Je n’en sais rien, moi. C’est pour ça, j’essaye de réfléchir, un peu, pour lui donner une bonne réponse, la bonne réponse, mais je ne trouve pas, moi. « du chocolat. » je réponds, tout simplement, à défaut de trouver l’adjectif qu’il conviendrait. « au lait je crois. » j’ajoute. Il me semble que c’est ça. Elle me dit son prénom, Odessa, je le garde bien en tête. « Thelma, mais on s’est déjà croisées, tu sais, on s’est jamais parlées, c’est tout, c’est pas pareil, je ne crois pas que ce soit pareil. » c’est vrai ça. On habite toutes les deux, ensemble, depuis plus d’une semaine, on se croise, on se croise beaucoup, on est obligées.