odessa
Il venait de se retrouver dans cet endroit qui lui rappelait vaguement son enfance. Cette enfance qu'il n'avait jamais vraiment eu. Cela lui rappelait vaguement les kermesses de fin d'année, à l'école. Avec ces multitudes de jeux. Les amusements étaient bien plus grands, comme par exemple cette roue. Cette grande roue. Il n'en avait jamais vraiment vu jusqu'à présent. Non, ce fut sûrement la première qu'il voyait. Qu'il voyait de ses propres yeux. Les images qu'il avait pu voir à la télévision ou sur du papier ne comptaient évidemment pas. Il s'était retrouvé là, les mains dans les proches, à errer entre ses multitudes de stand. Il s'arrêta alors stop, devant un stand. Il y avait déjà joué quand il était enfant. Le chamboule tout. Il déchirait tout à ce jeu. Il gagnait à tous les coups. Mais il avait certainement perdu son adresse enfantine. Un brin hésitant, il eut voulu se munir de la petite balle, pour essayer. Pour savoir s'il avait toujours cette même adresse, et s'il n'avait pas perdu le coup, des années après. De longues années après, même. Finalement, il se rétracta. Non, ce n'était peut-être pas une si bonne idée que cela. Mauvaise idée. Il enfouie ses mains dans ses poches et s'apprêta à partir quand il aperçut une silhouette venir en sa direction. Elle ne l'avait peut-être pas vu. Certainement même. Il ne savait pas vraiment. « Salut ! » laissa-t-il échapper alors qu'elle arriva à sa hauteur. Son nom... il ne savait plus trop. Comment pour la plupart des habitants. Il ne connaissait pas grand-monde, et surtout il n'avait pas retenu beaucoup de prénoms. La faute à une mémoire peu performante. Elle aussi ne se souvenait peut-être pas de son prénom. « Une partie, ça te dit ? », il désigna vaguement à l'aide de son menton le stand du chamboule tout. En soi, il était nul, ce jeu. Enfin, dans le principe. Jouer et ne pas avoir de récompense après, ça ne servait à rien. Strictement à rien. « Le premier qui réussit à faire tout tomber du premier coup à le droit de donner un gage à l'autre... ». Voilà. Déjà, l'intérêt de ce jeu était un peu plus intéressant.

Il y avait cette fille à quelques mètres de lui. Cheveux orangés, enfin roux comme ils disent tous. Elle s'appelait... O... O... Mademoiselle O. Dans l'immédiat, son prénom ne lui revenait pas à l'esprit. Peut-être qu'un peu plus tard, il lui reviendrait. Il avait espoir que sa mémoire pour une fois fonctionnerait plus ou moins bien. Il paraît que ça se travaille, la mémoire. Il y a même des jeux conçus pour cela... vraiment ? Un jour peut-être, il tâchera de palier cette mémoire déficiente. Il la salua brièvement, comme il aurait très bien pu le faire avec n'importe quelle personne. Il lui proposa alors une partie. Une partie de chamboule tout. Enfant, il défonçait tout à ce jeu. Mais son enfance était bien loin derrière lui. Un jeu sans enjeu n'était pas un jeu. Non, c'était un simple amusement sans intérêt. Ainsi, il lui proposa que le premier qui réussira à faire tomber toutes les canettes d'un seul coup aura le droit de donner un gage au perdant. C'était déjà bien plus intéressant comme jeu, vous ne trouvez pas, vous ? Elle lui répondit donc d'un pourquoi pas. Cela ne voulait pas dire non, mais ni oui, non plus. C'était une réponse comme ni-oui, ni-non. Elle espérait alors ne pas regretter, au moment où Valeri évoqua ses fameux gages. Quitte à faire une partie, autant en faire une seconde pour que le perdant puisse avoir sa revanche. Puis une troisième en cas d'égalité, histoire départager les deux joueurs. Tout était calculé et réfléchi. Un sourire étira les lèvres du biélorusse qui se contenta de ricaner silencieusement. « Oh mais non, tu verras ce sera chouette. » Ou pas vraiment, à vrai dire. Il n'avait aucune idée de ce que qu'il pourrait lui demander s'il venait à gagner. Elle lui demanda alors s'il voulait commencer, alors qu'elle était sur le point de se munir des balles. « Honneur à toi ! » souffla-t-il. Puis après tout, elle avait déjà la balle dans sa main, prête à viser sur les canettes entassées.

Elle voulait le laisser commencer. Honneur aux filles, voyons. C'était devenue une expression bateau, « l'honneur aux filles », ils la prononçaient n'importe où, n'importe quand, et quand ça les arrangeait bien. Ce n'était pas que ça arrangeait le biélorusse qu'elle commence... bon, d'accord, si. Un peu, un tout petit peu. Ainsi, il pourrait voir si elle est si douée que ça à ce jeu, ou si elle est dotée de deux mains gauches, cette miss O. Parait-il qu'il ne risquait pas grand-chose. C'était tout du moins ce que la jeune femme venait de lui dire. Méfiance, méfiance, quand même. Il préférait rester méfiant. Il croisa les bras, observant sans ciller la pyramide qui n'en sera plus une (enfin techniquement, sauf si la jeune femme se loupe). Après le jet de la jeune femme, il restait encore quelques éléments de cette fameuse pyramide fictive. Il en restait pas mal, d'éléments d'ailleurs. Un petit sourire amusé se dessina sur les lèvres du biélorusse. Elle avait réussi à en faire tombé trois, c'était mieux que deux, ou une... ou aucune. Elle lui tendit la balle qu'il récupéra au creux de ses mains. Pendant que Mademoiselle O remettait en place les boîtes qu'elle avait faites tomber, Valeri se concentra plus ou moins. C'est que... il y avait quand même un enjeu à la clé, alors quitte à jouer, autant gagner. La jeune femme reprit la parole. Il fait craquer les filles, il paraît, lui dit-elle alors. Oui, il paraît. C'était ce qu'il se disait à son sujet. « Il paraît ouais... et il paraît que t'es une grande curieuse, toi. » reprit-il, en lui lançant un bref regard. Il fit une pause, quelques secondes pas plus, avant de reprendre. « Hé attends, t'essaies pas de me déconcentrer en me parlant ? Ah parce que si c'est ça, tu auras un gage supplémentaire ! ». Evidemment, il plaisantait. Peut-être ne voulait-elle pas le déconcentrer, et voulait juste engager la conversation. Enfin, une chose était certaine, elle était bien curieuse cette rouquine.

Spoiler:

O... La rouquine évoqua le fait que Valeri plairait à quelques jeunes femmes, qu'il faisait craquer les filles comme elle l'avait dit. Le biélorusse ne put s'empêcher de lui souligner sa grande curiosité. Mais ce n'était plus du 'parait-il' à ce stade. Donc, elle était curieuse. De nature curieuse. Même avec les personnes qu'elle ne connaissait pas, ou peu... Ici, on pourrait opter pour le « pas » puisque jusqu'à présent, ils ne s'étaient pas parlés, ou alors juste très-très peu. Il ne se rappelait pas avoir eu l'occasion de lui parler, ou alors si c'était le cas, elle ne l'avait pas spécialement marqué. Elle était peut-être l'une de ces filles banales qui ne marquaient l'esprit de personne. Non. Pourtant, elle n'avait pas l'air comme tel. Puis pourquoi lui parlait-elle de cela, maintenant ? Peut-être qu'elle voulait le déconcentrer pour qu'il loupe la cible et qu'elle puisse rassurer sur son niveau. Ah. Il avait le flair, ou peut-être pas à vrai dire. Si elle tentait de le déstabiliser, ou de tricher, il lui donnerait un gage supplémentaire, préféra-t-il la prévenir alors. Elle ne pourra pas dire qu'il ne l'avait pas prévenu. Parait-il que ce n'était pas dans ses intentions de le déstabiliser, de le déconcentrer. Elle disait alors ne pas avoir envie d'avoir un gage supplémentaire. A cette remarque, le biélorusse ne put s'empêcher de ricaner doucement, avant finalement de reporter son attention sur la cible qu'il devait atteindre et détruire d'un coup avec cette balle. Elle ajouta alors que ce n'était pas elle, mais Sydney. C'était Sydney qui avait dit ça. La brune au prime. Il haussa les épaules, avant de lancer la balle en direction de la base de la pyramide éphémère. Quand il était petit, il avait une astuce pour réussir à tous les coups. Mais les années et la poussière se sont installés dans sa mémoire bien sale, à présent. Il lança alors la balle, faisant tomber un bon nombre de boîtes, mais pas assez pour les faire toutes. En effet, certaines semblaient faire de la résistance. La prochaine fois sera peut-être la bonne. «  Tu sais, elle n'a pas dit grand-chose Sydney à ce sujet... » souffla-t-il, allant alors ramasser les boîtes qu'il avait fait tomber. «  T'en connais des filles que je fais craquer ? » lui demanda-t-il comme ça. Elle avait dit qu'il faisait craquer les filles, alors elle avait certainement des noms en tête. Puis les filles entre elles, ça parle beaucoup. Beaucoup-beaucoup. Bien plus que deux bonhommes ensemble.