Je ne peux pas dire le contraire, je suis assez vexé de la façon dont ma relation, purement amicale, avec Eibhlin s’est terminée. Jamais je n’aurais pu la penser capable de me dire de telles choses sans aucune raison. Si elle n’avait pas envie que l’on soit ami alors pourquoi s’est-elle mise à me parler dès la première semaine d’aventure ? Je ne comprends pas. En tout cas tout cela me perturbe pas mal depuis la semaine dernière. J’ai l’impression qu’on s’est bien foutu de ma gueule. Je n’ai plus envie qu’elle m’approche. Je n’ai plus même plus envie de la voir. Son visage m’insupporte. Je change de pièce dès qu’elle se trouve dans la même que moi. Je suis en train de chercher un paquet de pâtes lorsque j’entends sa voix. « Tu m’prépares à manger ? » Je crois que je suis en train de rêver. Ce n’est pas possible, ce n’est pas elle. Ou alors elle est carrément suicidaire. Je ferme les yeux comme pour me convaincre que je suis dans un mauvais rêve, mais une fois de plus je l’entends. « Un truc pas trop compliqué hein… J’suis une bourge, mais j’ai des goûts simples… » J’crois qu’elle est vraiment là. Tout proche de moi. Je pousse un soupir. Elle me gonfle. Je ne l’ai pas encore vu et j’ai envie de l’attraper par les épaules pour la secouer dans tous les sens. « Regardes, là y’a un truc de purée… Tu peux me faire ça… » Oh de la purée, elle veut de la purée. Pas de soucis. Je fais quelques pas pour attraper un paquet de purée sans savoir si c’est le paquet qu’elle m’a désigner, j’ouvre l’emballage puis attrape un petit sachet de flocon de pomme de terre l’ouvrant d’un coup sec en tirant dessus et m’approche d’elle tout sourire. Sans rien dire, je verse le contenu sur sa tête et une fois vide jette le papier argenté à ses pieds. « T’es en assez ou tu en veux un peu plus ? » que je demande en lui adressant un sourire hypocrite avant de tourner les talons pour attraper ce fameux paquet de pâte. Non, mais elle a vraiment cru que j’allais lui préparer à manger à elle. Elle peut toujours crever, j’suis pas son chien moi.

J’trouve qu’elle a quand même vachement de culot la petite Eibhlin de venir me demander de lui préparer à manger alors qu’elle m’a envoyé valser comme une vulgaire chaussette sale la semaine précédente. Si elle pense que je vais m’exécuter et le faire, elle se met le doigt dans l’œil la nana. En plus j’suis plutôt du genre rancunière alors je pense que c’est mieux pour elle qu’elle ne s’approche pas de moi. Mon geste est peut-être complètement stupide, mais je me sens bien mieux après l’avoir fait. Oui je viens bien de gâcher de la nourriture et de verser tout un sachet de flocon de pomme de terre sur la tête de mon ancienne camarade. Je m’attends à ce qu’elle me hurle dessus, mais contre toute attente elle me regarde en souriant. Là, j’ai vraiment envie de la baffer. Elle m’insupporte. « Toi ça se voit que t’as jamais fait de purée… » Je m’en moque de ce qu’elle pense et puis en plus j’en fais très souvent de la purée. Mon fils n’en mange pas encore, mais moi j’aime bien ça. Bref, je ne réponds pas. Moi je n’ai rien à lui dire. « Je t’aide, il faut un peu de lait aussi ! » A croire qu’elle cherche le bâton pour se faire battre celle-là. Je ne lui adresse même pas un regard. Je ne montre aucune réaction. L’ignorance est le plus beau des mépris, j’crois bien que c’est ça qu’on dit. Je n’en suis pas sûre. « Et puis tu ramasseras aussi le papier que tu viens de jeter : je ne voudrais pas que l’on t’accuse de dégrader les lieux et de foutre le bordel un peu partout… J’sais que t’es pas une crasseuse… » C’est officiel, je ne peux plus la voir en peinture. « Tu me fais chier Eibhlin. » que je lui réponds sur un ton parfaitement neutre sans même lui adresser un regard. Je préfère m’occuper de trouver tous les ingrédients qu’il me faut pour ma recette de sauce pour accompagner mes pâtes.