danaé

Petite nostalgie du soir. Oui, en ce vendredi soir, je m’ennuie. Je ne veux pas embêter personne avec ça, je ne vais pas pleurnicher ou me plaindre de ma solitude du soir. Je ne vais justement pas venir me coucher auprès d’India, elle n’a pas besoin de me sentir triste, surtout pas. Et ça va, je ne suis pas non plus entrain de devenir dépressive. C’est juste mon sentiment du moment. Mon manque de mon monde, de ma famille, des filles... de Cian. Oui, je l’avoue, un peu de Cian. Je ne l’ai pas vraiment démontré depuis dimanche, mais ce n’est pas pour autant qu’il ne me manque pas. Incapable d’aller me coucher, je décide donc d’aller faire un tour à l’extérieur, peut-être que l’air frais me fera du bien, qui sait. Une énorme doudou sur le dos, une bouteille de vin dans la main, je marche en direction du kiosque à musique pour m’y poser, par terre. Bon, j’ai un peu l’air folle d’être là, et aussi plutôt désespérée. Je ne pense pas que je vais boire la bouteille au complet, j’ai juste envie de boire quelques gorgées, et de m’isoler un peu. Sauf que voilà que j’aperçois une silhouette s’approcher, et que je me dis que mon plan ne fonctionnera pas. En même temps, pas moyen d’être seule ici. Je reconnais Danaé, et finis par lui sourire, bien que je ne suis pas certaine qu’elle arrivera à distinguer mon sourire dans ce noir. « Je te rassure, je ne bois pas pour attirer l’attention. » Je la taquine. Je fais évidemment référence à ce fameux prime où il y avait eu une sorte de malentendu. Je lève la bouteille devant ses yeux en riant silencieusement, avant de prendre une longue gorgée. Bon, par contre, comme ça, j’ai un peu l’air alcoolique. Pas grave.

Cette aventure est officiellement en train de me gonfler et pourtant je n’ai pas envie de partir. Je n’ai pas envie de quitter le nid d’amour et toutes les personnes extraordinaires que j’ai pu rencontrer ici. J’ai peur qu’ils m’oublient par la suite. J’ai peur de ne jamais les revoir. Mais d’un côté j’ai envie de sortir d’ici pour retrouver mon fils et peut-être même pour retrouver Zoran et discuter avec lui de tout un tas de choses. De nous en particulier. Je ne sais pas pourquoi, mais cette seconde nomination est en train de m’effrayer. Je pense que c’est le fait de ne pas savoir ce que je veux réellement qui me mets dans cet état-là. Je ne mange presque plus. J’essaye de sourire tout le temps pour ne pas qu’on me pose de questions, mais j’ai du mal. Je ne dors presque plus. Comme si la douce Morphée n’avait pas envie de me prendre dans ses bras pour me bercer et m’amener au pays des rêves. Alors je me promène dans le château et ses alentours. Ce n’est pas très excitant, mais au moins je profite pleinement de ce lieu. Peut-être pour une dernière fois. Il fait un petit peu froid à l’extérieur, mais ce n’est pas bien grave. J’enfile un manteau par-dessus mes habits et m’élance dans la nuit noire. Quelques petites lumières ici et là éclairent les jardins et je me repère grâce à elles. J’avance sans un mot, regardant uniquement le sol. J’approche du kiosque à musique. Je grimpe les quelques marches qui me sépare du centre du bâtiment. Une voix m’interpelle. « Je te rassure, je ne bois pas pour attirer l’attention. » Une voix féminine. Je lève la tête et aperçois une silhouette plutôt élancée assise sur le sol. Je commence à connaître mes petits camarades et je ne tarde pas à reconnaître Nicola. Ce qu’elle vient de dire me fait sourire. Je la voix boire au goulot. Elle ne doit pas être dans son assiette. Certainement le départ de Cian. Je fais quelques pas en sa direction et m’installe à ses côtés avant de lui prendre, gentiment, la bouteille des mains. « Moi non plus. » Portant le goulot à mes lèvres, je me délecte d’une gorgée de ce qui semble être du vin. « Il te manque ? » C’est une question stupide car je connais déjà la réponse, mais j’ai envie de savoir. J’ai envie de parler de trucs de fille avec elle. J’ai envie d’être sa confidente pour une soirée et peut-être même qu’elle soit le mienne juste pour aujourd’hui. Je lui tends la bouteille pour lui montrer qu’elle peut me faire confiance. Après tout ce n’est pas un vilain malentendu qui va nous empêcher de passer un petit moment tranquille l’une avec l’autre.

Je sais pas, mais je crois que j’ai l’air désespérée. Comme ça, bouteille à la main, buvant du vin seule au milieu du kiosque de musique. C’est franchement un peu pathétique. Qu’on se rassure, au moins, je ne vais pas me mettre à pleurer. Non, je n’irai pas jusque là. Je ne suis pas du genre à pleure pour rien, et il m’en faut beaucoup pour laisser couler une larme sur ma joue. Mais je ne dis pas que c’est impossible par contre, enfin, ça dépend simplement de la situation et de mon état d’esprit. Et voilà que Danaé débarque et que je précise que je ne suis pas entrain de chercher à attirer l’attention d’une quelconque manière en ce moment même. C’est peut-être mieux de préciser, au cas où il y aurait un autre malentendu, même si bon, ma phrase relève plus de la blague qu’autre chose. Et elle doit le prendre de la sorte puisqu’elle vient s’installer à mes côtés, me volant par la suite ma bouteille. « Moi non plus. » Bon, tant mieux alors, c’est une bonne chose. « Il te manque ? » J’hausse les sourcils. Bon, je ne suis pas aussi subtile que je voudrais l’être finalement. Ça doit être écrit dans mon front. « Qui ça, le président ? » Je plaisante, reprenant la bouteille pour y boire une gorgée. Sans offense pour Barrack, mais il n’est pas celui dont je m’ennuie le plus ici, bien qu’il a tout mon admiration quand même. « Hm... Oui... Il me manque. » Cian, on parle évidemment de Cian ici. Et oui, il me manque. En même temps, je passais beaucoup de temps avec lui, c’est normal non ? « J’ai essayé de ne pas trop le montrer, parce qu’il n’est pas mort, je vais le revoir et tout, mais reste que bon... Il est pas là. Et c’est nulle. » Je fais une petite moue, enfantine, avant de boire encore. Bon, faudrait pas que je me saoule non plus à cause de ça. Ce n’est clairement pas la fin du monde.