Je ne savais pas quoi faire pour occuper ma soirée, et à vrai dire je m'ennuyais comme un rat mort, sincèrement. Une fois n'était pas coutume, je n'avais pas envie d'aller nager, sans doute parce que c'était déjà ce que j'avais fait durant presque quatre heures cet après-midi et que fallait savoir ne pas abuser des bonnes choses. J'avais un temps pensé aller me poser dans les écuries pour regarder un film, surtout que pour je ne savais quelle obscure raison j'avais une folle envie de revoir Miami Vice depuis quelques jours, je crois que c'était à cause du rêve que j'avais fait y'a trois jours ... Mais bon, la place était déjà prise, et j'avais pas envie de m'imposer aussi j'avais rebroussé chemin sur la pointe des pieds pour ne pas me faire remarquer. Finalement j'avais opté pour le salon, un peu en désespoir de cause, en me disant qu'en me servant un verre j'aurai de quoi m'occuper ... allez, cinq ou dix minutes, au moins. Par chance j'avais trouvé une bouteille de Scotch au cellier, et m'en saisissant j'avais pris la direction du salon ; Quitte à boire autant être bien installé. Sauf qu'une fois arrivé là-bas j'avais trouvé un Celse tout bonnement endormi sur le canapé, et j'avais considéré le fait de repartir à nouveau silencieusement, pour ne pas le réveiller, quitte à me trouver un autre endroit où m'échouer pour boire. Un endroit pas trop isolé, histoire que ça ne fasse pas non plus trop alcoolique, hu. «  Je suis disposé à partager. Moyennant une rétribution … honnête. » Une rétribution honnête ? Faisant un instant mine de réfléchir, j'avais laissé mes yeux aller du jeune homme à la bouteille que j'avais à la main, puis à nouveau sur Celse, avant de proposer « Je partage si tu partages, c'est assez honnête ? » Pour moi en tout cas ça l'était, assez honnête. D'autant plus que je lui apportais limite à boire sur un plateau, il n'aurait qu'à laissé ses fesses sur le canapé pendant que je m'occupais des verres ... franchement, je voyais pas ce qu'il pourrait espérer de plus, là. Et puis ça tombait bien que ce soit Celse qui soit là, en fait. Parce que c'était quand même con, qu'il m'intimide autant depuis le début tout ça à cause d'une stupide ressemblance avec ... enfin bref, du coup j'essayais de mettre ça de côté et de me raisonner. Surtout que ça semblait être un chic type, pour ce que j'avais pu en voir jusqu'à présent.

« Tu es plus que bienvenu. » Bon, au moins j'avais un peu moins la sensation de m'imposer, et d'ailleurs il avait aussitôt ajouté « Tu veux ? » tout en me désignant le bout de canapé qu'il semblait disposer à me laisser de libre. Faut dire que j'étais un peu venu pour ça à la base, pour pouvoir poser mes fesses sur quelque chose d'un tant soit peu plus confortable que les chaises de la cuisine. Et puis y'avait bien pire compagnie que celle de Celse, j'avais pas besoin de le connaître beaucoup pour le savoir, alors après avoir attrapé deux verres - parce que quand même c'était pas le genre de Whisky qui se buvait à la bouteille, là - je les avait déposés sur la table basse avec la bouteille, avant de m'asseoir à côté du jeune homme. « J'ai jamais trop aimé boire seul, je t'avouerai. » Parce que dans mon esprit boire seul équivalait souvent à déprimer, et que c'était quelque chose que j'essayais d'éviter de faire dans la mesure du possible. Vous me direz, quand on déprimait c'était rarement par choix, mais disons que dans la mesure du possible j'essayais de forcer l'optimisme. Y'avait de toute façon des années que j'avais pas eu l'occasion de vraiment déprimer, et donc de vraiment boire. Trop, et tout seul. Remplissant les deux verres jusqu'à la moitié, j'en avais fait glisser un du bout des doigts jusqu'à devant Celse, avant de me saisir du mien tandis qu'il me lançait « J’ai bien aimé ton interview, diffusée pendant le prime. Surtout le moment pendant lequel tu parles de ton couple, et de la fierté que tu ressens à être allé aussi loin tout en ayant, en quelque sorte, joué seulement pour de « faux » le jeu de l’amour que propose l’émission. » Levant un instant mon verre dans sa direction pour lui proposer de trinquer, j'avais souri avec légèreté, l'air pensif tandis que je pesais les mots qu'il venait de m'adresser. A vrai dire j'étais le premier surpris d'être allé aussi loin malgré ce qui pouvait s'apparenter à un handicap dans ce genre de jeux. Mais bon, je trouvais ça un peu naïf, ceux qui venaient ici presque avec l'espoir de rencontrer quelqu'un ; A mon avis, on n'apprenait pas vraiment à connaître une personne tant qu'on ne l'avait pas côtoyée dehors, hors caméra. « C'était une condition non négociable de toute façon, si on m'avait demandé de jouer au célibataire parce que ça rendait mieux à l'écran j'aurai laissé ma place. » En même temps soit on me prenait tout entier soit on ne me prenait pas du tout, et si on me prenait tout entier cela sous-entendait que l'on me prenait avec mon statut d'homme marié. Question de bon sens, question de principe. Machinalement je faisais tourner mon verre entre mes doigts, relevant les yeux vers Celse tandis qu'il reprenait d'une voix presque hésitante ; Comme s'il cherchait ses mots. J'avais tendance à oublier que certains faisaient l'effort depuis onze semaines déjà de parler une langue qui n'était pas la leur. « Quand j’ai passé l’entretien du casting, j’étais sûr qu’ils me recaleraient à cause de ça – le fait que je sois en couple. Tu sais, ils nous posent tout un tas de questions étranges sur nos habitudes sexuelles, intimes, et je pensais qu’on ne me prendrait pas en se disant « ce mec ne fera pas d’audimat, il n’aura pas de love story pendant dix mois. » J’espère vraiment que tu vas aller en finale. » J'avais souri légèrement à nouveau, tout en portant mon verre à mes lèvres. J'avais conscience de mes chances plus que minces ceci dit, quand on voyait le monde en face de moi, j'avais un peu l'impression d'être un gosse au milieu de adultes. « Ça risque de paraitre cliché du coup, si je te réponds que j'en pense pas moins te concernant, et pourtant y'a rien de plus vrai. » Sans exagérer, je crois que si j'avais été un simple spectateur il aurait eu mon vote sans souci, en fait. Alors bon, quand il me disait qu'il pensait ne pas être retenu simplement parce qu'il avait une copine ... je sais pas si il réalisait que le choix s'était certainement fait au moment où il était rentré dans la pièce. Raison pour laquelle j'avais fini par ajouter « Mais hm, le sportif avec une belle gueule et un petit accent, à mon avis que tu sois en couple ou pas ça a du être le cadet de leur souci quand tu as passé le casting. » Non parce que déjà ça c'était vendeur de base, non ? Vendeur, c'était un mot que mon entraineur avait en permanence à la bouche quand il parait en quête de sponsors, et c que ça pouvait m'emmerder déjà à l'époque.