Moi, j'mâchais grave et plus j'mâchais, mieux je me sentais. C'était automatique. Le bien être gagnait mes membres et animait soudainement mes mains ainsi que mon esprit. Face à ces tombes, je voyais grandir un arc-en-ciel fluo et un angelot sortir de derrière celui-ci en me soufflant quelques paroles. Cupidon? À non, il est trop beau pour que ce soir lui ! Un large sourire s'étendait sur mes lèvres, dilatant dans le même temps mes pupilles. « Merci » chuchotais-je, alors que la rosée automnale se déposait encore sur ces même tombes, sur lesquelles j'étais assise. Cahier en main, stylo dans l'autre, je me mis à retranscrire ce qu'on venait de m'inspirer. Ouai, j'écris un maaaaaagnifique livre. Un voyage dans un monde incroyable. Avec des des péripéties péripéties, toutes aussi BURLESQUES, les unes que les autres. Ahahah. Les mots se formaient sur le papier et ressemblaient plus où moins à des phrases. 'Quand mon cœur brûlera, toi, qu'est-ce que tu feras ?... GROS CONNARD.' D'une poésie sans égal, je sais je sais, merci beaucoup. Un large sourire béat aux lèvres, je m'exprimais ainsi, en criant. « Bonjouuuur. Helloooow» Peut-être était-elle là depuis bien longtemps, que je ne remarquais sa présence que maintenant, cette nana que je venais d'entendre débarquer. Je posais ma main au dessus de mes yeux, comme quand il y a du soleil, sauf qu'il ne fait du soleil que dans ma tête. Enfin, je ne suis pas censée savoir qu'il n'y a pas de soleil, alors, je mettais tout de même ma main au dessus de mes yeux pour me faire de l'ombre et contempler la demoiselle. Elle est sacrément belle. Ses beaux yeux bleus. Elle est belle. « Elle est beeeelle ! » M'exprimais-je sans m'en rendre compte. Non, cette phrase était censée rester dans ma bouche, fermée à double tour. Bien enfermée. Je lâchais un rire de petite cachottière, avant de gribouiller encore quelques chose sur mon papier, que je cachais avec ma main. Genre, faut pas qu'elle le voit.

« Qui ça ? » Sa beauté m'avait tant éblouie que, comme l'angelot plus tôt, l'inpiration m'arriva en masse dans ma tête frisée et que, ma stylo couchait sur papier la moindre de mes petites pensées. En fait je cachais ma feuille, mon cahier, mon carnet secret, mais je n'étais pas si sûre que j'avais véritablement besoin de le faire. Avec ma façon d'écrire, c'était plutôt HARD de me relire, MDR, et pour peur qu'elle n'était pas française, j'étais carrément libre d'écrire des gros mots * huhu * comme couille, salope, ou crotte de bique en poudre. Finalement, c'était deux ans plus tard que je relevais mes yeux sur elle. GENRE, elle avait pas compris. GENRE, elle avait pas l'habitude qu'on lui dise ça ? Peeeeut-être ? « Bah toi ! » lui répondais-je sèchement, avant de pointer ma mine sur le papier, mais sans rien écrire. Je relevais mon menton une autre fois. « Je te trouve jolie. » Voilà. C'était dit. J'avais une petite moue. Contrainte de le répéter. Bon, contrainte était un très graaaaand mot parce que je le répétais de moi-même, mais savait-on jamais. Hinhin j'suis pas encore nécrophile à ce que j'sache. Je revenais rapidement à l'écriture, les yeux illuminées par la beauté des siennes. « C'est quoi que tu écris ? » Je relevais encore une fois mes yeux sur elle. « Pshiiiiiit me déconcentre pas. » Soufflais-je comme une plainte, mon index sur mes lèvres. Pour tout dire, elle ne me déconcentrait absolument pas, puisque le nain devant nous, en train de chanter « HE OH HE OH, ON RENTRE DU BOULOT », ne me déconcentrait pas. « Des mots. » Je laissais échapper un rire, repointant mon nez sur mon cahier. AHAH j'étais très drôle, bien que ce n'était pas forcément évident. J'aurai bien pu écrire des chiffres, BAH OUAI. * hihi * Ma phrase terminée, je pris une voix très siriiiiiiieuse, - oui sirieuse – pour lui expliquer. « J'écris un livre, tu sais ce que c'est ? Sur un homme vert, qui rencontre une fille violette et sa pose trop de problèmes, parce que les bleus et les violets s'aiment pas beaucoup beaucoup ! Alors du coup ils décident de se marier en secret et par le plus gros bordel et bah ils se suicident l'un après l'autre. Meeeeeeeeerdouille, je t'ai raconté la fin. » Je posais ma main sur ma bouche, soufflant après ma propre connerie.

Dans ma tête, ça paraissait tout à fait évident. Sauf que ma tête n'est pas transparente, malheureusement. Mes idées, mes pensées, ne la traverse pas ; pourtant j'aurai juré que la tête de cet âne, qui viens de me faire signe, avait la tête transparente. Enfin. Alors la d'moiselle pouvait pas être certaine qu'il s'agissait d'elle. Maintenant, si, parce que je le confirmais, deux fois même, plus qu'une. « Merci, c'est gentil. » Je levais les yeux au ciel. « C'est pas gentil. C'est vrai. » Bah ouai, parce que si elle n'avait pas été belle, je le lui aurai dit aussi. J'aurai même dit « putain quel boudin », mais le Cupidon avait tendance à introduire plutôt des beautés dans son nid. Enfin, j'me souviens pas d'avoir vu un moche. J'me souviens de pas grand chose en même temps (et oui, j'me considérais grave comme une beauté. Bah ouai). Je n'la connais pas, elle ne m'connait pas, pourtant j'arrive à lui parler d'mon histoire. « C'est le roméo et Juliette des martiens en fait ? » Hmmm Roméo et Juliette... Roméo et Juliette. « Aaaaah meeeerde, qu'elle conne, j'me disais bien que cette histoire, j'la connaissais déjà ! » M'exprimais-je, en arrachant quatre/cinq feuilles de mon carnet, si rapidement que la fille d'à côté n'aurai pas le temps de réagir. Si vivement, que déjà, elles étaient en boules et balancées plus loin. P'taaaaaain, j'ai plus qu'à trouver une autre idée d'histoire. Bon j'sais que l'histoire d'un garçon qui veut pas grandir, c'est d'jà fait. Crotte de mouton desséchée au soleil. Pourtant, la belle continue. « Et ... J'pourrais lire une fois ? Quand tu auras terminé ? » Je haussais les épaules. « J'sais pas... » C'était à réfléchir. Jamais personne n'avait lu mes petits bouts de phrases, mes petits trips qui, mit bout à bout, étaient digne d'un poème surréaliste. En tout cas, j'pense pas l'avoir terminer pour la fin du jeu. Alors que j'avais gardé mon nez collé à mes autres feuilles vierges, je levais ma tête sur elle, très inspirée. « Et tu t'appelles ? » J'sais pas, mais je la sens bien en fait. D'ailleurs, je l'avais même pas vu s'asseoir à côté de moi. « J'sais pas si tu vois le cygne rose là-bas, avec les petits cœurs au dessus de sa tête. Il va m'aider à t'écrire un poème ! » Je pointais mon doigt vers une tombe. Ca ressemblait pas à une tombe, à mes yeux, mais plutôt un petit paradis. Ouai, tous ces morts étaient au paradis en fait !