Quelques fois, Mado ne pouvait faire autrement que de se comporter en petite peste. Oui bon, tout était relatif, alors disons qu'elle ne pouvait simplement pas s'empêcher de taquiner autrui, de le provoquer, doucement mais surement, la plupart du temps pour se divertir elle-même, tant l'ennui la guettait. C'est donc ainsi qu'aujourd'hui, tandis qu'elle s'était rendue à la piscine, elle avait ressenti l'intense envie de s'en prendre au grand indécis qui stagnait au bord du bassin, probablement pas décidé à y plonger avant la fin de l'année. Heureusement pour lui, Mado était là, toujours prête à rendre service et à faire gagner du temps. Pour autant, il n'était pas certain que reproduire la scène qu'elle avait initiée avec Mason soit une très bonne idée, étant donné qu'il s'agissait ici de Mickey, à savoir de quelqu'un d'encore moins disposé à s'amuser de son humour douteux. Est-ce que cela l’inquiétait ? Un petit peu tout de même, parce qu'elle ne voulait pas nécessairement avoir d'ennuis avec son camarade. Est-ce que cela la dissuaderait d'agir ? Absolument pas, voyons. Elle avait la ferme envie d'agir, alors elle agirait. Ainsi donc, elle ne se priva pas d'approcher en silence, dans le dos de l'anglais, déterminée à lui éviter de passer les prochains mois debout face à ce bassin. C'est donc ainsi qu'elle plaça ses mains dans son dos et qu'elle le poussa, sans trop de force, mais avec suffisamment de fermeté pour qu'il atterrisse droit dans l'eau. Elle ne put alors que se satisfaire du résultat. Un Mickey trempé équivalait inévitablement à une Mado contentée. Lui qui aimait la propreté, il ne rechignerait quand même pas contre un petit bain, si ? Okay, l'eau d'une piscine n'était pas la plus propre qui soit, mais c'était somme toute toujours mieux que rien. Toujours est-il qu'elle eut tout de même un peu peur qu'il y reste, le Mickey. Car peut être avait-il hésité parce qu'il ne savait simplement pas nager ? C'était à craindre, mais heureusement pour lui, elle était autant secouriste qu'elle était maitre-nageuse. Il ne risquait donc rien. Et puis de toute manière, il ne tarda pas à réapparaitre. Et il l'accusa. Quel toupet, tout de même. « Tu ne sais rien du tout, au contraire. Tu n'as ni preuve, ni témoin. Donc tu ne sais rien. » Oui, elle avait toujours un impressionnant esprit de contradiction. Cela ne faisait-il pas son charme, d'ailleurs ? Hm. « Folle ? Pas aux dernières nouvelles, non. Je suis juste très, très, très chiante dans mon genre. Quant à mon boulot, je ne crois pas être en fonction là, hm. » Ainsi donc, si elle avait envie de pousser un gringalet à l'eau, et bien, elle le faisait. Tout simplement. Mickey lui faisait l'effet d'être une pauvre petite chose fragile et perméable. Promis, elle ne le laisserait pas couler. « Tu sais Mickey, le balai que t'as dans le cul, il faudrait que tu penses à le chier, un de ces quatre. » Mais elle disait ça, elle disait rien. Hein.

Ce fut drôle de voir ce pauvre Mickey prendre l'eau de la sorte. Peut être Mado devrait-elle avoir honte de l'avoir poussé d'une telle façon, mais vous savez, elle était globalement sans-gêne, alors pas sûr que sa conscience ait envie de l'embêter pour si peu, hein. Et ça n'était pas plus mal, parce qu'elle avait franchement tendance à être fière d'elle, en fait. De toute façon, il n'y avait absolument pas mort d'homme. Pour autant, elle s'était doutée que Mickey ferait tout une histoire de bien peu de choses. C'était tout lui, ça. Ainsi, il ne manqua pas d'accuser sa camarade, comme si le fait qu'elle soit la seule aux abords de la piscine faisait nécessairement d'elle une coupable. Pff, c'était un peu facile, quand même. Après tout, elle avait pu s'approcher pour entreprendre de lui venir en aide, car c'était de base son métier, rappelons-le. Alors oui, elle le trouvait un peu gonflé de partir du principe que ça ne pouvait être qu'elle. Rappelons qu'il avait été dos à elle et qu'il n'avait aperçu son visage qu'une fois revenu à la surface. Ainsi, il n'était pas nécessairement dans le vrai, le Mickey. Bon d'accord, pour le coup il l'était, mais c'était pour le principe qu'elle lui tenait tête, vous voyez. Bref. « Alors ton instinct te trompe. Franchement Mickey, évite les conclusions hâtives. Quand on n'a aucune preuve, ça la fout un peu mal, quand même. » Oui, elle avait tendance à le provoquer, un tout petit peu, profitant assurément du fait qu'il ait été de dos au moment où elle l'avait poussé. C'est clair que s'il avait été de face, c'aurait été beaucoup moins simple de le prendre pour un jambon. Donc là, inévitablement, elle se réjouissait du contraire, hm. Quant au reste, et bien, visiblement, Mickey n'apprécia pas le petit commentaire de Mado. Et bien quoi ? Il n'aimait pas les balais ? Parce que oui, effectivement, il en avait un bien joli dans le derrière. Elle n'inventait rien, hein. Elle était simplement trop franche, mais elle faisait au moins honneur à son award. Eh bien oui. Bon, Mickey n'était vraiment pas content du tout, là, visiblement. Parce qu'il prit la peine de sortir du bassin et de lui faire un sacré numéro de mec brave et contrarié. Quel homme ! « Roh, arrête ton cinéma. Déjà, tu n'es pas du tout impressionnant, j'en ai vu d'autres, et ils pesaient un peu plus de quarante-huit kilos, quand même. Et puis, c'est bon, c'était qu'une réflexion. N'empêche que tu me donnes raison, là, hein. » Bah oui, il lui prouvait combien il était coincé. Maintenant, il la traitait de charretière. Ouais, c'était facile d'insulter, hein. Il n'en sortait pas grandi, allons bon. « Ce sont les mots "cul" et "chier" qui t'ont choqués à ce point ? Non parce que si c'est ça, je peux les remplacer par, hm, "derrière" et "déféquer". Ce qui donnerait donc "Tu sais Mickey, le balai que t'as dans le derrière, il faudrait que tu penses à le déféquer, un de ces quatre." C'est mieux ? » Oui, elle jouait encore d'un peu de provocation. N'empêche qu'elle ne comprenait pas pourquoi il faisait tout un fromage de si peu de choses, hein. Ce n'était pas bien méchant. Voyez, Mado n'avait pas rebondit de façon agressive sur le mot "charretière", alors qu'elle aurait pu, hein. Mais à quoi bon ? « Coincé ? Oui, c'est le moins que l'on puisse dire, hm. Mais c'est bon, ne t'offusque pas, si tu veux je peux retirer ce que j'ai dit. J'ai juste l'habitude de dire ce que je pense, et en l’occurrence, je pense que tu devrais te lâcher un tantinet. Regarde, je t'ai poussé à l'eau, et j'ai bien cru vivre mes derniers instants ... Tu aurais pu, je sais pas, t'en amuser peut être ? » Quoi que ça ne devait pas être son genre, à Mickey, hein. Roh et puis, chacun son truc, elle ne jugeait pas, hein.

Roh allez, que Mickey se détende, il allait survivre, hein. Non vraiment, il était relativement peu probable qu'il décède après une si petite chute. Surtout que bon, il semblait savoir nager, le coco. Donc en fait, il faisait son petit caca nerveux simplement pour embêter Mado, c'est ça ? Ça y ressemblait, en tout cas. Et puis bon, qu'il ne s'avise pas de l'accuser sans preuve ni témoin, parce qu'elle pourrait l'attaquer pour diffamation. Bah oui, au moins. Plus sérieusement, s'il est vrai qu'elle était une coupable idéale - et même une coupable tout court, pour le coup - il était certain que Mado n'avait pas pour autant dans l'idée de se dénoncer. C'était comme ça. Non pas qu'elle n'assume pas d'avoir poussé Mickey à la flotte, mais disons qu'elle n'avait pas nécessairement envie de lui offrir sur un plateau ce qu'il attendait probablement d'elle, à savoir des aveux. Réfléchissez deux minutes. Si elle avouait son "crime", il risquait fort d'attendre d'elle qu'elle s'excuse ensuite, et ça c'était hors de question. Parce qu'estimant que ça n'était pas le sale coup du siècle - personne n'était mort, n'est-ce pas ? - elle n'avait pas franchement dans l'idée de se repentir. Surtout qu'elle se savait capable de recommencer donc bon, voilà quoi. Lui, en tout cas, il semblait déterminé à dire que c'était elle. Et voyez quel argument choc il avançait ! Parce que Mado avait des ongles - de sorcière, apparemment - c'était fortement elle qui l'avait poussé. Bon alors, c'était quoi l'idée ? Il cherchait à lui faire du mal ou ... ? Non parce que ses ongles, elle les aimait comme ils étaient, c'est certain. Surtout qu'ils n'étaient pas plus longs que d'autres ongles féminins, vous savez. Ah, ce Mickey, il dramatisait tout. « Des ongles de sorcière, rien que ça ? C'est un concept intéressant. Surtout que je suis à peu près sûre qu'ils sont aussi longs que ceux d'Emmeline, ou Harlow, mais soit, je veux bien te croire Mickey. » Voyez comme elle était docile, cette Mado. Et pas contrariante pour un sou, c'est ça qui est bien. Parce que bon, elle voulait bien admettre que sa remarque au sujet du balai ait pu ne pas plaire à Mickey, mais il s'était un peu emballé, quand même. Et là, il allait sans doute un peu (trop) loin. Car voilà qu'il laissait entendre que tout chez Mado renvoyait à la vulgarité. Ah d'accord. Et ça, comment était-elle censée le prendre au juste ? « C'est bien la première fois qu'on me dit ça. Mais peut être viens-tu de pointer du doigt une vérité ! Peut être suis-je effectivement la vulgarité incarnée ! Mais tu comprendras que j'émette quand même quelques doutes alors, hm, pourrais-tu développer s'il te plait ? » Oui voilà. Et si son argumentaire devenait trop insultant, elle le grifferait avec ses ongles de sorcière. Oui, tout simplement. Parce qu'elle voulait bien prendre les choses du bon coté, mais s'il allait trop loin, ça n'irait pas. « Ah bah tu sais, justement, moi ta blague elle m'a amusée. Mais je crois qu'il m'en faut globalement peu, hm. J'ai bien compris que tu n'aimais pas être touché, et j'avoue que ça m'intrigue ... » Après tout, même Mado, qui n'était pas très tactile de nature, faisait des efforts et n'avait jamais piqué de crise parce qu'on avait eu le malheur de la toucher. Ce Mickey était un sacré cas. Il disait vouloir se lâcher mais avoir du mal. Que c'était dans sa façon d'être, mais qu'il prévoyait de faire des efforts. Ah ! Voilà qui était bon à entendre. « Alors quoi, tu es comme ça depuis toujours ? J'ai du mal à y croire, quand même. Je pensais que tu avais vécu quelque chose de traumatisant, quelque chose qui avait changé à jamais ton regard sur les autres. » Et elle s'y connaissait à ce niveau, elle ne disait pas ça simplement pour parler, hein. « Tu dis vouloir te "découvrir", mais je ne comprends pas. Quel genre d'efforts serais-tu prêt à faire, Mickey ? » Oui, Mado devenait psychologue, pour l'occasion. Une vocation pour elle, assurément. Bien sûr, il n'était pas obligé de se confier. Pour autant, elle ne l'en empêcherait pas ...