Quand on y pense, cette semaine a tout d'une véritable farce destinée à faire rire les téléspectateurs derrières leurs écrans. Imaginez, 40 candidats d'horizons tous différents dans un environnement hostile et dans le confort le plus sommaire, vous obtenez la plus grosse blague de l'année sur un écran télévisé. Pourtant Adélie ne s'en plaignait pas, elle avait l'habitude des randonnées au grand air et des excursions dans la nature, c'était inscrit dans ses gênes comme une seconde nature. Ce n'est pas nécessairement de la vie au campement dont elle avait peur mais plutôt des autres candidats tous aussi imprévisibles les uns que les autres. Elle devait apprendre à les connaître, du moins une grande partie d'entre eux, découvrir 40 personne serait bien trop difficile. Elle voulait bien être sociable mais il y avait tout de même des limites. Elle n'allait s'adresser qu'aux visages qui lui inspiraient la sympathie, elle ne voulait pas se rapprocher des grandes gueules même si tout cela serait inévitable si elle venait à intégrer le nid. Elle passe le plus clair de son temps à essayer de se rendre utile aux yeux des autres, elle sait que cet environnement peut être déstabilisant pour quelqu'un qui n'a pas l'habitude. Mission du jour : trouver de l'eau pour en ramener au campement. La jeune femme se dirige à pas feutrés vers le puit mais c'est à sa plus grande surprise qu'elle découvre qu'il n'y pour ainsi dire aucun sceau pour ramener de l'eau au campement. Génial, la jeune femme soupire. « Fais chier » finit-elle par lâcher  comme une supplique. Elle n'est pas du genre à jurer mais en cas de force majeure elle n'hésite pas à se relâcher.  Elle finit par entendre un autre candidat s'approcher du puit peut être qu'il pourra l'aider. « Je crois qu'ils ont oublié de nous donner un sceau ». Elle n'est pas idiote Adélie, elle sait que c'est un oubli totalement volontaire de la part de la production. Elle finit par se retourner pour faire face à son camarade avant de se rendre compte qu'il s'agit de la jeune femme à l'allure si particulière. Avec sa peau foncé et ses tâches blanches qui recouvrent une bonne partie de son visage et de son corps, elle est loin de passer inaperçue au campement. Elle ne connaît rien de la jeune femme mais peut être qu'elle pourrait l'aider à régler ce malencontreux problème d'eau.   « Tu saurais construire en construire un, toi ? » On ne sait jamais, peut être qu'elle était une vraie bricoleuse dans l'âme et qu'elle pourrait lui apprendre.  

Assise non loin du puit, elle regrette de n’avoir aucun crayon ni papier pour s’essayer au dessin. Enfin, elle regrette aussi de ne pas savoir dessiner : elle sait qu’en le couchant sur une feuille, ce puit ne serait alors qu’un amoncèlement de pierres difformes, ne tenant que par la force de la gravité et par beaucoup de chance. Au lieu de ça, elle se contente d’imprimer sur l’herbe des ronds, des croix, au grès de ses envies dans un premier temps, puis au fil de sa rêverie quand une fille capte son attention sans même le vouloir. Elle ne fait rien, elle s’approche simplement de son puit. Le sien pour ces quelques minutes passées à le scruter. Le juron qu’elle lâche ne la fait pas sourciller, son regard déjà accaparé par sa silhouette s’activant autour des pierres. Pensant ne pas s’être fait remarquer au premier abord, l’affirmation de la jeune fille lui étant pleinement destinée lui prouve que non. Elle ne répond rien. Pour autant, Imma lève imperceptiblement ses sourcils, tout en se levant elle-même de sa place. Ca aurait été trop beau de pouvoir puiser de l’eau sans difficulté. Ils ont déjà la nourriture facilement arrivée dans leur main, l’eau est une autre paire de manches. Doucement, la namibienne s’approche du puit à son tour. Elle hausse ses épaules, bougeant machinalement sa tête de droite à gauche pour lui signifier que non. Non elle ne saurait pas construire un sceau de fortune. C’est l’évidence même, Imma n’a jamais d’idées en tête. Elle est trop bête pour ça. C’est ce qu’elle pense en tout cas, trop peu sûre d’elle. Pourtant elle lui dirait bien de chercher peut-être après une bouteille, qu’elles pourraient attacher au bout de la corde restante et essayé de la remplir. Si tant est que cela puisse être possible, Imma n’en dira rien. Elle ne fait que baisser la tête pour regarder au fond du puit, l’eau calme les narguant. Imma avale difficilement sa salive.

Obliger les candidats à fabriquer un sceau de fortune, voilà qui était particulièrement cruel. Même dans Koh Lanta les candidats n'avaient pas à se creuser les méninges de la sorte. Certes, ils devaient fabriquer leurs cabanes mais construire un toit était beaucoup plus aisé que de fabriquer un sceau. Adélie n'avait jamais été une fille très créative, elle n'avait pas l'âme d'une artiste, elle était plus du genre écouter ce qu'on lui dit pour le reproduire qu'à prendre les devants et innover. Elle n'avait pas l'âme d'un leader et ça, tout le monde le savait. Peut être qu'avant de partir elle aurait dû demander à son père de quel manière pouvait-on fabriquer un sceau de fortune puisque c'est grâce à lui qu'elle sait monter une tente ou même allumer un feu en pleine nature.  Son père lui avait aussi appris à tendre l'oreille et à rester sur ses gardes au moindre petit bruit sortant de l'ordinaire car une fois dans la nature elle n'était plus dans le royaume des Hommes. C'est peut être ce qui a trahit sa camarade, peut être qu'un autre candidat n'aurait pas remarqué sa présence mais pas Adélie. Elle entame la discussion, d'une manière on ne peut plus simple mais sa camarades  se contente de lui répondre qu'avec des signes de tête mal assurés. La française a au moins la certitude que sa comparse ne sait pas construire de sceau de ses propres mains. « De toute façon, je pense que personne ici ne sait en faire un ». Elle soupire plus abattue qu'agacée. Cette immersion dans la nature est pour le moins très frustrante et à des années lumières de ce à quoi elle s'attendait. Tant pis si sa camarade n'avait rien à lui dire, Adélie en avait gros sur la patate et parlerait pour deux s'il le fallait. « Tu n'as pas l'air très bavarde, on dirait ». Elle ajoute d'un ton détaché, elle ne lui fait pas de reproches non, elle constate juste les faits. Adélie est une fille qui aime dire ce qu'elle pense et livrer ses impressions aux gens qu'elle rencontre ce qui peut parfois être déstabilisant, elle le sait bien. Elle ne fait pas ça dans le but d'être méchante, elle aime juste la transparence, ce qu'il y a de plus pur en ce monde. « Est-ce que je peux au moins savoir ton prénom et d'où tu viens ? ». De toute  évidence  elle a l'exotisme dans le sang même si la jeune femme peut se tromper.      

En soit on ne peut pourtant pas dire que la jeune femme devant Imma soit impressionnante. Ca n’empêche pas pour autant Imma de rester muette comme une carpe - assurément emprisonnée dans le mauvais corps la carpe – les yeux fuyant. C’est qu’elle s’exclame librement sans hésiter, sans chercher ses mots. Tout l’inverse de l’africaine. Elle soupire. Et puis elle fait une grimace. Personne ne saurait faire de saut, pourtant ils ont besoin d’eau, quelque chose à boire pour vivre. Elle n’a pas vérifié si du liquide était stocké dans la réserve, mais elle a compris que non. Qu’ils devaient se débrouiller avec ce puit. Sans chercher à faire part de son idée, elle laisse la jeune femme parler de nouveau, lui dire qu’elle n’est pas bien bavarde. La jeune femme est dans le vrai et Imma absolument consciente qu’elle n’est pas une grosse bavarde. Ce n’est pas auprès d’elle qu’il faut chercher de l’animation, elle ne serait pas capable de le fournir. « Pas vraiment. » Elle lâche enfin quelques mots. Elle parle peu, tout du moins quand elle ne connait pas la personne. Pire encore lorsqu’elle n’a rien à dire. Imma déteste parler pour ne rien dire, s’accaparer la parole des autres et peut-être manquer des choses intéressantes venant de la part d’une autre personne bien plus impressionnante. La jeune femme semble à l’aise à l’oral et plein de choses intéressante sur le coin de ses lèvres. L’africaine l’envie largement, mais en silence. Elle veut en savoir plus sur elle. La base apparemment. Elle bouge doucement sa tête à l’affirmative. « Imma. De Namibie. » Elle répond strictement à ses questions, ni plus ni moins, un sourire finalement sur ses lèvres aussi vite partie qu’il n’était apparu. Elle ne précise pas son continent, n’ayant pas une imbécile devant elle. Quand bien même aurait-elle imbécile, qu’elle n’aurait pas précisé Afrique avec la Namibie, comme elle ne précise pas sa ville, inconnue de tous. On s’intéresse bien moins aux villes africaines qu’à Sans Francisco par exemple ou une autre grande ville occidentale. Une légère moue boudeuse sur les lèvres, elle se penche de nouveau ver l’eau. Pour en revenir au puit. « Tu n’as pas soif ? » Qu’elle lui demande, légèrement curieuse. Elle si, elle a soif.

La jeune femme savait se faire discrète, en se rendant au puit, Adélie n'avait même pas remarqué sa présence dans les environs. Était-ce voulu ? Sûrement si on en juge par l'attitude de sa camarade qui  ne répondait qu'avec des signes de tête ou des haussements d'épaules. Elle est avare de mot et ça Adélie ne tarde pas à le lui faire remarquer sans pour autant que cela ne soit un reproche. Elle pense juste à voix haute, elle livre ses impressions sans pour autant émettre un quelconque jugement. On dit d'elle qu'elle est pragmatique, qu'elle garde la tête sur les épaules mais aussi un brin trop transparente et honnête pour son propre bien. Qu'elle ne soit pas bavarde comme une pie est loin de la déranger, elle accepte toute sorte de qualités et de défauts chez l'être humain. C'est sûrement ce tempérament secret qui doit rendre sa camarade unique aux yeux des autres, elle n'aimerait surtout pas la faire changer. « Je peux parler pour deux, ça me dérange pas ». Elle répond avec un timide sourire sur le coin des lèvres, elle se savait capable de faire la conversation à la place d'une autre personne, elle pouvait se montrer si bavarde quand on l'y autorisait. Elle ne voudrait pas importuner sa camarade avec les banalités de sa vie alors elle se contient pour l'instant, elle ne voudrait pas passer pour une pipelette si la simple idée d'avoir une conversation la dérange. Même si elle est avare en parole, Adélie souhaite au moins connaître le prénom et le pays d'origine de sa camarade, elle n'en demandera pas plus pour l'instant. Elle s’appelle Imma et elle est namibienne, chose qui ne manque pas d'illuminer le visage de la rouquine. « Oh j'ai lu tellement de livres documentaires à propos du continent africain que j'ai moi-même l'impression d'y avoir voyagé. Alors qu'en fait non .. c'est la première fois que je voyage de toute ma vie. La Namibie est magnifique en photo. Ça a l'air d'être un joli pays ». Vous voyez, il suffit d'un rien pour qu'elle s'emballe et que bientôt sa langue devienne incontrôlable, que les mots qui franchissent la barrière de ses lèvres n'aient plus vraiment d'ordres précis et que bientôt les phrases n'aient plus aucun rapport les unes avec les autres « Je suppose que c'est à mon tour de me présenter, je m’appelle Adélie et je viens de France. Mais pas de Paris, non surtout pas, je vis dans les montagnes près de l'Italie et de la Suisse si tu arrives à visualiser. ». Elle préfère préciser, elle ne supporte pas qu'on associe la France au simple nom de sa capitale. Son pays est tellement riche en paysage et en héritage culturel qu'elle préfère se détacher de cet amalgame que tout le monde fait avec la capitale. Elle, elle vit dans ses montagnes bien loin de l'agitation des grandes métropoles. Imma finit par se pencher vers le puit et lui demande si elle a soif. « Je n'ai rien bu depuis hier soir alors oui, mais nous n'avons toujours pas de sceau et je soupçonne la production de vouloir nous éliminer un par un des suites d'une déshydratation. Et si nous ne réglons pas rapidement ce problème, je serai le première victime. ». C'est vrai qu'elle a drôlement soif, d'ailleurs elle se maudit de ne pas avoir pris une coupe de champagne ou même un verre de jus de fruit la veille car aujourd'hui elle en paie le prix. « Tu sais s'il y a des bouteilles ou des gourdes dans les environs ? Ça pourrait être utile ». Peut être qu'en attachant une bouteille à une corde elle arriverait enfin à puiser l'eau et à boire.