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Elle a eu vent de l’existence du mini-golf, mais n’a jamais daigné s’y approcher jusqu’à aujourd’hui. Dans un premier temps parce qu’il y a d’autres lieux qu’elle considère comme étant bien plus intéressant que celui-ci, comme le spa ou la laverie – pièce très importante à ses yeux, oui – et dans un second temps parce qu’elle considère le mini-golf comme un sport de flemmards et que, par conséquent, elle n’apprécie pas celui-ci. Ce n’est pas le principe du jeu qu’elle n’aime pas, car qu’elle se retrouve souvent le dimanche après-midi sur un green de golf avec son père, c’est le principe de la miniature qui lui déplait. À ses yeux, même un singe peut réussir un parcours de mini-golf, tant ceux-ci n’ont absolument rien de difficile. Ce n’est pas pour rien qu’ils sont toujours pris d’assaut par les familles qui tentent de rassurer leurs progénitures sur leurs capacités alors qu’elles sont équivalentes à celle d’un primate et pas forcément évolué, le primate. Il n’y a besoin d’aucune réflexion pour terminer un parcours de mini-golf, contrairement à un vrai golf. C’est un sport trop souvent sous-estimé, qualifié de sport facile alors qu’il faut faire preuve de réflexion et d’adresse pour briller dans cette activité. Mylah ne brille pas autant qu’elle le souhaiterait, elle fait pâle figure aux côtés de son père qui a de nombreuses années d’expérience au compteur, mais elle se débrouille malgré tout. Son obsession à vouloir user absolument d’un nombre de coups pairs n’est sûrement pas innocente dans son incapacité à être talentueuse dans ce sport. Quoi qu’il en soit, si elle se rend aujourd’hui jusqu’au mini-golf, ce n’est donc pas par passion pour ce sport ou par soudain intérêt pour ce lieu. À vrai dire, du moment qu’un endroit ne lui plait pas, elle ne voit pas l’intérêt de s’y rendre pour le découvrir de manière plus approfondie. Non, si ses pas l’amènent ici, c’est simplement par ennui. Mylah ne s’ennuie jamais, dans la vie réelle, son entreprise lui prend tout son temps et toute son énergie, elle n’a guère le temps de soupirer en cherchant une façon d’occuper ses dix doigts. Or, ici, c’est le sentiment qui prédomine depuis la semaine dernière. Certes, elle sait qu’ils sont gâtés en vue du nombre d’endroits mis à leur disposition, mais ce n’est pas pour autant que ceux-ci font son bonheur. Il y a bien le spa qui la rend particulièrement heureuse, mais elle ne s’y rend qu’une fois par semaine, comme elle le fait à l’extérieur de ces murs. Sans dossiers ni mails à consulter, Mylah se voit bien obligée de changer ses habitudes pour occuper ses journées, même si cela lui déplait fortement. Elle a un programme bien établi et il lui est encore difficile de chambouler celui-ci. Elle arrive sur les lieux et même si elle est arrivée poussée par l’ennui, ce n’est pas pour autant qu’elle compte débuter une partie. Seule, ça n’en vaut pas la peine. Elle se contente donc d’observer les lieux, les plantes tout autant exotiques que celles du jardin, les pavés disposés de façon à former les allées – reprenant ainsi sa mauvaise habitude de marcher de façon à ne jamais poser le pied sur deux dalles qui se touchent directement – ainsi que la disposition du parcours et, plus précisément, la disposition des obstacles. Ce lieu ressemble aux millions de mini-golf qu’il existe déjà. Aucun intérêt pour Mylah qui ne tarde pas à faire demi-tour. Arrivée à hauteur du cabanon qui abrite tout le matériel nécessaire, elle croise un candidat – qu’elle reconnait comme étant Lamine, puisqu’elle a retenu les prénoms de chacun, désormais –  venu la tirer de son ennui, qu’elle accueillerait presque comme le messie si elle était un peu plus expressive quand elle est heureuse. « Sois mon adversaire. » Elle lui ordonne, en s’emparant d’un club de golf à sa portée, hors du cabanon, parce que la notion de rangement semble être totalement inconnue aux yeux de certains. Elle se prépare déjà, parce qu’il ne peut que dire oui, impossible de résister à ses beaux yeux.

Pour un hôtel qui se veut luxueux, elle doit admettre qu’elle est déçue de constater que les propriétaires se sont contentés d’un mini-golf. Un mini-golf pour des stars comme Michael Jackson ou Marilyn Monroe, il y a quand même quelque chose qui cloche. Et pour ce qu’elle a pu constater, cet endroit ne manque pas de place, il aurait tout de même pu prévoir quelques hectares pour installer un vrai parcours de golf et pas une imitation pitoyable. Mais soit, elle n’a pas la capacité d’inventer ce qu’il lui plait en un claquement de doigts, il va bien falloir qu’elle s’habitue avec les endroits que la production a mis à leur disposition. Et l’ennuie prédomine sur sa haine du mini-golf. Elle ne viendra pas ici une fois par semaine, hors de question, mais elle se laissera volontiers tenter une fois de temps à autre, quand elle n’a rien de mieux à faire. Le seul souci qui se présente à elle, pour l’instant, c’est qu’elle est seule et qu’elle n’a aucun intérêt à jouer sans adversaire. Mylah aime remporter des batailles, écraser les autres, autant dire que seule, il n’y a aucun intérêt. Mais un candidat semble avoir entendu ses prières puisqu’il ne tarde pas à la rejoindre. Elle lui impose d’être son adversaire, elle sait pertinemment que s’il est venu ici pour tester le parcours, il ne sera pas contre la possibilité de se mesurer à autrui. « Je compte bien changer la donne, il ne faudrait pas que tu t’habitues à ce cas de figure. » Sinon, il ne touchera plus terre et il semble déjà bien partie pour cela. Et oui, c’est bien Mylah qui dit cela, elle qui est loin d’être un exemple concernant le manque d’estime de sa personne. Mais il ne faudrait pas que Lamine s’imagine obtenir victoire sur elle parce qu’il a obtenu victoire sur une autre, puisqu’elle compte bien le remettre à sa place en bonne et due forme. L’idéal aurait été de l’affronter sur un véritable golf, histoire que l’humiliation soit d’autant plus désagréable pour le jeune homme. « J’espère bien, je n’aime pas que ma victoire ne soit pas méritée. » Parce qu’elle va gagner, c’est obligé. Si elle perd – d’autant plus à un jeu aussi facile que celui-ci – elle rasera les murs durant toute une semaine et prendra soin d’éviter Lamine jusqu’à la fin de son aventure, tant l’humiliation sera dure à accepter. Dans tous les cas, ce n’est pas parce qu’elle est une fille qu’il doit la sous-estimer, elle déteste ces traitements de faveurs sous prétexte qu’elle est de sexe féminin. Elle soupire théâtralement quand il lance la partie et elle ne manque pas de rétorquer. « Quel gentleman. » Elle siffle entre ses dents, ironique au possible. Non, vraiment, quelle gentillesse, il ne fallait pas. Elle s’empare d’une balle de golf et se dirige en direction du premier trou, sans adresser le moindre regard en arrière et, donc, à Lamine. Elle dépose délicatement la balle sur la marque prévue à cet effet et se concentre l’espace d’une minute, pas beaucoup plus, le premier trou consistant généralement à une simple ligne droite à parcourir. Et c’est sans grande surprise que Mylah réussit en un seul coup - c'est bien la seule fois où elle acceptera d'obtenir un nombre de coups impair. Cependant, elle n’affiche pas le moindre sourire de satisfaction, sachant pertinemment qu’il n’y a rien de difficile dans un parcours de mini-golf. Ce n’est pas pour rien qu’elle n’aime pas ce sport et préfère le véritable golf, avec des distances bien plus grandes que dans ce cas de figure. Elle reprend sa balle et se décide enfin à porter attention à son camarade. « Je te proposerais bien un véritable enjeu, mais je ne voudrais pas également t’humilier en dehors de ce parcours. » Elle rétorque, sûre d’elle et de sa victoire. En réalité, il faut bien qu’elle trouve un véritable enjeu, car bien que son envie d’écraser son adversaire soit grande et qu’elle ne compte pas lâcher le jeu à mi-parcours, ce n’est pas pour autant que cela s’avérera une partie de plaisir, passé le cinquième trou. Reste à savoir si Lamine est du même avis, mais elle est assez confiante sur la question.  

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