Assis sur un pouf miteux, qui lui aurait probablement d'attraper des morpions s'il s'y était installé à l'époque où les détenus à l'hygiène plus que douteuse se vautraient largement et sans classe, Lloyd-Snö rêvasse. Il pense plus qu'il n'est dans le moment, une attitude qu'Arthur appelle « l'écran de veille » qui se caractérise par un regard vague mais sérieux, les mâchoires serrées et une imperméabilité totale à ce que le monde extérieur a à offrir. Ce n'est pas qu'il ne soit pas heureux d'être là, mais plutôt qu'il a des tonnes d'informations à traiter, d'abord les prénoms de chacun et chacune, associer les visages aux noms puis les ensembles visage/nom à des détails de personnalité. La dérangeante impression qu'on va lui faire passer un examen et qu'il n'est pas assez préparé est collante. Ce n'est que lorsqu'une voix vient interrompre son train de pensées bouillonnantes qu'il cligne des yeux et retourne à la réalité de la situation. Lloyd est frappé en permanence par les beautés qui peuplent la prison. L'indien près du jukebox est un exemple frappant de diversité culturelle et sa beauté, quoiqu'universelle est empreinte d'une élégance typiquement indienne. « Salut ! » fait Snö en se levant pour approcher de l'angle de la pièce où se tiennent le morceau de machinerie et son interlocuteur. Dans la tempête qui avait régné sous son crâne Lloyd n'avait même pas vu qu'un autre candidat était dans la pièce. Le diagnostic s'impose sans trop de difficulté : il doit absolument arrêter de se laisser emporter par le flot de ses pensées et rester concentré sur la vie au sein de la prison. « J'ai entendu quelqu'un dire que tu pouvais juste y foutre un coup de pied dedans, mais je suis pas sûr que ça marche vraiment... laisse-moi voir. » fait-il en plaisantant à moitié pour se pencher sur le vieux jukebox. Il a l'air assez standard, rien de bien compliqué. L'indien prendrait le coup de main sans grand mal, mais pour la première fois, un guide ne serait pas de trop. « À l'époque dans les bars il y en avait toujours un, tu mettais une pièce et tu appuyais sur le numéro de la rangée et dans la rangée sur le numéro de la chanson que tu voulais, mais celui-là est plus simple alors t'as qu'à appuyer sur le bouton. Voyons... ah ! Celui-ci c'est un vraiment morceau de civilisation américaine. » Son explication alliant le geste à la parole, Lloyd-Snö a appuyé sur un morceau de rock mondialement connu. Les premiers accords de guitare résonnent et Lloyd est emporté par Joan Jett, sourire aux lèvres. Il ne va pas se déhancher, parce que les stéréotypes sont forts et que bouger devant un indien qui a la danse dans le sang serait la promesse d'une honte assurée, mais aussi parce qu'il n'aime pas danser seul. Si seulement Arthur était là, il l'aurait embarqué dans un rock endiablé.