Cela faisait plusieurs jours que ce bus l'intriguait. Il ne faisait pas partie des cinéphiles qui n'avaient sûrement pas eu besoin des explications de la production pour associer ce véhicule à un film, et ce film à un homme, mais ça ne l'empêchait pas d'être hautement fasciné par tout ce qu'il représentait, et de vouloir s'imprégner des énergies d'un endroit comme celui-ci. Bien sûr, il n'était pas idiot, il savait bien qu'il ne s'agissait là que d'une réplique du bus original, qui d'après ce qu'il avait compris se situait quelques part en Alaska, et qu'il était donc peu probable qu'il y ressente autant de choses que s'il s'était rendu sur place. Mais le simple fait de se retrouver indirectement connecté à un homme qui à ses yeux représentait la sagesse et l'idéalisme lui procurerait assurément des sensations étonnantes, saisissantes. Il ne savait pas encore s'il se contenterait de passer un moment à l'intérieur du bus pour s'imprégner de ce qu'il y ressentirait, ou s'il se poserait plus longuement pour destiner quelques prières à cet homme dont il ignorait encore presque tout mais dont il se sentait étonnamment proche. Et à défaut de le savoir dans l'immédiat, l'indien avait dans un premier temps pris la direction du jardin, et avait atteint le bus après quelques minutes de marche qui l'avaient d'ors et déjà placé dans un état d'apaisement et de bien-être. A présent face au véhicule, il s'en approcha doucement, l'observa depuis l'extérieur puis se décida à y entrer, avec le même respect et la même sobriété que s'il était entré dans un temple. Seulement, au moment où il se retrouva à l'intérieur, il constata la présence de l'une de ses camarades, Lorena, qui visiblement avait eu la même idée que lui, ce qui le partagea entre la satisfaction de profiter d'une compagnie qui lui était encore relativement étrangère, et la crainte d'avoir potentiellement interrompu la jeune femme. « Oh excuse-moi, tu … tu t'apprêtais peut être à te recueillir ? » Il osa alors lui demander, un peu embêté, tandis qu'il n'osa avancer davantage à l'intérieur du bus, sans doute parce qu'il préférait se tenir prêt à revenir sur ses pas s'il sentait que c'était préférable. « Ou bien peut être que tu prévois de passer la nuit ici ? » Il ajouta ensuite, en s'apercevant qu'un lit était laissé à disposition des visiteurs, un lit qui à première vue semblait en bon état et avait même probablement déjà servi. « Dans un cas comme dans l'autre, je peux te laisser seule, si tu veux. » Il n'aimait déjà pas déranger d'habitude, mais ici il en avait d'autant moins l'intention, parce qu'il s'agissait d'un lieu particulier, où chacun devrait être libre de s'isoler sans que quiconque n'impose sa présence.