Même si ça n’est pas la saison, les glaces du congélateur me donnent envie. J’hésite vraiment à en faire mon dessert. Mais ça n’est pas raisonnable, non, alors au lieu de ça je décide de me préparer un Smoothie avec le mixeur. Ça fait une éternité que j’en ai pas fait alors que j’apprécie énormément ce genre de jus. Pour autant, je retrouve tout de suite les bonnes habitudes pour le préparer. On peut dire que je suis un expert à Fruit Ninja dans la réalité. Je me découpe donc une mangue puis un fruit de la passion et un ananas pour me faire un Smoothie exotique. Clairement pas le plus simple mais quand on sait que la prod’ nous fournit quasiment tout ce dont on a envie sur commande niveau bouffe, on va pas se priver. Une fois les fruits mixés, je pars mettre des glaçons dans un bol via le frigo américain. C’est là que Greta débarque sans même me voir. Je plonge discrètement ma main dans le bol puis je me précipite vers elle qui ne fait que passer par la cuisine j’en ai l’impression. « Attends Greta ! » Si elle se stoppe pas, ça va pas être facile alors autant la prévenir. De ma main libre, j’attrape son bras pour la retenir et nouer contact histoire de. « Il y a l’étiquette de ton haut qui dépasse. » Je déclare alors le plus innocemment du monde alors qu’elle semble surprise. J’imagine qu’elle s’en fout un peu, après tout, on n’est pas en plein prime et faut avoir l’œil pour remarquer ce souci du détail. Enfin en cours faudrait-il que ce soit vrai. En l’occurrence, c’est pas le cas. Mais je fais tout comme en passant ma main vers sa nuque pour y laisser tomber quelques glaçons. « La vengeance est un plat qui se mange froid. » La doyenne du nid semble crispée par l’humidité de la glace qui coule dans son dos au travers de son haut. La pauvre. J’ai un instant de la peine avant de me dire que j’ai tout de même été sympa car j’ai pu lui rendre son fromage de la même manière et ça aurait été tout de suite moins agréable. J’aurai clairement pas apprécié avoir du fromage dans le dos. Heureusement, là, ce n’est que de l’eau.

L’heure n’est plus à la nourriture, j’ai déjà mangé, elle était à la vaisselle jusqu’à ce que je prenne une très oppressante envie de faire pipi. Le truc qui arrive parce que tu as surement trop bu d’un coup au repas ou simplement parce que tu as une petite vessie qui a tendance à se remplir à vitesse grand V. Les justifications sont multiples et inexplicables, la nature est faite ainsi et je me contente donc de m’adapter. Un petit tour du côté des toilettes, un bon petit lavage de mains dans les règles de l’art, une noix d’alcool pour me désinfecter les mains et me voilà prête à vaquer à d’autres occupations. Que pourrais-je bien faire ? Oh, je sais, je crois qu’un petit peu de sport ne me ferait pas de mal, je n’en ai pas encore fait aujourd’hui et mon corps me supplie de danser un petit peu… Il me reste quelques numéros à imaginer pour mon spectacle, je n’ai pas encore la musique mais elle me vient généralement lorsque j’arrive au bout de mes chorégraphies, quand j’ai une idée suffisamment avancée sur le rythme des pas, leur durée, l’intensité souhaitée. Je suis néanmoins arrêtée en chemin par Salvador qui m’attrape par le bras et me force à m’arrêter. « Une étiquette ? Quelle étiquette ? » Je coupe toutes mes étiquettes car je ne supporte pas qu’elles me grattent le dos, en aurais-je oublié une ? J’en doute forte. Il tente de remettre le fameux morceau de papier et… OH C’EST FROID. « OUUUUUH ! » Je gémis en me crispant, mon dos est glacé, des frissons me traversent l’échine et je ne tarde pas à secouer mon top pour faire retomber le glaçon à même le sol avant qu’il ne s’aventure plus loin. Il me parle de vengeance et je comprends immédiatement de quoi il est question. « Tu n’aurais pas dû ! » Il veut jouer ? On va jouer. Je l’abandonne, comme si de rien n’était, le temps pour moi de trouver un pot et de filer à la salle de bain le plus discrètement du monde pour le remplir. Je reviens lentement à la cuisine, il est là, il prépare son smoothie, parfait. Je me rapproche suffisamment pour ne pas avoir à trop courir et m’élance. « AY AY AY ! » Cri de guerre africain, il est surpris et je profite de ce petit moment de flottement pour lui vider l’intégralité de mon pot sur la tête, il est trempé. « T’en as assez ou je te resserre ? »

Evidemment, j’ai pas apprécié le baiser de Greta sur le prime qui puait de la gueule car elle avait avalé du fromage à cause du défi de Rowan. J’estime qu’elle aurait pu choisir quelqu’un d’autre. Déjà, j’ai eu de la chance car j’étais que sa deuxième victime. Zélie a dû vraiment souffrir de l’haleine de la quarantenaire. Du coup, je décide de me venger dès que l’occasion se présente et là, c’est le parfait moment. J’ai des glaçons sous le coude et Greta passe par là. Je l’arrête aussitôt prétextant une histoire d’étiquette mal placée puis je lâche les glaçons dans le haut de la candidate pour qu’ils glissent contre son dos. La vengeance est un plat qui se mange froid et là, on peut dire que c’est vrai. Je prends un malin plaisir à regarder la candidate se crisper. « Tu ne croyais quand même pas que j’allais en rester là ? » J’suis pas toujours un gentil nounours, faut pas croire. Je sais parfaitement me défendre et me venger si besoin. La candidate m’abandonne soudainement en annonçant tout juste que je n’aurai pas dû. Bon. Je reste attrapé pensant que je l’ai vexé et qu’elle n’a pas apprécié du tout. Soit. Je me dis que ça lui passera car au final, c’était pas bien méchant ce que j’ai fait. Du coup, je m’attelle à nouveau à la préparation de mon Smoothie exotique. Une fois celui-ci finit, j’admire mon chef d’œuvre avec satisfaction. Puis là, y’a les indiens qui débarquent ! Enfin non, juste Greta qui se prend pour une indienne et qui me balance un pot d’eau sur la tronche. Vu que j’ai rien vu venir, j’suis trempé. J’essore mes cheveux dans l’évier d’un air dépité avant de retirer mon tee-shirt humide. « Avoues que tu voulais me voir à poil, une fois de plus. » Elle a franchement le don pour ça. Sauf que là, c’est provoqué. En attendant, je me saisis du bol où les glaçons ont fondues pour le balancer d’un coup sans prévenir en plein sur la tronche de la demoiselle. Y’a pas de raison que je sois le seul trempé. « J’ai cru comprendre que je te donnais un peu chaud ! » Je déclare alors pour justifier mon action qui n’avait en fait même pas besoin d’être justifié puisqu’il s’agit d’un simple retour à l’envoyeur. « Interdiction de toucher à mon Smoothie. » J’annonce les règles tout en m’éloignant d’elle pour ne pas qu’elle récidive. J’y ai passé quand même du temps à la préparation du mélange et ça sera un beau gâchis qu’il finisse éparpiller par terre. « Bon allé, je propose une trêve : on arrête et je te sers un verre. Je te propose même un indice sur mon secret si t’en fais de même. » Faut que ça soit équitable tout de même.

Avec le recul je pense avoir choisi Salvador parce que j’étais certaine qu’il ne m’en tiendrait pas rigueur. Il y avait peut-être également une petite pointe de revanche, il aime crier sur tous les toits que je ne l’intéresse pas et je commence vraiment à le prendre personnellement. On l’a compris que je ne lui plais pas, je ne lui ai pas demandé de m’épouser et j’aimerais qu’il arrête de le ramener toujours sur le tapis. A croire que j’ai laissé mes sentiments me guider pour sélectionner mes deux victimes sous pression puisque je devais le faire immédiatement. Je ne m’attendais pas à ce qu’il quémande une bonne petite vengeance à son tour, le moins que l’on puisse dire c’est qu’il a su habilement me rouler dans la farine, j’ai le dos glacé et je promets de lui rendre la monnaie de sa pièce. Je prends la fuite pour lui laisser penser qu’il a remporté la guerre, dommage qu’il ne puisse se contenter que d’une bataille. Je reviens en furie, mon plan suffisamment préparé pour me permettre de le surprendre et de prendre l’avantage en l’arrosant à son tour. Je m’élance comme une indienne en alignant les cris et lui renverse le pot d’eau sur le visage, il a les cheveux trempé, l’eau dégouline sur son corps très logiquement et transforme le sol en une vraie patinoire. Il me parle de son corps à nouveau et j’en profite pour mettre les points sur les i, plus parce que j’ai été vexée qu’autre chose l’autre fois. « Je ne passe pas mes journées à fantasmer sur toi mon coco ! » Il est certes très agréable à regarder mais je n’ai pas la dalle, je ne meurs pas encore de faim et même si c’était le cas je préfèrerais ne rien faire plutôt que de me rabaisser à courir après lui. Il ne me rate pas, je n’ai pas fait attention à ce bol rempli d’eau tempérée, j’en ai plein les cheveux et je tarde à réagir, la bouche grande ouverte, en état de choc. « Tu n’as pas osé ? » Je le questionne en replaçant une mèche de cheveux pour mieux chasser l’eau de mon visage. Il m’interdit de toucher à son smoothie et j’ai symboliquement très envie de m’en servir puisque je ne suis pas autorisée à le faire. Il propose une trêve que je considère quelques secondes. « D’accord, mais je veux un verre bien rempli ! » Je le laisse nous sortir deux verres et les remplir de ce smoothie qui a l’air délicieux. « Je commence avec mon indice ? » Je le questionne, prête à honorer ma part du contrat, je prends le verre que je porte à mes lèvres sans pour autant le boire. « Mon indice c’est...» Je prends le temps nécessaire pour réfléchir à l’adjectif parfait, celui qui pourra le mettre sur la voie sans me mettre dans le pétrin, j’en ai un, il est parfait celui-là, il fait naitre un sourire satisfait sur mes lèvres. « Rancunière ! » Et sans dire un mot de plus je balance le contenu de mon verre dans sa direction. « Dommage, il avait l’air bon ! » Je marque une pause, l’observe à nouveau et laisse un sourire provocateur prendre la relève. « A la tienne ! » Et je m’en vais, sans lui adresser le moindre regard, je lui laisse le soin de nettoyer le bazar que nous venons de créer, sans rancune.