Le problème quand on a trop de choix, c'est qu'on a du mal à choisir, c'est du moins le cas de Gio. Il se souvient avoir parfois passé près d'une demi-heure à choisir quel dvd regarder lorsqu'il était au vidéoclub. Il a la même impression d'être dépassé par l'étendue des possibles dans le nid, que ce soit lorsqu'il s'agit de choisir à qui aller parler, où aller ou encore, comme c'est le cas maintenant, à quoi jouer. Dans la salle de jeux, une multitude d'options s'offrent à lui, certaines sont immédiatement balayées, à regret, parce qu'elles nécessitent d'être quatre ou plus pour y jouer et qu'il se voit mal aller embêter trois personnes pour jouer à un jeu de société avec lui. Il s'apprête même à baisser les bras quand la porte de la salle de jeux s'ouvre et qu Cristopher, l'un des doyens du casting, fait son apparition. Voilà qui change la donne, Gio n'est plus obligé de se rabattre sur une partie de solitaire. « Tu veux faire un jeu avec moi ? » demande Gio en guise de salutations. Ils se sont déjà croisés deux ou trois fois dans la journée et Gio a vite perdu l'habitude de saluer les gens quand il entre dans une pièce, il finissait par avoir l'impression de passer sa journée à dire bonjour aux autres candidats. « Echecs ? Scrabble ? Billard ? » Il est partant pour tout, il aurait bien aimé jouer au Mahjong, mais il n'y a joué que sur ordinateur et il croit se souvenir que ça se joue à quatre. De toute façon, autant faire un jeu dont ils connaissent tous les deux les règles. « On peut même le transformer en jeu à boire... » suggère-t-il parce que la pièce regorge d'alcools de qualité.

Cristopher a l'air satisfait de son entrée, Gio n'attendait personne en particulier, mais il est content que ce soit Cristopher qui se soit pointé. Il est marrant et pas prise de tête, du moins du peu qu'il a appris à le connaître durant la première semaine. « Tout à fait ! » répond-il alors que Cristopher semble emballé par sa proposition de jeu à boire. Gio est bon pour ça, donner aux gens l'opportunité de passer un bon moment. « Il paraît oui... » admet-il avec un sourire. Son aîné se décide pour un billard, ce qui n'est pas pour déplaire à Gio qui trouve ce jeu bien plus sujet à se bourrer la gueule que le scrabble ou les échecs. « Va pour un billard alors. » dit-il en commençant à organiser les boules dans le triangle. Gio a un peu d'expérience avec ce jeu pour avoir fait quelques centaines de parties pendant ses années de licences. Cristopher doit en avoir aussi de l'expérience mais plus à cause de ses années de vie et de son milieu social. « Ça coûte combien tu penses une marque de whisky ? » demande un Gio réellement curieux, jamais il n'aurait pensé à acheter une marque de quoi que ce soit, encore moins de whisky. « Tant que c'est du whisky écossais, j'suis partant. » répond-il, parce que le bourbon américain, très peu pour lui, ça a autant de classe que tout le reste des produits américains qui ont une origine étrangère. Cristopher s'enquiert des règles et Gio se content de lui réciter celles avec lesquelles il a toujours joué : « Chaque fois que quelqu'un rentre une boule, l'autre boit. Si la blanche n touche aucune boule quand tu tires, tu bois. Si tu fais rentrer la noire avant d'avoir le droit, cul-sec. » Peut-être que maintenant qu'il voit que Gio n'est pas du tout déstabilisé, il réalise qu'il n'a pas affaire à un amateur. « On trinque avant de commencer ? » demande Gio avant de répondre à sa propre question en trinquant avec Cristopher et en sirotant le liquide ambré qui est franchement bien meilleur que la majorité des whiskys qu'il a pu boire. « Je casse ou tu casses ? » demande Gio, laissant l'opportunité à Cristopher de prendre le contrôle de la partie. Au pire qu'est-ce qui peut arriver ? Gio devra boire ? Big deal.

Cristopher lui donne son estimation de ce que coûterait d'avoir sa propre marque de whisky et Gio écarquille les yeux. « Pfiou ! Ça doit être cool d'avoir quelques millions qui trainent ! » dit Gio en sifflant doucement. Gio ne l'envie pas à proprement parlé, il a de l'argent, il gagne sa vie confortablement et sa famille n'a jamais connu le besoin mais s'imaginer avoir des millions sur son compte en banque lui paraît un concept étrange et étranger. « Merci, merci. » répond Gio quand Cristopher lui laisse la main. Il n'y a aucun inconvénient à commencer, et encore moins à perdre. « Au fond, perdre ça m'dérange pas tant que ça, ça veut juste dire que je peux picoler davantage... » explique-t-il, révélant son manque d'esprit de compétition. Il casse néanmoins et aucune boule ne trouve de trou. C'est donc à Cristopher de jouer, ce qui lui laisse le temps de répondre. « Plein de choses. J'ai pris une année sabbatique pour profiter de la vie avant de finir mes études, d'entrer dans le monde du travail et tout. Donc c'était un peu la dernière opportunité pour moi de participer. Puis j'suis pas fermé à trouver l'amour ici, ça serait même cool. Et si j'gagne un peu d'argent ça n'sera pas d'refus. » Gio ne sait pas exactement pourquoi Cristopher aurait envie de gerber parce que certains d'entre eux espèrent trouver l'amour. Surtout quand d'après ce qu'a compris Gio, Cristopher a déjà trouvé l'amour... Un peu cynique comme réponse. « Et toi ? T'as l'air d'être blindé de tunes, j'ai entendu dire que t'étais marié, alors c'est quoi ta raison pour venir t'enfermer avec une bande de gens qui ont la vingtaine ? » demande-t-il parce que Gio ne voit pas combien de milliers de raisons une personne qui a déjà tout dans la vie peut avoir. Pour ce qui est de ses amours... « Non, pas de copine ou de copain, je suis on ne peut plus célibataire. » répond-il en haussant les épaules. Sa vie sentimentale est un peu désertique ces derniers temps et il aurait du mal à dire si ça lui pèse ou pas. Il a ses amis et ils lui prennent déjà tellement de temps qu'une vie de couple n'a pas le temps de lui manquer, mais ce serait sympa d'avoir quelqu'un à aimer et qui l'aime en retour. « Toi t'es marié, c'est pas trop dur pour ta femme de te laisser participer à l'émission ? » demande Gio, qui ne sait pas s'il aurait osé abandonner la personne qui partagerait sa vie pendant une période de temps indéterminée. Pas qu'il n'aurait pas eu confiance ou que cette personne aurait eu de quoi s'inquiéter, c'est simplement que passer jusqu'à trois mois sans voir la personne qu'il aime lui semble un peu compliqué.