Le déclenchement des lumières de la chambre à treize heures ne m'enchanta pas plus que ça. Je n'avais pas pour habitude de me lever très tard, mais disons qu'hier la soirée avait été mouvementée et avait traîné dans la nuit, et j'aurais bien dormi quelques heures en plus. Je n'serais dire à quelle heure j'ai rejoint mon lit, mais le soleil commençait sûrement déjà à se lever. En plus de ça, je n'avais pas spécialement passé une bonne nuit. Je ne repose pas la faute sur mon partenaire de jeu, et en l'occurrence partenaire de lit, Sami, mais plutôt sur ce premier prime qui m'avait rendu malgré moi toute excitée. J'ai beau dire tout ce que je veux, mais dans le fond, je peux pas nier le fait que ce prime fut une véritable expérience. L'humain est tout de même assez étrange et à la fois tellement complexe. Bon, ça ne va pas vous étonner si j'commence par dire qu'il y a dans la maison tout type d'individus. Je m'y attendais, forcément, mais de tels opposés peut-être pas. Mais tant mieux, ça risque de bien pimenter le jeu. Comment j'ai vécu le prime? Assise sur un fauteuil, à boire et à fumer, en faisant un debriefing sur la soirée, les candidats et les lieux. Le bilan est mitigé. La soirée en elle même disons s'est déroulée comme je l'avais pré-sentie, les candidats sans réelle surprise et les lieux un peu trop féerique à mon goût. La vie de princesse très peu pour moi. Déjà quelques personnalités se sont démarquées lors du prime, personnellement ça ne m'a pas percuté, maintenant que l'aventure commence! On était donc lundi, premier jour dans le nid d'amour. Déjà le nom, ça te met dans l'ambiance. Je me dirige vers la salle de bain, c'est une habitude, une fois levée, je vais me brosser les dents. Quitte à le refaire après le petit déjeuner. Je fais partie des premiers debout, j'aperçois encore beaucoup de camarades lézarder dans leur lit... Je m'estime heureuse, je n'aurais pas à faire à la cohue dans la salle de bain.

Je me suis réveillé à 7h précise, avec des maux de tête insupportables. Sans oublier cette odeur de brétaille qui me colla après la visite de l’écurie ce matin, une odeur qui avait la fâcheuse manie de me déplaire au plus haut point. Conscient du danger que présentait cette aura nauséabonde sur moi et la blonde qui m’accompagnait ce matin en cet endroit, nous nous décidâmes de filer, chacun vers son chemin pour nous dévêtir de cette sale enveloppe de merde. Deux minutes plus tard, je me retrouve tout seul, et les caméras tracent mécaniquement mon itinéraire… ainsi, je longe les couloirs avant de déboucher sur un angle qui m’annonce d’ores et déjà la présence d’une candidate, blonde encore une fois ; elles sont nombreuses oui. Il faut dire qu’avec ce surnombre, il demeure un sacré pourcentage de 0,3% de finir sur une salle vide. Pas le temps de parler donc, je ne suis pas vraiment là pour ça, après tout, je n’en vois pas l’utilité. Parler pour bien dire, ça ne m’intéresse pas, alors imaginez moi parler pour ne rien dire… Carrément inconcevable. Je m’éloigne un peu en direction des douches. Des douches communes. La personne derrière moi n’est pas consciente que je devrais abandonner mes habits pour ainsi dévoiler mes parties intimes, ce qui ne signifie rien pour moi. Ses regards sur moi que je détecte grâce à mes radars internes ne suffiraient pas pour que je cède à cette idée de devoir me désaper. Je commence donc, frénétiquement, prenant le soin de ne rien laisser sur ma peau laiteuse, obstruée par de nombreux coups et bleues, parsemés dans mon corps mais qui peuvent paraître illisible sur ma peau, à cause de sa noirceur, mais qu’un 10/10 dans chaque œil et quelques carottes permettraient de déceler. Me reste plus que le caleçon. Inspiré, je dévoile mes fesses noires, et me projette directement vers les douches que je prends soin de fermer doucement, pas pour priver la jeune femme de ce spectacle, non, mais bien pour ne pas laisser l’eau s’échapper. J’attends, laissant l’eau se déverser sur moi, et puis là, je commence à songer à mon existence…

On m'avait devancé, et le black en question était entré en premier dans la salle de bain. Ce n'est pas une raison pour moi de changer mes plans, je savais que tout au long de l'aventure j'allais devoir supporter tous ces gens, que ce soit lors des soirées, des repas, des jeux collectifs ou bien encore des douches, comme ce matin même. Oui les douches communes. Honnêtement si ça pouvait en gêner certains, moi ça ne me procurait ni chaud ni froid. Tu m'diras, je garderais sûrement un maillot de bain sur moi pour le début, du moins le bas. Je n'étais pas spécialement pudique, voire pas du tout, mais à l'inverse, j'évitais de me promener nue dans tous les recoins de la maison. Enfin bon, me laver en gardant mon maillot de bain allait probablement vite me prendre la tête. No matter. J'ouvre donc la porte de salle de bain à mon tour, je n'sais quel tronche j'avais ce matin, j'en avais pas grand chose à foutre. Mais les nombreux miroirs disposés tout autour des murs de la pièce, eux, m'ont vite remis sur pied. Mes cheveux détachés commençaient à graisser, pas étonnant vu la tonne de laque qu'on m'avait mis hier soir avant mon entrée dans le nid d'amour. J'avais de petits yeux plissés, déjà qu'en tant normal je n'avais pas spécialement de grands yeux, mais la lumière heurtant mes pupilles n'arrangeait pas grand chose. Le grand black se tenait derrière moi, à poil, prêt à entrer dans les douches. Sérieusement je ne doutais pas de son corps de rêve, j'avais pu me faire ma propre idée lors du prime. Il n'est pas difficile de remarquer sa carrure.. disons imposante tout de même. Et puis, mon camarade du prime m'avait parlé de lui, comme quoi il était son partenaire. Je crois même qu'il s'en était plaint toute la soirée. Franchement, j'le trouvais pas pire qu'un autre, au moins il l'a fermé toute la soirée, aucun risque qu'il vienne le faire chier. Il était à présent sous la douche et moi j'en profite pour attraper ma brosse à dent. Par la suite, j'ai bien mis plus de deux minutes à comprendre le système des robinets. Ah c'était bien beau, très esthétique, mais côté pratique j'avais connu bien mieux. Après avoir compris qu'il fallait appuyer en haut, en même temps que passer sa main sous le robinet, je pouvais enfin me brosser les dents. Comme tous les jours, le dialogue était un exercice très périlleux me concernant, mieux vaut pas s'y aventurer...

Je songe à mon aventure. A ce début d’aventure, à la noble quête altière qu’on m’a prodigué les soins de remplir en ces lieux, et qui me chiffonne… Pour la première fois, je ne sais pas comment m’y prendre. D’habitude, j’ai avec moi tout un arsenal offensif, partant du simple canif de chasseur au petit scalpel du légiste, ou bien, le Colt M1911, le Mythe Américain, mon préféré de tous, le model A1. Là, je n’ai rien, je suis complètement désarmé, pas d’outil de travail, niet, nada. Mes bijoux me manque, J’ai franchement envie d’en créer, mais je passerais pour un dingue. Créer un lance pierre ? Pourquoi pas, durant ma visite, j’ai repéré des morceaux de bois, me manquera l’élastique, un soutien gorge d’une putain fera l’affaire. Mais on me prendra pour un môme, un dingue, un déchet radioactif ultra-instable… Quelques-uns le pensent déjà, d’autre s’obstinent à supprimer ce malheureux constat… Pour la première catégorie, je les comprends, pour la seconde, je les plains. Je ne suis pas cruel, je suis tout simplement absurde et complètement inhabituel. Je songe à mon début d’aventure… L’eau se déverse sur moi, les jets d’eau clarifie ma peau et je ne peux sentir un réel besoin de quitter cette fusion qui allie deux alliages : Mon corps métallique à cet eau pure. A un moment, je trouve que j’en ai assez pris, que cette eau n’a plus le même effet, et qu’il est temps que je sorte. J’arrête la mécanique simpliste de l’engin et pousse la porte. La jeune femme est toujours là. Je ne me gêne pas et attrape une serviette blanche que j’enveloppe tout autour de ma taille. Je la regarde, avant de laisser tomber mes yeux sur un miroir… Et là, je regarde fermement l’homme que je suis. Je suis dans une salle de bain, avec une femme, des pulsions meurtrières s’emparent de moi mais je suis assez immunisé pour l’instant… avant de rentrer dans ce jeux, j’ai pris les précautions de vidé 60% de mes liqueurs spermatiques sur une geisha japonaise que j’ai spécialement commandé sur ce qu’il appelle « la toile »… Pas de panique, il me reste 40% au cas où… Mais je n’ai pas trop envie de les user pour l’instant. Ce n’est que le début… si je saute quelqu’un, on me vire direct. Pour l’instant, je suis le mec bizarroïde du nid, ça ne me fait ni chaud ni froid… Tout ces gens ne me font rien, je n’ai même pas la sensation d’avoir un quelconque impact sur eux, ou eux sur moi. Ectoplasme que je suis, cette jeune femme avec ses regards indiscrets ne me fait rien elle aussi. Je la regarde une dernière fois, avant de me laisser tomber sur une chaise… Je ferme les yeux à cet instant et me décide à rester ici pendant un long moment, juste assez pour faire dissiper cette odeur de merde et en habiter une autre, plus humaine…

Je me pose comme d'habitude tout un tas de questions. D'autant plus quand mon activité du moment est le brossage de dent. C'est vrai ça, que voulez-vous faire à part penser pendant trois longues minutes? Je ne pense pas à ce qui va arriver, enfin ce n'est pas dans mes habitudes de programmer ma journée, ni même mon petit déjeuner. Je pense plutôt à ce qui m'entoure, réflexion faite, je disserte inconsciemment sur ma propre personne. Vous savez, il y en a des choses à dire et même à éclaircir. Ça fait plus de vingt-deux ans que je travaille sur moi-même et je n'ai toujours pas réussis à en comprendre un huitième. Il me reste encore quelques années, du moins je l'espère, pour continuer d'apprendre. Je parle de moi comme d'une énigme, c'est pas faux. On m'a d'ailleurs déjà comparée à une sorte d'objet instable, ce jour-là, j'avais attisé la curiosité d'une jeune femme. Mais rien à voir avec l'énigme, je sais. Je fixe mon regard dans le miroir, tout en faisant un mouvement circulaire de ma main droite afin de faire briller mes dents. C'est une façon de parler, à vrai dire, c'était plus pour atténuer l'haleine de chacal que j'me tapais tous les matins. Je ne me considère pas une exception en ce genre, certains l'avouent moins que d'autres c'est tout. J'en avais presque oublié la présence du black sous la douche, lorsque ce dernier fit apparition à côté de moi, devant le second lavabo de la salle de bain. C'est bizarre, mais ce type ne me mettait pas en confiance. Enfin je ne pense pas que ce soit si bizarre que ça, mais j'entends par là, que je suis rarement impressionnée par une personne en tant que telle. Il se produisait un phénomène purement psychique qui me mettait pratiquement mal à l'aise. Là encore, un truc purement inexplicable. Je ne me gêne pas pour le regarder et m'interroger. De un parce que je ne vois pas pourquoi m'en cacher? Si d'autres n'osent pas, ça les regarde. Et de deux parce qu'il doit sûrement en avoir rien à foutre, ça pour le coup c'est une affirmation mec. Je le vois s'asseoir sur la chaise qui figure au coin de la porte. J'arque un sourcil. «t'es sur ma serviette, là.» du con. Que ce soit lui ou un autre, je m'emportais très facilement. Pas que ma serviette soit sacrée, mais j'en avais besoin point barre. J'attendais pas spécialement une remarque de sa part, mais plutôt un geste, genre me donner ma serviette peut-être? «tu serais aimable de m'la filer.» merci bien pour ta générosité. moi agressive? ah bon?

J'ai carrément oublier le moment présent. Cet état de nudité ou ma peau est vulnérable contre tout contact me faisait voyagé vers des pensés très noires, à l'image de ma texture moléculaire à présent très propre... Avant d'être perturbé par cette pouf, j'étais sur la planète XX et je m'imaginais plusieurs films érotiques. Je pensais à ce que je pouvais faire de ce paquet de filles avec qui on m'avait dangereusement logé. Imaginez avec moi une cage, un lion et quinze steaks hachés rouges comme on en voit sur les dessins animés. Un festin royal tourné en un véritable massacre. Si j'étais glouton ? Pas vraiment, mais à la vue de toutes ses cuisses bandantes, on pouvait dire que ça faisait franchement vibrer ma lanterne rouge et je me voyais toujours prêt au crime. D'habitude, les femmes je ne les côtoie jamais. Je suis le genre de mec qu'il faut éviter de mettre avec un V car sinon ça gicle de partout. Les femmes sont un traitement pour mes désirs, l'opium de mon corps, ma drogue, la matière métaphysique qui parvient, naturellement à faire de moi un agneau après l'acte. D'habitude, on m'interdit les femmes, et le fait qu'on ait eu l'idée de me mettre avec un homme dans ce jeu n'est autre qu'un des nombreux signes qu'on devrait me craindre. Les femmes, je ne les rencontre que rarement. Et quand je les rencontre, c'est surement la nuit, après l’achèvement de mes travaux douteux ; on m’installe sur un canapé et on me dispose un album sur les genoux... Et là, je peux choisir le produit qui m'inspire, en vue du très large panel de choix. Je ne paye rien, c'est offert par l'institut et c'est quelque chose que j’apprécie. Il nous prodigue toujours des trophées de victoires. Parfois, je reste des heures devant ce catalogue, priant le bon dieu de me procurer le courage de finalement choisir l'heureux fantasme de cette nuit, et une fois le choix validé, je déballe mon cadeau avec la même envie du petit chrétien à la vue de ces paquets rose-vert-bonbon pour Noël...Mais cette pouf sournoise vient d’interrompre mes fictions. Une serviette ? C'est tout ? Elle ne s'imagine pas tout le mal qu'elle m'a prit, pour une serviette ... Je ne vais pas râler, ce n'est pas dans mes habitudes. Je m'en fiche outrageusement,comme d'habitude, avec la même attitude similaire aux précédentes, et ce n'est pas prêt à changer. Ce n'était que des fictions... Je me lève, et je la lui donne, tout simplement, sa serviette, puis occulte la salle avant de lâcher mes pieds pour retrouver ma position précédente, c'est à dire assit sur la chase en plexiglas ou je ne sais quel matière de merde... C'est du plastique j'en suis sûr. Qu'est ce que j'attends ? Que mon corps sèche et que mes membres retrouvent leur fraîcheur de tous les jours, avant de m'élancer vers une nouvelle quête. Cette femme devant moi, ce n'est qu'un détail incrusté profondément dans ce décor, rien d'autre...