C'était un fait, quelques fois, Tweedy aimerait sincèrement mesurer quelques centimètres de plus. Disons dix bons centimètres. Comme elle aimerait posséder une garde robe moins désespérante, disons. Parce que généralement, elle était amenée à enfiler des tenues soient d'une simplicité déconcertante, soit pour le moins improbables. Ainsi donc, la plupart du temps, Tweedy ne ressemblait à rien, si ce n'est à un clown. Était-ce d'ailleurs pour cette raison qu'elle avait écopé d'un tel déguisement lors de la dernière soirée ? Hm, la jeune femme allait finir par le penser. Quoi qu'il en soit, c'est avec un certain désespoir que la jeune femme mettait une fois de plus de l'ordre dans ses affaires, se rendant à nouveau compte que la plupart de ses fringues étaient à jeter, ou même à brûler. Ouais bon, il faut dire que la jeune femme n'était ni une lanceuse de mode, ni une milliardaire ... Ainsi donc, pas étonnant qu'on puisse parfois confondre sa garde robe avec celle de sa mère. Quoi que, sa mère avait probablement plus de goût qu'elle en matière de vêtements, quand on y pensait. En tout cas, Tweedy ne put s'empêcher de dévier son regard en direction d'une autre pile de vêtements qui, eux, ressemblaient un minimum à quelque chose. Non, rectification : ces vêtements-ci étaient superbes. C'était un style plaisant, à mille lieux du sien donc. Sans trop savoir pourquoi, Tweedy commença à caresser les tissus, se permettant même de poser certaines tenues devant elle, se positionnant face au miroir le plus proche. Et là, elle vit le reflet de l'une de ses camarades. Aj. Un petit cri de sursaut lui échappa. Bon sang, qu'elle peur elle venait d'avoir. « Est-ce que ... est-ce que cette tenue t'appartient ? » demanda-t-elle bêtement, gênée d'avoir été prise sur le fait comme une gamine de huit ans. Oui, gênée, c'était bien le mot.

Il faut que je change de veste, je viens de mettre la mienne à la machine, car, malheureusement, elle pue la clope, même si cela ne me dérange pas d'ordinaire, mais là, l'odeur est vraiment très marquée. Je l'ai mise à laver, c'est bien mieux. Je suis en débardeur, et j'ai la chair de poule maintenant, je cherche une veste qui peut trainer, mais bizarrement tout est bien ranger. Et mince, j'ai jamais de chance, je remonte donc, juste frigorifiée. Je me frictionne les bras, pour m'insufler un peu de chaleur et je monte des escaliers deux à deux et je déboule dans le cellier. Je chope Tweedy entrain de faire: je sais pas, mais elle a l'air coupable. Elle vient de crier, je la regarde, en fronçant les sourcils, c'est quoi son problème ? Peu importe, je fonce vers mon placard, et je me cherche un pull bien chaud. « Est-ce que ... est-ce que cette tenue t'appartient ? » Je tourne vers elle. J'hoche la tête. « Oui, c'est la mienne. » Je lui réponds en la regardant puis je me reconcentre sur ma tâche principale, me couvrir. Je compte les piles, les pulls chauds, troisième pile à droite. Je prends un pull à grosses mailles, noir. Je l'enfile avant de m'occuper à nouveau de Tweedy. « D'ailleurs, je peux savoir ce que tu fais avec ? » Je lui demande finalement, un brin surprise. Je suis pas possessive avec mes fringues, non, je veux juste savoir ce qu'elle fout avec.

Tweedy n'était pas une voleuse. Non. Et ça n'était pas non plus son genre de fouiller dans les affaires des autres, hein, soyons clairs. Pourtant, la jeune femme n'avait pu s'empêcher d'aller jeter un coup d’œil du coté d'une jolie pile de fringues qui, incontestablement, avaient bien meilleure mine que ses fringues à elle. Là au moins, on n'avait pas l'impression que tout avait été acheté dans une friperie, ou même, dans une grande surface. Il y avait un minimum de goût, un minimum de style ... Bref, c'était canon comme garde-robe, et bien à mille lieux de la sienne. Voilà pourquoi Tweedy s'était laissée séduire par le diable et qu'elle avait plus ou moins délibérément placé cette si ravissante tenue sur elle, sans l'enfiler bien sûr, juste histoire de voir ce que ça pourrait donner, dans ses rêves les plus fous. Elle se plaça alors devant le miroir qui se trouvait non loin d'elle, mais alors qu'elle était comme hypnotisée par la tenue en question, la jeune femme fut pour le moins surprise de voir le reflet d'Aj dans le miroir, si bien qu'elle en poussa un petit cri de stupeur. Zut de zut, elle venait de se faire cramer. Et bien comme il faut, en plus. Non vraiment, c'était une catastrophe. Une catastrophe, oui. Si bien qu'elle songeait à disparaitre dans un trou de souris. Oh mais attendez, le pire serait qu'en plus cette tenue appartienne à Aj. Était-ce le cas ? Et bien, elle n'en savait rien du tout, voilà pourquoi elle prit le risque de le demander à sa jolie camarade. Et là, Aj lui répondit qu'il s'agissait effectivement d'une tenue à elle. Bam, c'était la fin du monde. Tweedy arbora une mine affreusement gênée, son sang lui brûlant les joues et des gouttelettes de sueur ornant son front. « Je te prie de m'excuser » fit-elle alors, tandis qu'elle éloigna la tenue d'elle et qu'elle s'éloigna plus généralement du miroir. Mais alors qu'elle s'apprêtait à remettre la tenue à sa place, Aj lui posa LA question qu'elle redoutait. De pire en pire. « Je ... je tâchais de voir s'il n'y avait pas de faux plis » finit-elle par lâcher, un brin confuse. Ouais ouais, bien sûr. Pas mal cette histoire de faux plis, n'empêche. Pas crédible pour un sou, mais pas mal.

« Je ne vois pas pourquoi tu t'excuses, tant que tu ne déchires pas mes vêtements pour passer tes nerfs ou je-ne-sais-quoi, c'est bon. » Je la rassure, avec un léger sourire. Je l'observe, je ne comprends pas tellement son malaise, je cherche, c'est peut-être moi, je n'aurai surement pas dû rentrer dans le dressing, en même temps, je ne pouvais pas savoir qu'elle y était. J'ai l'impression qu'elle rougit de plus en plus, je crois bien qu'elle transpire légèrement, son front luit un petit peu. Oula, on a un problème. « Tu es sûre que tu vas bien ? » Je lui demande, un brin inquiète, en fronçant les sourcils, portant ma main à mon menton, en mode pensive. Puis elle pretexte chercher les faux plis, mauvaise réponse, avec une maniaque comme moi ma belle, les faux-plis n'existent pas. Rien qu'à voir l'état de ma penderie, bien rangée, les piles presques alignées au centimètres près. Mais bon, je ne conteste pas, je m contente simplement d'hocher la tête face à son explication, pour éviter de la mettre encore plus dans l'embarras. Je ne la sens pas aujourd'hui, je me demande ce qu'il peut bien lui arriver. « Tu veux l'essayer ? » Je lui propose en m'occupant de ma penderie, je ressors tout, pour mieux ranger. Je suis bien tentée de lui dire que la tenue lui ira bien parce que j'ai grossis ou un truc dans ce style, mais étant donné que j'ai une silhouette de mannequin anorexique, je ne serais pas tellement crédible.

C'était naturel chez Tweedy de s'excuser en permanence. A croire que la jeune femme estimait sans cesse faire quelque chose de grave au point de ressentir perpétuellement le besoin de s'en excuser. Remarquez, il valait sans doute mieux ça que l'inverse, quand on y pense. Parce que les gens qui ont tendance à faire tout et n'importe quoi, sans jamais prendre la peine de s'excuser, n'étaient pas très bien vus par Tweedy, justement. Quoi qu'il en soit, elle fut plutôt soulagée de constater qu'Aj ne lui en voulait pas à mort d'avoir osé toucher à ses affaires, ce que pas mal de monde n'aurait assurément pas apprécié. De toute manière, qu'elle se rassure, Tweedy n'était aucunement du genre à se permettre de détériorer les affaires d'autrui. Non, absolument pas. « Oh ne t'inquiète pas, il n'y a aucun risque. Et puis, de toute manière, je suis plutôt du genre à intérioriser. » Ah bon ? Parce que ça, à la rigueur, on s'en fichait royalement. Finalement, Aj sembla s’inquiéter quelques peu pour Tweedy, au point de lui demander si ça allait. Bon, il faut dire aussi que la petite brune se mettait à trembler légèrement et à transpirer, deux des symptômes qui transparaissaient généralement de son état de gêne. Rien de bien alarmant, donc. « Oui oui, tout va bien » lui assura-t-elle alors, dans un large sourire. Et pour cause, maintenant que Tweedy savait qu'Aj ne lui en voulait pas, elle allait bien mieux. Logique. Oh mais attendez, est-ce que sa camarade lui proposait sérieusement d'essayer sa tenue ? Non, attendez, Tweedy devait rêver. Tout cela ne pouvait pas être réel. Ah mais si, visiblement, ça l'était. Ça alors. « Oh non, je ... je ne voudrais pas risquer de ... » De quoi ? De l'élargir ? De la déchirer ? De la faire subitement changer de couleur, peut être ? Sait-on jamais. « Je ne suis pas sûre que ce genre de vêtements puissent m'aller. C'est ton style, pas le mien. » Oui car ces deux jeunes femmes avaient des styles vestimentaires sensiblement différents. Mais était-il vraiment nécessaire de le rappeler ?

Tweedy est du genre à intérioriser, pas moi, et si je venais à vraiment me mettre en colère, je crois que passer ma rage sur des pauvres vêtements me ferait vraiment du bien, ou un coup de poing dans le mur m'irait tout à fait aussi. A voir. Finalement Tweedy me rassure, elle va bien, je me permets d'n douter tout de même, j'hoche quand même la tête, d'accord, on va faire comme si je la croyais, même si je sais que quelquechose ne va pas. « Je ne suis pas sûre que ce genre de vêtements puissent m'aller. C'est ton style, pas le mien. » Je fronce les sourcils. Comme si j'avais un style, elle me fait rire, je suis celle dont les fringues sont les plus basiques, et simples, et pas très féminines. Sauf pour les primes, de temps en temps, et encore, c'est la Prod qui me fournit là. « Et alors, je ne vois pas trop où est le problème ? » Je lui lance en la regardant, bizarre, puis je sors toutes mes piles, et je m'assois sur le sol, je commence à trier mes vêtements, en fonction de la couleur. Je vois qu'elle ne bouge toujours pas, je me demande ce qu'elle attend. Je soupire, et je tourne la tête dans sa direction, mes yeux verts se posent sur elle. Donc ? Je la contemple avec un air interrogateur. « Vas-y essaie. » Je finis par lui demander, avant de me reconcentrer sur le rangement de ma penderie. Je vois, enfin, j'imagine qu'elle hésite encore. « S'il te plait, aller ... » Je lui demande tandis que les doigts de ma main tapotent sur le sol, je commence à me faire impatiente. Aller, elle va pas mettre trois ans à s'habiller.

Sérieusement, que pensez-vous du style vestimentaire de Tweedy ? Non, ne répondez pas, vous risqueriez de lui faire beaucoup de mal. Quoi que pas tellement, puisque la petite brune était parfaitement consciente du fait que sa garde-robes n'affichait pas tellement de style, de classe, d'élégance. Bien sûr, elle aimait la plupart des fringues dont elle disposait, et était même prête à reconnaitre que certaines n'étaient pas mal du tout dans leur genre, mais dans sa globalité, sa garde robe tirait tout de même la gueule. Il fallait bien le reconnaitre, hein. Les couleurs étaient soient trop ternes, soit trop pétantes, les formes pas tellement flatteuses ... Ouais, ça n'était clairement pas la garde-robes d'une Première Dame, mais ça lui irait parfaitement si elle n'avait pas sans cesse sous les yeux des garde-robes plutôt agréables à regarder, qui faisaient logiquement passer la sienne pour quelque chose d'assez miteux. Tenez par exemple, celle d'Aj lui donnait clairement envie, raison pour laquelle Tweedy avait osé se servir dans celle-ci et s'imaginer porter l'un de ses vêtements. Malheureusement pour elle, sa camarade l'avait surprise et désormais, elle semblait vouloir que Tweedy essaye le dit vêtement. Mais cela ne lui irait assurément pas, non, ça n'était même pas son style à la base. Mais soit, si vraiment Aj insistait, parce que visiblement elle insistait, Tweedy pouvait daigner faire un effort ... De toute manière, elle avait bien de la chance : le ridicule ne tuait pas. « Bon d'accord » fit-elle alors, dans un petit sourire gêné. Sans attendre, Tweedy prit le vêtement et partit se cacher derrière une sorte de petit mur qui empêcherait Aj de la voir galérer à enfiler son vêtement, hm. Quelques instants plus tard - presque une éternité, en fait - Tweedy réapparut. « J'ai l'air du dinde. » Non, ça n'était pas une question mais bien une affirmation.