Nicole

LUNDI 10 DÉCEMBRE - 19H32
CHAMPS DE LAVANDE

L'un de nos tous premiers échanges avait eu lieu ici-même, dans ces champs de lavande. C'est donc tout naturellement que j'y avais amenée Nicole ce soir, tenant fermement sa main et bravant à ses côtés le froid de décembre qui nous fouettait le visage, et qui tentait de ralentir nos pas à travers le village mais sans succès - à croire qu'à deux, nous étions suffisamment costauds pour braver vents et marées. Revenir ici avec elle me replongeait douze semaines en arrière. Au départ, je m'étais dit que Nicole et moi ne parviendrions jamais vraiment à nous entendre. Et pourtant... tandis que cette aventure touchait à sa fin, j'étais le plus heureux des hommes - normal, j'étais amoureux. Bien sûr, je n'oubliais pas cette Épée de Damoclès qui trônait au-dessus de nos têtes, et notre histoire qui était grandement menacée à l'heure actuelle. Qui pouvait dire quelle voie nous emprunterions, et surtout si nous le ferions ensemble, ou chacun de notre côté... Je ne voulais pas me retrouver séparé de Nicole, vraiment, je partais aujourd'hui du principe qu'elle m'était indispensable et que sans elle, je ne pourrais vivre. C'était les pensées bien noires d'un type s'étant fermé à l'amour pendant sept ans et qui, enfin, y avait droit à nouveau. Je préférais ne même pas penser à l'éventualité que Nicole puisse, elle aussi, briser mon cœur comme Lahoussine l'avait fait sept ans plus tôt. Cette fille vénale et cupide qui m'avait délaissé pour un autre, bien plus mûr, certes, mais surtout bien plus riche. Je ne serais même pas étonné que Lahoussine fasse le chemin jusqu'à Londres pour reprendre contact. Eh oui, j'étais assuré de partir avec ma cagnotte personnelle dimanche, et celle-ci était élevée, plus encore que je ne l'aurais pensé. Que ce soit bien clair, elle pourrait tenter de ressurgir dans ma vie subitement, elle risquait d'être bien reçue. Mon frère se chargerait probablement de lui faire passer l'envie de briser des cœurs. Je n'avais pas été le premier, et certainement pas le dernier non plus. De toutes façons aujourd'hui je n'avais d'yeux que pour Nicole, et elle seule. Cette aventure nous l'avions menée à deux, en couple du début à la fin, et nous la quitterions à deux également. Pour un avenir néanmoins incertain, et un retour à la réalité semé d'embuches, et probablement de quelques prises de conscience, également. Nicole et moi arrivâmes sur les fameux champs de lavande où, deux mois et demi plus tôt, nous commencions tout juste à faire connaissance. Aujourd'hui Nicole représentait encore certaines zones d'ombre à éclaircir, bien sûr, mais je la connaissais certainement mieux que bien des personnes ici. Enfin, à une exception près, cela va de soi. Je me stoppai dans ma marche, me tournant alors vers Nicole à qui j'offris d'emblée un large sourire. « Tu te souviens... c'est ici qu'on s'est échangés nos premiers mots après le prime. » J'avais déposé ma veste sur ses épaules pour qu'elle n'attrape pas froid, tout ça... Aaaah, ça faisait un bail. Et comment oublier ce prime d'ouverture durant lequel j'avais découvert avec stupéfaction ma partenaire, pensant que celle-ci ne m'épargnerait rien. Au final j'en venais à me demander ce qu'aurait été mon aventure sans Nicole. Est-ce que j'aurais atteint la finale, hier soir, avec une autre partenaire ? Aurait-elle été éliminée plus tôt, ou plus tard, avec quelqu'un d'autre ? On ne le saurait jamais. « Hum... Nicole... tu penses vraiment que j'ai "un sérieux soucis" ? » rétorquais-je, tout en troquant mon sourire au profit d'une mine inquiète, crispée. Je faisais évidemment référence à mon secret. Pour le moment je n'allais pas revenir sur la moquerie de Teresa et le fait qu'elle y ait rit. Moi j'étais surtout soucieux de l'image que je pouvais lui renvoyer, d'où cette question que je lui posais. Si Nicole pensait que j'avais un grain, il y avait de fortes chances pour qu'elle n'envisage rien par la suite avec un type dans mon genre. Mais mon secret était celui que j'avais révélé la veille, c'était moi, ça faisait partie de ma vie et je n'allais pas changer mes convictions pour qui que ce soit. Non, qu'on le veuille ou non je m'étais persuadé de certaines choses il y a trois ans et j'étais à présent catégorique sur le sujet. Me saisissant de ses mains, je la fixai de mes grands yeux clairs. « J'ai pris une décision. » tranchai-je, sans en dire plus pour le moment. Peut-être cette décision dont il était question ne l'intéresserait en rien... Ou peut-être au contraire chercherait-elle à en savoir plus... Je n'essayais même pas de jouer sur un certain côté énigmatique. À vrai dire c'était on ne peut plus sérieux là, j'étais loin de plaisanter et ce qui allait suivre risquait de faire l'effet d'une bombe.

Ce soir, alors que le froid glacial de l’hiver s’était confortablement installé au sein du village, Malik me proposait une petite ballade. Comment ne pas refuser ? C’était trop romantique. Hm, oui je suis devenue fada de ces choses-là contre mon gré. A vrai dire malgré mon goût inavoué pour ce genre de truc il aurait eu droit à un non catégorique dû au froid si ceci n’était pas la dernière semaine de jeu. Pour lui. Pour les finalistes. La mienne s’était déroulée il y a fort longtemps, et en costume de rat s’il vous plait. Mon partenaire était populaire autant à l’intérieur du nid qu’à l’extérieur. Nous savions tous ici que les fois où nous avions été mis sur la sellette c’était pour me faire dégager moi et pas lui. La seconde fois fut la bonne. En y repensant j’avais toujours cette envie de tous aller les égorger un par un. Mais bon, je ne suis pas une psychopathe ; moi. Ma main tenue au chaud dans la sienne, je laissais Malik me guider. On s’enfonçait au milieu de nulle part et c’était vraiment pas une bonne idée tellement nous étions frigorifiés. Il voulait peut-être me laisser là et s’enfuir en courant avec un rire diabolique pour se venger du prime ? Mh au vu du champ de lavande dont nous nous rapprochions je crois que finalement son intention était tout autre.« Tu te souviens... c'est ici qu'on s'est échangés nos premiers mots après le prime. » Evidemment je que je m’en souvenais et c’était très chou de sa part de revenir ici. Le début de cette aventure me semblait si loin maintenant… dire que ça faisait quatre mois que nous étions rentrés. Hallucinant comme le temps pouvait passer vite et surtout à quel point j’avais pu changer d’avis sur lui depuis notre dernière rencontre dans les brins de lavande. Lors de notre premier échange je ne lui avais pas laissé beaucoup de chances, voir aucune puisque je m’étais fixée sur son apparence de loser fini. Les mecs qui piquent les fringues à leur père à la base ça ne m’attire pas des masses mais lui il était différent. Heureusement, sinon mon aventure aurait été un véritable enfeeer. Être attachée à un pauvre type pendant des mois, merci bien mais NAN. « Oui… je n’étais jamais revenue ici depuis. Ça me rappelle pleins de choses.» Un long sourire s’étalait sur mon visage pourtant ces choses n’étaient en rien très glorieuses. Mon regard se projetant au loin, bien que la nuit l’empêchait de s’y perdre, je me remémorais ce premier soir de l’aventure que j’aurais étonnement voulu revivre. Alors que nous ne nous connaissions même pas mon partenaire s’était sacrifié en me glissant sa veste sur les épaules, tandis que lui grelottait ; il n’y a pas à dire Malik était aussi précieux que mon collier de perles de cultures. Ce n’était pas une perle mais un collier de perles ! « Hum... Nicole... tu penses vraiment que j'ai "un sérieux soucis" ? » Bah oui chaton, qui dédierait une part de sa vie à un mec qui n’existe plus ?! « J’ai été surprise. » Lalalaaa ; comment contourner la question, leçon 1. Mes prunelles désormais posées sur lui, j’étais un peu gênée face à son air de constipé. Je connaissais son secret et pourtant j’avais trouvé le moyen d’être cassante lors de sa révélation alors que tous les autres partenaires s’étaient montrés compréhensifs à l’égard de leurs acolytes. « Je ne pensais pas que c’était si important pour toi en fait. T’y penses vraiment tout le temps ? Tu entends sa voix là par exemple ? » Qu’il m’explique quoi ! Je voulais savoir à quel point il considérait la seule personne capable de rivaliser en chirurgie faciale avec Térésa, après tout il avait lui-même déclaré qu’il faisait partie de sa vie. Y avait de quoi flipper nan ? J'aurais aussi pu prendre peur devant ces grands yeux qui me fixaient, des yeux globuleux et tout clairs même dans la nuit noir. « J'ai pris une décision. » Oulà. Je le sentais pas là. Ca faisait très moment mélo-dramatique propice à une mauvaise nouvelle, du moins à un truc qui n’allait pas me plaire. Moi aussi j’avais quelque chose à lui dire venant d’une décision sur laquelle je ne reviendrais pas mais je me gardais de le lui signaler. En général dans les films qu’on regardait pour rire avec ma seule et unique copine jusqu’à il y a environ trois mois, des deux personnes qui avaient quelque chose à confier c’était toujours la mauvaise qui parlait en premier. Dooonc étant donné que sommeillait en moi une fille respectable, je me tus. Inspiratiooon. « Ok vas-y, je suis concentrée. » Ok coco je suis chaude comme la braise là, chaud patate! Nan j'rigole, en fait ça voulait simplement dire que j'étais prête à ne pas m'énerver, à ne pas pleurer, à ne pas me vexer. Rien du touuut, quelle que soit la nouvelle j'étais préparée à rester calme et civilisée.

Ne pas avoir chopé une sale maladie comme une bronchiolite ou ne serait-ce qu'une angine relevait du miracle, je pense. En tout cas me concernant, car j'étais sans conteste le candidat qui avait le plus souvent omis de revêtir un manteau un tant soit peu chaud ou d'enrouler une écharpe autour de son cou avant de sortir et d'affronter le froid de plus en plus intense qui paralysait peu à peu le village. Certes, j'étais un garçon quelque peu irréfléchi... Des plaques de verglas apparaissaient même sur les trottoirs, de quoi garantir une chute retentissante au moins prudent des passants. Ce soir, j'étais justement de sortie avec Nicole et comme souvent, j'avais sur-estimé ma résistance au froid. Mais bien agrippé à la main de Nicole, je partais du principe que celle-ci m'évitait de mourir d’hypothermie. Alors tant pis si je ne sentais plus ni mes jambes, ni mes bras. Quand j'étais auprès d'elle, j'étais incapable de me laisser abattre. Elle me donnait la force de continuer ma marche à travers le village puis de me frayer un chemin entre tous ses brins de lavande qui semblaient être là pour freiner nos pas, plus que pour dégager une douce odeur ou faire joli. Je n'avais pas conduit Nicole ici par hasard. Douze semaines plus tôt, dans ce même champs, nous échangions nos premiers mots après le prime d'ouverture. À l'époque nous ne sachions rien l'un de l'autre et jamais je ne me serais imaginé ressentir pour Nicole des sentiments tels que ceux que je ressentais aujourd'hui pour elle. C'était fou de voir combien notre binôme avait évolué, combien nous avions appris à nous connaitre, à nous apprécier, et enfin à nous aimer. Tout n'avait pas toujours été très rose entre nous, mais j'étais fier d'avoir fait tout ce chemin avec elle. Mon aventure n'aurait pas été la même sans Nicole, elle m'avait beaucoup apporté. J'espérais qu'elle percevait, tout comme moi, la dimension symbolique du lieu sur lequel nous venions de poser pied. « Oui… je n’étais jamais revenue ici depuis. Ça me rappelle pleins de choses. » J'avais moi aussi une multitude de souvenirs me revenant brutalement à l'esprit. Notre première soirée dans le nid n'avait pas été la meilleure que j'avais passée ici mais il fallait pourtant voir celle-ci comme le commencement de ce que nous avions petit à petit construit à deux, tout au long de ces semaines. Je gardai le silence quelques instants afin d'admirer le sourire se dessinant progressivement le long des lèvres de Nicole. Malgré le froid, elle restait incroyablement belle. Je me perdais dans ses yeux, je détallais le moindre trait de son doux minois. J'aurais pu la contempler ainsi pendant des heures mais je me sentais comme contraint de revenir sur ce qui l'avait, semble-t-il, beaucoup marqué la veille au soir - à savoir la révélation de mon secret. Après celle-ci, Cupidon avait cherché à connaitre le ressenti de Nicole et ma partenaire avait alors rétorqué que j'avais selon elle un "sérieux soucis", ce qui m'avait je dois bien le dire un peu blessé tout de même. Mais je préférais lui donner l'occasion de m'expliquer ce qu'elle entendait par là, histoire de voir si j'avais ou non majoré son côté compréhensif. « J’ai été surprise. » fit-elle. Là, je n'avais clairement pas la réponse escomptée à ma question. Ce n'était même pas une réponse d'ailleurs. Je pouvais concevoir le fait qu'elle eut été surprise d'en apprendre d'avantage sur mes convictions hier soir mais si il y avait bien quelqu'un que je ne pensais pas capable de me prendre pour un dégénéré, c'était quand même bien elle. Or un "sérieux soucis", cela mettait en évidence une sorte de folie chez moi, non ? C'était peut-être ce que j'étais après tout, à ses yeux - un fou. Elle reprit. « Je ne pensais pas que c’était si important pour toi en fait. T’y penses vraiment tout le temps ? Tu entends sa voix là par exemple ? » Je tentai de réprimer un rictus en posant ma main devant ma bouche, comme un gamin ricanant discrètement derrière un mur pendant une partie de cache-cache. Entendre la voix de Michael ? Hum, je n'étais pas atteint à ce point-là quand même. « Je pense que le jour où je commencerai à entendre des voix, celle de Michael ou d'un autre, j'irai consulter. » rétorquais-je, dans un rire. Non mais soyons sérieux quelques instants... C'était une chose de dénoncer ouvertement une mascarade autour de la supposée mort de Michael - à laquelle je ne croyais pas le moins du monde -, s'en était une autre d'entrer en contact avec lui alors qu'en plus, il était bel et bien vivant pour moi. Entendre la voix des morts, je connaissais bien que je n'en avais jamais tenté l'expérience. Mais entendre celle des vivants, quand même... « Non, bien sûr que non. Et je n'y pense pas non plus tout le temps. Seulement cela fait partie de moi maintenant, je réfute fermement ce qu'on a tenté de nous faire avaler au sujet de sa mort, comme tout Believer se revendiquant comme tel. » J'empruntais régulièrement l'ordinateur portable de ma belle-sœur pour suivre les dernières informations sur cet hoax, via mes sites favoris. J'étais plus informé sur la vie de Michael que probablement bien des fans à l'heure actuelle. « Je ne vis pas non plus que pour Michael, hein, Nicole. Je veux dire j'ai un travail, j'ai pas chamboulé ma vie pour lui non plus. Mais oui, ça importe pas mal à mes yeux. (...) Il importe à mes yeux. » Ne jamais avoir été fan de Michael Jackson et se prendre de passion pour lui du jour au lendemain et une fois sa "mort" annoncée au JT du soir ? Je l'avais fait. Oui, parfaitement. J'avais gardé les mêmes convictions malgré mon départ brutal d’Égypte et ma migration en Angleterre, il y a quelques mois. Aujourd'hui j'étais un Believer et je ne pouvais plus me cacher. J'espérais d'ailleurs que mon discours dimanche soir avait convaincu la communauté... Suite à quoi je passai aux choses sérieuses, annonçant à Nicole que j'avais pris une décision. « Ok vas-y, je suis concentrée. » Ah, au moins elle y portait de l'attention, je n'allais donc pas parler dans le vide. Qu'on se le dise cette décision la concernait quand même un peu, bien qu'initialement elle me concernait surtout moi. Prenant une grande inspiration et plongeant à nouveau mes prunelles dans les siennes, je finis par lâcher le morceau. Enfin, j'amorçai d'abord la chose à ma façon, on va dire. « Quel que soit le verdict dimanche, je suis au moins assuré de partir avec pas mal d'argent en poche, tu sais... » Chaque finaliste repartirait avec sa cagnotte, et la mienne était la plus élevée de toutes pour l'heure. Ce qui me garantissait une belle somme d'argent pour ma sortie de ce nid, sachant pertinemment que de toute façon je ne pouvais pas espérer plus. « Ça représente, hum, je crois... 32 500€. Oui, quelque chose comme ça. » poursuivis-je, pas très sûr de moi mais c'était dans ces eaux-là, tout du moins. Effectivement ça faisait un paquet d'argent, et maintenant je ne pouvais que lui faire part de la suite... de la décision en elle-même. « Voilà j'ai appris hier qu'un de mes amis avait de très graves soucis financiers... Il n'a pas pu m'en parler puisqu'il s'agissait de son secret mais maintenant, je me sens comme qui dirait... concerné. Je songe donc à lui faire don d'une partie de cette somme. » Ça, c'était dit. Le candidat en question était Wade, autant dire que pour lui j'étais prêt à beaucoup de choses. Et Nicole le savait, je ne ferais pas usage personnellement de cet argent. Alors autant qu'il aille à des personnes en ayant réellement besoin. « Une autre partie ira à ma mère, de qui je vais tenter d'améliorer les conditions de vie et par conséquent la santé. » Dans notre appartement miteux Londonien, il n'était pas facile de conserver une santé de fer. Ma mère avait pas mal d'années au compteur, et aujourd'hui j'estimais qu'il était de mon devoir de fils de faire en sorte qu'elle puisse vivre dans un confort qui n'avait jusque là jamais été à sa portée. J'avais de l'argent là, je voulais en faire bon usage. « Et je suis prêt, également, à t'aider financièrement si besoin à ta sortie. » Tout dépendait bien sûr de ce que prévoyait de faire Nicole après. Allait-elle définitivement laisser derrière elle sa profession d'escort-girl ? Je ne savais pas grand chose de ses projets, puisque pour l'heure nous ne connaissions pas notre avenir à deux. « Voilà, je... Même si ma décision est prise, j'aimerais quand même savoir ce que tu en penses. » Qu'on se le dise, je la testais un peu, c'est vrai. J'attendais une réaction de sa part, en espérant bien sûr qu'elle soit bonne et que Nicole ne me considère pas comme un abruti jetant son argent par les fenêtres. Aussi, je risquais fort de reverser un peu d'argent, également, à des œuvres caritatives. Et pourquoi pas à des hôpitaux Égyptiens accueillant chaque jour des enfants victimes de bombardements semblables à ceux ayant causé la mort de mon père, il y a quelques années. Je ne détournai pas le regard, désormais dans l'attente d'un geste, d'une parole...

Malik riait. Il riait de mes questions concernant son secret. Alors je devais en déduire que j’étais à côté de la plaque ? J’étais un peu déconcertée mais surtout extrêmement soulagée ! « Je pense que le jour où je commencerai à entendre des voix, celle de Michael ou d'un autre, j'irai consulter. » Pfiouuu. Je lâchais un long soupire résultant de mon soulagement. Merci, Malik était normal ! Il continuait à s’expliquer et en fait il était juste borné ; ce n’est pas comme si je ne le savais pas déjà. En général je détestais lorsqu’il campait sur une conviction débile et sans fondement (dont une en particulier mais on ne reviendra pas dessus) mais là bon… « T’es anticonformiste en fait. C’est terriblement sexy ! » Mes ongles venant ripper son torse étaient peut-être de trop mais qu’importe, il était graouuuu. Le côté « Il importe à mes yeux. » me refroidit un peu tout de même, c’était ce côté-là du secret que je n’arrivais pas à comprendre mais bon bref c’est juste qu’il s’intéressait à ce cas comme moi je m’intéressais à McCartney. Stella. Ma main sauvage se retrouva ensuite en possédée de celle de Malik. Il avait quelque chose à m’annoncer. Je me concentrais donc, prête à relativiser touuut ce qui allait sortir de sa bouche. S’il me larguait alors j’irais voir Térésa. S’il abandonnait l’aventure alors je lui mettrais une claque. S’il voulait qu’on se marie je lui ferais revoir ses paroles en l’étouffant avec des brins de lavande. Bref, j’étais prête à tout. « Quel que soit le verdict dimanche, je suis au moins assuré de partir avec pas mal d'argent en poche, tu sais... » Monsieur le roi des discours bonjour. Je déteste lorsque les gens tournent autour du pot avant d’aborder le sujet principal, c’était sincèrement énervant. Je ne suis pas du genre patiente, en fait. J’adoptais une expression de poupée, mes prunelles fixées sur les siennes. Je me permis un petit « oooh » muet lorsqu’il annonça le montant de sa cagnotte avant de reprendre ma position précédente ; droite, petit sourire légèrement marqué, visage radieux. Là je me concentrais vraiment pour ne pas flancher. N’avais-je pas dit qu’on ne reviendrait plus sur le souci financier de la chose précédemment ? Je pensais d’ailleurs que le sujet était clos et que j’avais gagné mais NON. Il m’éneeeeerve ! Déjà donner du fric à sa mère alors qu’elle allait bientôt crever euuuh aucun intérêt ! Et puis son ami il avait qu’à faire gaffe, on trouve tous des solutions quand on veut. Au pire y a la prostitution chéri ! « Et je suis prêt, également, à t'aider financièrement si besoin à ta sortie. » Waw, tant de gens voulaient m’aider maintenant alors qu’avant personne ne s’en souciait. D’ailleurs jamais je n’avais demandé de soutien à qui que ce soit ; avant j’aurais sauté sur l’occasion pour profiter de lui mais je ne pouvais pas abuser de Malik. Je comptais bien me débrouiller seule et trouver des alternatives une fois dehors. Pas question de choisir la solution du lâche. Toujours stone, je secouais cependant ma tête de droite à gauche, tout en restant muette. Valait mieux parce que j’allais péter un câble sinon. « Voilà, je... Même si ma décision est prise, j'aimerais quand même savoir ce que tu en penses. » Aaaah il fallait donc que je m’exprime. Hmmm… je portais un doigt sur mes lèvres, levant mon regard vers le haut ; genre j’étais en pleine réflexion. « Hmmm…. TU SAIS TRES BIEN CE QUE J’EN PENSE ! » Plus je retiens ma colère, plus fort elle explose ; évidemment. « T’es où toi là-dedans ? Nul paaaart. Et qui est en finale ? Toi ! Je ne vois pas où est la logique de la chose ! C’est toi qui t’es lancé dans cette aventure, toi qui l’as vécue et c’est toi qui mérite la récompense. » Qu’est-ce qu’il m’énervait à ne jamais penser à lui ! Respire sexy Nicole. Inspire, expire, inspire, expire. « Ok admettons que tu fasses ça, t'as intérêt à utiliser les avantages que t'offrira Fake Lover à la sortie sinon je ne l'accepterai pas. » Il savait très bien de quoi je parlais là, les interviews, les photos et tout ça. Oooh oui il détestait ça mais il fallait bien qu'il ait de la thune pour lui bordelasse! C'est simple je refusais que Malik souffre encore d'un style de vie précaire alors qu'une occasion en or se présentait à lui. « Je refuse que tu ne saisisses pas ta chance. » Bras croisés sous ma poitrine, j'étais mi-boudeuse, mi-en colère maintenant. « Et si tu me demandes pourquoi, c'est parce que je t'aime. Voilà. » Bon avec CE détail il devrait normalement pencher en ma faveur. Normalement. Je n'arrive pas à croire que je lui ai sortit ça de but en blanc! N'empêche que c'était sortit... tout seul.

Nicole s'imaginait que j'entendais la voix de Michael Jackson et que c'était ma façon, sans doute, d'entrer en contact avec lui. Or, justement, je n'avais aucun contact avec le roi de la pop. Je le savais juste vivant, quelque part, mais entendre sa voix ah non, jamais je n'en avais eu l'occasion. D'ailleurs je préférais que cela reste comme ça, car bien souvent les voix qu'on entendait étaient celles de personnes décédées. Et si je venais à entendre la voix de quiconque un jour, mon premier réflexe serait de me rendre dans le cabinet du psy le plus proche. En général cela n'annonce jamais rien de bien fameux... des troubles psychologiques, de la schizophrénie... Non, merci, je préférais en rester à mon état de Believer incompris et sûr de ses convictions. « T’es anticonformiste en fait. C’est terriblement sexy ! » À ce point ? Et... ses ongles au niveau de mon torse... elle allait m'attaquer, me mordre, se jeter sur moi ? Vraiment, on aurait dit une lionne prête à bondir sur sa proie. Ce qu'elle ne fit pas. Ouf, elle aurait pu ne faire qu'une bouchée de moi. C'est que je la connaissais, ma Nicole ; elle avait un côté animal, bestial même qui était facilement perceptible. D'ailleurs, entre nous, j'aimais beaucoup ce côté-ci, mais chuuut. « Je doute de l'être autant que toi. » répliquais-je avant d'y ajouter un petit clin d’œil. Nicole et sexy étaient synonymes, autant qu'à mes yeux Malik et sexy étaient antonymes. Je mourrais d'envie de me réchauffer tout contre elle mais je préférais ne rien entreprendre pour l'heure car la suite de mes paroles semblèrent quelque peu l'attiédir. Ce devait être le fait de reconnaitre que Michael était important pour moi. Il ne fallait pas qu'elle pense un instant que je lui vouais un véritable culte, car ce n'était pas vrai. Ce type, je ne faisais que m'y intéresser car toute la mascarade montée autour de sa mort feinte me fascinait. Rien de plus. Mais ce qui suivit méritait d'avantage qu'on s'attarde dessus, je pense. Il était question de la toute récente décision que j'avais prise au sujet de l'argent qui allait me revenir dimanche soir. Je ne souhaitais pas en faire un usage personnel voilà pourquoi je prévoyais de venir en aide à un ami dans le besoin, mais également d'aider ma mère à se trouver un chez soi plus confortable, plus sein également. Je redoutais un peu la réaction de Nicole puisqu'elle était du genre à me reprocher d'agir d'abord pour les autres avant d'agir pour moi. Mais c'était dans ma nature ça, je voulais constamment secourir mon prochain car au moins, là, je me trouvais une certaine utilité. Je proposais aussi de l'aider financièrement si besoin, mais surtout, je voulais savoir ce qu'elle pensait de tout ça. Car son avis, toujours, importait à mes yeux. Je ne changerais pas mes plans, seulement j'espérais qu'elle comprendrait mon choix, et qu'elle l'accepterait. Mais c'était peut-être trop espérer pour ce soir. « Hmmm…. TU SAIS TRES BIEN CE QUE J’EN PENSE ! » En général quand Nicole commençait à hausser le ton dès le début, ça ne laissait rien présager de bon pour la suite. « T’es où toi là-dedans ? Nul paaaart. Et qui est en finale ? Toi ! Je ne vois pas où est la logique de la chose ! C’est toi qui t’es lancé dans cette aventure, toi qui l’as vécue et c’est toi qui mérite la récompense. » Certes, c'était mon aventure. Ça avait mon casting, ma sélection et ma qualification. Seulement je ne ressentais pas le besoin de garder de l'argent pour moi, je n'en voulais pas. Je n'étais pas venu ici dans le but d'amasser des tonnes de liasses de billets, à la base. « Ok admettons que tu fasses ça, t'as intérêt à utiliser les avantages que t'offrira Fake Lover à la sortie sinon je ne l'accepterais pas. » Et profiter du système comme beaucoup de candidats le faisaient pour se construire un avenir après le jeu, non merci ! Et quels avantages ? Aaah ouiii... On en avait déjà parlé, je n'avais même pas envie de revenir là-dessus pour être honnête. Seulement Nicole ne se rangeait pas de mon côté et cela me peinait. Je pensais qu'elle me soutiendrait. « Je refuse que tu ne saisisses pas ta chance. » Je soupirai longuement. Nous ne parviendrions de toute manière jamais à nous mettre d'accord ! Qu'est ce que je pouvais répondre, sans m'enfoncer, sans que Nicole ne soit plus désemparée encore qu'elle ne l'était déjà ? « Et si tu me demandes pourquoi, c'est parce que je t'aime. Voilà. » Tandis que j'avais un instant plus tôt baissé la tête et reporté le regard à mes pieds, sans savoir quoi lui répondre pour éviter qu'elle ne s'énerve d'avantage, je relevai le tout lentement, sans être certain d'avoir bel et bien entendu ce qu'elle venait de me dire. Ou plutôt de m'avouer. Je pensais avoir rêvé, avoir été victime d'une de ces hallucinations auditives qu'un surplus de fatigue pouvaient parfois causer... Je n'étais plus sûr de rien là. « Pa... pardon ? » Pincez-moi ! Bousculez-moi ! Baffez-moi ! "JE T'AIME"... En fait non, je n'avais pas rêvé, elle l'avait bien dit. Je commençai à trembler, comme si un regain d'énergie prenait subitement possession de tout mon corps. « Tu m... m'ai... » Rien à faire, je n'arrivais pas à le répéter. Ou peut-être bien que si, en fait. « ELLE M'AIME !! YIIIIIIHAAAAAA !! » m'exclamais-je, en faisant alors raisonner ma voix dans tout le champ et probablement même jusqu'aux souterrains du nid, tout en bondissant sur place. Oui ma voix portait vachement. Nicole m'aimait, donc. Je n'en avais jamais douté, bien sûr, seulement le savoir était une chose, l'entendre en était une autre. J'attendais qu'elle me le dise depuis pas mal de temps maintenant, vous n'aviez pas idée combien j'étais soulagé à cet instant. Cette fois-ci, l'excitation me poussa à me jeter sur Nicole et à la faire basculer sur cette étendue de lavande sans pouvoir réprimer quoi que ce soit. Désormais à califourchon au-dessus d'elle, je me penchai en avant jusqu'à atteindre ses lèvres que je capturai passionnément... puis plus ardemment. Toute cette activité d'un coup faisait que j'étais maintenant essoufflé. Mais j'avais aussi tellement envie de lui montrer combien je l'aimais, là, tout de suite... Allais-je seulement oser me dévergonder un peu pour l'une des dernières soirées que nous passerions ensemble dans ce village ? Certes, il faisait froid... mais il y avait toujours un moyen de rehausser notre température corporelle.

J’étais vraiment énervée contre Malik, comme à chaque fois qu’on abordait ce sujet. Malheureusement à cause de la fin imminente de cette aventure il revenait super fréquemment sur le tapis. Je vais donner par-ci, je vais lui donner à lui blablablablaaaaaaa… mais garde-le pour toi cet argent ! Pourquoi était-ce si difficile à se l’imprimer dans le crâne ?! D’ailleurs s’énerver dans un champ en pleine nuit était super agréable, ma voix n’avait jamais autant résonné. J’hésitais même à arracher des brins de lavande pour les serrer dans mes mains afin qu’on notifie un peu plus le mouvement de mes bras ; un peu comme une hôtesse d’aéroport. Ou les gens qui font atterrir les avions là. J’ai vu ça à la télé une fois, ils avaient l’air suuuper cons. Enfin bref mon discours n’avait pas l’air de toucher Malik, ça avait même l’air de l’emmerder. Bon, il ne me restait plus qu’une seule solution. Lui avouer mes sentiments cash. Je savais très bien qu’il attendait ça depuis un bail, il en était même venu à réclamer l’autre jour, vous vous rendez compte ? Un vrai gamin. « Pa... pardon ? » Ah non. Non. Ok maintenant que le premier était lâché il serait beaucoup plus facile de partager ces mots à l’avenir mais là il ne fallait pas exagérer non plus. La situation n’était pas propice à un bis qui, en plus, aurait sonné super faux. Malik régissait vraiment étrangement à ma déclaration, si on pouvait appeler ça comme ça. Il aurait pu se contenter de sourire, je ne sais pas moi, mais là il entrait carrément en transe. Oups ? « ELLE M'AIME !! YIIIIIIHAAAAAA !! » Euh… super-méga-trop unsex le coup de « je suis un cowboy ». J’en venais limite à me poser des questions. C’était une victoire pour lui que je me déclare comme ça ? Parce que si oui, en fait il voulait juste ça et après il comptait se casser, nan ? Genre « youpi j’ai réussi, next ». Oh non je suis vraiment conne parfois… ce n’est vraiment pas le style de Malik d’agir comme ça… mais bon avouons que sa réaction était vraiment dingue ! En plus il avait réussi à faire raisonner sa voix plus fort que la mienne… injustice. Je n’eus que le temps de le regarder stupéfaite et de me poser des questions inutiles avant qu’il ne me saute dessus. Tombant au sol dans un cri résultant de ma surprise, peur, et tout ce qu’on ressentait lorsqu’on venait s’écraser dans un champ de lavande, je me retrouvais en position trèèès compromettante. Là, tout de suite, même dans ce froid glacial, j’avais terriblement envie de lui ; même après son cri du far West. Je ne devrais pas, j’étais supposée être en colère et il fallait que je lui parle de quelque chose qui, en plus, risquait de ne pas lui plaire. Après ce furieux baiser je n’avais vraiment pas envie de couper court à ce moment, surtout que là j’étais on fire. My body is ready, in fact. Mais NON. Il fallait que je me reprenne ! « Malik je suis sérieuse ! » J’installais ma main sur son torse afin de le tenir à une distance efficace. S’il se rapprochait j’allais craquer, et il ne fallait pas ! « Tu te gardes un compte en banque fourni sinon c’est no sex. » Même quand il n’était pas question d’argent je vendais mon corps… pathétique. Sortit de son contexte mes paroles semblaient d'ailleurs super intéressées, or ce n'était pas le cas. J'osais espérer qu'il comprendrait. Il avait plutôt intérêt vu que je venais de refuser son aide il y a tout juste hm... deux minutes et six secondes. Mon chantage était vraiment méchant, autant pour lui que pour moi d'ailleurs puisque en ce moment même je crois que nous avions tous les deux envie de la même chose, à savoir un sunday caramel. Hm. « Et je tiendrais parole. » Au cas où il n'aurait pas compris que ça ne s'imposerait pas que sur le moment. Mon regard restait fixé un long moment sur ses lèvres jusqu'à ce que je ne réagisse et me concentre de nouveau sur ses intenses prunelles. Mettre un moment en suspend, c'était tout un art; qu'on le croit ou non.

Pour Nicole, il était tout bonnement inconcevable que je puisse faire profiter de mes gains une autre personne que moi-même. Et pourtant, c'était bel et bien ce que je prévoyais de faire, dans quelques jours. J'étais, quoi qu'il advienne dimanche soir, assuré de repartir avec ma cagnotte et je désirais par conséquent venir en aide à des personnes nécessitant réellement cet argent - ce n'était pas mon cas, enfin, pas exactement. Certes je connaissais la pauvreté et la misère depuis des mois maintenant, je dormais sur un simple matelas, je n'avais pas de chauffage, et un travail mal payé... seulement je n'étais pas à la rue non plus. Si j'étais dans cette situation, c'est que le seigneur l'avait voulu. Nicole parlait des avantages que pourrait m'offrir une telle émission mais pas un instant je n'envisageais de profiter de ceux-ci. Ce n'était pas contre elle, Nicole ne cherchait qu'à me faire prendre conscience que je ne pensais certainement pas assez à moi mais il allait lui être bien difficile de me faire entendre raison. Car j'étais borné, et que je campais généralement longuement sur mes positions. C'est alors qu'elle dégoupilla une grenade, lâcha une véritable bombe, sans doute inconsciemment d'ailleurs. Elle ne devait pas mesurer la portée de ses paroles sur le moment, elle ne savait pas combien son "je t'aime" me ferait plaisir. Ah c'était peu de le dire... il fallait me voir sautiller sur place, gigoter, me tortiller et surtout crier comme un type complètement dingo. C'était juste parfaitement inattendu, j'avais toujours su que mes sentiments étaient réciproques mais si vous voulez, ce soir, j'en avais la preuve formelle. C'était dit, c'était su. De quoi me mettre dans tous mes états. J'étais surexcité, au point de me jeter sur elle, sans retenue aucune. Je me retrouvai au-dessus de Nicole, l'embrassai avec fureur et entrain mais très vite, je sentis une pression sur ma poitrine, me poussant alors à me reculer, à détacher mes lèvres des siennes. « Malik je suis sérieuse ! » Oh non, elle tenait vraiment à me stopper dans mon élan là ? Pour une fois que c'était moi qui prenais des initiatives... Bah, je ne lui en voulais pas, et d'ailleurs elle avait sans doute la désagréable impression que je ne l'avais pas un instant écouté tout à l'heure. Or si, je m'étais montré très attentif mais tout de suite, je n'avais plus tellement envie de revenir là-dessus. Nous retrouver seuls, dans cette étendue de lavande sous un ciel des plus noirs et avec personne aux alentours me donnait quelques idées. « Tu te gardes un compte en banque fourni sinon c’est no sex. » Ah non, ça, c'était vraiment pas cool. Elle ne pouvait pas réveiller mes besoins de mâle et m'empêcher par la suite de les assouvir. Car comme j'étais quelqu'un de fidèle et de terriblement accro à Nicole, je ne pourrais me résoudre à aller voir ailleurs... non, tout ce que je risquais de faire, c'était plonger dans la frustration la plus totale. Et je n'avais pas envie de ça. D'ailleurs, j'étais persuadé qu'elle n'avait pas envie de ça non plus. « Et je tiendrais parole. » répliqua-t-elle tandis que je me redressai légèrement. Oups, j'espérais ne pas l'écraser d'ailleurs, en lui imposant tout mon poids. Je n'étais pas bien épais mais de nous deux, j'étais quand même le plus lourd. « Nicole... je garderai de quoi manger tous les jours, payer le médecin ou le dentiste en cas d'urgence... je n'ai pas besoin de grand chose, je m’accommode de peu et ça a toujours été le cas. Je suis comme de très rares gagnants du loto, ceux qui ne gardent rien pour eux, ou seulement le strict minimum, et qui font don de tout le reste aux autres. Je ne pourrai pas changer de mode de vie demain, ni après-demain, ni dans un mois ou un an. Mais si tu as peur que je meurs de faim, ne t'en fais pas, ça n'est pas prêt d'arriver. » Il y aurait toujours un bocal de cornichons qui trainerait dans mon frigo. Car oui, j'avais quand même un frigo, ne poussons pas la dèche à son summum. Néanmoins on ne risquait pas de me voir dépenser une fortune en fringues de luxe, montres en or et autres babioles inutiles que je laissais volontiers aux footballeurs payés des mines d'or. Je préférais faire un usage sensé de cet argent, et je partais du principe que je ne manquais de rien. « Tu... m'autorises à retirer ta doudoune ? » ... pour commencer. Non, je n'avais pas oublié son avertissement, seulement j'espérais m'être montré suffisamment convaincant y'a de ça trois secondes. Allez, tout mon corps brûlait de désir pour elle là, d'un instant à l'autre je ne répondrais plus de rien. Partant à nouveau à la conquête de ses lèvres, je n'attendais plus que sa permission pour entreprendre de la dévêtir... comme je mourrais d'envie de le faire. Après, peut-être ce froid glacial allait-il la rebuter et mettre fin à cet échange qui, pourtant, était prometteur...

J’ai toujours été quelqu’un d’égoïste, de vénale, et ce n’était pas pour Malik que j’allais changer ça. De toute façon même si je l’avais voulu ç’aurait été impossible – n’oublions pas que je faisais déjà l’effort surhumain de prendre quelques un de ses avis en compte. Il m’était donc inconcevable que Malik ne se projette pas dans une vie meilleure alors qu’il en avait l’occasion surtout que, il devait s’en douter, pour que ça marche entre nous il fallait qu’il quitte son milieu social ploucard. Jamais je n’étais sortie avec des miteux et ce n’était pas maintenant que ça allait commencer. J’aurais accepté pleins de choses pour lui, comme baiser devant des caméras par exemple, mais là naaan y avait des limites à ne pas franchir. Il venait de trouver, probablement inconsciemment, le moyen le plus efficace pour me faire taire en me sautant dessus et en réveillant mes ardeurs les plus profondes. Je sombrais dans son jeu un moment avant de finalement me reprendre. Ce n’était pas le moment quoi ! Un peu de tenue, bordel. En plus je m’engageais même à ne pas subir à ses élans sauvages pour l’éternité en lui précisant qu’il avait intérêt à revoir ses projets sinon pas d’hélicoptère. Euh là je ne sais pas qu’elle mouche avait bien pu me piquer pour sortir une chose pareille. Il était évident que même avec ce chantage il ne changerait pas d’avis… autrement dis j’allais devoir revenir sur mes paroles. Quel boulet de m’être piégée toute seule ! A entendre Malik on avait presque l’impression qu’il comptait mener une vie normale à sa sortie, or se payer à manger et tout ça c’était bien mais se payer une maison et des restau’ c’était mieux. Et qui allait m’offrir de sublimes robes pour mon anniversaire, noël, fête ? PERSONNE ! Teresa allait me faire la gueule à coup sûr, plus de clients, plus de riches hommes… plus de cadeaux ! C’était tellement dur à admettre. J’en pleurerais. Je tournais ma tête sur le côté, refusant de le regarder. Oui je boudais, again and again ! C’était un rituel lorsqu’on ne me procurait pas ce que je voulais et je n’étais pas prête de le quitter ! « C’est sûr que t’auras besoin d’aller au médecin vu ta super résistance au froid. Mes dents grinçaient, d’ailleurs je faisais expressément références à ses conditions de sommeil. - Mais si tu as peur que je meurs de faim, ne t'en fais pas, ça n'est pas prêt d'arriver. Ah… je n’y avais même pas pensé en fait, mais si ça lui faisait plaisir d’y croire… laissons-le, ce serait un peu comme son cadeau de noël à lui. « Tu... m'autorises à retirer ta doudoune ? » Hé !! « C’est pas une doudoune ! » Oui enfin ça y ressemblait mais le terme était beaucoup trop has been ! Je ronchonnais, comme une gamine de sept ans puis finalement me décidais à le regarder de nouveau pour lui signaler que c’était une Burberry qui m’avait coûté… euh non rien en fait. Malik eut raison de se jeter sur mes lèvres pour le coup car sinon j’aurais parlé trop vite. Sérieusement ça me frustrait qu’il ait trouvé comment me manipuler à sa guise pour éviter le moindre conflit, non en fait ce frustrait le plus c’était de succomber aussi facilement. J’avais résisté une fois et il s’était contenté de réattaquer une seconde fois avec la même arme pour que ça fonctionne. J’étais faiiible. Mes doigts vinrent ses glisser jusqu’à la fermeture du manteau de Malik sans que je ne les contrôle. Dézippant sa fermeture tout en lui faisant part d’un baiser… disons fougueux ; je lui donnais corporellement parlant un « oui » des plus explicite je crois. Mes mains glissèrent par-dessus ses épaules, le débarrassant de sa veste. Parce que j'étais pressée de me réchauffer, et parce que j'avais le coup de main rapide grâce à l'entrainement, mes doigts gelés s’affairèrent au niveau de sa ceinture. Autant dire qu'une fois que j'étais lancée on ne m'arrêtait plus, hm.

J'étais irrémédiablement attiré par elle, mais aussi vers elle. Tout chez Nicole me donnait subitement envie de la croquer à pleines dents. Bon, je ne prévoyais pas non plus de la grignoter comme un casse-croûte, mais il m'était par contre impossible de réprimer mes pulsions cette fois-ci. Elles étaient trop intenses, et surtout arrivées trop rapidement. Je n'avais plus qu'une envie : me donner tout à elle, entièrement, et avec amour. Le mien pour Nicole n'avait pas de limites, peut-être ne parvenais-je pas à le lui faire ressentir comme je le souhaitais et suffisamment régulièrement, seulement cela ne faisait aucun doute, j'étais fou d'elle. Le pire qu'il pouvait m'arriver pour l'heure était d'être stoppé dans mon élan, ce que s'employa pourtant à faire Nicole. Elle me faisait comprendre qu'elle était sérieuse, qu'elle ne plaisantait pas et me menaçait également de me priver de sexe si je ne me décidais pas à revoir un peu mes plans pour l'avenir. Ce qu'elle voulait, c'était que je fasse usage de cet argent qui était à ma portée pour mener une autre vie, ce qu'elle devait estimer être une vie meilleure pour moi, pour nous peut-être, aussi. Seulement, j'avais pour habitude de penser aux autres, avant de m'attarder sur ma petite personne, totalement insignifiante par ailleurs celle-ci. Je ne souhaitais pas voir mon quotidien modifié brusquement, je ne voulais pas de changements considérables dans ma vie du jour au lendemain. La venue de Nicole dans celle-ci en était déjà un, croyez-moi. Elle me comblait, je n'avais pas besoin de plus. Mais si ça pouvait la rassurer, je lui garantissais de garder un peu d'argent pour des visites médicales en express - sait-on jamais, jusque là je n'avais jamais montré de signes d'une santé fragile mais des fois qu'un pépin ne m'arrive prochainement... « C’est sûr que t’auras besoin d’aller au médecin vu ta super résistance au froid. » Hm, mon instinct me laissa penser qu'elle se référait au fait que je dormais sans drap ni couverture... j'avais bon ? Sans doute, et puis à quoi d'autre cette remarque pouvait-elle se rapporter, je vous le demande. Je m'étais dit que Nicole m'aurait subtilement signifié que le médecin dont j'avais le plus besoin, c'était d'un psychiatre mais elle ne le fit pas. Je l'avais peut-être convaincue au sujet de mon secret, finalement. Ah bah ça ne me faisait pas de mal de le croire en tout cas. Bon, l'heure était grave là - j'avais de plus en plus envie d'elle et je n'étais plus susceptible de tenir bien longtemps avant de perdre le total contrôle de mon être. Aussi, il faisait un froid de canard, et je ne voulais pas m'éterniser ici toute la nuit non plus. Mais comme mes pulsions s'étaient éveillées dans ce champ, ce soir, je risquais de me faire quelque peu insistant avant de parvenir à assouvir mes besoins de mâle. Je lui demandai alors la permission de retirer sa doudoune, au lieu d'arracher celle-ci ce que j'étais parfaitement capable de faire, sur le moment pourtant. « C’est pas une doudoune ! » Ah, au temps pour moi alors... Mais vous avouerez que ça y ressemblait quand même vachement ! Et puis, roh, moi je ne faisais pas grandement la différence vous savez. Et puis doudoune ou pas, cette grosse couche de tissu était bien superflue d'un coup. Regagnant avec envie les lèvres délicieuses de ma bien-aimée, je sentis bientôt ses petits doigts entreprendre de me défaire de mon gros manteau en laine. J'avais terriblement froid d'un coup, mais si chaud aussi... c'était paradoxal au possible et pourtant cela résumait bien notre situation. Je crois d'ailleurs que je venais d'avoir la réponse à ma question. Aussitôt, je défis à mon tour la fermeture de ce qui était toujours à mes yeux une doudoune. On allait pas chipoter. Hop, l'instant d'après, celle-ci vint rejoindre mon manteau à un mètre de nous. Nicole ne trainait pas, ses doigts étaient d'ors et déjà descendus au niveau de ma ceinture... Ah oui, elle était rapide. Plus rapide que moi, là, je prenais du retard. Ni une ni deux, j’accélérai la cadence et plaçai mes mains sur le haut de son pantalon, dont je défis un bouton, puis l'autre, avant d'en descendre la fermeture. J'hésitai quand même à le lui retirer et à découvrir ses jambes, car avec un temps pareil le contact de jambes nues sur la lavande quasi-givrée serait terrible - voir douloureux. Mais si nous voulions poursuivre tout ceci, il faudrait inévitablement nous dévêtir et ce, totalement. Ou partiellement en fait, seulement ce pantalon ne pouvait pas rester à sa place. Je finis par le faire glisser le long de ses interminables jambes, mon regard se perdant dans le sien comme pour lui faire comprendre que oui, certes, elle allait avoir très froid... mais qu'elle pouvait sans problème me rendre la pareille en retirant le mien, à son tour. En attendant je laissai mes mains s'aventurer sur sa peau dénudée. Le désir que j'éprouvais pour elle se faisait chaque seconde plus puissant. Et me dire que nous étions à l'abri des regards indiscrets me permettrait certainement de gagner en assurance ce soir. En espérant que ce froid n’affaiblisse pas mon endurance, par contre.

Cette aventure m’aura surprise du début à la fin. Si je devais résumer celle-ci de ma belle plume, le point final concernerait cette folie que nous nous apprêtions à exercer. Faire l’amour dans un champ de lavande en plein mois de décembre, même avec une imagination débordante, je n’y aurais jamais pensé. Je nous imaginais même finir congelés, l’un sur l’autre, découverts au lendemain par les caméras indiscrètes. Quelle perception romantiiique. Ouch ou pas. Mes jambes se retrouvaient en contact direct avec les brins de lavande gelés et c’était tout sauf agréable. Viiite je voulais être réchauffée ! A en juger par le regard de Malik ça n’allait pas tarder. L’une de mes mains vint d’abord s’aventure sur ses –fameuses- fesses. Agrippant le boîtier accroché à sa poche arrière, je l’arrachais quitte à faire un trou dans le pantalon (inutile de dire que de toute façon ce ne serait pas une grande perte) afin de l’envoyer le plus loin possible de nous. Une parfaite intimité, voilà ce qui nous manquait ; le micro était le dernier détail à régler. Fort heureusement on n’avait pas le droit aux caméramans penchés juste au-dessus de nous avec leurs micros en peau de bison. Je pouvais m’afférer maintenant sur son bas en toute tranquillité ; enfin pas trop quand même, je ne tenais pas à lui éternuer en pleine figure. Nous nous retrouvions donc à égalité ; dévorant son cou de baisers dans un premier temps, mon regard vint ensuite se réfugier de nouveau dans le sien, partageant l’excitation et l’émotion de ce moment magique que nous nous apprêtions à partager. […]
Allongée dans ce tas de lavande qui à force ne m’irritait plus le nez, je ne pouvais empêcher ce sourire béat de loger sur mon visage. Je n’avais plus froid tellement mon cœur battait encore à un rythme effréné. Je me redressais, fixant Malik tandis que l’une de mes mains tâtait aveuglément le sol derrière moi dans le but de trouver un bout de tissu abandonné. Jackpot ! « Ah je crois que c’est à toi celui-là ! » Je laissais pendouiller le vêtement devant mes yeux et, oui effectivement, c’était à Malik. Je n’étais pas super forte en lancé de fringues visiblement. On aurait dit deux gamins ayant fait une bêtise coquine en secret. Remarque, c’était en quelque sorte le cas, et c’était super excitant même si le côté « vite remets tes fringues » était moins cool. Un rhume pour la finale c’était comme manger un brownie avant d’enfiler une gaine ; the same. Imaginez-le ne pouvant pas porter son gros chèque en carton à cause d'une goutte au nez… dur. Je fouinais élégamment afin de retrouver ma culotte, ce qui ne fut pas bien difficile en fait puisqu’une La Perla blanche ça ne pouvait pas échapper facilement à mon œil aiguisé. En plus ce n'était pas comme si elle ne s'était pas retrouvée accrochée d'une manière des plus intrigantes sur un brin de lavande. Je la renfilais, pensant que quand même Malik aurait pu remettre ce qu’il avait enlevé. A genoux, je me laissais finalement retomber sur mon partenaire, sans aucune violence bien sûuur, et l’embrassais dans un rire des plus inutiles et mutin. Je lui lançais un regard pleins de sous-entendus. « C'était coquin. » De sa part, bien sûr. Il m'avait eue, moi de mon côté -à la base- je n'aspirais pas à ça mais à une graaande nouvelle. En fait j'en venais même à douter de ma décision, c'était un peu égoïste de ma part et ça risquait même de le vexer. Of tant piiis, j'y penserais quand le moment sera approprié.