A cet instant précis, Mado se félicitait de n'avoir pas quitté la salle de sport au moment où elle y avait sérieusement songé. Si elle était partie, qu'elle avait fui cette discussion, elle n'aurait pas eu l'occasion de s'expliquer avec Fitz, et les conséquences n'en auraient été que plus critiques par la suite. Ce qu'elle voulait, c'était comprendre et permettre à son camarade de comprendre également. Parce qu'ils étaient autant dans le flou l'un que l'autre, c'était certain. Sans doute Everleigh l'était elle aussi de son coté, du moins c'était ce que supposait présentement la française. Il faut dire que les choses avaient tourné assez étrangement et qu'il n'était plus du tout simple de s'y retrouver. Quand est-ce que les choses étaient devenues aussi compliquées ? Quand Mado avait commencé à se mêler des affaires d'Everleigh et Fitz ? Sans doute. A noter toutefois que, de son coté, elle avait commencé à déprécier la situation un petit peu avant, lorsqu'elle avait cru comprendre qu'elle était à Fitz ce qu'un boulet était à une cheville, à toujours le coller, à ne rester qu'avec lui, et ainsi à empêcher les autres - ou tout du moins l'une de leurs camarades - de profiter également de la présence du jeune homme. Peut être, oui, que c'est ce qui avait contribué à la rendre curieuse, également. Ça combiné aux images diffusées lors de l'avant-dernier prime. Elle savait être grandement fautive dans toute cette histoire, ne serait-ce qu'au niveau de ses disputes avec Fitz, mais il est vrai qu'elle avait aussi le sentiment - même infime - d'avoir été piégée par tout un enchainement de petites choses. La Production, en tout cas, devait trouver ça plutôt divertissant. Chaque saison - et pour en avoir suivi la plupart, Mado le savait bien - avait son lot d'histoires compliquées, de passions fatales, et nul doute qu'ils donnaient en quelques sortes aux membres de la Production, mais aussi au public, ce qu'ils désiraient. Et donc, oui, cette idée était particulièrement dérangeante à l'esprit de Mado. C'était en cela qu'elle se sentait manipulée, ou qu'elle craignait en tout cas de l'être un jour. Car elle avait tendance à imaginer ce qui pouvait se dire sur internet, se voyant alors très bien passer pour une vieille fille jalouse et hargneuse. Oh oui, elle avait tendance à s'imaginer ce genre de réputations, hm. Alors que bon, à choisir, elle préférait encore être considérée comme une garce froide et désagréable, hein. Quoi qu'il en soit, il était certain que tout cela l'emmerdait principalement parce qu'elle commençait à affectionner Fitz et qu'elle ne voulait tout bonnement plus prendre le risque de le perdre. Elle n'était pas extra-lucide et n'avait ainsi aucun moyen de savoir comment les choses évolueraient, que ce soit entre le jeune homme et elle ou entre Fitz et Everleigh, mais l'idée de perdre cette complicité qui semblait l'unir à Fitz depuis les premiers jours d'aventure - intensifiée par le fait qu'elle ait toujours eu beaucoup de mal à se lier aux autres - lui était particulièrement dérangeante. Insupportable, disons. Elle n'en dirait rien dans l'immédiat, sans doute de crainte de passer pour une grande désespérée des relations humaines, mais il est vrai qu'elle vivrait très mal une nette dégradation de leurs rapports et le fait de ne plus du tout pouvoir compter sur ladite complicité à l'avenir. Et bien sûre que le sentiment gênant de permettre à certaines personnes de s'enrichir n'enlevait rien à la sincérité de l'affection qu'elle commençait à avoir pour Fitz. Elle avait bien conscience que la difficulté avec laquelle elle s'exprimait rendait globalement ses propos incompréhensibles, alors elle se réjouissait qu'il comprenne enfin ce qu'elle avait voulu dire. Elle laissa même apparaitre un fin sourire lorsqu'il lui témoigna de la réciprocité de la chose, ce qui, naturellement, avait tendance à lui faire plaisir, tout de même. S'il lui avait dit qu'elle puait la moule et qu'il avait souhaité rompre ce début d'amitié, ouais, elle l'aurait bien moins bien vécu, hein. Bah oui, logique. Quant à la promesse qu'il avait faite à Bob, oui, elle la trouvait absurde. Parce qu'elle l'était. Mais pour le coup, elle n'en voulait pas tant à Fitz d'avoir promis une telle chose à Bob qu'à son partenaire d'avoir trouvé le moyen de lui faire promettre ça. D'ailleurs, de quoi se mêlait-il, celui-là ? N'était-ce pas assez compliqué comme ça pour qu'une tiers personne foute son nez là-dedans ? Okay, Bob pensait probablement bien faire, et ça lui faisait plaisir dans un sens, mais vraiment, cette promesse était assez improbable. Aux propos de Fitz, elle grimaça légèrement. Hm, la pièce vérité, tout s'expliquait. Et sincèrement, elle appréciait de savoir que Fitz serait là pour elle si elle ne s'en sortait plus. Parce qu'elle avait beau avoir Ezra, il semblerait que ces temps-ci, son frère se pense plus fils unique qu'autre chose, donc bon. Elle, de son coté, prenait également conscience qu'elle était peut être un peu moins forte qu'elle l'avait pensé avant d'entrer dans le jeu. Pour autant, sa fierté étant ce qu'elle était - démesurée, bien souvent - il est certain qu'elle se sentait obligée de sous-entendre que tout irait toujours bien et qu'en soi cette promesse était inutile, bien qu'il soit probable que ce ne soit pas le cas. « Je pars toujours du principe que je pourrai me débrouiller seule, oui. En tous les cas, ça me fait quand même plaisir. Bob a voulu bien faire, je m'en doute. Quant à toi, la promesse que tu lui as fait me rassure, je dois l'avouer. » Puisqu'elle était lancée et qu'elle savait préférable de se confier tant qu'elle en avait le courage. Oui, ça la rassurait. Elle qui partait du principe que tout le monde ne croisait sa route que pour l'abandonner était effectivement rassurée de savoir que Fitz, lui, était prêt à promettre de ne pas la laisser tomber. Bien sûr, elle restait consciente que les choses seraient différentes une fois l'aventure terminée, mais ne serait-ce que dans le cadre du jeu, savoir qu'elle avait quelqu'un sur qui compter la rassurait, vraiment. Fitz avait visiblement l'impression de devoir faire un choix, et même si Mado ne voulait pas l'y contraindre, elle comprenait qu'il ait ce sentiment. Sans doute avait-elle contribué à lui donner ledit sentiment la semaine passée, lors du diner de la Saint-Valentin. Sans doute son attitude avait-elle laisser penser qu'elle était jalouse et, justement, c'est ce qu'il semblait se demander. Car si elle était certaine d'en donner l'impression, le tout était effectivement de savoir si jalouse, elle l'était vraiment. Et ça, c'était même une chose dont elle n'était pas sûre elle-même en soi. Et pour cause. « D'une manière générale, je suis possessive. Ezra te le dira, Carmen l'a bien compris également, parce que j'ai comme qui dirait une peur panique de perdre ceux auxquels je m'attache. J'ai cette envie d'exclusivité, une envie très égoïste de ne pas partager avec les autres. Je n'ai jamais été véritablement jalouse des conquêtes de mon frère, pour la simple et bonne raison, et bien, que je n'ai jamais eu l'intention de me retrouver à leur place. Logique, hm. La jalousie, ça a une dimension plus sentimentale, il me semble. Alors il est clair que si je devais être jalouse de quelqu'un, ce serait plutôt d'Everleigh, et de quelque chose, de la complicité qu'elle partage avec toi ... puisque, là, il serait déjà plus normal que je veuille être à sa place. » Se lancer dans ce genre d'argumentaires, clairement, c'était risqué. Mais elle-même avait longtemps confondu l'idée de possessivité avec l'idée de jalousie, alors ça l'aidait également d'expliquer, et donc de s'expliquer tout ça. « Pourtant, je ne suis pas encore capable de faire pleinement la différence entre ma perpétuelle possessivité et l'éventuelle jalousie que je pourrais ressentir dans cette situation. Peut être que ça ne s'arrête qu'à de la possessivité. Mais peut être pas. Je n'en saisi pas encore toutes les nuances, parce que je n'avais jamais eu à me poser ce genre de questions, n'ayant jamais connu ce genre de cas de figure, alors hm, je ne le sais pas plus que toi pour le moment ... » Et elle espérait qu'il comprendrait qu'elle veuille être certaine de pleinement comprendre ce qu'il en était pour elle avant de risquer à lui donner une réponse. La jalousie, c'était probablement ce que sa mère avait longtemps ressenti à l'égard des maitresses de son père, de leur temps. Elle, elle n'avait jamais été confrontée à ce sentiment. Et si elle l'était vis à vis d'Everleigh, elle n'en avait pas encore pleinement conscience. Mais ça viendrait, sans doute. En tous les cas, il est vrai que Mado avait un peu du mal à comprendre une chose, elle aussi : en quoi ses disputes avec Fitz avaient-elles eu un impact autre que négatif sur la tournure des choses ? Il semblait dire que ça avait changé les choses, autant que ses baisers avec Everleigh les avaient changé, alors hm, elle était un peu perdue oui. « Je ne comprends pas tellement quand tu dis que nos disputes ont changé quelque chose » se risqua-t-elle alors à demander. Après tout, il fallait qu'elle assimile tout elle aussi, et elle n'attendait de lui qu'une brève réponse simplement censée l'éclairer. Elle comprenait en tout cas une chose : Fitz n'avait pas été confronté qu'à des choses évidentes sentimentalement parlant, alors oui, elle était apte à comprendre qu'il veuille maintenant laisser le temps faire les choses. C'était sans doute plus sécurisant, et moins risqué. « Laisser le temps faire les choses, oui, je pense que ça n'est pas plus mal. » Et elle le pensait. « C'est sans doute le meilleur moyen de ne pas avoir de regrets par la suite. » Des regrets dont, personnellement, elle se passerait bien. Elle avait suffisamment de quoi faire à d'autres niveaux, c'est certain.

Improbable promesse que celle que Fitz avait faite à Bob, oui, c'est certain. Disons que Mado n'avait jamais tellement voulu s'avouer qu'il pouvait lui arriver d'avoir besoin de quelqu'un pour veiller sur elle, ou au moins veiller à ce qu'elle ne parte pas en live, comme cela arrivait malheureusement de temps à autre. Ezra ? C'était différent. Elle ne voulait pas lui apparaitre autrement que comme la grande sœur indépendante et forte qu'elle avait toujours essayé d'être. Bien sûr, il connaissait ses faiblesses, avait été là pour elle durant la pire période de son existence, mais elle ne voulait clairement pas lui faire jouer le rôle du protecteur, partant logiquement du principe que l'ainée qu'elle était devait veiller sur son cadet, et non l'inverse. Alors oui, elle avait dans un premier temps trouvé un peu gonflé que Bob et Fitz aient semblé convaincus qu'il serait bien que l'anglais veille sur elle, sans qu'on lui ait au préalable demandé son avis, comme si on la prenait pour une pauvre petite chose ayant terriblement besoin de soutien. Puis elle avait réfléchi. D'une part, c'était plutôt gentil de la part de Bob de vouloir à ce que quelqu'un soit là pour elle. D'une autre part, apprendre que Fitz ne comptait pas l'abandonner de si tôt, c'était aussi une nette satisfaction. Et puis bon, elle avait aussi été amenée à admettre qu'il n'était peut être pas plus mal de pouvoir effectivement compter sur quelqu'un le jour où elle baisserait sa garde et où elle pourrait ressentir le besoin de s'ouvrir davantage. Cette promesse, au final, n'était peut être pas une si mauvaise chose. A la réponse de Fitz, elle se contenta d'afficher un mince sourire. Au fond, Bob avait un bon fond, elle s'en était déjà rendue compte. C'était juste un mec paumé et maladroit. Elle-même avait plus ou moins décidé de le prendre sous son aile, alors la promesse qu'il avait faite faire à Fitz la touchait sincèrement. Pour autant, elle ne pensait pas lui dire que l'anglais lui en avait parlé. Il était sans doute préférable qu'il l'ignore. Quant à la prétendue jalousie de Mado, disons qu'elle restait assez peu concrète. A cet instant précis, elle était bien incapable de faire une véritable différence entre sa possessivité générale et ce sentiment plus nouveau, plus inédit, plus effrayant aussi dans un sens. Bien sûr qu'elle pourrait être jalouse d'Everleigh, de sa complicité avec Fitz. Sans doute savaient-ils tous les deux pourquoi, ce qu'elle ne prit d'ailleurs pas la peine de préciser de son coté. Mais peut être n'était-ce pas encore le cas, ou ne le serait-ce jamais. Disons que dans le doute, elle préférait se réserver et prendre du recul avec tout ça. Comme disait Fitz, il était trop tôt et c'était trop flou. Oui, voilà, exactement. Quant à sa théorie sur l'enfermement, elle semblait plausible également. Après tout, on disait bien que ce genre de jeux intensifiaient les liens. On lisait ça partout, en tout cas. « On verra bien. Et euh ... oui, je pense aussi que c'est lié. Ce n'est peut être pas très sain non plus tout ça d'ailleurs, hm. » Mado avait visiblement décidé de décrier ce jeu, la Production, l'environnement de l'émission ... Ouais, disons qu'elle se méfiait dudit enfermement, en fait. Cela pouvait en rendre plus d'un fou, probablement. Et peut être était-il dangereux que les choses prennent une plus grande ampleur dans ce genre d'endroits. Il ne faudrait pas qu'un cœur lui pousse en pleine nuit, tout de même. Non, les gens ne s'en remettraient pas. Hm. En tous les cas, Mado comprit davantage les propos de Fitz, ceux traitant de leurs disputes et de l'impact que cela avait pu avoir sur les choses, en dehors du fait, bien sûr, que ça ait initialement créé un léger froid entre eux. « Je pensais que tu laisserais tomber, moi, justement » confia-t-elle alors, pensant qu'il devait savoir qu'en s'adressant à lui tout à l'heure, elle avait sérieusement cru qu'elle se heurterait à un mur, ou tout du moins à un Fitz ayant déjà enterrée leur "amitié". Il faut dire qu'en ayant de son coté du mal à accorder des secondes chances, elle partait du principe que les autres étaient tout aussi peu disposés à le faire. Elle avait été agréablement surprise par Fitz et par sa capacité à prendre du recul et ne pas condamner leur début de complicité, en fait. « Je te suis reconnaissante de ne pas avoir décrété que tu t'en foutais » reprit-elle, tout aussi sincèrement. En soi, depuis le premier jour, elle voyait leur relation comme un fil tendu et extrêmement fragile, qu'une moindre brise pourrait rompre, qu'une moindre connerie pourrait faire céder. Maintenant, elle était tentée de marcher sur des œufs, bien consciente qu'il lui faudrait prouver qu'elle méritait cet intérêt. Mais voilà que Fitz lui posa une question affreusement ... comment dire ... non, affreuse tout court, en fait. LA question qu'il ne fallait surtout pas poser à cet instant précis. C'était immonde de la confronter à ce genre d'interrogations, en avait-il conscience ? Peut être pas. « Cette question ... elle est bizarre. Elle est difficile, surtout. » Parce que si elle disait oui, c'était un peu la honte quand même. Et si elle disait non, elle passerait probablement pour une menteuse. Donc là, ça n'était pas simple. « Je ne veux pas que ça t'influence en quoi que ce soit ou que ça t'empêche de faire ce que tu aurais envie de faire avec elle, mais ... oui, enfin ... disons que ... que ce ne serait pas la joie de mon coté. » Pas la joie de son coté ... Oui bon, dans le langage parfois farfelu de Mado, ça pouvait - éventuellement - s'apparenter à un « J'irai me pendre au lustre du salon, mais franchement, je le vivrai bien. » Bon okay, quand même pas à ce point. Disons simplement que, oui, tout de même, ça lui ferait un peu de peine. Beaucoup ? Bon, stop, voulez-vous. « Tu dis ça par rapport à la promesse que tu as faite à Bob ? Parce que si c'est le cas, et bien ... qu'importe, je suppose. » Oui voilà, qu'importe la promesse, s'il voulait aller plus loin avec Everleigh, ce ne serait pas si terrible que ça à ce niveau-là, probablement. C'était à lui de voir de toute manière.

Cette question était incroyablement embarrassante. Ce ne devrait même pas être permis de poser ce genre de questions, en fait. Pas comme ça, pas maintenant et pas alors qu'elle avait déjà eu du mal à s'excuser, à se faire pardonner son attitude déplorable de la semaine passée. Qu'on se le dise, Mado n'était absolument pas de ces personnes qui pouvaient s'ouvrir facilement, et répondre à des interrogations faisant écho aux ressentis, aux émotions. Là, Fitz cherchait à savoir si, dans l'éventualité où quelque chose de plus poussé se passerait avec Everleigh, Mado viendrait à en souffrir ... Elle n'appréciait pas tellement que cette question lui donne hypothétiquement un coté plus humain qu'elle le voudrait, qu'elle soit forcée de se projeter vers un futur qui ne lui plairait pas des masses, et pour cause, elle eut naturellement envie de lui répondre par la positive. En soi, bien sûr qu'elle aurait du mal à supporter le fait que quelque chose de plus développé se passe entre Fitz et Everleigh. Elle n'était pour autant pas tout à fait capable de savoir pourquoi, ni à quel point exactement, mais il était certain qu'elle ne le vivrait pas extrêmement bien. Pour autant, elle ne se voyait pas lui répondre trop clairement, parce que ça lui donnerait un coté un peu désespéré qu'elle ne tenait pas tellement à avoir. Alors il lui fallut réfléchir, un court instant, à la réponse qu'elle pourrait lui donner. Ce qu'elle ne voulait pas, c'était aussi lui mentir. Car prétendre qu'un rapprochement plus poussé entre les deux jeunes gens ne la dérangeait pas serait incroyablement malhonnête, et elle lui devait à présent beaucoup plus de franchise. La mauvaise foi, elle avait déjà donné, et elle estimait que si Fitz avait consenti à ne pas tirer un trait sur leur "amitié", elle lui devait une plus grande transparence. Elle dut alors trouvé un moyen de lui faire comprendre que oui ça la dérangerait, sans pour autant tomber dans le pathétique. Alors elle opta pour une formule à la fois subtile et quelques peu équivoque, espérant que cela conviendrait et qu'il comprendrait que sans vouloir aller trop loin dans sa réponse, elle restait honnête avec lui. Bien sûr, elle avait tendance à penser qu'il ne posait pas cette question de façon anodine, que peut être cela annonçait justement quelque chose de peu plaisant, oui, ça elle l'avait bien compris. Elle ne voulait naturellement pas lui rajouter la moindre pression, se doutant que rien de toute cette situation n'était facile pour lui. Mais il avait posé une question et avait obtenu une réponse sincère. Une chose la mettait tout de même relativement mal à l'aise : la promesse qu'il avait faite à Bob. Elle ne voulait pas qu'il se sente forcé d'aller contre ses désirs à cause de ça, clairement. A elle, il ne lui avait de toute manière rien promis. Alors oui, elle pourrait l'avoir mauvaise, mais ce ne serait pas un argument qu'elle pourrait un jour utiliser contre lui, c'était certain. Fitz reprit alors la parole et la française l'écouta avec attention. Bien sûr qu'elle comprenait que des choses ne se contrôlaient pas et qu'il était de toute manière trop tôt pour parler de tout ça. Ils étaient d'accord pour laisser les choses se faire, alors oui, évidemment qu'il faudrait à Mado oublier cette improbable compétition, car ça n'était pas à cette échelle là qu'elle devait se battre, c'était certain. De base, elle n'était absolument pas venue pour être dépeinte comme une fille capable d'être charmée par le premier beau garçon venu. Mais comme il venait très justement de le dire, certaines choses ne se contrôlaient pas, hm. « Je ne suis pas de celles qui se donnent un genre, tu sais » confessa-t-elle, dans un sourire, comme pour aller dans le sens de ses propos. Elle n'avait jamais cherché à paraitre plus gentille, plus serviable ou plus charmeuse. Elle assumait, en quelques sortes, d'être un peu trop coincée pour "rivaliser" avec celles qui, disons, avaient davantage l'habitude d'user de leurs charmes. Et si cela lui valait de n'intéresser personne, ni ici ni ailleurs, alors elle le vivrait plutôt bien, supposons. Pour autant, elle ne ferait le plaisir à personne de se mettre de coté, car encore une fois, elle ne comptait jouer aucun rôle, et certainement pas celui de la cruche fantomatique. « En tout cas, oui, je comprends tout ça et je ne te demande pas de me promettre quoi que ce soit ... » Ce serait idiot, et contraire à l'idée de laisser les choses se faire, évidemment. « ... Si ce n'est peut être simplement de ne pas te mettre trop la pression avec tout ça, je pense que c'est ce qu'ils veulent, justement. » Ce "ils" faisaient encore et toujours référence aux orchestrateurs de toute cette histoire, en quelques sortes, ceux que tout cela devait divertir, contenter. Nul doute que c'était plus drôle pour eux que pour les concernés. « Y'a quand même qu'une fille comme moi pour trouver le moyen de gâcher son premier diner de Saint-Valentin. Y'a pas écrit "boulet" sur mon front, mais clairement, y'aurait eu moyen. » Bah oui, ici, elle préférait quand même en rire, disons. Parce que ça faisait un peu loseuse, tout de même. « Du coup bah, comme je pensais emmener Rosie au cinéma un de ces quatre, tu me diras si tu veux te joindre à nous. » Et elle souriait, bêtement, sans même se rendre compte qu'elle devait un tantinet parler chinois, là. Et pour cause. « Hm, Rosie, c'est l'ours en peluche, hein. Oui, je sais, y'a eu beaucoup de recherche au niveau du prénom. J'en ai pas dormi pendant deux nuits, d'ailleurs. » Un ours rose qu'elle avait nommé Rosie, oui, c'était un peu trop original sans doute, hm. A noter qu'elle passait maintenant pour une nana plus apte à copiner avec des peluches qu'avec des humains. Glorifiant, sans nul doute.

Rester elle-même, oui, ce devrait être chose relativement aisé, étant donné que Mado ne considérait pas être de celles qui jouaient un rôle dans ce genre de programmes, qui apparaissaient sous des jours différents et successifs, simplement pour se faire bien voir, se faire apprécier et se faire soutenir. Elle, non, ça n'était définitivement pas son genre. Elle ne s'était d'ailleurs pas privée de le dire, par plusieurs fois, histoire que personne ne s'imagine qu'elle puisse avoir l'intention de devenir subitement adorable, simplement pour perdurer plus longtemps ici. Son caractère faisait ce qu'elle était. Il était loin d'être plaisant la plupart du temps et faisait même que, généralement, on ne l'appréciait pas des masses. Mais elle assumait de n'être pas quelqu'un de foncièrement sympathique, puisqu'au moins elle pouvait se féliciter de ne pas prétendre l'être, justement. Parce que oui, elle aurait pu dès le départ sourire comme une hypocrite à tout le monde, lier de fausses amitiés avec tous les candidats et se montrer serviable et adorable avec chacun d'eux. Faire l'actrice, interpréter un rôle, elle était presque sûre que c'était donné à tout le monde, et pas seulement à ceux du Cours Florent. Mais elle, ça ne l'avait jamais tentée. Parce qu'elle tenait justement à rester qui elle était, avec ses défauts et sa personnalité ambivalente. Sans doute ne se respecterait-elle plus si elle se mettait à jouer à celle qu'elle n'était pas. Oui, sans doute. Alors les propos de Fitz, non seulement elle les comprenait, mais elle les approuvait. Bien sûr qu'elle comptait rester elle-même, malgré la tournure franchement compliquée que les choses avaient pris récemment. Si cela lui faisait finalement défaut, tant pis, elle garderait suffisamment de dignité pour s'en consoler, disons. « J'agirai en fonction de moi » répliqua-t-elle alors, en un sourire. Parce qu'effectivement, ça n'étaient pas les autres qui décideraient de la conduite qu'elle adopterait à l'avenir, tout comme ils ne l'avaient jamais fait par le passé. Les actes de Mado dépendraient de Mado, et puis c'est tout. Oui, c'était très bien ça. Naturellement, Fitz ne pouvait lui faire aucune promesse, et elle ne le lui demandait d'ailleurs pas. Elle savait que ça n'aurait aucun sens, qu'en soi ce ne serait probablement même pas naturel, alors non, aucune promesse n'était à faire. Surtout qu'elle avait déjà pu noter que la plupart des promesses étaient faites pour être brisées, et que rien ne servait d'en passer par là. Quoi qu'il en soit, Mado avait tout de même tendance à penser, légitimement sans doute, qu'elle n'avait pas manqué de gâcher le diner de Saint-Valentin. Vous savez, le truc généralement bien pompeux mais qu'elle avait expérimenté pour la première fois - de sa vie, oui oui - au sein de cette aventure, et qu'elle avait un tantinet gâché sur la fin, donc, oui. Lui, il semblait dire que c'aurait pu être pire. Oui, sans doute aurait-elle pu renverser une bougie et foutre le feu au costume de son camarade. Elle ne répondit alors pas et préféra garder cette hypothèse pour elle, des fois qu'elle passe pour une tarée. Tarée, elle l'était pourtant, ou suffisamment en tout cas pour emmener un nounours rose fraichement prénommé Rosie au cinéma. S'en débarrasser, disait-il ? Elle avait dit ça, elle ? « Oui mais, souviens-toi, j'aime ce qui est mignon, et elle m'a attendri » notifia-t-elle, plutôt sérieusement d'ailleurs. Hm, Titanic ? « Rosie est très fleur-bleue, tu sais. Mais je ne me laisse pas faire et j'impose mes goûts. 'Faut se faire respecter, nom de dieu. » Bah ouais, les ours en peluche n'allaient pas commencer à faire la loi, tout de même. Et puis quoi encore ?