Un matin comme tous les autres. Ce matin n'avait rien à envier aux autres matins précédents. Ce réveil n'avait rien d'exceptionnel. Comme toujours, il se réveillait seul dans son lit. Jaileen devant certainement se lever bien plus tôt, ou devait-elle le fuir. Il n'avait jamais vraiment sûrement devait-il interpréter ceci. La première personne qu'il verrait à son réveil ne serait pas Jaileen, mais... Il était bien trop tôt pour se poser ces questions, et se prendre la tête avec sa propre conscience. Bien trop tôt pour tenter de résoudre un problème. Trop tôt pour tenter de trouver une solution à une réflexion. Trop tôt pour penser. Beaucoup trop tôt... Il agita sa tête, secouant toutes ces pensées de sa tête. D'un geste de la main, il retira le drap qui le cachait et se mit, aussitôt, debout sur ses deux jambes. Il resta un instant, debout, sans bouger. Clignant des yeux, comme pour tenter de dire à cette douce et chère Morphée de le laisser tranquille, que cette nuit était terminée. L'esprit encore un peu embrumé par le sommeil, il se dirigea tant bien que mal jusqu'à la salle d'eau. Loge maquillage, comme ils l'avaient nommée -ils, c'était la production. Son regard se posa sur une jeune femme qui se trouvait déjà dans la pièce. Il n'eut pas de mal pour reconnaître la jolie silhouette de Lena. Elle serait donc la première personne qu'il verrait après son réveil. Ce détail sur l'identité de la première personne qu'il verrait n'avait en soi peu d'importance. Ou peut-être. Il n'avait jamais bien trop su. Il était certain que croiser une personne qu'il n'appréciait pas dés le matin ne l'aurait pas mis en joie, mais bien de mauvaise humeur. De très mauvaise humeur. Tiens, comme par exemple Sully. Il devait certainement avoir l'incident de fin de prime au travers de la gorge, pour citer l'homme en premier. Il lui adressa un sourire en guise de salut, alors qu'il entra dans la pièce. Il pouvait remarquer qu'elle était sur le point de se laver les dents. Elle avait donc une bonne hygiène dentaire, ce n'était certainement pas le cas de tous les candidats ici. Il était presque sûr que des Miss et des Misters Cracra devaient loger au sein de ce nid. Il put remarquer qu'elle abandonner son brossage de dent pour venir vers lui. Il resta debout, sans ciller, ne sachant que faire, ni que dire. Elle prononça finalement quelques mots. Sully. Méfier. De toi. La semaine dernière. Ce fut les mots principaux qu'il eut retenu des paroles énoncées par la jeune femme. Il ne cilla pas, plantant son regard dans les pupilles brunes de Lena. Il ne bougea pas, ne fit aucun mouvement, et resta juste figé par ces quelques mots. Quelques mots, ce fut d'ailleurs ce que la danoise ajouta. Quelques mots. Ça ne plaisait pas à Sully de la savoir avec lui. Avec Valeri. Ca ne lui plaisait pas du tout. Un léger silence s'installa dans la pièce, alors que le biélorusse baissa légèrement la tête. « Ca explique donc ce qui s'est passé à la fin du prime... » souffla-t-il à haute voix. A vrai dire, il faisait cette réflexion plus pour lui-même, qu'autre chose. Cela expliquait certainement les raisons que la venue de Sully et le fait qu'il ait emporté Lena, en faisant genre de demander la permission à Valeri. Ce dernier releva doucement la tête, reportant son attention sur le visage de la danoise. « Et toi... tu te méfies de moi ? » réussit-il alors à énoncer.

En entrant dans cette salle de bain, il ne s'attendait pas à croiser un candidat. Peut-être parce qu'il pensait que tout le monde était entrain de vaquer à des occupations diverses et variées. Certains devaient déjà être entrain de flâner sur la plage, ou à l'ombre au cœur du jardin botanique. Ils devaient tous vouloir profiter des premiers rayons du soleil de la matinée. Valeri profiterait donc de l'absence des candidats pour aller prendre sa douche. Prendre sa douche et éveiller son esprit encore un peu endormi. Sur sa route, il y croisa Lena. Elle aussi se trouvait dans la salle d'eau. Ils se saluèrent brièvement d'un sourire, alors qu'un léger silence s'était installé entre eux. Pas un mot, juste des gestes. Elle s'approcha de lui, sans un mot. Avant de prononcer quelques mots. Elle parla de Sully. La semaine prochaine, il lui aurait dit de se méfier. De se méfier de Valeri. Le biélorusse ne pouvait indéniablement pas s'empêcher de faire le rapprochement avec le petit incident qui avait eu lieu à la fin du prime. En effet, l'américain avait fait interruption alors que les deux jeunes gens étaient en pleine conversation. Au final, Valeri s'était retrouvé seul. Seul avec son jus de fruit et ses petits gâteaux au chocolat. Il ne pouvait rien faire, de toute façon. Il était donc resté penaud face à cette situation. Peut-être que Valeri se trompait à ce sujet, mais il ne pouvait pas s'empêcher de faire le rapprochement avec ça. Il se méfier d'elle, alors il avait fait en sorte de l'éloigner d'elle. Cette déduction était peut-être fausse, il ne savait pas. Lena trouvait ça bizarre. Que c'était bizarre. Vraiment bizarre. Elle évoqua une tension dans l'air. Elle lui demanda si lui aussi l'avait senti. Si lui aussi avait senti cette tension. Tension dans l'air. Il resta un long moment, sans bouger, les bras de le long de son corps et cilla longuement. L'avait-il ressenti, lui aussi ? «  Sûrement, oui... » lâcha-t-il fébrilement dans un souffle quasi-inaudible. Une tension. Une tension dans l'air. Peut-être. Tout cela avait tendance à troubler le jeune biélorusse, et à le désarçonner de son excès de confiance. Il ressentit alors le besoin de savoir si la jeune femme se méfiait de lui. Si elle avait décidé d'écouter les dires de Sully. Se méfiait-elle de lui ? De lui, de Valeri. Certainement. Sûrement. Peut-être. Peut-être pas. Sans réponse. Il y avait tout un panel de réponses possibles à cette question. Elle aurait aucune raison de le faire. Aucune raison de se méfier de lui. Lui, Valeri. Celui qui voulait se forger l'image du petit merdeux. Elle lui demanda alors la confirmation de ces quelques mots énoncés. N'est-ce pas. «  ...Oui. ». souffla-t-il. Il se gratta la nuque, avant qu'un petit soupir s'échappa de sa bouche. Sa main vint chasser des frissons éphémères sur son torse. Alors qu'un léger silence s'installa dans la pièce. Valeri se pinça les lèvres, restant sans voix. «  Je crois qu'il s'est basé sur les impressions que je lui ai donné... Je, je ne sais pas ce qu'il a pu te dire à mon sujet, mais... ». Il laissa sa voix en suspend, se taisant complètement. «  Rien, rien... » reprit-il, d'un geste de la main en l'air comme pour chasser les mots qu'il venait de prononcer.

Les images de la veille venaient se mêler aux douces paroles présences, dictées par Lena. Il y avait comme un certain trouble dans son esprit, et il ne pouvait pas cesser de faire le rapprochement avec la réaction de Sully à la fin de ce prime. Peut-être faisait-il fausse route en pensant cela. A croire que la vie entière du biélorusse était de prendre des mauvaises routes, des mauvais chemins, de marcher loin des sentiers battus. Valeri n'était pas comme tous ces garçons qui avaient une route toute tracée devant lui, son chemin s'appelait « échec » et il nourrissait ce nom perpétuellement. Il était devenu cet échec, cet échec social, cet échec relationnel. Cet échec que l'on voulait rayer d'un trait épais rouge sur une copie. Il y avait des tensions dans l'air, d'après Lena. Sûrement, oui. Sûrement, il y en avait. Il ne savait pas, il ne savait pas vraiment. Il n'avait jamais vraiment su comment décrire sa relation avec l'américain. Peut-être était-ce cela. Une relation tendue, une relation conflictuelle. Il ne savait pas. Il ne savait pas vraiment comment il pouvait appeler leur relation. Elle n'avait pas de nom leur relation. Celle de Sully et de Valeri. Elle n'avait pas de nom parce qu'elle n'en valait pas la peine, certainement. Il avait ainsi dit à Lena de se méfier du biélorusse. Ce dernier ne put s'empêcher de lui demander si elle, elle se méfiait de lui. Evidemment, ce n'était pas ce qu'il voulait. Il ne voulait pas qu'elle se méfie de lui. Pourquoi ? Parce qu'il devait il y avoir une raison ? Il ne savait pas comment cette raison pouvait être appelée. Lena n'avait pas de raison à se méfier de lui. Non, aucune. Et ça, elle pouvait le croire. Le jeune garçon reprit alors vaguement la parole. Evoquant Sully. Il s'était basé sur les impressions que Valeri lui avait donné. Cette même impression qu'il donnait à tous, cette même impression qu'il voulait donner à tous. Il s'arrêta brusquement dans ses mots, dans ses explications... avant de finalement laisser souffler deux petits « rien ». Rien. Rien. Il ne voulait peut-être finalement rien dire. Ne rien dire de peur de se dévoiler. De se dévoiler bien trop. Lena semblait agacée par tout ça. Il ne savait pas si ce n'était juste que cette histoire relationnelle entre Sully et lui qui pouvait bien l'agacer autant, ou bien tout simplement ses mots, les mots qu'il venait d'employer et qui venait de s'échapper de sa bouche. Il ne savait pas. Il ne voulait pas l'agacer pourtant, lui. Non. Il ne voulait pas ça. Elle ajouta alors qu'il n'avait pas dit cela pour rien. On ne disait jamais quelque-chose pour 'rien', parce que rien était un concept inexistant. Rien n'existait pas. Rien pouvait être représenté par un espace vide, un cercle au contour noir et du blanc à l'intérieur. Rien, ce n'était que cela. Que cette description que je viens de vous faire. Valeri secoua doucement la tête, de gauche à droite. Avant finalement de se reculer, il vint s'asseoir sur le rebord de l'évier. Son regard se posa une nouvelle fois sur le visage de Lena. Elle était jolie, Lena. Oh ça oui. « Non. Évidemment, non. Il n'a pas dit ça pour rien. ». Il marqua une brève pause, avant de prendre une grande inspiration. Il savait que Lena ne voulait pas se contenter de cette simple affirmation. « Pour Sully, comme pour la majorité des personnes, ici ou même ailleurs, je ne suis que ce petit merdeux, ce garçon suintant la prétention jusqu'à la moelle. Ils pensent m'avoir cerné... ils pensent savoir qui je suis... qui je suis vraiment... Cette image, je l'ai voulu, je l'ai dessiné comme on peut dessiner un portrait sur une banale feuille de papier... mais avec toi c'est... différent... peut-être parce que tu m'as jugé bon dés le début... on ne m'a jamais jugé de 'gentil'... c'est la première fois que l'on dit cela de moi... oh si, peut-être quand j'étais enfant... non, même pas. Mes parents disaient que j'étais un enfant 'perturbateur' et qu'ils ne savaient pas ce qu'ils feront de moi plus tard... Enfin, je m'égare un peu... ». Il laissa une nouvelle fois sa voix en suspend, s'arrêtant de parler. Il déglutit avec peine, et déposa ses mains sur ses cuisses. Quelques secondes s'écoulent. Justes quelques secondes, pas plus. « Je n'aurais peut-être pas dû te dire tout cela... » conclut-il, en descendant de son perchoir. Il se posa devant le lavabo et finit tourner le robinet.

Valeri ignorait les mots exacts que Sully avait bien pu utiliser pour lui peindre son portrait. Peut-être lui avait-il qu'il était prétentieux, bien trop prétentieux, qu'il n'était qu'un immonde prétentieux cynique. Beau-parleur, peut-être. Il ne savait pas vraiment, mais il se doutait bien que le portrait qu'il avait bien pu lui dépeindre n'était pas flatteur, pas du tout. Alors il lui avait de se méfier de lui, de ce personnage qu'il lui avait dépeint. Évidemment, Sully ne lui avait pas dit cela pour rien. Il y avait des raisons. Après quelques secondes, il reprit la parole. Il se doutait bien que Lena n'allait pas se contenter de ces brefs affirmations. Sûrement voulait-elle en savoir plus, ou tout du moins un peu plus. Sa curiosité était peut-être légitime, dans ce cas précis. Dans la situation dans laquelle elle se trouvait. Entre un garçon avec qui elle ressentait de la sympathie et cet homme qui était le frère de son fiancé (et qui n'était pas ici par hasard). Il tenta alors de s'expliquer et de s'exprimer du mieux qu'il le pouvait. Ce n'était pas facile de parler... Non. Ca ne l'était pas. Ce n'était pas simple de s'exprimer, de devoir expliquer des faits... Non, ça ne l'était pas. Mais rien n'était simple. Parce que tout ce qui était simple s'avérait être difficile. Oui, c'est vrai. Tout le monde le voit comme ça. Comme ce petit merdeux prétentieux. Tout le monde, sauf Lena. Cette image, bien évidemment, il l'avait voulu, il l'avait désiré. Tant désiré. On ne naît prétentieux, on le devient. On se dessine des traits, des pourtours du parfait portrait que l'on désire être. On se dessine des traits intouchables. Avec elle, Lena, tout était différent, si différent, trop différent. Elle ne pensait pas comme les autres, elle n'agissait pas comme les autres. Non. Lena n'était pas comme les autres, elle était unique. Ses pensées et l'image qu'elle avait su se faire du jeune homme était unique. Tout était unique chez-elle. Oui, tout. Il lâcha s'échappa un petit soupir à la suite de ces explications qui étaient peut-être confuses, il ne savait pas... dans sa tête, tout était confus. Tout. La moindre pensée, la moindre image, le moindre mot, tout semblait être confus. Il n'aurait sûrement pas dû parler de tout cela. De tout ça. De ces choses qu'il voulait renier et qu'il reniait jusqu'à présent. Son passé, son présent... un jour, il reniera aussi son futur. Il reniera tout ce qu'il était, tout ce qu'il est et tout ce qu'il sera. Oui, il reniera son propre être. Il se plaça face à l'évier. Regardant un court instant son reflet. Il tourna le robinet entre ses doigts, et fit couler un petit filet d'eau. A cette mélodie aquatique venait alors surgir la douce voix de la jeune femme. Il put l'entendre faire un pas, un pas vers lui... ou peut-être en arrière. Il ne savait pas, il n'avait pas envie de redresser la tête pour pouvoir le constater de ses propres yeux. Elle voulait des explications, d'autres explications... encore. Oui, encore. Pourquoi elle le voyait comme gentil, et les autres non ? Pourquoi être désireux d'une telle image ? Pourquoi la vouloir ? Trop de pourquoi, trop d'interrogations. Valeri redressa doucement la tête, ouvrant légèrement la bouche. Mais rien. Rien. Aucun son ne pouvait sortir. Ses mots étaient bloqués au fond de sa gorge, comme s'ils étaient interdits de s'exprimer. Ces mots-là n'avaient pas le droit d'être exprimer. Il le faisait pour... « ... ». Il rebaissa une nouvelle fois la tête, venant caresser sa nuque. La voix de Lena surgit une nouvelle fois dans la pièce. Est-ce que... ? Il ne bougea pas d'un cil, observant le reflet de la jeune femme dans le miroir. Elle voulait alors savoir. Savoir s'il faisait des efforts avec elle, et avec les autres non. Il finit finalement par se retourner, posant son regard sur le visage de la danoise. « Non. » souffla-t-il brusquement, contre tout attente. Ce n'était sûrement pas cette réponse qu'elle attendait. Peut-être aurait-elle voulu qu'il lui dise qu'avec elle, il faisait des efforts et qu'avec les autres, non. « Je veux dire par là.. avec toi... tout semble si simple... si naturel... sans artifice... je ne ressens pas ce besoin de faire des 'efforts'... » souffla-t-il. Il se retourna une nouvelle fois, passant un peu d'eau sur son visage. Comme pour se rafraîchir, ou comme si ce simple geste lui perdrait à apaiser son esprit. Il ferma le robinet, puis attrapa sa serviette et s'épongea avec.

Parfois, on voulait s'exprimer, mais les mots eux ne voulaient pas. Ils voulaient boycotter nos émotions, nos sensations, son pensées, nos états d'âme. Oui. Des fois, les mots se rebellaient. Les mots n'étaient pas contents, et ils le faisaient comprendre à leur manière. Valeri se retrouver sans voix face à la jeune femme. Pourquoi se conduisait-il ainsi avec les autres. Pourquoi jouissait-il de cette image qui ternissait son portrait ? Pourquoi... Pourquoi.... Pourquoi toujours vouloir chercher à comprendre ? Pourquoi. Il n'y avait plus que ce mot gravé dans l'esprit du biélorusse. Les questions venaient se mêler à ses pensées bien trop flous. Il ne pouvait pas parler, il n'en avait pas la force, ou pas le courage. Il pouvait très bien trouver une excuse à cela. Mentir. Il n'en avait pas la force. Pas le courage. Il préféra alors se taire, en mettant ainsi sous silence les interrogations de la jeune femme. Ce n'était sûrement pas cela qu'elle s'attendait comme réponse. Elle ne voulait pas d'un silence en guise de réponse. Pourtant parfois le silence était bien plus fort que tout. Il laissait planer les sentiments et les ressentis. Il nous faisait comprendre certaines choses, le silence. Parfois, mais pas ici. Non, pas dans cette salle de bain en tout cas. Le silence avait décidé de ne pas prendre parti, d'être neutre. Un silence neutre, sans ressenti, sans état d'âme. On ne sentait ni de gêne, ni d'angoisse, ni d'impatience, ou d'interrogation dans ce silence. On ne ressentait rien. Rien du tout. Lena reprit alors la parole, venant à briser ce silence insensé. Elle venait à lui demander s'il était amené à faire des efforts avec elle. Des efforts. C'était ce que Sully lui avait demandé de faire. De faire des efforts. Non. Avec elle, il n'avait pas besoin d'en faire. Tout semblait être bien plus simple, plus naturel et sans les artifices qui allaient avec. Il n'avait pas besoin de faire des efforts avec elle, mais alors pourquoi ? Pourquoi elle... Et de nouveau ces mêmes interrogations. Elle disait n'avoir rien. Rien de plus que les autres. Il haussa les épaules, avant d'inspirer très fortement. Un soupir tout autant bruyant s'échappa furtivement entre ses lèvres. Son regard se posa une nouvelle fois sur le regard de Lena, détaillant avec précision chacun des traits qui dessinaient ce visage. Il eut voulu reculer de quelques centimètres, mais le lavabo lui faisait obstacle. Il entrouvrit la bouche, avant finalement de se rétracter. Les mots avaient toujours décidé de boycottes ses pensées. Les mots étaient fourbes. Les mots étaient le pire ennemi de l'espèce humaine. Les mots, encore des mots. « Tu sais... enfin, non, tu ne sais pas... Certains événements, qui se sont déroulés dans ma vie, ont fait que j'ai dû me forger cette carapace et cette image peu désagréable... reniant alors certaines choses, certains concepts de la vie... je... ». Il s'interrompit brusquement, se pinçant légèrement les lèvres. Il était certain qu'il y avait des choses dont il n'était pas prêt à parler, ni à dévoiler quoique ce soit. Ni lui, ni ce passé si proche de lui qu'il ne pouvait pas renier. Il se retourna de nouveau, tournant une nouvelle fois le dos à la jeune femme. Il put remarquer sur le rebord de l'évier une brosse à dent avec une pellicule de dentifrice dessinée. Elle devait à partir à Lena. Elle était la seule quand il est entré dans cette salle d'eau. Il tourna légèrement sa tête vers la jeune femme, lui adressant un fragile sourire. « Il y a ta brosse à dents qui t'attend., j'crois bien.. Elle s'impatiente et je l'entends crier ton nom : « Lena, Lena, Lena ! Ne m'oublie pas !» ». Un léger sourire se dessina sur les lèvres du jeune biélorusse. C'était une façon comme une autre d'échapper à ce qu'il voulait, de fuir certainement. Fuir, s'échapper, être le fugitif des mots. Les mots étaient fourbes, ils étaient nos plus grands ennemis, oui. « Elle est très bruyante cette brosse à dents, d'ailleurs. ». Les mots qu'il avait associé aux paroles de cet objet n'était que le fruit de l'imagination du biélorusse. Une brosse à dents ne parlait, il le savait. Il faisait cela juste pour détendre l'atmosphère, pour oublier tout ça. Oui, voilà... Il voulait mettre cette conversation derrière lui. Il prit une inspiration, comme pour se donner le courage à deux mains. C'était marrant, parce que le courage, on le prenait toujours à deux mains, et jamais à deux pieds, à deux oreilles, à deux yeux, à une bouche, à un nez, ni même à une main. Non. Le courage, on le prenait toujours à deux mains. Comme si c'était un lourd fardeau à porter. Alors, il portait ce fardeau du bout de ses longilignes bras. « Tu ne diras rien sur ce que je t'ai dit, n'est-ce pas ? » souffla-t-il. Sûrement craignait-il qu'elle colporte ces quelques mots, ces quelques paroles explicatives à d'autres, à Sully par exemple. Oui... il n'avait pas envie que tout cela se sache. Même si c'était stupide, les caméras pourraient très bien le trahir et lui jouer des coups fourbes.