☽Le réveil fut difficile. Je regardais alors ma montre que j'avais déposé sur la table de chevet. 11 heures. « Quoi ? » Je poussais un léger cri et me levais brusquement. C'était la première fois que je faisais la grasse matinée. C'était aussi la première fois que Krisjana se levait avant moi. Rapidement, je me rendais dans l'ascenseur. J'étais à moitié paniqué de la situation. Les portes se fermèrent et je passais une main dans mes cheveux. Je respirais profondément et sortis de là quand les portes s'ouvrir. Malheureusement, je me retrouvais au mauvais étage. Au lieu de descendre, j'étais monté. Je m'apprêtais à reprendre l’ascenseur quand la porte ouverte un peu plus loin m'intrigua. Curieux de nature, je m'avançais jusque dans l'encadrement puis entrais pour m'arrêter près d'une statut sur laquelle je m'appuyais légèrement. Face aux commentaires de Jorah, j'osais regarder le Cupidon qui me servait d'accoudoir et m'écartais en frissonnant. « C'est déjà mieux que moi... » Je riais légèrement, m'avançant un peu plus dans la pièce. « Je n'ai que mon caleçon et mon débardeur à lui offrir et je ne compte pas m'en déposséder dans l'immédiat... Cupidon est peut-être mignon avec ces petites ailes angéliques mais je ne suis pas encore prêt à me déshabiller pour ces beaux yeux... Y'a certaines limites que je ne suis pas encore prêt à dépasser. » Je fis quelques pas, observant le musée de fond en comble. Cupidon par-ci, Cupidon par-là. Cupidon partout. Je soupirais bien que voir une pièce comme celle-ci me réconfortait. L'amour en était l'élément central et, finalement, je me disais que cet endroit était peut-être fait pour moi.

☽Non ! Jamais je ne me déshabillerais pour cet angelot. Il avait beau être mignon comme tout, je n'étais pas fou. Je m'avançais un peu plus dans le musée dont je comprenais beaucoup mieux l'appellation. Sculptures, tableaux, Cupidon était représenté sous toutes les formes et de toutes les manières. C'était trop. Beaucoup trop même. Je me retournais pour faire face à Jorah quand ce dernier me demanda de l'informer si jamais l'envie de faire une offrande me prenait. Je lui fis une légère moue désapprobatrice. Je ne comptais pas dépasser cette limite de l'intimité avec lui, ni même avec d'autres et encore moins avec les téléspectateurs. Je continuais de visiter cette pièce tandis que le trentenaire me faisait part de son opinion tout en me questionnant sur mes goûts. Après un aller-retour dans le musée, je m'adossais au mur et répondis. « C'est surtout étrange pour un Cupidon. Je le pensais plutôt discret... A moins qu'il ne nous cache lui aussi un secret et qu'il se prénomme en réalité Narcisse. » Tout était envisageable dans le nid. Entre les secrets des candidats, les défis, pourquoi Cupidon n'aurait pas lui aussi son secret comme nous tous ? « Et je ne dirais pas que c'est glauque... Je trouve cet endroit juste trop extravagant, trop tape à l’œil, trop 'regardez-moi et aimez-moi'. Un peu comme certains candidats... » Je laissais échapper un léger rire amusé. Certains candidats étaient de ce genre-là. Ils faisaient tout en 'trop' et cela devenait trop barbant. « Ne t'inquiète pas, je ne pense pas à toi quand je dis ça. »

☽Narcisse. Cupidon. Tant de noms qui pourtant pourraient se lier. Mais bon, notre cher Cupidon taquin, malsain et sadique ne serait pas lui-même s'il n'avait pas sa pièce au sein du nid. Je comprenais d'une certaine façon pourquoi le musée existait. Cependant, je n'en voyais pas l'utilité dans le jeu. Elle aurait pu servir de lieux de rencontres entre les candidats. Dîners aux chandelles, rendez-vous romantiques... Mais non ce n'était qu'un musée à l’effigie de notre doyen, le maître du jeu. Tant de potentiels pour rien. C'était...regrettable. « C'est bien ce type-là ! » Répondis-je. Le mythe était connu. D'ailleurs, qui ne le connaissait pas ? Tout le monde en avait probablement déjà entendu parlé. Soit...Je plissais les yeux quand Jorah reprit la parole. Comme si j'étais du genre à 'faire tomber ma chemise'. D'accord, je l'avais déjà fais mais pour de bonnes raisons : prendre ma douche ou un bain, plonger dans la piscine ou encore après une séance sport intensive. « Tu fais quoi dans la vie déjà ? Parce que ce côté mélodramatique pourrait presque convenir à un comédien... » Lui lançais-je avec humour. Je me tournais alors vers une énième statut de l'angelot. Je la regardais, l'observais en détail. « Moi qui pensait qu'il aurait un arc et des flèches sur toutes ces œuvres, j'en suis presque déçu... » Je détournais mon regard un instant sur mon interlocuteur pour vois sa réaction tout en palpant la sculpture. Un 'crac' me ramena instantanément sur l’œuvre. « Oh merde... » Un doigt m'était resté en main. Ni vu, ni connu, je tentais de camoufler ma connerie. En vain... « Je savais bien que c'était du toc. »

☽« J'ai fondé et je dirige ma propre entreprise entre Londres et Rome. » Répondis-je à Jorah qui était donc maquilleur professionnel. J'étais impressionné. Il partait sur les tournages, suivait les acteurs. Il devait probablement voyager aux quatre coins du monde pour suivre les réalisateurs. D'une certaine manière, je l'enviais puisque mon travail ne me permettait de partir un peu partout. Je centrais uniquement sur l'Italie et l'Angleterre. Cependant, mes divagations s'arrêtèrent brusquement quand la statut de Cupidon se brisa par ma faute. Je ne pus m'empêcher de lancer une injure et de faire un commentaire ironique pur tenter d'amoindrir la situation présente. Mais le trentenaire ne me réconforta pas et son ton toujours aussi dramatique ne m'amusait plus vraiment sur le coup. Une chanson démarra subitement. Je la reconnaissais. J'avais déjà partagé un instant comme celui-ci avec Amy la première semaine et maintenant c'était avec lui... Allons-y. Ce n'était qu'un baiser après tout et ça ne serait pas ma première fois. Je ne partais donc avec aucun préjugés. Je prenais ce défi pour ce qu'il était. Je ne cherchais pas plus loin. Jorah s'approcha alors de moi. Je le regardais faire. Son petit sourire m'amusa et nous nous embrassions. Simplement et rapidement, tel un léger baiser volé. Je ne m'affichais pas d'avantage et laissais Jorah s'écarter. Je ricanais suite à à sa question. Cupidon avait des yeux partout, même sur nos conneries. « On pourrait presque le croire... J'en suis même certain ! C'est un vicieux, ce mec. Toujours là quand on ne s'y attend pas... » Toujours avec le doigt de l'angelot, je le gardais finalement en main. Ca me ferait un souvenir du nid. Autant que ça serve à quelque chose. « Soit dit en passant, j'aimerais bien avoir ses yeux pour voir tout ce qu'il se passe dans la maison... Ça doit être plus qu'intéressant. T'en penses quoi ? »