Austin

La grande majorité des candidats devait dormir puisqu’un calme olympien régnait dans le Nid. L’agent marketing, vêtu uniquement d’un short de sport et de ses baskets blanches, s’apprêtait à se rendre dans la cuisine pour se préparer une infusion lorsqu’il croisa Austin dans l’escalier, rencontre des plus intéressantes. Un rictus espiègle se dessina instinctivement sur ses lèvres. Aussitôt il saisit son colocataire par le bras, lui adressant un regard complice, et l’entraîna (contre son gré ?) dans les toilettes. Il referma la porte derrière eux et prit soin de la verrouiller. Tout portait à croire que Leone était resté sur sa faim après leur précédente entrevue.

« Pas de caméra, pas de micro, juste toi et moi. » Murmura-t-il joueur en retirant son boitier noir qu’il posa délicatement sur carrelage. Il s’approcha d’Austin et répéta l’opération, n’hésitant pas à lui soulever le tee-shirt pour se faciliter la tâche.

Louison était revenue dans la maison pour le plus grand bonheur du New Yorkais. En effet, celui-ci prendrait définitivement son pied en observant son camarade se dépatouiller avec le malheureux Cassandre. Il avait hâte de voir comment Austin se sortirait d’affaire, il le savait ingénieux et manipulateur. La situation risquait donc fortement de l’amuser.

« Je t’ai manqué ? » Demanda-t-il un brin provocant. Il se doutait bien que même si tel était le cas, le Français ne l’admettrait jamais.

Leone n’avait pas pensé qu’Austin aurait autant de mal à gérer cette nouvelle situation. Il ne s’était pas attendu à une telle réaction de sa part, en effet ce dernier semblait particulièrement tendu et grognon alors qu’il était généralement audacieux et téméraire. Certes, le jeune New Yorkais ne pouvait imaginer ce qu’il traversait actuellement mais tenta de se montrer un brin compréhensif. Ainsi, il n’insista pas davantage ; d’autres occasions de provoquer son partenaire de jeu se présenteront sûrement dans les jours à venir. Il ouvrit la porte des toilettes puis laissa le champ libre à son colocataire, lui faisant signe qu’il pouvait partir rejoindre ses occupations.

A quoi s’attendait-il ? Austin pouvait être déçu autant qu’il le voulait, Leone ne le convaincrait pas pour autant de rester. Il ne lui ferait pas ce privilège. Le fait de l’avoir entraîné dans les toilettes était déjà une preuve amplement suffisante, tant pis s’il ne voulait pas saisir sa chance.

« A toi de savoir où est ta place. Si tu as mieux à faire je comprends. Je n’ai rien à te prouver. » Répondit-il avec nonchalance.

Leone appréciait réellement la compagnie du vrai Austin. Effectivement, se retrouver seul avec son camarade lui permettait de s’évader. Il avait toujours adoré la compétition, la rivalité qu’il partageait avec lui était exaltante et le forçait sans cesse à se surpasser. En revanche, il n’avait pas l’intention de le retenir contre son gré, encore moins de lui imposer sa présence. Le Français avait sûrement d’autres chats à fouetter à cette heure si tardive. Par conséquent le bel Américain n’ajouta rien, se tenant toujours en retrait. Austin était suffisamment grand pour savoir où il devait être et avec qui.

Austin referma finalement la porte, recherchant désespérément une justification. Leone ne jouait pas, il avait simplement ressenti l’envie de se retrouver seul à seul avec son colocataire à l’abri des regards indiscrets. Celui-ci ne semblait pas comprendre, ou plutôt ne voulait pas comprendre. Néanmoins il pouvait toujours attendre, l’agent marketing n’était pas prêt de lui avouer cette vérité qui porterait un certain discrédit sur sa volonté d’être un homme inaccessible.

« Ne compte pas sur moi pour te dire ce que tu veux entendre. » Répliqua-t-il d’un ton calme.

Contrairement à lui, le beau New Yorkais n’avait pas sommeil. Son rythme biologique était complètement décalé depuis ses premiers jours dans le Nid, par conséquent il n’était pas pressé et pouvait encore tenir quelques heures. A plusieurs reprises Austin aurait pu partir pourtant il était toujours là, avec lui. Contre toute attente, Leone serait peut-être le premier à se lasser. Il ramassa également son micro, prenant soin de ne pas effleurer le Français en se baissant.

« Si la production te demande ce que tu faisais avec moi dans les toilettes, dis leur que je t’ai violé. Betty-Jayne se sentira moins seule et ça fera couler de l’encre. Bon on se casse ? C'était une erreur de penser pouvoir croiser le vrai Austin une seconde fois. »

« Crois-moi, tu ne veux pas être mon ennemi. J’ai une certaine influence que tu ne peux qu’envier. Tu as beau être doué, tu ne peux rien contre moi. J’ai un avantage considérable sur toi, tu en es parfaitement conscient. »

Le jeune New Yorkais lui adressa un sourire moqueur. Charlie et Matthew avaient confiance en lui. Aussi manipulateur qu’il soit, Austin n’avait pas la moindre chance. Que ses nouvelles soient bonnes ou mauvaises, l’impact que Leone avait sur ses deux amis était définitivement plus fort qu’un vulgaire mensonge.

« Je vais te dire un secret… » Déclara-t-il en s’approchant de son camarade. Il lui caressa la joue sensuellement et reprit dans un murmure :
« Tu veux te dresser contre moi ? Grand bien t’en fasse. Je te mets au défi de m’atteindre, tu connais les risques. »

Il se recula ensuite, posant sa main sur la poignée de la porte, prêt à partir. Il dévisagea Austin, continuant d’espérer au fond de lui qu’il avait changé d’avis. Il y avait suffisamment de cons dans ce Nid. Confian, il ajouta:

« Ou alors tu réfléchis un instant… Admets-le, te battre contre moi ne donnera aucun résultat. Tes menaces sont une illusion, tu n’en as pas besoin pour attirer mon attention. Tu peux faire mieux. »

Leone réajusta son micro, ouvrit la porte puis s’apprêta désormais à sortir des toilettes. Son regard azur croisa une nouvelle fois celui d’Austin, il se sentit obligé de partager le fond de sa pensée, reprenant sa métaphore :

« J’apprécie la rivalité que nous partageons. Tu es l’un des rares candidats que je trouve intéressant mais tu auras giclé d’ici avant d’avoir eu l’occasion de me faire boire la tasse. Tu ne préfères pas remonter à la surface ? Avec moi ? »

Ainsi, il avait joué cartes sur table. Austin se devait d’être réceptif, Leone ne lui réexpliquerait pas.