Assis sur les gradins du stade, il tente de lutter. Lutter contre son envie irrépressible de courir au nid pour y rechercher son paquet de cigarettes. Il ne s’en sépare jamais, habituellement, mais il a fallu que ce soir, il parte se balader sans penser à ce précieux graal. Autant dire que dès qu’il a eu envie de s’en griller une et qu’il a réalisé qu’il n’avait aucune cigarette sous la main, son sang n’a fait qu’un tour. Il aurait pu faire demi-tour immédiatement, mais non, il s’est lancé un petit défi personnel. À savoir, s’asseoir sagement sur ces gradins et résister le plus longtemps possible à l’appel de sa drogue. Faut dire qu’il fume trop, Alistair, il le sait très bien. Et de lui-même, il n’a pas assez de volonté pour arrêter, alors il tente des parades. Il n’arrêtera jamais, c’est certain, mais il peut toujours tenter de vivre plus d’une heure sans craquer pour ce poison. Alors il attend, tapant un peu du pied. C’est un comportement particulier, certes, mais il aurait au moins la fierté d’avoir résisté l’espace de quelques minutes et si sa résistance est forte, quelques heures. Heureusement que Clémentine apparait dans son champ de vision avant de prendre place à ses côtés, elle est susceptible de lui changer les idées, parce qu’actuellement, son esprit n’arrête pas de penser cigarette, cigarette, cigarette. La question qu’elle lui pose lui provoque un léger rictus. « Un peu, oui. » C’est peut-être parce qu’ils n’ont pas l’habitude d’être les victimes d’un enfermement forcé, contrairement à d’autres. « Même moi je suis de meilleure humeur que la moitié de nos colocataires. » Il déclare, légèrement moqueur. C’est dire à quel point c’est le monde à l’envers cette semaine. Même lui, ayant hérité d’une nomination à la fin du prime et ayant remis ça pour la semaine suivante grâce à la roulette, et de meilleure humeur que les septante pourcents des candidats. Ceci dit, il ne sait pas s’il s’agit véritablement de l’enfermement qui les rend effectivement fous ou si c’est juste le fait que les relations soient mises à mal dernièrement, entre les multiples coucheries et règlements de compte. Au moins, l’avantage avec Alistair, c’est que ce genre de problèmes liés aux relations qu’entretiennent les uns et les autres ne risque pas de se présenter à lui, puisqu’il n’est pas du genre à s’attacher aussi facilement que certains. « Oui, merci. » Il répond à la proposition de Clémentine quand elle secoue son paquet de cigarettes. Il aurait pu refuser, histoire de tenir encore un petit moment sans fumée, mais il n’en a plus la force, Clémentine lui apparait être une sauveuse à cet instant précis. « Si je pars dimanche, tu voudrais que ce soit qui, ton nouveau partenaire ? » Il demande ensuite, curieux. On ne peut pas dire qu’ils soient les partenaires les plus soudés du nid, alors elle n’aura pas de peine à passer de lui à un autre, il est juste curieux de savoir vers qui va sa préférence, même si ça ne dépendra pas d'elle.

Il est vrai que l’enfermement n’a pas que du bon et que cela commence sérieusement à agir sur le moral des troupes. Ce qui est surprenant et quelque peu désagréable, puisqu’en l’espace de deux petites semaines, le nid est devenu un repère à dépressifs qui tirent la tronche à longueur de journée, bien qu’il soit mal placé pour juger cela. Malgré tout et comme il l’avoue à Clémentine, même lui est de meilleure humeur, c’est dire si les dégâts sont importants. Elle confirme d’une façon qui lui provoque une esquisse de sourire. « Je suis sûr que Cupidon nous sera redevable pour avoir pris les devants. » Et donc déclarer le fameux état de crise du nid. Non, vraiment, l’angelot ne peut que les remercier. Il change ensuite de sujet pour en venir à sa nomination et donc à la potentielle élimination qui lui pend au nez. Il est curieux de savoir, dans l’hypothèse où cela est sa dernière semaine, qui elle souhaiterait comme nouveau partenaire. Le choix ne dépend évidemment pas d’elle, mais qu’importe, elle doit bien avoir des préférences sur le nombre de candidats encore en lice. En attendant sa réponse, il s’empare de la cigarette qu’elle lui a proposé, jouant avec celle-ci avec ses doigts, comme pour retarder malgré tout le moment où il la portera à ses lèvres, comme pour se prouver qu’il est capable de résister à la tentation, même quand celle-ci est à portée de mains. Et finalement, Clémentine lui répond. Elle aimerait bien être seule. « Je peux comprendre. » Non pas que son partenariat avec elle le dérange, mais disons qu’ils n’ont pas le profil type des partenaires toujours collés l’un à l’autre et étant unis par un lien impossible à briser. Ils ont un partenariat à distance et ça lui convient très bien. Mais malgré tout, et sans vouloir vexer Clémentine, les choses n’auraient pas été bien différentes s’ils avaient été chacun de leur côté. Ceci dit, Mallaury ne la dérangerait pas non plus. « Je suis sûr qu’il sera aux petits soins pour toi. » Il admet, accompagné d’une esquisse de sourire. Sa partenaire n’est pas aussi précieuse à ses yeux que peut l’être Tilda aux yeux de Lou (du moins, il n’y a pas si longtemps) ou Pia aux yeux d’Andreja. Malgré tout, s’il vient à quitter le nid, il sera satisfait à l’idée qu’elle soit en partenariat avec quelqu’un comme Mallaury, qui n’osera jamais lui faire le moindre tort. Aux propos qu’elle tient par la suite, il se contente de pincer les lèvres en fixant sa cigarette, dans un premier temps. Puis, lâchant la cigarette des yeux pour reporter son attention sur Clémentine, il se décide à lui répondre. « Un peu, je dois t’avouer. » Inutile de lui mentir, Clémentine n’est pas assez naïve pour boire ses paroles. Oui, il part légèrement défaitiste, sans pour autant penser que c’est totalement cuit pour lui. Disons simplement qu’il est face à de fortes personnalités, des candidats qui ne sont pas effacés comme a pu l'être Noah il y a deux semaines, contre lequel il pensait tout de même avoir ses chances. Mais là, cette semaine, il ne pense pas avoir l’avantage sur quiconque et c’est bien ça, le problème. « Mais le fait de me savoir déjà condamné la semaine prochaine n’arrange pas les choses. » Il finit par déclarer, haussant les épaules par dépit. Deux nominations à la suite, trois en l’espace d’un mois, ça l’inquiète un peu, il espère que le public ne sera pas lassé de le sauver, comme il a sûrement pu l’être avec Isaac ou Ana, nominés eux aussi à plusieurs reprises. « Tu n’as jamais été un peu défaitiste lors de tes nominations ? » Bien que ce soit un sentiment de pression qu’elle ne connaisse plus depuis bien longtemps, étant épargnée depuis des semaines, ce qui n’est pas pour déplaire à Alistair. Mais elle a tout de même connu les nominations, elle ne s’est jamais inquiétée un minimum pour sa place au sein du jeu ?