Il y a du vent aujourd’hui, genre beaucoup. Pour autant, j’ai décidé d’aller l’affronter et de me munir d’une veste épaisse et de mon bonnet. Je marche dans la direction du parc d’attraction. Je veux ma friandise du jour. J’ai vraiment la dalle. Beignets, churros ou barbe-à-papa, peu importe mais me voilà. Au passage, un truc m’interpelle devant les grilles. Y’a un bout de piñata je crois coincé dedans. J'vois pas vraiment car il fait déjà nuit. En bon protecteur de la planète, je décide d’intervenir et de passer mon pied entre les grilles pour le pousser et le décoincer. J’y arrive sauf qu’à présent c’est mon pied qui se retrouve coincé dans la grille. Flûte de zut ! Je force alors mais en vain. J’ai l’air con comme ça. J’essaye de tirer pendant plusieurs minutes mais tout ce que j’arrive à faire c’est déplacer la grille. Soupire. Je me décide à essayer de retirer ma chaussure en m’aidant avec l’autre jambe vu que je peux pas l’atteindre avec mes mains en me baissant mais impossible d’y soustraire mon pied coincé. « P’tain de satané chaussure à la noix ! » J’ai l’air d’un profond débile là comme ça et le pire, c’est que je me rends pas compte qu’il y a à présent une candidate qui observe mon manège. Je continue donc à rouspéter tout seul. « Rowan doit être en train de jubiler devant son écran là. Je suis littéralement comme un lion en cage. Grrr. GrRrR. GRRRRRRRRRRR. » Et j’hausse le ton en plus en essayant de perfectionner le son du lion. De là, j’entends des rires. Je me retourne aussitôt et reconnaît Gaël avec qui je partage ma chambre. « Si tu m’aides et que tu dis rien à personne, je… » Vite, une idée ! Mais y'a rien qui vient évidemment. « Je te prépare le petit-déjeuner au lit demain matin ? » Oui, d’accord tant d’attente pour si peu d’originalité mais en même temps, c’est pas la meilleure situation pour faire cogiter mes neurones correctement.

Et en plus, il s’énerve. Gael l’a vu, de loin, grimper sur la grille. Au début, elle n’a pas comprit son manège. Il voulait s’échapper, ou quoi ? Parce que bon, il aurait pu faire comme Lorena et abandonner, c’était quand même plus facile. Peut importe la raison, au final, Gael était arrivée plus ou moins au moment où il avait commencé à faire le lion. Ce qui était assez risible, et qui fit donc rire la jeune américaine. “Hmmm… Deal. J’aime bien les oeufs, au matin.” Régime de sportive oblige, elle prenait ses protéines au matin. La brune s’approcha et leva les bras pour défaire les lacets de la chaussure de Salvador. “On arrivera à la décoincer une fois que ton pied ne sera plus dedans.” Fit-elle alors qu’elle s’éloignait, la chaussure était ouverte et donc, le lion était libre de s’en aller. "N'empêche, ça ferait une si chouette histoire à raconter..." Ouais, enfin, pas pour lui.

Le ridicule ne tue pas. Heureusement sinon je serais déjà mort depuis pas mal de temps. Et là, en l’occurrence, je serai foudroyé sur place. J’ai tout bonnement l’air d’un imbécile avec ma chaussure coincée dans le grillage et je grogne tel un lion en cage. Je pense à ce gage que Rowan m’a donné cette semaine et j’me dis que là elle doit bien rire. J’imite le félin quasiment à la perfection tandis que Gaël se régale de ce spectacle dans mon dos. Oups. Je souhaiterai effacer à tout prix cette séquence de sa tête et qu’elle ne répète rien à personne surtout. Alors je lui propose un deal qu’elle accepte. Je devrais lui préparer le petit déjeuner demain. « Œuf poché ? » J’imagine oui. En tous les cas, ça ne devrait pas être un problème. J’ai toujours cuisiné donc je sais y faire même si ces derniers mois, j’ai clairement lésiné là-dessus. Enfin peu importe. Le déjeuner passera après. Là, la priorité c’est qu’elle me prête main-forte ou du moins qu’elle me décoince de ce grillage. Certes, la vue du parc d’attraction est sympa mais c’est frustrant de ne pas pouvoir l’approcher de plus près. « Il me manque le temps des chaussures à scratch. » Que je déclare pendant qu’elle défait mes lacets. J’imagine qu’avec des scratchs, j’aurai pas eu besoin de son aide et j’aurai pu me sortir de là tout seul. Mais hélas, c’est pas le cas. Je porte des lacets maintenant comme un grand. « C’est Rowan. Elle met des pièges à ours. Grrr. » Mais oui, rien que ça. Surtout que ça a pas vraiment de sens vu que c’est ma chef d’équipe et que je suis censé être son petit poulain tout comme Gaël d’ailleurs. « Merci. La parole est d’argent mais ton silence est d’or. Je suis sûr que c’est pas Colin qui t’en apporte des petits déj’ au lit le matin en plus. » Oui, clairement, je l’achète. Mais y’a que ça qui marche. Surtout face à une inconnue. Je sais pas de quoi elle est capable.

« Tu sais les faire ? » Elle sait d’expérience que les œufs pochés ne sont pas la chose la plus facile du monde à faire, mais si Salvador sait les faire, alors la jeune femme veut bien signer tout de suite. Et son sourire en témoigne, c’est un accord tacite. Elle lui défait alors ses lacets et rit à sa remarque. « Je pense que j’ai déjà vu des basket à scratch pour adulte. » Des addidas ou des trucs dans le genre, mais à la télé elle sait qu’elle ne peut pas prononcer le nom de la marque à voix haute. Ca ferait du placement de produit gratuit. « Et l’ours est tombé dedans… ? » Elle ose un léger rire, à nouveau, alors que le candidat descend de son perchoir. Gael lui attrape la chaussure qu’elle peut décoincer facilement et la lui tend. « Tiens, t’es libre, Koda ! » L’ours dans frère des ours, quoi. En espérant qu’il comprenne la référence. Il a touché en plein dans le mide, Gael fait une petite moue. « Non, pas vraiment. Bon, il faut dire que je me réveille tous les jours avant lui, aussi. Parfois je me réveille quand il va se coucher, bref, on est complètement décalés ! »