Rappelez-lui pourquoi il était toujours là ? Ah oui, c'est vrai, il voulait se dé-tendre. Et ce lieu lui avait semblé idéal au départ et jusqu'à ce que Monsieur Syssoï débarque. Parce qu'étrangement, il avait un peu plus de mal à le penser désormais. Sans doute était-il plus délicat de se vider l'esprit quand le grand brun était dans les parages. Non pas que sa compagnie était détestable, hein, vous n'y êtes pas. Simplement, il avait une tendance légèrement agaçante, mais très légèrement. Sa manière de s'exprimer, comme s'il appartenait à un autre temps, rendait cette entrevue difficilement supportable. Et rien à voir avec le coté profondément insociable de Jackson, hein. Et dire que c'était lui qui avait mis le sujet Gabrielle sur la table. Croyez bien qu'il s'en mordait les doigts à présent. Parce que franchement, il se portait bien mieux quand il n'entendait pas parler d'elle. Ça le gonflait, pour tout vous dire. Et voilà que sa majesté reprenait la parole. Et le moins que l'on puisse dire, c'est que Syssoï avait une drôle de façon de voir les choses, de les interpréter. Son « Pourquoi moi et pas toi, peut être ? » faisait doucement sourire Jackson. Est-ce que cela avait un rapport avec le fait qu'il se fichait pas mal d'être considéré comme LE mec dont Gabrielle n'a malheureusement pas voulu ? Déjà, qu'est-ce qui vous fait croire qu'il aurait aimé qu'elle veuille de lui ? Tout cela l'amusait en quelques sortes. « Ça n'a rien d'une compétition » répondit-il doucement, comme si tout cela lui passait bien au dessus de la tête. Et c'était un peu vrai d'ailleurs. Si Jackson ne voyait pas nécessairement d'un bon œil le rapprochement entre Syssoï et Gabrielle, ça n'était pas pour les raisons qui semblaient évidentes. Mais ça, ça semblait échapper à pas mal de monde visiblement. Parce que, non, il n'était pas jaloux. Cela voudrait dire qu'il la considérait comme une chose qui lui appartenait, alors que ça n'était clairement pas le cas. Rappelons qu'il la connaissait à peine et que tous les deux se supportaient tout juste. « Et je ne veux rien savoir. Vos histoires ne m'intéressent pas, à vrai dire. » Ouais bon, il y avait une part de vérité et une part de mensonge là dedans. Mais vu qu'il n'avait pas juré sur la Bible qu'il dirait la vérité, il s'en branlait pas mal.

Ce type est d’une inutilité à faire peur. Il sert à rien. Non, mais sérieusement, vous l’avez vu se lancer dans la chasse au secret ou même interagir avec un membre de la même espèce que la sienne ? Non. Le seul moment où il a été un tant soit peu intéressant c’est lorsqu’il se trouvait menotté à Ruben. Ils emmerdaient tout le monde, mais au moins il avait un semblant d’existence. Je ne m’estime pas particulièrement sociable, bien au contraire, mais j’ai tendance à prendre sur moi, profitant de l’expérience comme d’une parenthèse thérapeutique dans mes relations avec l’Autre. Ça ne durera que le temps de l’aventure, et sitôt que j’aurais passé les portes du sas je retournerais me complaire dans mon isolement, mais en attendant j’accepte de me plier aux règles du jeu. Ce que ne fait absolument pas le blond, au point que j’en suis à me demander ce qu’il fout là ? Lui-même n’a pas l’air très sûr de lui, totalement incapable de savoir, même, pourquoi il s’obstine à rester à mes côtés alors que ma présence semble l’incommoder. Sachant que sa présence à lui ne me dérange pas le moins du monde, peut être du fait de son inexistence, justement, je m’installe, en tailleur, sur la roche froide qui passe au travers de mes diverses couches de vêtements. J’ai le mérite de tenter un pas vers lui. Puisqu’il a engagé la conversation sur le sujet Gabrielle, j’imagine que c’est certainement parce qu’il s’agit du seul qu’il conçoit d’avoir avec moi. Mais il me rembarre en utilisant le terme «compétition»... Hum... Je reste perplexe, et le regard que je lui jette rapidement par-dessus mon épaule l’est tout autant. Qui a parlé de compétition ? Pas moi. La seule compétition que je conçois est en terme de danse, et honnêtement, je ne pense vraiment pas qu’il fasse le poids. J’hausse un sourcil, et détourne rapidement les yeux de lui pour les reporter sur l’horizon nettement plus intéressant. Il enchaine, prétextant qu’il ne veux rien savoir, que nos histoires ne l’intéresse pas. Ouai, c’est ça, prend-moi pour un bébé lapin, je te dirais rien, ducon. « Au contraire, elles t’intéressent, et je n’arrive pas trop à comprendre pourquoi. T’as pas l’air d’être le genre de type à te soucier de ton prochain. » Je ne le regarde pas, je n’en vois pas l’intérêt. Il accorde une sorte d’importance incohérente à Gabrielle, une importance qu’il semble rejeter en bloc. Et cette même sorte d’intérêt je l’ai retrouvé chez Gabrielle. Si ça ne me contrarie pas, ça m’intrigue. Mon cerveau se trouve à nouveau face à une question à laquelle il cherche une réponse. Tout bêtement.

Plus les minutes s'écoulaient, et plus les jambes de Jackson semblaient vouloir le conduire à l'intérieur, loin de cet endroit et ainsi loin de son camarade. Mais lui, en parfait contradicteur qu'il était, n'en avait semble-t-il pas l'intention. Pas pour le moment en tout cas. Parce qu'il n'y avait aucune raison que la présence de Syssoï l'empêche de savourer le présent instant, après tout. Okay, ça n'était peut être pas exactement pareil que s'il avait été tout seul, mais qu'importe. Et puis, croyez-le ou non, mais il préférait encore avoir à faire au grand brun plutôt qu'à un type comme Ruben ou même Baptiste. Le niveau intellectuel était ici un peu plus élevé, et ça n'était pas un mal. Toutefois, Jackson n'irait jamais l'avouer ouvertement, parce que ça n'était tout simplement pas son genre. Ainsi, le jeune homme restait debout, toujours aussi proche du vide et écoutait d'une oreille ce que lui adressait son camarade. Ah oui, ils parlaient là de Gabrielle. Un sujet de conversation qui lui semblait pourtant de plus en plus improbable quand lui même n'avait pas adressé la parole à la rousse depuis pas mal de temps. Et pourtant, c'était lui et bien lui qui avait amené le sujet dans la conversation. Probablement que, sur le coup, ça lui avait semblé assez judicieux. Autant dire que ça l'était déjà moins à ses yeux désormais. « T'es du genre à savoir tout mieux que les autres, pas vrai ? » Jackson avait précédemment prétendu que les histoires de bécots entre Syssoï et Gabrielle ne l'intéressaient pas. Du moins, si elles l'intéressaient, ça n'était pas de la manière dont pas mal de monde devait se l'imaginer. En fait, cela s'apparentait tout juste à de la curiosité mal placée. « Ceci dit, t'as raison. Je ne suis pas le genre de type à me soucier de mon prochain. » D'une manière générale en tout cas. Car il y avait bien une personne sur cette putain de planète pour qui il pouvait encore se faire un minimum de soucis : sa sœur ainée. Il n'irait pas jusqu'à dire que tous les autres pouvaient bien crever la bouche ouverte, mais presque. « Et toi alors, t'es quel genre de type au juste ? » Si il pouvait en apprendre un peu plus sur Monsieur Syssoï, ça n'était pas plus mal. Il était clairement censé se foutre des autres, mais était malgré tout capable de montrer un semblant d'intérêt de temps en temps. C'était rare, mais pas inespéré.

« T’es du genre à savoir tout mieux que les autres, pas vrai ? » J’hausse les épaules, fixant toujours l’horizon. « Lorsque les gens ne savent pas grand chose, il est aisé de savoir mieux qu’eux, non ? » Ce n’est pas de la prétention, c’est un fait avéré. Si les gens étaient moins con, sûrement que j’aurais l’air moins réfléchis, intelligent et cultivé. Après, tout est une question d’éducation et d’accès à l’éducation, même s’il y a beaucoup de volonté aussi qui entre en jeu. Et puis j’observe, j’observe beaucoup, je garde le silence mais j'emmagasine les informations, je les stocke, les range par ordre croissant ou chronologique, j’arrive à me forger une opinion assez rapide d’une personne, à tracer son esquisse avec autant de précision que le ferait un Franckie sur une feuille Canson. Et il me donne raison, en avouant qu’il n’est effectivement pas du style à se soucier des autres. C’était pas difficile à déduire, ça. Tout dans son attitude hurle son individualisme voir son repli sur soi au point de se désintéresser totalement du reste du monde. Moi, au moins, mon repli sur moi s’explique par mon besoin de préserver le reste du monde. Il décide de faire un pas vers moi, un pas maladroit, mais c’est l’intention qui compte, en m’interrogeant sur le genre de type que je suis. Bonne question, et surtout question sans rapport, ou presque, avec Gabrielle. Ça aussi je note. Alors, quel genre de type je suis ? J’ai tout un chapelet de réponses possibles qui se bousculent à mes lèvres que je torture de mes dents... J’hésite, puis je fini par répondre dans un soupir : « Le genre de type pas fréquentable. » C’est la réponse qui me semble la plus juste, tandis que je me relève en posant mes yeux de glace sur lui. Je ne cherche pas à l’intimider, c’est pas mon genre, je me contente simplement de répondre à sa question avec franchise. Je ferme les yeux un instant, puis prend appui contre un rocher qui semble sortir de terre pour tendre vers le ciel. Ici, personne ne veut comprendre que j’ai des raisons de me comporter de la sorte. Personne sauf une. Et ce n’est pas Gabrielle.

Okay, alors soit Syssoï était excessivement sûr de lui, soit il était véritablement aussi cultivé qu'il semblait vouloir le montrer. Qu'importe. Jackson laissa s'afficher un sourire amusé sur ses lèvres suite à la réponse de son camarade. D'un certain coté, il n'avait pas tort le Syssoï. Dans le fond du moins. « C'est pas bête comme raisonnement » fit-il alors, tandis que son regard se baladait sur ce qui se trouvait autour de lui. Visiblement, Syssoï était un type très philosophique, ou en tout cas du genre à penser beaucoup. Que voulez-vous, il faut bien de tout pour faire un monde. Et puis, mieux valait ça que l'inverse, qu'un mec qui ne pense jamais au contraire. On ne citera pas de nom mais on en pense pas moins, hein. Finalement, Jackson confirma ce que son camarade avança, à savoir qu'il n'était pas le genre de type à se soucier de son prochain. C'était si vrai. Naturellement, Jackson chercha par la suite à savoir quel genre de type pouvait bien être ce bon vieux Syssoï. Car si habituellement il ne comptait pas sur les gens pour se qualifier eux même, se contentant de le faire pour eux, il tenait ici à avoir la version de Syssoï. C'était encore lui qui se connaissait le mieux, après tout. Et quand il finit par lui annoncer qu'il était un type « pas fréquentable », Jackson arqua un sourcil. Intéressant. Ainsi donc, il se voyait comme un type pas fréquentable. C'était une réponse pas très commune et loin d'être banale. Et tandis que son camarade se releva, Jackson soutint son regard un court instant. Non pas qu'il espérait voir sortir du feu des orbites du jeune homme, mais presque. Plus sérieusement, Jackson se surprenait lui même à se prendre d'intérêt pour son camarade. Ça n'était tellement pas naturel chez lui. « Pas fréquentable, à quel point ? » Ouais, maintenant que sa curiosité était piquée, il espérait en savoir plus. Mais si Syssoï n'avait pas dans l'idée de lui répondre, il pouvait toujours le balancer du haut des falaises. Au moins, aucune chance que Jackson insiste après ça.

« C'est pas bête comme raisonnement » C’est seulement maintenant qu’il s’en rend compte ? Comme si j’avais pour loisir de péter face au vent. Non, tout ce que j’avance est d’une vérité absolue. Je ne dis pas que je suis détenteur de la science infuse et que mes dires sont paroles d’évangile, mais quand je me donne la peine de parler, chacun de mes mots a été pesé avant d’être utilisé à bon escient. Sauf quand je raconte de la merde, et ça m’arrive de plus en plus souvent avec une catégorie de personnes tellement restreinte que, bien évidemment, Jacko n’en fait pas partie. Je n’essaye pas d’épater la galerie puisque mon but est de faire fuir avant tout. Briller ne m’intéresse pas, susciter la convoitise encore moins. Je suis juste tel quel, à prendre ou à laisser, mais vaudrait mieux laisser, si je puis me permettre un conseil gratuit. Et c’est ce que j’essaye de lui faire comprendre en me définissant comme personne peu ou pas fréquentable. Encore une fois, je n’essaye pas de me distinguer par ce biais puisque, depuis le début, tout en moi me distingue des autres. C’est juste un fait avéré, je ne suis pas fréquentable, et c’est la raison pour laquelle j’essaye de faire fuir ceux qui n’ont pas la présence d’esprit de le voir immédiatement. Les gens me fuient d’ordinaire, ils m’évitent comme l’ont fait tous les candidats durant la première semaine. Et dans la vie de tous les jours, ça me suffit, puisque je ne fréquente jamais personne plus d’une semaine. Mais là je suis contrains de côtoyer les mêmes individus, jour après jour, et immanquablement, ils finissent par s’attacher. C’est à moi de faire en sorte de les détacher lorsque je ne suis pas trop lâche pour ça. « Pas fréquentable, à quel point ? » finit-il par me demander. « Sur une échelle de un à Hiroshima ? » je rétorque aussi sec, utilisant ma propre échelle de valeur qui ne se restreint pas à un chiffre mais à une catastrophe nucléaire. « Sans hésitation, Fukushima. » Une autre catastrophe nucléaire, avec le même résultat, ou presque que le précédent, mais pas les mêmes causes. Disons que Hiroshima c’était voulu et prémédité. Fukushima, la catastrophe que je représente, c’était inévitable, mais involontaire... Je suis une catastrophe malgré moi, et c’est peut être ça le plus dur à vivre.

Syssoï n'était pas un type fréquentable. Du moins, c'était ainsi qu'il se décrivait, ainsi qu'il se voyait. Jackson ignorait si cela était véritablement le cas, parce qu'après tout, il ignorait tout de lui. Alors peut être qu'effectivement, ça n'était pas un type fréquentable. Mais en y réfléchissant bien, peu de types étaient fréquentables. Les types qui se disaient fréquentables étaient même parfois ceux qui l'étaient le moins. Et les types dits pas fréquentables, l'étaient parfois encore moins que ce que l'on s'imaginait. En fait, beaucoup de types n'étaient pas fréquentables sur cette foutue planète. Jackson, lui même, ne se considérait pas comme particulièrement fréquentable. Il était bourré de défauts, détestait la quasi totalité de l'humanité, était parfois pris de pulsions meurtrières et avait même passé des années en maison de correction. Alors oui, d'une certaine manière, lui même n'était pas un type fréquentable. Toutefois, il était utile de s'interroger sur une chose : à quel point pouvait-on ne pas être fréquentable ? Il devait y avoir différents niveaux, des sortes de paliers. Parce que le type qui agressait les petites mamies dans la rue n'était peut être aussi infréquentable que celui qui les égorgeait, non ? Du moins, ça paraissait logique. Syssoï, par exemple, se considérait comme un type pas fréquentable, mais à quel point au juste ? C'était très justement ce que venait de lui demander Jackson, qui se montrait de plus en plus curieux mine de rien. Il détestait ça, qu'on se le dise. Mais il ne luttait pas. Parce qu'il se prenait toujours de fascination pour les gens bizarres, et encore plus pour les gens dangereux. Syssoï n'avait pas l'air franchement bizarre, ni dangereux. Pour autant, s'il se considérait comme pas fréquentable, c'était bien pour une raison. Et lorsque le grand brun se compara à la catastrophe Fukushima, Jackson arqua un sourcil. Ah ouais, quand même. Attendez, il le faisait marcher ou bien il était sérieux ? Pour le coup, il semblait plutôt sérieux. Et puis, très honnêtement, Syssoï ne semblait pas être le genre de type à faire facilement de l'humour. Ainsi donc, il se trouvait infréquentable au point de se comparer à une catastrophe nucléaire. Intéressant. Pas flippant, non. Intéressant. « T'es pas radioactif, au moins ? » l'interrogea Jackson. Okay, c'était un peu limite comme réflexion. Mais que pouvait-il bien déclarer après une telle révélation ? Probablement que Syssoï avait de bonnes raisons de se considérait infréquentable à un tel point. Raisons que lui seul connaissait. Là, tout de suite, Jackson pensa à Gabrielle. Juste une fraction de secondes, hein. Et si Syssoï était amené à lui faire du mal ? Et si il la contaminait avec on ne sait quel mal ? Et si ... Okay, on ferme.

Spoiler:

J’avais envisagé cette description comme une échelle de valeur traduisant une catastrophe, et non son caractère nucléaire ni radioactif. Ce n’était qu’une allégorie, une image frappante, personnifiant ce que je suis, un exemple criant de vérité. Evidemment que non, je ne suis pas radioactif, comment pourrais-je l’être ? Si j’avais été contaminé, je serais actuellement entrain de crever dans une chambre stérile, ne recevant la visite que de médecins en combinaison jaune et casque intégrale à la E.T. Il s’imagine vraiment que si mon secret avait été « je suis radioactif, les gars, et j’vous emmerde. » La prod m’aurait laissé rentrer dans le nid, et Gabrielle aurait accepté de dormir avec moi, voir de carrément glisser sa langue dans ma bouche ? Comme il est mignon. Esquisse un sourire amusé, tout en plaquant mes cheveux battus par le vent, en arrière. J’hésite a répondre à sa question, elle ne semble pas digne de réponse, j’espère que c’est de l’humour de sa part, bien que rien ne soit notifiable dans son expression faciale, en tous cas, rien ayant trait à un quelqu’un amusement. Par contre, la seconde suivante, ses traits se modifient légèrement, rien d’excessivement frappant, mais suffisamment pour que je le remarque. Il s’inquiète. Il ne s’inquiète pas pour lui, puisqu’il n’a pas eu de mouvement de recul. « Tu t’inquiètes pour Gabrielle. » Comme c’est touchant. Il ne s’agit pas d’une question mais d’une affirmation, et j’ébauche un nouveau sourire. « Elle a de l’importance, pour toi. » ça non plus ce n’est pas une question, ni même une provocation, juste l’énoncé d’une vérité. « Je ne suis pas contagieux au sens propre du terme… » dis-je en me retournant pour lui offrir mon dos tandis que ma face profite des embruns. « Je ne lui ferais jamais de mal volontairement. » et je le pense, même si je sais que, du mal, je vais lui en faire, c’est inévitable.

Spoiler:

« T'es pas radioactif, au moins ? » Hum, en y réfléchissant bien, cette question n'avait pas trop sa place dans la présente conversation. Elle était assez malvenue, oui. Même Jackson le pensait, c'est vous dire. Mais disons que cela avait été la seule chose qu'il avait trouvé à dire à cet instant précis. Syssoï venait de lui avouer qu'il n'était pas un type fréquentable, puis s'était plus ou moins comparé à Fukushima. Vous aussi, vous auriez galéré à trouver quoi dire après ça, c'était évidemment. Mais alors que Jackson s'attendait à une réaction de la part de Syssoï, celui-ci évoqua Gabrielle. Grillé. Il avait lu dans ses pensées ou bien ... ? Flippant, pour le coup. Jackson prit un air profondément désintéressé - sans trop de mal, comme à son habitude - et regarda en direction de l'horizon. S'il s'inquiétait pour Gabrielle ? Hm, peut être un peu oui. Bon okay, il s'inquiétait pour elle. Parce que les récentes déclarations de Syssoï avaient beau l'intriguer plus que l'effrayer, il ne pouvait pas s'empêcher de penser à Gabrielle, pour le coup. A la première formulation de son camarade, Jackson resta finalement muet. De toute manière, s'il disait cela sur ce ton, c'est qu'il avait très bien saisi que Jackson s'inquiétait effectivement pour la jeune femme. Alors à quoi bon le lui confirmer ? Mais Syssoï ne s'arrêta pas là. Non. Il enchérit avec une seconde déclaration. Celle-ci surprit d'ailleurs légèrement Jackson, bien qu'il s'efforça de ne rien montrer, avec un tout petit peu plus de mal ce coup-ci. Si Gabrielle avait de l'importance pour lui ? « Personne n'a la moindre importance à mes yeux » fit-il, sans montrer la moindre émotion. Pour le coup, il était assez malhonnête. Mais ça, il s'en fichait pas mal. Finalement, Syssoï reprit. Il ne se considérait donc pas comme étant contagieux au sens propre du terme. Okay, c'était bon à savoir. Et alors que Jackson s'apprêtait à lui répondre, le grand brun poursuivit. Jackson planta son regard dans le dos de son camarade. « Voilà qui est rassurant » fit-il doucement. D'accord, il venait plus ou moins de se griller tout seul, comme un grand. Mais il mettrait ça sur le compte d'une distraction. Et probablement que la goute qu'il venait de sentir tomber sur son épaule serait tout à fait crédible dans le genre. Ouais, ou pas.

« Personne n’a la moindre importance à mes yeux. » me lance-t-il avec un effort certain pour rester impassible, ce qui est plutôt réussi, je dois bien l’avouer. Mais il compte faire croire ça à qui ? Sérieusement ? Ça marcherait peut être avec quelqu’un de nombrilisme à l’extrême, trop auto-centré sur son propre trou de balle pour penser à aller renifler celui du voisin, mais moi ? Non, avec moi, ça ne marche pas. Je n’irais pas jusqu’à dire que je vois clair dans son jeu, c’est même plutôt l’inverse, j’y vois que dalle, tout est brouiller comme Canal + sans abonnement, et justement ça m’intrigue. Et ce qui m’intrigue n’a aucune chance d’être engendré par le néant. C’est pourtant ce qu’il essaye de me faire croire avec ses réponses plates, ses airs détachés, sa pseudo-absence d’émotion. Le néant. Ce type voudrait me faire croire qu’il est vide à l’intérieur, alors que je me doute que c’est l’inverse. Il s’imagine mort en dedans, alors que je perçois quelque chose qui brûle et ravage tout sur son passage. Ce feu, loin d’anesthésier ses plaies, ne fait que les raviver immanquablement. Alors, qui espère-t-il duper avec son petit jeu de rôle ? Pas moi. Et ce n’est pas sa répartie suivante, sous-entendant qu’il se trouve rassurer du fait que je ne ferais jamais du mal intentionnellement à Gabrielle, qui va me donner tort, c’est l’inverse qui se produit. « Et si... » Ouai, je suis un fou dans ma tête, je fais me lance dans une proposition destiné à Jacko le Croquant. « Et si tu déposais le masque, juste le temps de cette conversation, et que tu me répondais avec franchise comme je le fais moi-même ? » ça peut paraître absurde comme proposition, mais j’estime que c’est réglo, sachant que je ne lui ai jamais manqué de respect en lui mentant ouvertement. Ok, sauf pour la gerbe de Gabrielle, mais ça avait été plus fort que moi, et c’était tellement peu crédible que... Bon. Je m’adosse à la pierre, scrutant les traits de mon interlocuteur, tandis que mon front se plisse. « Pourquoi est-elle si importante à tes yeux ? Je me trompe peut être, mais je ne crois pas que ce soit purement sexuel, et j’ai du mal à imaginer que tu puisses nourrir des sentiments pour elle en si peu de temps. » Un mois, c’est quoi un mois ? Un battement de cil dans toute une vie. Suffisant pour s’attacher, pas assez pour tomber amoureux. Et puis je l’imagine mal tomber amoureux de qui que ce soit. C’est le genre de mec à fuir les sentiments comme la peste bubonique.