Okay okay, Jackson venait de comprendre. Si Ruben s'intéressait à ce point à toutes ces histoires qui, pourtant, ne le regardaient absolument pas, c'était probablement parce qu'il s'emmerdait à un point tel que la vie des autres devenait synonyme de fascination pour lui. C'était soit ça, soit il était simplement idiot. Parce qu'il n'était pas sans savoir que Jackson dépréciait particulièrement qu'on se mêle de sa vie, de ce qui ne regardait que lui, comme le faisait présentement Ruben. Ça n'était pourtant pas faute de le lui avoir répété, hein. Mais non, visiblement, ça n'avait servi à rien. Car Ruben revenait toujours plus curieux, plus fouineur, et surtout plus casse-pieds. De quoi agacer Jackson, vous ne pensez pas ? Car ce dernier était effectivement agacé. Parce qu'il ne parvenait toujours pas à comprendre pourquoi Ruben se mêlait de tout ça. Et pour le moment, il parvenait même à le faire chier avec ses histoires de conseils. Comme si tout cela n'était pas assez insupportable. « Non, je n'ai pas la "prétention" d'en donner, figure-toi. Tant mieux pour vous tous, d'ailleurs » fit-il alors, une pointe d'amertume dans la voix. Il allait véritablement falloir penser à éliminer ce Ruben de malheur, décidément. Car ce dernier reprit concernant cette histoire avec Gabrielle. Une histoire qui, une nouvelle fois, ne le concernait pas le moins du monde. Et pourtant, il se permettait d'y mettre son grain de sel. Dites vous bien qu'il s'était carrément permis de séquestrer la jeune femme, afin de recueillir des informations, et tout cela en s'étant fait passé pour Jackson. Carton plein pour Ruben. Quel champion. « Nous aider ? Ce que tu es drôle » fit Jackson, suite aux paroles de son camarade. Alors comme ça, Ruben voulait les aider ? Qui l'eut cru. « Attends, c'est sérieux ? » reprit-il, un sourcil arqué. Que Ruben veuille les aider, c'était déjà étrange. Mais qu'il avance qu'il faisait partie de ceux qui souhaitaient voir Gabrielle et Jackson se tomber dans les bras, c'était encore pire que ça. On nageait clairement en plein délire, là. « T'abstenir aurait effectivement été une bonne idée » fit-il par la suite, dans un soupire. Oh oui, si seulement Ruben avait eu cette idée avant de se mêler à ce point de cette histoire. Cela aurait par exemple évité à Jackson de se mettre dans un tel état, hm. Car Jackson venait d'user d'un langage peu charmant, avant de s'être calmé pour tâcher d'en savoir plus sur la discussion que Ruben avait eu avec Gabrielle. Mais visiblement, celui-ci n'était pas tellement disposé à parler cette fois encore. « Milles excuses, dans ce cas » s'exclama Jackson, sans en penser le moindre mot. Comme si il allait s'abaisser à faire des excuses à Ruben simplement afin de récolter des informations à son tour. Ruben reprit la parole, et Jackson fronça les sourcils. « Si je n'étais pas persuadé que tu plaisantes, je crois que je t'emplafonnerais » conclut Jackson, le regard fixe et orienté vers son camarade. Qu'on se le dise, Gabrielle avait le droit de gifler mais pas d'être giflée. Sinon, ça allait chier.

J'étais loin d'être le mec le plus stable de ce nid, vraiment très loin. Après tout depuis le départ de Sonny, j'étais le seul taulard encore en jeu et je savais que cela rendait assez suspicieux certains de mes camarades. Qu'on puisse me voir comme un tueur ou comme un trafiquant de je-ne-sais-quoi, je m'en foutais pas mal. Je savais mieux que quiconque ce qui m'avait mené en taule, et personne ne réussirait à me rendre coupable de quelque chose que je n'avais jamais faite. Seulement j'essayais tant bien que mal de me montrer aussi mature que mon âge le demandait. À trente-trois ans, il était évident que je me devais de faire preuve d'une certaine maturité même si, bien souvent, cette maturité se faisait assez absente car il m'était parfois compliqué d'accepter l'âge que j'avais, et le fait que ma jeunesse était maintenant derrière moi. J'étais un grand gamin, je ne le cachais pas, mais ça ne m'empêchait pas, souvent, de jouer les médiateurs ou les donneurs de leçons et ce, malgré moi. Selon Jackson et en vue de l'ironie qu'il ne cessait d'employer dans chacune de ses phrases, je n'étais qu'un mec prétentieux qui donnait des conseils tout en déconseillant aux autres d'en donner. Lui n'en donnait pas, visiblement. Ça n'était pas plus mal, selon moi. « Oh oui, tant mieux pour nous. Les conseils, lorsqu'ils sont malvenus, c'est encore mieux qu'ils ne soient pas donnés. » Jackson avait souvent de mauvaises intentions, même si au fond il était comme nous tous pourvu d'un bon fond. Sa carapace le faisait paraitre comme ce qu'il n'était pas en réalité, et je trouvais ça dommage. Si j'étais sérieux en lui disant que j'avais voulu les aider à tomber dans les bras l'un de l'autre ? Un peu, oui. « Oui, c'est sérieux. » Aussi surprenant que cela puisse être, je ne lui voulais absolument aucun mal au Jacko, et à sa grande rousse non plus d'ailleurs. Il aurait préféré que je m'abstienne, c'était compréhensible. « T'en fais pas va, on ne m'y reprendra plus. Je veux bien aider mon prochain, mais si c'est pour être traité comme une vulgaire merde c'est pas la peine. Donc soyez certains, Gabi' et toi, qu'après ça je vous foutrai la paix. » Qu'ils s'aiment, qu'ils se détestent, je m'en foutais maintenant. Il y a avait sans doute bien assez de personnes ici rêvant de les voir s'enticher pour que je quitte la partie. Et puis Jackson me l'avait bien fait comprendre, il se serait bien passé de mon intervention dans leur petite histoire. Jackson s'excusa, enfin fis mine de s'excuser. « Quand des excuses ne sont pas sincères, on évite de les débiter, tu vois. » Il gaspillait sa salive, là, clairement. Je disais ça pour lui moi, c'est tout. J'avais par ailleurs affirmé qu'en vue des deux-trois baffes que j'avais données à Gabrielle dans la cabane en bois l'autre jour, celle-ci était parvenue à me confier pas mal de choses assez croustillantes. Jackson, visiblement très protecteur envers la rouquine, me fit comprendre que s'il n'était pas convaincu que mes paroles étaient fausses, il emplafonnerait. Ouah, j'en était touché. Et dire qu'il était près à se donner tout ce mal rien que pour moi. Je décidai d'orienter le sujet vers les fameuses confessions de Gabrielle. « N'empêche, je savais pas que pendant que tu crevais d'envie d'être avec Gabrielle, celle-ci rêvait d'un autre. Enfin j'ignorais, jusqu'à ce qu'elle me le confie, qu'un autre mec occupait toutes ses pensées. » Bien évidement, Gabrielle ne m'avait jamais confié ça. Tout était inventé. Je détestais devoir recourir au mensonge pour me faire entendre, mais je n'avais guère le choix. C'était désormais le seul moyen que j'avais trouvé pour faire réagir le blond. Et si j'étais assez bon comédien, il y avait de fortes chances qu'il tombe dans le panneau...

Comme si Jackson allait s'amuser à donner des conseils aux autres. N'importe quoi. Déjà qu'il n'était pas fichu de trouver un sens à sa propre vie, alors il n'irait certainement pas conseiller les autres au sujet de la leur. Chacun sa merde, comme on dit. Et puis, très honnêtement, qui serait tenté de suivre les conseils d'un type tel que lui ? Probablement pas grand monde. Et bien, grand bien leur fasse. « J'ignorais que tu avais l'âme d'un philosophe » fit alors Jackson, toujours plus ironique, suite aux paroles de Ruben. On se croirait retournés à la FAC, c'était désolant. Mais ce qui l'était encore plus, c'était le fait que Ruben soit visiblement sérieux. Sérieux au sujet du fait qu'il voulait voir Gabrielle et Jackson se tomber dans les bras. Bon sang, ça foutait presque la trouille. Même Jackson n'avait pas ce genre de bêtises en tête. Bon, peut être que si en fait, mais ça n'était clairement pas la même chose. Parce qu'à moins que Ruben soit tombé éperdument amoureux de l'un ou l'autre et qu'il cherche à cacher cette passion à travers des manifestations particulièrement hypocrites, il y avait peu de chance que toute cette histoire le concerne. Alors, pourquoi se permettait-il encore de revenir là dessus ? A croire qu'il voulait tenter le diable. Dommage pour lui, celui-ci était blond aujourd'hui, et loin d'être commode. Jackson poussa alors un lourd soupire - qui fut probablement audible à l'autre bout du château - puis laissa apparaitre un faux sourire sur ses lèvres, lorsque son camarade lui affirma que Gabrielle et lui auraient bientôt la paix. « Pour de vrai ? Oh, je n'y croyais plus » reprit alors le grand blond, tout en exagération. Devait-il pleurer de joie ? Ou pleurer ton court, tant tout cela commençait à l'agacer ? Cette histoire avec Gabrielle, le fait que certains trouvent le moyen de s'en mêler. Ouais, très honnêtement, ça l'agaçait. Remarquer, ça n'était pas comme si cela lui arrivait rarement, hein. Ruben reprit ensuite la parole et Jackson leva les yeux au ciel. « Dans ce cas, excuse-moi de m'être excusé sans en avoir pensé le moindre mot, ce qui par ailleurs est toujours le cas » fit-il, tout à fait neutre. En gros, que Ruben aille se faire foutre, c'était bien mieux. Oh oui, qu'il y aille, ou en tout cas, qu'il disparaisse. Car Jackson serait bientôt tenté de laisser parler l'agressivité qu'il refoulait depuis déjà quelques minutes. Et les nouvelles paroles du grand brun ne lui permirent pas tellement de se calmer. « Un autre mec occupe ses pensées, tu dis ? » lança alors Jackson, un sourcil arqué. Blaguait-il ? Blaguait-il pas ? Le mystère restait entier.

Comme tout le monde, il m'arrivait de temps à autres de mentir dans le seul but de faire réagir quelqu'un. Là en l'occurrence, j'avais sous-entendu que Gabrielle s'était confiée à moi, ce qui n'était pas franchement le cas, m'affirmant alors qu'un autre mec que Jackson occupait ses pensées. Honnêtement c'était en fin de compte tout le contraire à mes yeux. Selon moi la belle rousse n'avait d'yeux que pour le grand blond, mais je doutais que Jackson en soit réellement conscient. Il y avait de l'amour dans l'air entre ses deux là, qu'ils acceptent de le reconnaitre ou non. Pour le moment notre discussion restait axée sur les fameux conseils que Jackson disait n'avoir pas la prétention de donner. À cela je lui avais répondu que ça n'était pas plus mal, car des conseils n'étaient pas franchement bons à prendre d'une personne malveillante. Il rétorqua que j'avais l'âme d'un philosophe. Mouais, d'accord. Je ne voyais pas trop le rapport avec notre présente discussion, mais après tout pourquoi pas... « L'âme d'un philosophe, sans blague ? Je sais pas trop comment le prendre à vrai dire. » Que devais-je en déduire ? Que mes belles paroles le charmaient, ou au contraire que j'étais plus barbant qu'autre chose ? Peu importe, je préférais encore ne pas le savoir. Par ailleurs j'avais affirmé au grand blond ne plus avoir ni l'envie ni l'intention de me mêler de ses histoires de cœur. Cela sembla le soulager quelque peu. Il semblait d'ailleurs avoir un peu du mal à le croire, si bien que je dus le lui confirmer. « Oui, pour de vrai. » C'était dit, à partir d'aujourd'hui ou plutôt à partir de la fin de notre discussion, j'arrêterais pour de bon de fourrer mon nez dans son histoire avec Gabrielle. Une histoire qui premièrement ne me regardait pas, et qui deuxièmement commençait à m'agacer plus qu'autre chose, tant je n'y comprenais rien et tant j'avais l'impression que Jackson se foutait de la gueule de la belle rousse. Jackson cru ensuite bon de s'excuser pour le fait de s'être excusé sans en penser le moindre mot. Gné ? Il était probablement encore en train de mentir, là tout de suite, alors autant ne rien dire, non ? « Garde tes "excuses" Jacko. » Si s'en étaient, ce dont je doutais plus qu'autre chose. On en revenait enfin à mon fameux mensonge concernant cette fameuse confession que Gabrielle était censée m'avoir faite l'autre jour, concernant un mystérieux inconnu qui occuperait ses pensées et qui ne serait pas Jacko. Ceci me permis de découvrir quelque chose concernant le blond, justement : il était incroyablement naïf, en fin de compte. Le but était avant tout de le faire réagir, et mon objectif était atteint, rien qu'à en juger la mine déconfite qu'il avait prise à la suite de mes aveux. « Oui, un autre mec, tu sais un... MAIS BON SANG RÉVEILLE-TOI JACKO ! » Je dus hausser le ton histoire de lui faire ouvrir les yeux une bonne fois pour toute. « Tu crois sérieusement que Gabrielle pense à un autre, là ? Bah non, y'a que toi qui occupe ses pensées et ça, on dirait que t'arrive pas à le reconnaitre. » Jackson pouvait toujours tenter de faire diversion, ça ne marcherait pas. Il s'était trahi lui-même et ses sentiments pour la rouquine étaient désormais plus perceptibles que jamais. « Donc le mieux que t'aies encore à faire c'est d'arrêter de jouer au con, du genre batifolages à-tout-va et compagnie. Cette fille là en vaut la peine, et je pense qu'on sera plusieurs à te casser les dents si tu viens à la faire souffrir. Voilà. Des questions ? » Ma foi je lui avais dit ce que j'avais à lui dire, et j'en étais presque soulagé. C'était ici que mon intervention prenait fin. Je fis un pas vers lui, avant de poser ma main sur son épaule. « Et ceci n'était pas un conseil. Prends-le plutôt comme un avertissement. » Je reprenais la méthode de Syssoi, qui quelques semaines auparavant avait lui-même posé sa main sur mon épaule tout en m'avertissant au sujet de Moore. Et bien je faisais pareil, je mettais quelque peu en garde Jackson concernant Gabrielle. Mes conseils, je pouvais me les garder. Un petit avertissement, en revanche, n'était selon moi pas de trop. Et qu'il ne croit pas là que j'avais une dent contre lui ou quoi que ce soit. Rien que le fait que j'ai posé ma main sur son épaule devrait lui faire comprendre que ce que je voulais, avant tout, c'était qu'il se montre enfin tel qu'il était réellement, c'est-à-dire un mec de vingt-cinq piges responsable, et digne de confiance.

Dire que Ruben avait l'âme d'un philosophe, c'était un peu comme comparer Jackson à un Saint. Vous voyez le genre. Pour autant, quelques fois, l'ironie du grand blond était si dissimulée qu'on serait en droit de se demander si, tout compte fait, il n'était pas sincère. Ici, pour le coup, il ne l'était pas. Mais dans d'autres situations, il était effectivement possible que cela porte à confusion. Quoi qu'il en soit, la répartie moisie du grand singe ne faisait pas de lui un philosophe. Loin de là. « Prend-le comme tu veux, pour ce que j'en ai à foutre ... » Chassez le naturel, il revient au galop. Par la suite, Ruben insinua qu'il ne tarderait pas à laisser Gabrielle et Jackson tranquilles. C'était clairement la meilleure nouvelle de la journée. C'était même presque trop beau pour être vrai, dites donc. Voilà pourquoi Jackson chercha à savoir si Ruben disait vrai. Et visiblement, oui. Parfait, dans ce cas. Voilà qui lui donnerait moins d'envies de meurtres d'ici les prochains jours, ce qui n'était pas nécessairement un mal. Et puis, Jackson aurait également moins de problèmes sur le dos, ce qui ne pouvait être qu'une bonne chose également. Ainsi donc, cette sage décision était la bienvenue. « Chouette » fit alors Jackson, dans un sourire hypocrite. Certes, c'était bel et bien une bonne nouvelle que d'entendre Ruben dire qu'il cesserait de se mêler de cette histoire. Pour autant, Jackson ne comptait pas l'en remercier à genoux. Après tout, c'était quand même la moindre des choses que Ruben se mêle de son cul, hein. Les excuses de Jackson, ou plutôt ce qui était censé en être, sonnaient particulièrement faux. Et pour cause, il n'en pensait pas le moindre mot. Il aurait bien aimé, mais c'était impossible. Quel dommage. Quelques instants plus tard, Ruben crut bon d'évoquer sa discussion avec Gabrielle - bon d'accord, Jackson le lui avait demandé, mais tout de même - et notamment une certaine confession que la jolie rousse lui aurait faite. Un autre homme occupait donc ses pensées ? Sans blague. Jackson tomba dans le panneau. Bah oui, il était blond. Logique. Et là, Ruben haussa le ton, si bien qu'il sursauta presque. Le grand singe se lança alors dans un discours enflammé, censé convaincre Jackson des "sentiments" que Gabrielle avait prétendument à son égard. « T'es plutôt mal renseigné » fit-il alors, l'air de rien. Parce que cette histoire d'autre mec, là, c'était pas si bidon que ça, d'après lui. D'ailleurs, c'était peut être même pour ça qu'il avait marché, au début. Hm. Ruben reprit la parole, et le moins que l'on puisse dire, c'est qu'il allait un peu loin. « De jouer au con ? Mais je ne joue pas, tu sais bien » répondit-il, dans un haussement d'épaules et sur un ton tout à fait neutre. Qu'on se le dise, l'avis de Ruben ne l'intéressait pas. Il ne prit même pas la peine de l'envoyer chier, d'ailleurs. Sans doute qu'une partie de lui se doutait que cela partait d'une bonne intention, mine de rien. « Tu crois que je ne sais pas que Gabrielle en vaut la peine ? » reprit-il finalement. « Et la raison pour laquelle je tâcherai de ne pas la faire souffrir, ce n'est pas que je crains de me faire "casser les dents", comme tu dis, mais que je crains de le perdre » avoua-t-il ensuite. Jackson se connaissait suffisamment pour savoir qu'il faisait souffrir au moins autant qu'il avait souffert par le passé. Pour autant, il préférait croire qu'il pourrait changer pour Gabrielle. Oui, Jackson était parfois un brin rêveur. Soudain, Ruben posa sa main sur son épaule. Gloups. Voilà un contact surprenant. « Okay, okay. Mais sois gentil, retire ta main » fit Jackson. Parce qu'il pouvait très bien l'avertir sans pour autant foutre sa main sur son épaule, hein.

J'avais fini par comprendre que Jackson n'avait pas été bien heureux dans le passé. C'était en tout cas ce que j'en avais retenu de notre petite discussion dans la cuisine, l'autre jour, alors que nous échangions des indices sur nos secrets respectifs. Il fallait avouer que dans le genre passé tragique ou sombre, je me posais là moi aussi. Entre la taule, les problèmes familieux, mes problèmes de santé... la vie avait été une sacrée chienne avec moi tout de même. Aujourd'hui la plupart de mes problèmes se voulaient résolus, mais certaines choses ne pouvaient être oubliées. Mon secret, par exemple, mais celui-ci n'avait rien à voir avec notre présente discussion. J'avais tout fait pour faire ouvrir les yeux à Jackson sur sa relation avec Gabrielle, sur les sentiments de celle-ci également. C'était désolant d'avoir dû aller jusqu'au mensonge pour le faire réagir, d'ailleurs. Ah il ne jouait pas au con ? Qu'on m'explique alors, car il me semblait qu'il avait tout de même collectionné les actes aussi débiles qu'immatures depuis le début de l'aventure, et par là je pensais à ses baiseries, entre autres. Bref, pour moi Jackson se comportait souvent comme un con, et il le savait. « Ah oui, tu es né con, j'oubliais. » S'il ne jouait pas au con, alors il l'était naturellement, je ne voyais que ça. Mais là n'était pas la question, puisque celle-ci résidait dans le fait que Jackson soit apte, ou non, à faire souffrir Gabrielle avec un tel comportement. Il n'avait pas le choix, il devait prendre son courage à deux mains et virer ce côté gamin qui persistait en lui depuis sans doute son adolescence. Et vite. Il se disait prêt à changer pour les beaux yeux de Gabrielle, car il prenait conscience qu'elle en valait la peine. C'était une bonne chose. Par ailleurs il affirma ne pas craindre mon avertissement. Il n'avait de toute manière pas à avoir peur, loin de moi l'envie d'amocher sa grosse tête de blond. Il avait en fin de compte peur de la perdre. Tiens, on dirait moi avec Moore. « C'est tout en ton honneur d'abord d'en prendre conscience, ensuite de vouloir faire cet effort pour elle. » Je préferais le Jackson responsable, raisonnable et apte à se montrer mâture plutôt que le Jackson crétin, immature et prétentieux. Ma main sur son épaule semblait le gêner, ou le révulser, plus qu'autre chose. « D'accord, je l'enlève. » Je retirai donc ma main. Puis je pris la direction de la sortie, pensant en avoir fini avec lui. Il avait ouvert les yeux, pour moi c'était le principal et selon moi Gabrielle était entre de bonnes mains si, bien sur, il arrêtait pour de bon de batiffoller à-tout-va. Pour elle, il en était capable non ? Avant de sortir, je me retournai une dernière fois vers lui. « Bien. Sur ce, je te laisse Jacko. Quant au petit mot, là, je te laisse le choix de le foutre à la poubelle ou de l'encadrer. » Mouais, il y avait de fortes chances que ce bout de papier termine au fond de la poubelle dans peu de temps. Peu importe. Cette discussion n'avait pas été inutile à mes yeux. Il pouvait bien faire ce qu'il voulait de l'objet du délit. Cela ne me concernait désormais plus. Je quittai la pièce serein, ravi au passage d'être parvenu à ranger le cellier comme je le souhaitais... et d'avoir pu parler avec Jackson, oui, bien sur.

Sujet terminé pour Ruben.