Il ne sait pas pourquoi ses pas l’ont guidé jusqu’ici. Probablement par ennui, comme ils le font régulièrement depuis qu’il est ici. Ou peut-être l’attrait de la roulette. C’est sûrement ça, il n’y a pas d’autres explications puisqu’il ne compte pas poster sur sa page personnelle – après trois semaines, il ne s’est pas encore découvert une passion pour twitter – ni espionner ses petits camarades. Quoi que, cette option pourrait s’avérer plus utile si on passe outre un certain voyeurisme, pour capter les conversations intéressantes de ses camarades. Mais comme ce n’est pas son truc d’espionner, de chercher des pistes de cette façon, il s’en passera. Il garde tout de même l’idée en tête si un jour une de ses pistes a besoin d’être confirmée, mais pour l’instant, il s’en passera. Il constate qu’il n’est pas le seul à avoir eu l’idée de venir ici, puisqu’à peine a-t-il poussé la porte qu’une candidate lui jette un coup d’œil avant de se concentrer à nouveau sur les écrans et de s’adresser à lui. « Le zoo de microbes ? » Il répète, sceptique. Il ne croit pas avoir vécu dans une grotte mais pourtant, ce terme ne lui dit absolument rien. Ou peut-être que c’est une métaphore pour désigner les candidats, mais ce serait un peu poussé à l’extrême, non ? Et puis, ce n’est pas à lui de réfléchir à ça, elle n’a qu’à l’aiguiller pour qu’il comprenne le fond de sa pensée. Il en a marre d’essayer de comprendre les candidats qui semblent venir d’une autre planète, c’est fatiguant et pas du tout son truc, donc il s’en passera. Elle l’invite à s’installer, mais il n’a pas besoin de sa permission pour prendre place à ses côtés, déplaçant tout de même sa chaise pour ne pas être trop près d’elle. Outre le fait qu’il n’aime pas être proche des gens, c’est elle qui parle de microbes aussi, elle ne lui inspire pas spécialement confiance. Il plante son regard sur les divers ordinateurs sans pour autant les toucher et les utiliser. Il n’a jamais posté sur son twitter parce qu’il déteste cordialement les nouvelles technologies et ces caméras ne font pas exception à la règle. Il n’est pas à l’aise avec le fait d’être filmé, il l’avait presque oublié à force, mais cette visite lui renvoie la vérité en pleine face. Alors il tourne la tête vers sa camarade, quitte à planter son regard quelque part, il préfère affronter celui de sa camarade que le poser sur les images de surveillance. « Ana, c’est ça ? » Ou la bipolaire du prime, mais il se passera de ce surnom peu flatteur, il n’a pas envie d’assister à une seconde crise de sa part et surtout, de la gérer. Il a rien demandé.

Il faut qu’elle l’éclaire, parce que le terme zoo de microbes ne lui dit absolument rien. Enfin, à moins que ce soit une comparaison foireuse pour désigner les autres candidats, chose qui serait originale bien que très certainement moyennement appréciée par les candidats en question. Lui ne s’en vexerait pas, parce qu’il n’est pas du genre à se vexer pour une si petite chose. Sauf qu’elle se décide à lui donner des explications et ce n’est en aucun cas une comparaison foireuse. Mais un véritable zoo. Un truc à Amsterdam, interactif. Les explications le laissent tout de même perplexe. « C’est une blague ? » C’est la première chose qui sort de sa bouche. Non, non, ce n’est pas une blague, elle n’a pas l’air du genre à plaisanter sur ce sujet, elle a l’air complètement à fond. Mais il ne comprend pas quel est l’intérêt d’un musée consacré aux microbes et encore moins de savoir combien de ceux-ci vivent sur nous-même. « Et ça intéresse vraiment des gens ? » Elle, visiblement, c’est certain. Ce n’est pas qu’il ne veut pas faire d’efforts, mais il a beau réfléchir, il ne voit pas l’intérêt d’un tel musée et surtout d’avoir dépensé une somme d’argent certainement astronomique pour quelque chose ainsi. Il finit par changer de sujet en lui demandant de façon détournée de l’éclairer sur son identité. C’est bel et bien Ana. Lui n’a pas besoin de faire les présentations puisqu’elle a retenu son prénom – et non son surnom, amen. Elle ajoute ensuite que ce n’était pas une insulte, que c’est un fait scientifique. « Je ne l’ai pas pris comme tel. » Comme une insulte. Bien même s’il pensait qu’il s’agissait d’une comparaison foireuse, ce n’est pas pour autant qu’il a interprété cela comme une insulte, il y a une part de vrai dans ses propos, les êtres humains sont des nids à microbes. Il est quelque peu mal à l’aise quand elle le détaille un court instant, avant qu’elle décide finalement de reporter son attention sur les écrans. Lui préfère reporter la sienne sur la pièce, il n’aime pas cette idée d’être un voyeur, même par ennui.

Il a un peu de peine à comprendre l’intérêt d’un tel musée, les microbes ne sont pas, à ses yeux, le sujet le plus important du monde, ainsi de là à en faire un zoo entièrement consacré à ce sujet… Oui, ça le dépasse un peu. Il ne manque d’ailleurs pas de le faire comprendre à sa camarade, avec un manque flagrant de délicatesse, mais ça n’est pas son truc de prendre des pincettes. Ce n’est donc pas une blague, c’est tout à fait sérieux. Sauf que cette fois elle lui parle du fonctionnement du corps et de l’organisme. Il fallait évoquer ces deux points dès le départ. « Vu ainsi. » Ce n’est pas pour autant qu’il ferait le voyage jusqu’à Amsterdam pour découvrir ce fameux musée, mais si le sujet touche un domaine un peu plus large que les simples microbes, ça peut éventuellement être intéressant. Enfin, lui, la science n’est pas son truc, raison pour laquelle il a beaucoup moins d’entrain que sa camarade à ce sujet. La déclaration qu’elle lui fait par la suite a le don de légèrement l’étonner. « Ma réputation me précède. » Il déclare simplement, avec une légère pointe d’ironie. Pour une fois qu’on ne le compare pas avec un suicidaire, il est plutôt à l’aise avec cette réputation-là. « Je t’en prie. » Il déclare en se tournant légèrement afin de distinguer les traits de la candidate. Si elle veut lui poser quelques questions, il n’y voit pas d’inconvénient. Rares sont ceux s’intéressant à lui, et bien qu’il ne soit pas à l’aise avec ce soudain intérêt sur sa personne, il ne voit aucune raison de refuser. D’autant plus qu’elle est capable de passer outre les bruits de couloirs pour se forger sa propre opinion, ça n’est pas donné à tous.