«Qui est mort ?» me demande-t-il soudainement. J'écarquille les yeux. Dans le genre question sans aucun tact on fait pas mieux. Je souris légèrement. « Personne, enfin y a bien eu un poisson rouge ou deux, quelques hamster cochon dinde et compagnie. » Je sais très bien que e n'est pas sa question je m'empresse d'ajouter. « Si tu parles de mort au sens propre alors personne. Sinon je dirais mon père. Il est en quelque sorte mort à mes yeux bien qu'il fasse toujours parti des vivants aux dernière nouvelles. » Sans le vouloir ou peu être que si je le veux je l'oriente vers la véritable direction qu'il doit emprunter.

Je suis déjà au courant pour son père, je l’ai su à la seconde où elle a évoqué son besoin d’exister à ses yeux, et cette culpabilité qui l’avait fait fuir, la laissant seule avec sa mère. A l’origine j’avais pensé que son père pouvait être à l’origine de l’accident de voiture responsable de son traumatisme crânien, mais ça me semble trop simpliste comme explication. Il y aurait de quoi se considérer comme miraculée, en effet, mais pas au point d’insister dessus comme elle l’a fait. «Ton père n’est pas mort à tes yeux, mais tu penses être morte aux siens. Alors que... Je pense, c’est lui qui s’estime mort à ses propres yeux. Tu ne crois pas ?» Ok, ça n’a rien à voir avec la recherche de son secret, c’est typiquement le genre de truc de psychologues à la con que je ne peux m’empêcher de sortir. Même moi, je m’agace. «Où était-il, lors de l’accident ?» Bah quoi ? Je tente.

 «Ton père n’est pas mort à tes yeux, mais tu penses être morte aux siens. Alors que... Je pense, c’est lui qui s’estime mort à ses propres yeux. Tu ne crois pas ?» C'est juste. J'aimerais qu'il le soit. Syssoï et sa psychologie je ne fais pas de commentaire sur la première partie de sa phrase je n'en vois pas l’intérêt. La seconde par contre éveille une réflexion chez moi. « Je ne pense pas qu'il se sent suffisamment coupable pour ça. » dis-je simplement. Cet homme est... un lâche que j'aimerais détester de toute mon âme mais malgré tout il ne fait que me manqué un peu plus chaque jour. Je sort de mes pensées à l’énoncé d'une nouvelle question. «Où était-il, lors de l’accident ?»  Cette question eu pour effet de me provoquer un espèce de flashback. Où était-il ? « Il conduisait. » dis-je simplement pas un mot de plus. Cette confrontation devient plus pénible que ce que je pensais. L'angoisse, le mal aise s'empare de moi comme les tremblements s'emparent de mes deux mains cette fois-ci. Je quitte son regard pour me concentré sur un point futile de la pièce.

Qu’est-ce que je peux répondre à ça ? Je ne pense pas que ce soit mon rôle de la réconcilier avec son père, ni même avec l’image du père qu’elle cherche partout, y compris chez ses amants... J’aimerais qu’elle se soigne de ça, mais je ne peux pas l’aider dans tous les domaines, je ne suis même pas sûr de parvenir à l’aider dans un seul domaine. Pourtant, Dieu sait que j’aimerais. Je ferme les yeux, je soupire, ma dernière question me fait mal aux lèvres rien que de les franchir, mais elle m’a demandé de jouer le jeu. J’observe mes pieds en attendant sa réponse... Elle arrive, provoquant la réaction attendue. Est-ce à dire que j’avais raison depuis le début ? Quel pourrait être l’intitulé exact de ce secret ? « Ton père a provoqué l’accident de voiture qui a failli te coûter la vie ? » C’est tout ? «Ou bien... ‘mon père a faillit me tuer’...» Ça ne me semble pas assez précis. J’aimerais ajouter autre chose, mais, en relevant la tête, je ne peux que constater l’état dans lequel je viens de la plonger, moi ou le souvenir. En une fraction de seconde je suis à ses côtés, agenouillé devant elle, les mains en étau autour des siennes. «Je pense que ça suffit !» Je gueule à la caméra comme si elle était la responsable. « Excuse-moi, Dochka... Excuse-moi...» J’aimerais pouvoir retirer tout ce que je viens de dire. A quoi bon trouver son secret si c’est pour la plonger dans cet état ?

« Ton père a provoqué l’accident de voiture qui a failli te coûter la vie ? » Oui c'est ça j'hausse la tête légèrement. «Ou bien... ‘mon père a faillit me tuer’...»  Je comprend qu'il essaye d'inclure mon père dans l'intituler de mon secret. J'hausse négativement la tête. Avant qu'il n'arrive à ma porté si rapidement que j'en fut surprise. Il enserre mes mains comme il le fait si souvent maintenant et se confond en plate excuse. Je secoue de nouveau ma tête à la négative. « Ne t'excuse pas tu n'as rien fais de mal » dis-je plongeant mes prunelles dans les siennes. Je savais à quoi je m'exposais en entrant dans ce jeu, je savais que ce genre de scénario pouvait se déroulé à l'intérieur de ces murs. Qu'il ne s'excuse pas. « Mon père à bien provoqué l'accident de voiture. Mais ce n'est pas l'intitulé de mon secret. » dis-je calmement pour lui faire comprendre que mon père n'avait rien à voir avec mon intitulé bien qu'il était étroitement lié au secret. « J'ai survécu mais.. à l'époque j'aurais préféré... » Non je ne peux pas dire ça. Je ne le dis pas. « N'essaye pas de me préserver, je vais m'en remettre. Ce ne sont que de mauvais souvenirs. » dis-je arquant un sourire sur mon visage. Je récupère ma main gauche et vient la déposer sur sa joue en une caresse. Je suis prête à entendre une nouvelle question si lui l'est.

Elle est forte, plus forte que je ne l’imagine, elle m’épate à chaque fois. Je m’en veux de ma réaction, je ne veux pas qu’elle la juge excessive ou engendrée par un élan de pitié, ce n’est absolument pas le cas. Je ne peux juste pas supporter d’être le déclencheur de ses tremblements. Bien sûr je ne suis pas le responsable, mais c’est moi, en ce moment, qui joue avec le bouton «on/off». J’en peux plus de faire souffrir les gens auxquels je tiens. J’en peux juste plus. Elle veut poursuivre, j’ai l’impression qu’elle en a besoin... J’hésite. Je ne suis plus sûr d’en avoir envie, moi. Pourtant je tente... «La moelle épinière...» Le système nerveux central se trouve dans le cerveau et dans la moelle épinière cervicale... «Oh oh oh, to touch and feel various girls vaginas and hymens.» Cette phrase mnémotechnique me revient comme un coup de fouet en pleine tronche... Les 12 paires de nerfs périphériques, incluant ceux de la motricité. «Tu es restée paralysée ?» Je reste à ses pieds. C’est là que je me sens le plus à ma place.

«La moelle épinière...» Je retire ma main de sa joue. Je lui souris péniblement mais je lui souris. «Oh oh oh, to touch and feel various girls vaginas and hymens.» Je n'ai pas compris, je ris légèrement. Ce n'est pas important. «Tu es restée paralysée ?» Je souris de plus belle. J'ai conscience de ne pas répondre à ses questions. « Je pense qu'on en a terminé avec les questions. » Ma réponse ne répond pas à sa question directement et pourtant elle en dit tellement. Je lui souris. J'ai la gorge serré. Je n'aime pas parlé de ça. Je préfère éludée la question sans y répondre réellement. Je pensais que j'aurais pu faire preuve de plus de franchise lorsqu'on arriverait à ce point mais au fond je ne peux pas. Je reste la petite fille terrifié que j'étais. Effrayé qu'à cette simple évocation les choses redeviennent comme elle étaient aussi rapidement qu'elles se sont améliorées. Alors si j'avais répondus à sa question sincèrement je lui aurait dis oui, oui j'ai été paralysé et pas qu'un peu. Et maintenant je me tiens debout, alors que personne ne croyais que je sortirais un jour de cette chaise roulante. Sa présence facilite les choses, mais cela reste un moment très difficile et le pire n'est pas encore passé. Je m'imagine déjà durant le révélation. Syssoï me connaît tel que je suis en réalité les autres ne voit en moi qu'une garce superficielle. Je ne veux pas parler de ça avec ce genre de personne, mais j'ai signé pour ça. «Alors quel est ton intitulé? » dis-je dans un sourire difficile.

J’ai juste envie de rester ici pour toujours. De barricader la porte pour empêcher toutes intrusions, toutes choses possiblement néfastes aptes à l’affliger plus encore. J’ai pas envie de tout ça, j’ai pas envie de cracher son secret à la face du monde, à la face de ces connards qui n’auront pas mérité toutes ces informations sur elle. Mais j’ai aussi envie d’une chose primordiale à mes yeux : je veux qu’elle puisse m’en parler. Et je sais que ce ne sera pas possible tant que son secret n’aura pas explosé. Il y a des règles et on se doit de les respecter. On a signé pour ça aussi. «Tu es sûre de toi ?» Evidemment qu’elle l’est, mais je veux l’entendre de sa bouche, je ne veux plus me contenter de la détermination de son regard... J’inspire. J’expire. Para ? Tétra ? A quel point l’intitulé doit-il être précis ? Suis-je trop perfectionniste ? Sûrement. Une dernière information me revient. La paraplégie est due à une lésion de la moelle épinière au niveau dorso-lombaire, ce qui ne peut résulter d’un trauma crânien, alors que la tétraplégie... Je relève les yeux vers elle, expire une dernière fois puis me lance. «Je pense que l’intitulé de ton secret est : ‘j’ai été tétraplégique’.» Suis-je l’enfer de son paradis, ou le paradis de son enfer ?

«Tu es sûre de toi ?» Bien sûr. J'aimerais rester là avec lui mais en même temps j'ai qu'une envie aller me cacher dans un trou loin de tout le monde jusqu'au jour de la révélation. Je ne sais pas si j'arriverais à supporter le regard des gens. « Certaine. » Puis je lui demande de m'énoncer le secret qu'il à découvert à mon sujet son intitulé complet. «Je pense que l’intitulé de ton secret est : ‘j’ai été tétraplégique’.»Je ne dis rien. Il a raison sur le terme médicale mais ce n'est pas important. « Tu oublie que je suis une miraculée. » dis dans un sourire. Cette partie de moi à une grande place dans mon secret j'ai assez insisté dessus je pense. « Je crois que tu as tout ce qu'il faut pour valider ton buzz. Tu n'as plus besoin de moi. » dis-je me préparant déjà me levé, le coeur serré. Je veux oublier.

Miraculée... Je lève les yeux au ciel malgré moi. Il fait 8 kilomètres de long son secret ? Peut être aussi, de part ce geste, je tente de lui arracher un sourire. N’est-ce pas sous-entendu dans le terme tétraplégique qu’il faudrait un miracle pour sortir de ce fauteuil. A moins qu’elle n’évoque le fait qu’elle ait faillit mourir. «Ok, ok, alors que penses-tu de : ‘j’ai frôlé la mort et me suis réveillée tétraplégique. Je suis une miraculée. Et en plus, je suis sexy à damner un saint.’ ?» Serait-ce un sourire ? «Bon, ok, je retire la dernière partie... Mais je la pense.» Elle s’apprête à se lever, mais je ne veux pas qu’elle parte, pas encore. Je me redresse, la relève, et l’attire contre moi. Je ne suis pas quelqu’un de très tactile, j’ai du mal avec les contacts physiques qui, pour moi, représente beaucoup à chaque fois. J’espère qu’elle en a conscience, et j’espère aussi qu’elle a conscience que je ne fais pas ça pour elle, mais pour moi. C’est moi qui ai besoin de son contact physique en cet instant. Plus que n’importe quoi d’autre. «Tu peux encore garder ton secret, Dochka... Personne ne le trouvera.»