Le coin détente ne portait finalement pas si bien son nom après une telle annonce. Il y avait soixante cadeaux, ils étaient donc soixante encore en course. Alix venait d'annoncer qu'il n'y aurait que vingt-cinq candidats sélectionnés. Ghika se demanda comment ils allaient créer des couples s'il y avait un nombre impair de candidats, mais ce n'était pas le plus important. Ils étaient soixante, ils seraient vingt-cinq, c'était plus de cinquante pour cent d'éliminer. Les statistiques n'étaient pas vraiment en sa faveur, ni en la faveur de personne. Il semblait y avoir quand même pas mal de filles, avec un peu de chance les garçons les plus proches de lui se seraient considérablement vautrés pendant les entretiens, laissant plus de place à Ghika de réussir à décrocher une place.

Alors qu'il inspectait du regard les différents paquets, il se demanda lequel il choisirait, certains avaient un numéro qui avait une signification particulière pour lui, mais faire confiance à un chiffre n'était pas très rationnel. Les nombres n'avaient pas de volonté, ceux qui les avaient attribués en revanche étaient doués de raisons et peut-être qu'un peu de réflexion sur ce qu'il savait des anciens candidats pouvait lui être utile. De toute façon, le principe d'une tombola ne résidait-il pas dans le caractère aléatoire du choix du gain ? Ce n'était pas vraiment du goût de Ghika que de laisser son destin, parce que c'était bien ça qui était en jeu rien de moins que son destin, entre les mains d'un hasard qui ne lui avait qu'assez peu souri. Il n'était en effet pas le genre de personne qui avait la baraka. Mais après tout, il était parmi les soixante derniers pré-sélectionnés alors peut-être que cette fois-ci il aurait de la chance... « Je crois que ça sert à rien de réfléchir, le hasard ça ne se contrôle pas, même avec des arguments en béton... mais je vais quand même laisser passer deux ou trois personnes pour voir s'ils ont de la chance ou pas, on sait jamais, s'ils ont pas de veine ça veut dire que moi j'ai plus de chance d'en avoir. » murmurait déjà Ghika à son voisin. Un voisin dont il ignorait le prénom et qui le regardait avec un petit air amusé.

Voyant des candidats potentiels tirer des numéros, Ghika se décida à s'avancer vers ce qu'il restait de cadeaux et d'en choisir un, sans réfléchir,  les yeux mi-clos, comme lorsqu'il regardait un film d'horreur et fermait les yeux sans vraiment les fermer pour voir sans regarder. Ses mains décidèrent sans prévenir d'attraper un paquet, d'une taille plutôt normale. D'un œil seulement il regarda le numéro du paquet. Apparemment le faire d'un œil n'était pas suffisant, et il dût se résoudre à ouvrir son second globe oculaire. « 23. » Vingt-trois, deux et trois, un nombre premier, deux fois onze et demi, quatre fois cinq virgule soixante-quinze. Si le nombre sur son paquet ne lui déplaisait pas, -bien qu'après mûre réflexion la valeur sentimentale que l'on attachait à un nombre était totalement irrationnelle- ce qu'il contenait pouvait être une bombe à retardement. Ghika n'avait plus qu'à espérer que le sort ne s'acharnerait pas contre lui. Ce serait bien une première ça !

Pour animer notre longue, très longue, journée de casting la production nous avait promis des activités. Voilà que la première venait d'être annoncée, une tombola... Tout ce qu'il y avait de plus banal... Il nous suffisait de tirer un numéro entre 1 et 60 puis attendre pour avoir notre lot. J'apercevais devant moi le mec du balcon qui semblait en grande discussion avec un autre prétendant cela juste avant de tirer le numéro 23. Je prenais sa suite piochant au hasard un numéro que je criais :

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Je n'avais pas de véritable coup de cœur pour ce nombre... De tout manière j'avais laissé faire le hasard. J'étais maintenant assez curieux de découvrir ce que serait ma récompense et comment celle-ci influencerait-elle mon aventure... Dans la mesure où je serais sélectionné bien sûr.

Alors que je venais de finir mon casting, un des jury m'avait conduit dans une salle remplie de postulants. Il m'avait présenté cette salle comme un coin détente. A moins que je sois devenu mal voyante entre la salle de casting et ici, jamais j'aurai pensé que cette salle serve à se détendre. C'était le bordel, on était entassé dans 20 mètres carrés, c'était à peine si il y avait une fenêtre, bref. J'avais besoin d'espace moi. Je fis donc une moue, m'asseyant près d'un autre candidat plutôt atypique puisqu'il était entièrement tatoué. J'avoue que je ne pouvais m’empêcher de les distinguer un peu. Je croisais donc les jambes, me passant une main dans les cheveux, attendant l'activité qu'on nous avait promis. Je commençais à taper mes ongles frénétiquement sur mon genoux. J'avoue que je n’emmerdais grave. Heureusement, un gars de la production je suppose, nous proposa une petite tombola. Quoi ? J'étais venue pour une tombola ? Ils sont sérieux. Moi qui m'attendait à quelque chose de plus folklorique. Je soupire donc un peu, me prenant quand même au jeu. Je pris donc la suite d'un type plutôt mignon et du mec qui était à coté de moi. Je me lève donc, faisant claquer mes talons pour aller piocher un numéro. «7.» dis-je clairement. C'était un numéro que j'affectionnais car c'était celui de ma date de naissance. J'allais donc prendre le paquet correspondant au numéro, ne l'ouvrant pas tout de suite. J'allais ensuite me rassoir avec le paquet.

Tu parles d'un coin détente, une pièce n'avait jamais aussi mal porté son nom dans toute l'histoire de l'humanité. Une pièce digne d'une chambre en hôpital psychiatrique où des dizaines de candidats s'entassent en attendant je ne sais trop quoi, le dégel sûrement. Je fais parti de ces gens là. A vrai dire je n'avais pas vraiment d'autres choix que de me trouver dans ce coin « détente », après mon entretien le jury m'avait conduit ici pour je ne sais quelle animation. Les derniers candidats pénétraient dans la pièce, nous allions bientôt être au complet. Voici donc la première animation que la production nous avait si longtemps promis, j'ose espérer que ça vaut le coup histoire que je ne sois pas en train de me liquéfier pour rien. Je parcours la salle du regard, quelle belle assemblé nous formons ! Mon regard croise celui d'un homme entièrement tatoué. J'ai beau avoir beaucoup de tatouages je dois avouer que ce gars bat des records. Impressionnant. Un membre de la production fait enfin son apparition pour faire son annonce. L'activité sera une tombola. J'hallucine, tout ça pour une tombola. Je réprime un rire nerveux. Je me laisse finalement prendre au jeu et prend la suite d'une grande brune filiforme. Le hasard fera les choses puisque je suis totalement incapable de me décider à choisir un numéro. Je ferme les yeux et glisse la main dans l'urne pour piocher ce maigre petit bout de papier. « 13 » annonçais-je clairement à toute l'assemblée. Il fallait bien que ça tombe sur quelqu'un ce fichu numéro treize. Superstitieuse je commence à craindre le pire. Et merde, pourquoi moi ?

Quelle idée j'avais eu de m'embarquer là dedans. C'est pas tant l'étroitesse de la pièce ou encore la foule de candidats qui me gêne, c'est plutôt d'avoir mis des talons hauts alors que ça fait des années que je les ai troqué pour des chaussures de marches plus confortable. Ils auraient bien rit dans la brousse si j'avais ramené mes stilletos Saint-Laurent. J'ai totalement perdue l'habitude de chausser des chaussures de la sorte et je dois dire qu'à faire de déambuler de bâtiments en bâtiments, je commence à avoir les orteils gros comme des patates douces. Il ne reste pas beaucoup de place dans la salle de détente. Alors je n’hésite pas à bousculer une nana pour avoir ma place assise, j'ai trop mal au pieds voyez vous. Je pousse un soupire de soulagement alors que j’ôte mes chaussures pour me prodiguer un massage homemade. Mon regard se pose alors sur le gars de la production qui semble ne pas bouger d'un poil physiquement depuis sa première participation à cette télé-réalité. J'aimerais bien savoir quel genre de truc il mets sur son visage pour avoir l'air aussi frais. Une tombola ? Un sourire se dessine sur mon visage c'est bien une activité qui peut être sympa. Se laisser guider par le hasard c'est assez excitant, même s'il s'agit de simplement gagné un coupe ongle. Mais qui sait, peut être que je pourrais gagner le massage de mes rêves, qui vont enlever la lourdeur de mes pieds en trente secondes ? Je laisse mes stilletos sur ma chaise, signifiant qu'il est hors de question qu'on me pique ma place. Mais par contre si vous voulez me piquer mes chaussures, ça me fera une bonne raison de continuer pied nue, alors vous gênez pas. Je choisis d'une main faussement innocente, m'attardant sur bon nombre de paquets. Et puis finalement je tire « Le numéro 55. » Je ne sais pas si se sera d'une augure particulière, mais la chose m'intéresse assez. Que vais-je gagner ?

Il tire sur ses manches longues jusqu’à en effilocher son pull, il fait les cent-pas sans jamais s’arrêter, et les cigarettes rencontrent ses lèvres les unes après les autres. Alistair est stressé. Il regrette déjà de s’être présenté au casting. L’étape considérée comme la plus dure pour beaucoup – le passage devant le jury – est derrière lui, mais ce n’est pas celle-ci qu’il craint le plus. Ce qu’il craint le plus, c’est de tomber sur d’autres potentiels candidats, et surtout, de devoir engager la conversation avec eux. Il aimerait rentrer chez lui, disparaitre de la circulation jusqu’à ce que la production le rappelle, ou non. Mais il n’a aucune envie d’être là, à faire semblant de sympathiser avec des gens qui, si ça se trouve, il ne reverra même pas. Il s’est mal vendu durant son casting, alors il doute de ses chances d’intégrer l’aventure. Mais peut-être que ce n’est pas plus mal, puisqu’il n’est pas certain que ce soit l’idée du siècle de participer à Fake Lover. Il a eu vent qu’une activité se préparait, Peter a pensé que ce serait une bonne idée qu’il s’y rende. Alistair lui a promis qu’il ferait des efforts, il sait qu’il doit tenir sa promesse, quel que soit le prix. Mais pour l’instant, il se contente de faire les cent pas à l’extérieur, à trembler nerveusement et à essayer de se calmer. Ils ne vont pas le manger, ces candidats. Ce sont des êtres humains comme lui, il n’y a aucune raison que cela se passe mal. Et il a prévu son coup, il entre, il donne un numéro, il apprend le contenu de son cadeau, et il fait demi-tour. Ni plus, ni moins. Au bout de la douzième cigarette en l’espace d’une petite heure, il prend une grande inspiration, ferme les yeux un court instant, fait craquer ses doigts, et se dirige enfin à l’intérieur. Il évite le plus possible de croiser les regards des autres, membres de la production comme candidats potentiels, et file en direction de la salle de détente. Quand il ouvre la porte, il se relaxe légèrement. Il n’y a que cinq personnes. Et puis, il réalise que par conséquent, sa présence sera certainement remarquée, et son cœur s’accélère soudainement. Il pose son regard sur la liste de numéro déjà pris, et se lance. « 01. » Il dit simplement du bout des lèvres. Le numéro un, sa date de naissance mais surtout son chiffre porte-bonheur. En espérant que la chance soit de côté, puisqu’elle semble l’éviter du mieux qu’elle peut. Prostré dans un coin, il attend sagement que Cupidon lui annonce son cadeau pour pouvoir faire demi-tour.

C'est bon, c'est fini, j'ai passé l'entretient, je peux maintenant retourner à l'hôtel, retrouver ma chambre, surtout le grand lit pour pouvoir m'y étaler de tout mon long, et puis je vais prendre un bon bain pour me détendre et je sortirai peut-être pour découvrir la ville de nuit. Oui, ça m'a l'air d'être un assez bon programme pour la soirée. Je balance mes cheveux d'un geste de la main alors qu'ils tombaient seulement en cascade sur mon épaule gauche, je préfère qu'ils soient dans le dos, j'ai l'impression d'avoir autant de poids des deux côtés de ma tête. Je ne presse pas pour arriver à la porte d'entrée, qui sera ma porte de sortie cette fois, et j'ai le temps de remarquer un peu d'agitation dans les parages. Piquée par la curiosité, je décide d'aller voir. Il me semblait bien qu'on m'avait parlé d'animations, mais je n'étais pas très sûre alors j'avais préféré balayer cette information de ma petite tête. Mais il s'avère que nous avons bel et bien droit à un petit quelque chose concocté par la production. Une tombola. C'est sympa. J'entre dans la salle de détente, certains sont déjà installés quand d'autres arrivent, comme moi. Je suis sur le point de m'asseoir à une place libre, mais une brune me pousse pour la prendre avant moi. « Heu, ça va ? » Que je lui demande légèrement contrariée. Ce n'est pas très cool de sa part, elle aurait pu me demander de lui laisser la chaise surtout que j'aurais compris si c'était parce qu'elle avait mal aux pieds à cause de ses chaussures que je la vois retirer. Mais bref, j'oublie rapidement ce qu'il vient de se passer quand j'aperçois Alix, le très beau présentateur de l'émission. Je préfère rester debout pour mieux le voir. Il nous explique en quoi consiste l'activité et c'est donc à nous de choisir notre paquet. J'hésite à me précipiter dessus, sur les paquets pas sur Alix, mais ça me ferait passer pour une folle. J'attends donc que les quelques personnes déjà présentes aient choisi le leur et j'en prends un au hasard. « 40. » Que je dis, inspectant le paquet sous tous les angles. J'espère qu'il contient quelque chose de plus intéressant que ce que certains ont déjà eu le plaisir de se voir offrir. J'espère surtout que c'est quelque chose de positif, comme ce qu'a eu la blonde qui est tombée sur le numéro sept, et donc un baiser de la personne qu'elle veut. Moi, je sais déjà qui je choisirais si je remportais un tel prix.

A peine l'interrogatoire terminé, il était parti dehors s'en griller une. Le temps passe, les clopes défilent, mais le temps foireux de ce pays l'oblige à quitter le balcon pour retourner dans les locaux. Ce n'est pas son premier voyage, sans doute le second, mais c'est difficile pour cette tête brûlée de s'habituer à un nouveau climat. De nouveau dans les couloirs de la bâtisse à flâner, marcher sans trop savoir où il va, il entre dans une salle au moment même où une annonce est faite. Il écoute d'une oreille et scrute d'un oeil furtif les tronches des candidats présents dans la pièce. Le mot tombola lui parvient. Un jeu enfantin, mais utile pour les gens qui se font royalement chier comme notre Shûji. Un sourire d'hypocrite sur les lèvres, il s'avance et d'une voix faussement enjouée il lance. « Le numéro 27 ma jolie. » Pourquoi ce chiffre ? Qu'est-ce qu'on en a à foutre. Et maintenant il se passe quoi ? Il ne connaît pas l'enjeu, mais ça ne doit pas être bien extraordinaire. Il s'écarte un peu de la foule à cause de l'odeur qui s'en dégage. Transpiration et effluves douteuses, ce n'est pas étonnant en rassemblant autant de monde. Princesse Shûji se met donc volontairement à l'écart en attendant le résultat.